Aussi, sans me lasser, tous les jours, je revois Le haut des toits de chaume, et le bouquet de bois, Au vieux puits la servante allant emplir ses cruches3, Et le courtil en fleur où bourdonnent les ruches4, Et l’aire, et le lavoir, et la grange ; en un coin, Les pommes par monceaux, et les meules de foin ; Les grands bœufs étendus aux portes de la crèche, Et devant la maison un lit de paille fraîche. […] Le fusil d’un chasseur, un coup parti du bois, Viennent de réveiller mes remords d’autrefois : L’aube sur l’herbe tendre avait semé ses perles1, Et je courais les prés à la piste des merles, Écolier en vacance ; et l’air frais du matin2, L’espoir de rapporter un glorieux butin, Ce bonheur d’être loin des livres et des thèmes3, Enivraient mes quinze ans tout enivrés d’eux-mêmes. […] La mort de louise Quand Louise mourut à sa quinzième année, Fleur des bois par la pluie et le vent moissonnée, Un cortége nombreux ne suivit pas son deuil ; Un seul prêtre en priant conduisit le cercueil ; Puis venait un enfant qui, d’espace en espace, Aux saintes oraisons répondait à voix basse ; Car Louise était pauvre, et jusqu’en son trépas Le riche a des honneurs que le pauvre n’a pas. […] Alors, on ne voit plus que l’onde, et que les cieux, Les nuages dorés passant silencieux, Et les oiseaux de mer, tous allongeant la tête5, Et jetant un cri sourd signe de la tempête… Le chevreuil Dans un bois du canton, pris dès son plus jeune âge, Il était familier, bien qu’au fond tout sauvage : Aux heures des repas, gentiment, dans la main Il s’en venait manger et des fruits et du pain. […] Sa trace était partout dans les sentiers des bois ; Mais nul brame amoureux ne répétait sa voix ; Plutôt, des fronts armés de pointes acérées Devant lui s’avançaient sous les branches fourrées : Chevreuils libres et fiers, de leur gîte accourus Contre ce vil flatteur de l’homme, cet intrus.
Qui peindra des grands bois le studieux silence, La liberté des champs et leur indépendance, Et les prés pleins de fleurs, et le petit chemin Qu’on suit, entre les blés, son Horace à la main ? […] J’ai reconnu cet air si vif des bois, Qu’avec tant de plaisir j’aspirais autrefois ; Le long frémissement qui court sous les ombrages, Semblable au bruit sans fin qui montait des rivages, Et cette odeur de mousse et de feuilles dans l’air, Et les pommiers penchés par le vent de la mer. Ne me conduisez pas : j’en sais toutes les routes ; Parmi ces bois grandis, je les retrouve toutes ; J’irais, fermant les yeux, et, si rien n’est changé, Au bout du chemin creux de hêtres ombragé, Le château va paraître. […] Lorsque de la vallée, ou du bourg ou des bois, Le soir, dans le château, je rentrais autrefois, De quel empressement l’agreste châtelaine Accourait à l’appel de la cloche lointaine !
Mon filz, mon filz, voyez vous ceste chorde, Ce bois, ce feu, et ce cousteau icy ? […] Les bois montrent déjà leurs limoneus rameaus ; Ja la montagne croit par le décroit des eaus, Et bref la seule main du Dieu darde-tonnerre Montre la terre au ciel et le ciel à la terre378. […] Les bois, les vergers, le Clain du Poitou, l’Orne de la Normandie, voilà toute sa vie, sa joie et son rêve. […] « Je l’ay fait ennemy du tumulte des villes, J’ay repurgé son cœur d’affections serviles, Compagnon de ces dieux qui sont parmy les bois. […] II) ; insouciance ou fierté, il en prend son parti, et dès lors (1605-1613) vit à Paris, à Chartres, à Royaumont, dont l’abbé était son ami, faisant des vers dans les bois, faisant pis à la ville, héritant un jour d’une pension de son oncle sur l’abbaye des Vaux-de-Cernay recevant un autre jour un canonicat de la cathédrale de Chartres ; et il meurt, a quarante ans en laissant seize satires, trois épîtres, cinq élégies et quelques odes, stances et épigrammes, bagage léger, mais de prix, à part les réserves morales de Boileau.
