Voltaire 1694-1778 [Notice] Habile, adroit, remuant, infatigable, s’occupant de tout à la fois, mêlant les plaisirs aux affaires, homme de cour et homme de lettres, favori de Madame de Pompadour et roi des philosophes, fla teur des souverains qu’il encensa pour assurer l’impunité à ses hardiesses, ennemi des abus plus que des vices, prêt à tout oser contre les préjugés, mais ne sachant respecter ni la religion ni les mœurs, Voltaire n’eut jamais le temps de se recueillir, et risqua de propager les réformes par la licence, ou de corrompre les esprits en voulant les affranchir. […] Ce bœuf2 qui pesamment rumine ses problèmes, Ce papillon folâtre, ennemi des systèmes, Sont regardés tous deux avec un ris moqueur Par un bavard en robe3, apprenti chicaneur, Qui, de papiers timbrés barbouilleur mercenaire, Vous vend pour un écu sa plume et sa colère. […] La sérénité Qu’il est grand, qu’il est doux de se dire à soi-même : Je n’ai point d’ennemis, j’ai des rivaux que j’aime, Je prends part à leur gloire, à leurs maux, à leurs biens ; Les arts nous ont unis ; leurs beaux jours sont les miens. […] Le canon se faisait entendre ; l’ennemi se montrait ; soudain la fatigue était oubliée. […] quelle déconfiture on eût fait des Russes et des Prussiens, si le régiment qui était à notre droite se fût battu comme le nôtre ; si la cavalerie se fût trouvée là au moment où l’ennemi a commencé à fléchir ; si le général de la réserve eût égalé en talent et en courage celui qui commandait l’avant-garde !
Conformément à sa promesse, il dissipera, il terrassera vos ennemis. […] Il livrera en votre pouvoir les ennemis qui vous bravent ; ils tomberont anéantis à votre aspect : un seul chemin les avait guidés vers vous, et ils n’en trouveront point assez pour fuir votre vengeance. […] Pour vous, le ciel deviendra d’airain, la terre sera de fer ; et la main vengeresse du père que vous aurez offensé, vous saisira pour vous livrer, chargés de fer, à vos plus cruels ennemis.
Souvent, l’orateur, pareil à un stratégiste prudent, qui assure sa marche en pays ennemi, ne hasarde une proposition qu’en l’appuyant de ses preuves. […] Mirabeau, accusé de trahison par ses ennemis, se défend en ces termes : « — Celui qui a la conscience d’avoir bien mérité de son pays, et surtout de lui être encore utile ; celui que ne rassasie pas une vaine popularité, et qui dédaigne les succès d’un jour pour la véritable gloire ; celui qui veut dire la vérité, qui veut faire le bien public, indépendamment des mobiles mouvements de l’opinion populaire ; cet homme porte avec lui la récompense de ses services, le charme de ses peines et le prix de ses dangers ; il ne doit attendre sa moisson, sa destinée, la seule qui l’intéresse, la destinée de son nom, que du temps, ce juge incorruptible, qui fait justice à tous. » — (Du droit de paix et de guerre. 2e Discours.) […] Ceux d’un ami ou ceux d’un ennemi ?
Je fuis : ainsi le veut la fortune ennemie. […] Non, princes, ce n’est point au bout de l’univers Que Rome fait sentir tout le poids de ses fers : Et de près inspirant les haines les plus fortes, Tes plus grands ennemis, Rome, sont à tes portes. […] Ne croyez point pourtant qu’éloigné de l’Asie J’en laisse les Romains tranquilles possesseurs : Je sais où je lui dois trouver des défenseurs ; Je veux que d’ennemis partout enveloppée, Rome rappelle en vain le secours de Pompée. […] Il sait que l’ennemi, que ce coup va surprendre, Désormais sur ses pieds ne l’oserait attendre, Et déjà voit pour lui tout le peuple en courroux Crier aux combattants : Profanes, à genoux ! […] J’y ai jeté, autant que j’ai pu, la magnificence des mots ; et, à l’exemple des anciens poètes dithyrambiques, j’y ai employé les figures les plus audacieuses, jusqu’à y faire un astre de la plume blanche que le roi porte ordinairement à son chapeau, et qui est, en effet, comme une espèce de comète fatale à nos ennemis, qui se jugent perdus dès qu’ils l’aperçoivent.
Toute action, suivant Aristote, se passe ou entre des amis, ou entre des ennemis, ou entre des gens indifférens l’un pour l’autre. Qu’un ennemi tue ou veuille tuer son ennemi, cela ne produit aucune commisération, sinon en ce qu’on est attendri d’apprendre ou de voir la mort d’un homme quel qu’il soit. […] Mais il ne voit par-tout, dit-il, que des yeux ennemis. […] Quel est cet ennemi que tu leur vas livrer ? […] Le voici : Je fuis : ainsi le veut la fortune ennemie.
Malgré les mauvais succès de ses armes infortunées, si on a pu le vaincre, on n’a pas pu le forcer ; et comme il n’a jamais refusé ce qui était raisonnable, étant vainqueur, il a toujours rejeté ce qui était faible et injuste, étant captif. » On peut rapporter à la concession la Permission, figure qu’on emploie, tantôt pour abandonner à eux-mêmes ceux qu’on ne peut détourner de leur dessein, tantôt pour inviter son ennemi à faire tout le mal qui lui est possible, et cela, afin de le toucher, ou de lui inspirer de l’horreur de ce qu’il a déjà fait. […] L’ennemi renversé fuit et gagne la plaine : Le Dieu lui-même cède au torrent qui l’entraîne, Et seul, désespéré, pleurant ses vains efforts, Abandonne à Louis la victoire et ses bords. […] On l’accuse d’avoir sacrifié à cette ambition le repos de l’État, en perpétuant la guerre pour perpétuer son autorité ; la vie de ses ennemis, dont aucun n’échappa, dit-on, à sa vengeance, et les devoirs les plus justes de la reconnaissance, en persécutant une reinea exilée, autrefois sa bienfaitrice. […] Mon cœur de soins divers sans-cesse combattu, Ennemi du forfait, sans aimer la vertu, D’un amour malheureux déplorable victime, S’abandonne au remords, sans renoncer au crime. […] C’est ici le dieu du Rhin, qui suivant la fiction d’un poète, a pris la figure d’un vieux guerrier, pour marcher à la tête des ennemis.