Le tutoiement, d’ailleurs assez ordinaire alors entre les personnes de même rang ou de même naissance, et particulièrement usité sur notre théâtre à cette époque (voy. […] Mais qu’on veuille bien se le rappeler : une délicatesse souvent raffinée et une grandeur inculte, tel était le double caractère de l’époque où vécut Corneille.
Un poëme épique, une tragédie, un drame, un roman qui appartiennent à une époque ou à un pays que l’auteur connaît mal ou ne peut connaître, dont le but n’est pas franc et bien déterminé, où les oppositions ne sont point senties et manquent de relief, amènent infailliblement un style vague, incolore, maigre, sans originalité ou sans variété.
Le temps n’a fait que sanctionner le jugement de son époque.
On vit naître à cette époque une multitude de légendes et de récits merveilleux qui, ensuite, ornés et fécondés par les conteurs de toute sorte, furent l’origine de nos romans de chevalerie.
Nul ne représente mieux toutes les passions et tous les talents du xvie siècle, cette époque si féconde en grands caractères et en libres esprits.
Pareillement, à l’époque de la rentrée des tribunaux, les procureurs généraux font souvent des discours où ils recommandent aux avocats la rigoureuse observation de leurs devoirs : ces discours ne sont pas du genre judiciaire, mais bien du genre délibératif ou démonstratif ; nous les plaçons, néanmoins, dans l’éloquence du barreau, et avec raison, puisqu’ils en ont tous les caractères. […] Il faut se contenter de rappeler les principales circonstances de sa vie à quelques époques marquées, et de ramener les faits et la morale à quelque vertu dominante qui paraît avoir animé toutes les autres. […] À cette époque, Lemaître et Patru furent les premiers qui y introduisirent le bon goût et la pureté du langage28 ; depuis ce temps, et malgré quelques travers qu’on a pu reprocher aux avocats, comme dans les Plaideurs de Racine, on peut dire que notre barreau s’est distingué par les qualités à la fois les plus brillantes et les plus solides ; en particulier, par cette habitude de ne faire appel qu’à la raison et à la justice, et non pas aux passions, comme on le faisait sans cesse chez les anciens.