Ce bruissement des prairies, ces gazouillements des bois, ont des charmes que je préfère aux plus brillants accords ; mon âme s’y abandonne, elle se berce avec les feuillages ondoyants des arbres, elle s’élève avec leur cime vers les cieux, elle se transporte dans les champs qui les ont vus naître et dans ceux qui les verront mourir ; ils étendent dans l’infini mon existence circonscrite et fugitive. […] Bientôt des tonnerres affreux firent retentir de leurs éclats les bois, les plaines et les vallons ; des pluies épouvantables, semblables à des cataractes, tombèrent du ciel. […] Elle nous donna pour guide l’aîné de ses garçons, qui, après une demi-heure de marche, nous conduisit à travers des marais dans les bois d’Ermenonville. […] Le bruit des eaux, des bois, de la foudre et des vents, qui tombent et se brisent contre les rochers ébranlés et fracassés ; les cris et les hurlements des hommes et des animaux, pêle-mêle emportés dans un tourbillon de sable, de pierres et de débris, tout semble annoncer les dernières convulsions et l’agonie de la nature. » On devra étudier aussi le récit d’une tempête que subit Bernardin aux environs de Madagascar, et qu’il raconte à un ami dans une lettre, sans préoccupation littéraire. […] Les touffes lointaines des bois limitent merveilleusement, par leur panache majestueux et leurs ondulations capricieuses, la portée de la vue.
Le jour, tombant d’en haut à travers un voile de feuillage, répand dans la profondeur des bois une demi-lumière changeante et mobile, qui donne aux objets une grandeur fantastique. […] Les bois, les vallons, les rivières, les rochers, entendent tour à tour les hymnes des laboureurs. […] Le rossignol Lorsque les premiers silences de la nuit1 et les derniers murmures du jour luttent sur les coteaux, au bord des fleuves, dans les bois et dans les vallées, lorsque les forêts se taisent par degrés, que pas une feuille, pas une mousse ne soupire, que la lune est dans le ciel, que l’oreille de l’homme est attentive, le premier chantre de la création entonne ses hymnes à l’Éternel. […] La rivière qui coulait à mes pieds, tour à tour se perdait dans le bois, tour à tour paraissait brillante des constellations de la nuit, qu’elle répétait dans son sein. […] M. de Lamartine dit : « Le poëte est semblable aux oiseaux de passage qui ne bâtissent point leurs nids sur le rivage, qui ne se posent pas sur les rameaux des bois ; nonchalamment bercés sur le courant de l’onde, ils passent en chantant loin des bords ; et le monde ne connaît rien d’eux que leurs voix. » 2.
De ces hôtes des bois, les fauvettes sont les plus nombreuses comme les plus aimables ; vives, agiles, légères et sans cesse remuées2, tous leurs mouvements ont l’air du sentiment, tous leurs accents le ton de la joie. Ces jolis oiseaux arrivent au moment où les arbres développent leurs feuilles et commencent à laisser épanouir leurs fleurs ; ils se dispersent dans toute l’étendue de nos campagnes : les uns viennent habiter nos jardins ; d’autres préfèrent les avenues et les bosquets ; plusieurs espèces s’enfoncent dans les grands bois, et quelques-unes se cachent au milieu des roseaux. […] La fauvette à tête noire est de toutes les fauvettes celle qui a le chant le plus agréable et le plus continu : il tient un peu de celui du rossignol, et l’on en jouit plus longtemps ; car, plusieurs semaines après que ce chantre du printemps s’est tu, l’on entend les bois résonner partout du chant de ces fauvettes ; leur voix est facile, pure et légère, et leur chant s’exprime par une suite de modulations peu étendues, mais agréables, flexibles et nuancées : ce chant semble tenir de la fraîcheur des lieux où il se fait entendre ; il en peint la tranquillité, il en exprime même le bonheur : car les cœurs sensibles n’entendent pas sans une douce émotion les accents inspirés par la nature aux êtres qu’elle rend heureux. […] Ils n’ont d’autre voix qu’un petit cri fréquent et répété ; ils le font entendre dans les bois dès l’aurore, jusqu’à ce qu’aux premiers rayons du soleil tous prennent l’essor et se dispersent dans les campagnes.