Puis vinrent les malheurs publics et privés, l’anarchie, la violence et les crimes : ces épreuves attendrirent et tempérèrent son exaltation sans décourager son amour de la liberté.
La parole l’a mis au monde ; la parole a donné l’éveil et le premier cours à sa pensée ; quoi qu’il veuille, quoi qu’il fasse, pour son bonheur ou son malheur, la parole achèvera son œuvre ; elle en fera une victime de l’orgueil ou de la charité, un esclave des sens ou du devoir ; et si la liberté lui demeure toujours contre le mal, ce sera pourtant à la condition d’appeler à son aide une meilleure parole que la parole qui l’aura trompé. […] Les besoins et les malheurs du prochain ne trouvent que de l’indifférence, de la dureté même, dans les cœurs, lorsqu’on peut le négliger sans rien perdre, ou qu’on ne gagne rien à le secourir.
III : « Disons avec Aristote accommodé à nostre usage : La tragédie est la représentation sérieuse et magnifique de quelque action funeste, complète, de grande importance et de raisonnable grandeur non pas par le simple discours, mais par l’imitation réelle des malheurs et des souffrances, qui produit par elle-même la terreur et la pitié, et qui sert à modérer ces deux mouvements de l’âme. » Racine est plus exact dans cette traduction, écrite à la marge d’un exemplaire de la Poétique : « La tragédie est donc l’imitation d’une action grave et complète, et qui a sa juste grandeur.
malheur à qui est seul.
Il donne pour exemple du concours des choses fortuites le malheur de Palamède, que plusieurs circonstances, rassemblées par Ulysse, firent juger coupable de trahison. […] Cette comète n’a aucune liaison physique avec ces malheurs ; cependant le peuple regarde la comète comme la cause de l’événement : post hoc, ergo propter hoc. […] Énée remarque, en racontant ses malheurs, que, si l’on avait été attentif à un certain événement, Troie n’aurait pas été prise : Trojaque, nunc stares, Priamique arx alta, maneres. […] Et pour vous souhaiter tous les malheurs ensemble, Puisse naître de vous un fils qui me ressemble ! […] Oreste apprend qu’Hermione n’a pu survivre à Pyrrhus, qu’il vient lui-même d’immoler ; il s’écrie : Grâce aux dieux, mon malheur passe mon espérance !
Qui changera mes yeux en deux sources de larmes, Pour pleurer ton malheur ?