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2. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre III. Idée de l’Éloquence des Saints-Pères. »

Content d’exposer le vrai, saint Justin dédaigna les ressources et le fard de l’éloquence : mais son style rachète, par la force et la précision, le défaut total d’ornements. […] Le caractère dominant de son éloquence est la force, la profondeur des idées, la vivacité du raisonnement, et la noblesse soutenue du style. […] Il avait profondément médité l’évangile, connaissait bien le cœur humain, et savait concilier la force et la douceur. […] quelle force et souvent quelle rapidité dans le style ! […] Il tenait de la force du premier, et avait la facilité, l’heureuse abondance, le nombre et la majesté du second.

3. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre III. Du Sublime dans les Compositions littéraires. »

À mesure que la société a fait des progrès en civilisation, le génie et les mœurs ont perdu en force et en sublimité ce qu’ils ont gagné en politesse et en correction. […] Indépendamment de la simplicité et de la concision, la force est une des qualités indispensables du sublime. La force d’une description consiste en grande partie dans sa concision ; mais elle comporte encore quelque chose de plus, et c’est principalement un choix judicieux de circonstances capables de mettre l’objet décrit dans son jour le plus favorable. […] Tout ce qui sort de la nature, tout ce que l’expression rend avec plus de fracas que de force véritable, voilà l’enflure. […] La force de l’expression grecque se retrouve dans plusieurs endroits.

4. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre III. De la partie oratoire dans les Historiens anciens. Historiens grecs. »

Voici maintenant l’équité naturelle réclamant avec force ses droits, contre les droits imaginaires de la force et de l’usurpation : 71« Quid nobis tecum est ? […] Ces victoires, accompagnées d’un faste noble, sont légitimes, et acquièrent à notre ville une réputation de force et de puissance. […] Croyez que la jeunesse et la vieillesse ne peuvent rien l’une sans l’autre, et que c’est dans la réunion de tous les âges et de tous les ordres que consiste la force principale de l’état. […] Ce sont les forces réelles d’une armée, et non les discours du chef qui la commande, qui sont vraiment capables d’inspirer de la confiance. […] Non, non il faut leur opposer une force égale à la leur ; c’est dans le pays qui les a vus naître qu’il faut leur chercher des rivaux.

5. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre second. Définition et devoir de la Rhétorique. — Histoire abrégée de l’Éloquence chez les anciens et chez les modernes. — Chapitre premier. Idée générale de l’Éloquence. »

Les qualités fondamentales de toute espèce d’éloquence, sont la solidité du raisonnement, la force des preuves, la clarté de la méthode, et une apparence au moins de sincérité dans l’orateur. […] C’est au philosophe à nous convaincre de la vérité par le nombre et la force des preuves ; mais c’est à l’orateur à entraîner notre volonté, à fixer toutes nos irrésolutions, à nous forcer enfin de vouloir ce qu’il veut, en rangeant nos cœurs de son parti. […] Mais c’est peu, pour l’orateur, de convaincre les esprits par la force et la justesse du raisonnement. […] C’est là son triomphe, et c’en est assez pour faire sentir aux jeunes gens que le caractère distinctif de l’éloquence est une action pleine de chaleur, plus ou moins véhémente, selon la nature et la force des obstacles que son sujet lui donne à renverser. […] Tantôt, l’orateur ne cherche pas uniquement à plaire, il s’efforce d’instruire et de convaincre ; il emploie tout son art, il rassemble toutes ses forces pour détruire les préventions qui peuvent s’élever contre lui ou contre sa cause, pour réunir ses preuves et les disposer de la manière la plus favorable à sa défense.

6. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre III. Des ornements du style » pp. 119-206

D’autres figures sont employées par les passions ou par l’imagination, pour ajouter de la force au discours. […] Cette figure est un tour très propre à soutenir l’attention en donnant au sentiment de la force et de la chaleur. […] Les voyelles donnent aux mots de la douceur ; les consonnes leur donnent de la force. […] Pour réussir ici, l’écrivain doit parfaitement connaître le génie de la langue et la force des mots, et être doué d’un goût exquis. […] Il est facile de sentir la force de cette chute rupistis.

7. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre II. Des différentes espèces de Discours Oratoires. »

Partout il réduit ses auditeurs au silence, ne leur laisse ni excuse, ni prétexte, et les force à goûter la raison dont il est le plus fidèle organe. […] Tout doit y être plein de force et de dignité : il ne souffre rien de commun, rien de médiocre. […] Dans la confirmation, l’Orateur du barreau doit déployer toute la force de la raison, revêtue des grâces du style. […] -C., et rival de Démosthène, lui est bien inférieur pour la force et la véhémence. […] Il ne faut donc pas que son style ait cette force et cette véhémence qui remue l’âme, et l’arrache à elle-même.

8. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Bossuet 1627-1704 » pp. 65-83

C’est que sa vie et ses discours se confondent : l’une ajoute aux autres la force des exemples. […] Leurs côtés revêtus, leurs entrailles3 rafraîchies, leurs forces rassasiées vous auraient béni. […] C’est un effet de son ardeur, et son ardeur vient de sa force, mais d’une force mal réglée. […] Son ardeur s’est changée en force, ou plutôt, puisque cette force était en quelque façon dans cette ardeur, elle s’est réglée. […] Un poids invincible, une force irrésistible nous entraînent ; il faut sans cesse avancer vers le précipice.

9. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre V. De la disposition. »

Conduites d’armées, sièges de places, prise de villes, passages de rivières, attaques-hardies, retraites honorables, campements bien ordonnés, combats soutenus, batailles gagnées, ennemis vaincus par la force, dissipés par l’adresse, lassés et consumés par une sage et noble patience ? […] Si je ne puis raconter tant d’actions, je les découvrirai dans leurs principes ; j’adorerai le Dieu des armées, j’invoquerai le Dieu de paix, je bénirai le Dieu des miséricordes, et j’attirerai partout votre attention, non pas par la force de l’éloquence, mais par la vérité et la grandeur des vertus dont je suis engagé de vous parler. » 3° Narration. […] « Quel sera le crime de l’homme du roi, qui, trompé dès le début de son expédition, frustré de la moitié des forces qu’on s’était engagé à lui fournir, enchaîné bientôt par une puissance absolue, dépourvu de tous moyens, sans vivres, sans argent, sans vaisseaux, sans soldats, traversé par mille obstacles, oublié de sa cour, tandis que les ennemis recevaient des renforts multipliés de la leur ; malgré l’excessive infériorité de ses forces, malgré l’esprit de sédition et de vertige répandu dans une armée qui n’a ni solde, ni nourriture ; malgré la désertion journalière et la défection totale de cette armée sans cesse quittant ses drapeaux pour aller joindre l’ennemi, trouve moyen de faire la guerre pendant trois ans sans interruption ; prend dix places, en manque une, et la manque parce que son escadre l’abandonne et laisse la mer libre à l’escadre ennemie ; gagne dix batailles, en perd une, et la perd, parce qu’une partie de ses troupes disparaît au commencement de l’action, et le laisse sur le champ de bataille, au moment où il fond sur l’ennemi ; dispute le terrain pied à pied ; lorsqu’il ne peut plus se défendre, tient pendant cinq mois en échec des forces vingt fois supérieures aux siennes ; et après avoir épuisé toutes les ressources que son zèle et son imagination pouvaient lui suggérer, après avoir payé et nourri de son argent le peu de troupes qui lui restait, est enfin obligé de rendre une ville2 bloquée par terre et par mer, une ville prise par la famine, où il ne restait pas un grain de riz, où l’on avait mangé les arbres et le cuir, sans autre défense, en un mot, que quelques canonniers, et une poignée de soldats, qui n’avaient plus la force de remuer un canon, même pas celle de se trainer jusqu’aux remparts. […] Souvent on résume les principales preuves en les groupant avec de nouvelles couleurs et une nouvelle force, pour frapper vivement les esprits et achever de les convaincre-, ou bien, si le sujet prête à l’émotion, l’orateur met en œuvre toutes les ressources du pathétique pour frapper un grand coup ; il emploie les tours animés, les figures hardies, les expressions énergiques, pour toucher, ébranler, subjuguer les auditeurs. […] Il faut convenir que la philanthropie est bien barbare, et qu’à force d’humanité, nous sommés devenus bien inhumains !

10. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Cousin, 1792-1867 » pp. 492-503

On la croirait parvenue à la perfection, si on ne sentait que la force et la grandeur l’abandonnent. […] Si sa phrase n’a pas l’ampleur, la plénitude, l’éclat et la force de la phrase du xviie  siècle, elle ne manque pas encore, ou plutôt elle ne manque jamais d’une suffisante solidité. […] La force avait fini par manquer à la prose française ; Rousseau la lui a rendue : c’est là son titre immortel. […] Il est sage de s’y présenter avec toutes ses forces réunies, la raison et le cœur se prêtant un mutuel appui, et l’imagination soumise ou charmée. […] Mais je n’ai plus la force de faire passer dans mes paroles l’énergie de mes sentiments.

11. (1839) Manuel pratique de rhétorique

Tout à coup ils passent de la fureur au repentir ; les lois reprennent leur force, les plus criminels sont punis. […] La vieillesse diminue, affaiblit nos forces physiques. […] Dans le discours, comme en tout, c’est une heureuse disposition qui fait la beauté et la force. […] Il faut donc qu’il sache tempérer la force de ce genre par la simplicité et la douceur des deux autres. […] Également, il ne doit rien y avoir de force et d’outré dans la pensée et dans le sentiment.

12. (1825) Rhétorique française, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes pp. -433

Elle m’a été enseignée par deux maîtres dont l’autorité a depuis long-temps force de loi dans nos écoles ; Rollin et Fénélon. […] Vous faites la description de cette habitude, vous en peignez l’empire avec force. […] Tout doit y être plein de force et de dignité ; il ne souffre rien de commun, rien de médiocre. […] Les indices matériels ont ordinairement plus de force que les indices moraux. […] V, c. 14) ; alors l’argumentation toute pure peut ajouter de la force au discours.

13. (1879) L’art d’écrire enseigné par les grands maîtres

L’un est force et droiture d’esprit, l’autre est amplitude d’esprit. […] Voilà la force de l’imitation et de la peinture. […] Si on disait cela avec tranquillité, il perdrait sa force. […] Jamais il ne ferait des discours pleins de force et de justesse. […] Les pas d’une force !

14. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Montesquieu, 1689-1755 » pp. 235-252

La force des lois dans l’un, le bras du prince toujours levé dans l’autre, règlent ou contiennent tout. […] La république est une dépouille ; et sa force n’est plus que le pouvoir de quelques citoyens et la licence de tous. Athènes eut dans son sein les mêmes forces pendant qu’elle domina avec tant de gloire et pendant qu’elle servit avec tant de honte. […] Il était toujours aussi aisé de triompher des forces d’Athènes qu’il était difficile de triompher de sa vertu. […] Montesquieu, comme Bossuet, aime à donner aux mots toute la force de la simplicité.

15. (1827) Résumé de rhétorique et d’art oratoire

Il faut de plus que la description de l’objet joigne la force à la concision et à la simplicité. […] La courte phrase ou incise est dans sa force lorsqu’elle est composée de deux ou trois mots. […] En fuyant la prolixité on imprime aux écrits un nouveau degré de force et de beauté. […] Il est peu jaloux d’exprimer d’abord sa pensée dans toute sa force, parce qu’il a l’intention d’en renouveler l’impression ; chez lui l’abondance supplée à la force ; il aime la magnificence et les ornements de toute espèce. […] Il nous pousse à des résolutions vigoureuses, à des actions pleines de force et de chaleur.

16. (1843) Nouvelle rhétorique, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes (7e éd.)

Un déclamateur fleuri n’aurait eu aucune force dans les affaires. […] La force qu’ont les corps de se rétablir dans leur premier état dès qu’une force plus grande cesse de les fléchir ou de les comprimer. Et cette force de réaction, quelle est-elle ? […] Tacite a moins de force (Hist. […] » On voit ici les épithètes contribuer à l’élégance et à la force du style.

17. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre V. Beautés oratoires. »

Mais ce qui nous surprendra davantage dans un siècle aussi reculé, dans un climat presque barbare, et chez des peuples à peine sortis des mains de la nature, c’est de trouver des discours dans la force du terme, des harangues de longue haleine, et qui paraissent avoir été le fruit de la réflexion et du travail, tant on y remarque l’art de mettre à profît toutes les circonstances possibles, de ne dire que ce qu’il faut, et de le dire précisément comme il doit être dit pour produire l’effet que l’on en attend. […] vous traverserez aujourd’hui le Jourdain, pour vaincre des nations qui vous passent en nombre et en force, pour prendre des villes dont les remparts s’élèvent jusqu’aux cieux. […] Vos fils et vos filles seront traînés captifs chez les peuples étrangers : vos yeux le verront, et vous n’aurez ni la force ni le courage de les défendre. […] Nous ne connaissons, dans aucun orateur grec ou romain, français ou étranger, rien de comparable à ce beau discours, pour la force ou la véhémence. […] Que sera-ce donc, si l’on prend la peine de réfléchir que ce que nous venons d’offrir au lecteur, n’est que la traduction de la version latine faite sur le grec des Septante, et qu’il y a aussi loin du grec à l’hébreu, sous le rapport de la force des mots et de l’énergie des images, qu’il y a loin de notre français au grec d’Homère ou de Démosthène ?

18. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome I (3e éd.)

Il puisa dans le travail la force de supporter des pertes douloureuses. […] Les poètes ont emprunté leurs plus sublimes comparaisons du lion ou des autres animaux d’une force surprenante. […] Dans nos temps modernes, le langage est devenu plus correct et plus précis ; mais il a perdu de sa force et de sa vivacité. […] De là plus de concision, plus de vivacité, plus de force. […] C’est aux voyelles à donner de la douceur aux mots ; les consonnes leur impriment de la force.

19. (1867) Rhétorique nouvelle « Première partie. L’éloquence politique » pp. 34-145

Il ne cherche ni ne fuit le danger : il n’a recours à l’emploi de la force que quand il a épuisé toutes les ressources de la ruse. […] Aux violences de ses adversaires il oppose l’impassibilité de la force sereine et sûre d’elle-même. […] Démade avait plus de feu, Eschine plus de souplesse, Phocion plus de force, mais Démosthène avait la conviction qui manquait à ces orateurs. […] si les dieux pouvaient vous donner la force de vouloir, comme il vous ont donné la faculté de comprendre !  […] Il ressemble au torrent qui emprunte ses forces aux digues qui le resserrent.

20. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome II (3e éd.)

Une phrase mal divisée par les repos paraît hachée, et perd toute sa force. […] Une seule observation fera voir quelle influence ils ont sur la force et la grâce d’un discours. […] Dans Perse, on retrouve plutôt la force et l’ardeur de Juvénal que la politesse d’Horace. […] Aucun style n’exige plus de force, de chaleur et de noblesse que celui du poème épique. […] Son génie a de la force, mais jamais de douceur, jamais d’aménité, jamais de grâce.

21. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Pascal, 1622-1662 » pp. 44-51

Les seuls gens de guerre en sont pas déguisés de la sorte, parce qu’en effet leur part est plus essentielle : ils s’établissent par la force, les autres par la grimace. […] Ils ne sont pas masqués d’habits extraordinaires pour paraître tels ; mais ils se sont accompagnés de gardes, de hallebardes : ces trognes5 armées qui n’ont de mains et de force que pour eux, les trompettes et les tambours qui marchent au-devant, et les légions qui les environnent, font trembler les plus fermes6. Ils n’ont pas l’habit seulement, ils ont la force. […] Quand la force combat la force, la plus puissante détruit la moindre ; quand on oppose les discours aux discours, ceux qui sont véritables et convaincants confondent et dissipent ceux qui n’ont que la vanité et le mensonge ; mais la violence et la vérité ne peuvent rien l’une sur l’autre. […] Le mot a toute la force de son étymologie.

22. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre V. Du Style en général, et de ses qualités. »

Quelle force elles empruntent l’une de l’autre dans le morceau suivant ! […] Il se met peu en peine de se faire entendre du premier coup, parce qu’il se propose de revenir sur son idée ; et ce qu’il perd en force, il tâche de le regagner par l’abondance et la variété. […] On trouve cependant des écrivains aussi recommandables par la force que par l’abondance de leur style ; et l’on peut citer, entre autres, Platon, Plutarque et Tite-Live, chez les anciens, pour preuve de la vérité de cette assertion. La force ou la faiblesse du style dépend en effet de la manière dont un auteur voit son sujet. […] il l’exprimera avec force.

23. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre Ier. Des éléments du style. » pp. 22-78

Mais attendez pour les lui donner qu’il ait assez de force pour les demander. […] C’est le vague et l’immensité de ces images qui en fait la force et la sublimité. […] Qu’entend-on par force dans la phrase ? […] Quelles sont les règles à observer relativement à la force de la phrase ? […] Toutes les phrases auraient naturellement la correction, la clarté, la précision, l’unité, la force.

24. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Buffon, 1707-1788 » pp. 282-302

La force de son caractère, l’amour de la gloire et le dévouement à une idée l’élevèrent au-dessus des querelles de son temps ; au lieu de se dépenser au jour le jour, il économisa si bien ses facultés qu’il ne se laissa pas distraire un instant du sujet grandiose auquel il avait voué son existence. […] Marqués dans toute sa personne, l’élévation, le calme, la convenance et la conscience de sa force ont aussi fixé leur empreinte sur son style. […] Par la force du génie, on se représentera toutes les idées générales et particulières sous leur véritable point de vue ; par une grande finesse de discernement, on distinguera les pensées stériles des idées fécondes ; par la sagacité que donne la grande habitude d’écrire, on sentira d’avance quel sera le produit de toutes ces opérations de l’esprit. […] On ne peut donc trop s’en occuper ; c’est même le seul moyen d’affermir, d’étendre et d’élever ses pensées : plus on leur donnera de substance et de force par la méditation, plus il sera facile ensuite de les réaliser par l’expression3. […] L’ordre est ce qu’il y a de plus rare dans les opérations de l’esprit : quand l’ordre, la justesse, la force et la véhémence se trouvent réunis, le discours est parfait.

25. (1873) Principes de rhétorique française

— La rhétorique est fille de l’éloquence qu’elle enseigne, et elle lui prête des forces nouvelles. […] Du reste, c’est une force qui doit se faire sentir plutôt que se montrer. […] — Démosthène a dû toute sa force oratoire à la passion dont’ son patriotisme animait ses discours ! […] On poursuit ma partie ; on force une maison. […] a première personne du pluriel est d’une grande force dans l’enseignement moral.

26. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Balzac. (1594-1655.) » pp. 2-6

Il a été affermi dans son pouvoir par une force étrangère et qui n’était pas de lui, par une force qui appuie la faiblesse, qui anime la lâcheté, qui arrête les chutes de ceux qui se précipitent, qui n’a que faire des bonnes maximes pour produire les bons succès. […] Cette main invisible, ce bras qui ne paraît pas, donne les coups que le monde sent ; il y a bien je ne sais quelle hardiesse qui menace de la part de l’homme ; mais la force qui accable est toute de Dieu1. […] Disons que c’est une éloquence d’affaires et de service, née pour le commandement et la souveraineté, tout efficace et toute pleine de force. […] La force de ce verbe s’est singulièrement affaiblie de nos jours ; il a ici le sens du latin vexare, exercere.

27. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre II. Application des principes à la première Philippique de Démosthène, et à la seconde Catilinaire de Cicéron. »

Avant d’avoir reçu cette sanction, il portait provisoirement le nom de προϐούλευμα, et n’avait force de loi que pendant un an. […] Tout le morceau est plein de cette force de raisonnement qui, ne s’appuyant que sur des faits, porte nécessairement la conviction. […] On ne peut vous prêter le premier motif, lorsque la sage vigilance du consul a rassemblé des forces plus que suffisantes. […] Malgré le peu de cas que vous faisiez de mes avis, la république opposait ses propres forces à votre coupable indolence. […] Ce n’est point à la force des armes seulement que nos ancêtres furent redevables de l’accroissement rapide de la république.

28. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Napoléon Ier , 1769-1821 » pp. 428-446

Qu’elle m’en croie, j’ai des forces telles que toutes ses forces ne peuvent balancer longtemps la victoire. […] Ironie discrète de la force qui se sent supérieure à l’adversaire. […] C’est le langage de la dignité et du bon sens, de la force qui se modère. […] Il disait au conseil d’État : « Dans tous les pays la force cède aux qualités civiles. […] L’histoire, comment fera-t-elle pour expliquer la mort de Napoléon, impuissante et ignorée comme sa naissance, lorsque, longtemps après, il reste à son nom assez d’empire pour prêter de la force à qui l’honore ?

29. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre VI. Analyse du discours sur l’esprit philosophique, par le P. Guénard. »

Je connais peu de morceaux qui réunissent à un pareil degré la profondeur des idées, la justesse du sens, la clarté des raisonnements, l’élégance et la force d’un style toujours au niveau de la matière qu’il traite. […] » Penser d’après soi-même : caractère plein de force et de grandeur ; qualité la plus rare peut-être et la plus précieuse de toutes les qualités de l’esprit. […] « Je le trouve dans le talent de saisir les principes généraux, et d’enchaîner les idées entre elles par la force des analogies : c’est véritablement le talent de penser en grand. […] Quelle force et quel éclat ils vont emprunter de cette réunion ! […] » Mais si la nature, en vous accordant le talent de penser en philosophe, vous a refusé cette heureuse sensibilité qui saisit le beau avec transport, et le reproduit avec force ; si vous n’êtes qu’un esprit toujours réfléchissant, la règle devient plus sévère à votre égard, et vous bannit de l’empire du goût ; éloignez-vous : la raison séparée des grâces, n’est qu’un docteur ennuyeux qu’on laisse tout seul au milieu de son école.

30. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Balzac, 1596-1655 » pp. 2-10

Disons que c’est une éloquence d’affaires et de service ; née au commandement5 et à la souveraineté ; tout efficace et toute pleine de force. […] Il disait qu’en vain on députait des ambassadeurs pour résister à Démosthène, aux assemblées où il se trouvait, vu qu’ils n’y pouvaient servir leurs maîtres qu’en s’accommodant à ses opinions ; que la valeur pouvait combattre la force, et avoir l’avantage sur le nombre ; mais qu’il était également impossible au nombre, à la force et à la valeur d’ériger de trophée contre l’éloquence de Démosthène. […] Il estimait un homme plus que vingt mille hommes, parce qu’il savait qu’un homme est quelquefois l’esprit et la force d’un État, et que celui-ci, selon la relation que lui en avait faite Antipater, tout nu et désarmé qu’il était, sans vaisseaux, sans soldats et sans argent, combattant seulement avec des lois, des ordonnances et des paroles, attaquait la Macédoine de tous côtés, investissait les meilleures places, et rendait inutiles les plus puissantes armées. […] Il y a bien je ne sais quelle hardiesse qui menace de la part de l’homme, mais la force qui accable est toute de Dieu. […] Le soleil n’agit pas de toute sa force, comme il fit dès le mois d’avril de l’année passée, quand il brûla les herbes naissantes.

31. (1872) Recueil de compositions françaises pour préparer au discours latin les candidats au baccalauréat ès-lettres. Première série

Il faut user des forces que nous nous sommes faites. […] Les lois sont étouffées par la force, les droits sacrés sont anéantis, la liberté gémit accablée sous des armes sacrilèges ! […] Or, quoi de plus juste que de repousser la force par la force ? […] Les dieux immortels ont été les témoins des événements, ils ont accordé la victoire non pas à ceux qui les premiers avaient attaqué injustement, mais à ceux qui ont repoussé la force par la force. […] On ne peut battre les Romains qu’avec leurs propres armes et dompter l’Italie qu’avec les forces de l’Italie même.

32. (1811) Cours complet de rhétorique « Notes. »

Rousseau, entre autres, et du grand Corneille, du ton sage, mesuré, respectueux même, qu’il adopta depuis dans le Cours de littérature, et l’on sentira tout ce que peut l’empire de la raison dans un esprit bien fait, sur la force des préjugés, et sur les illusions même de l’amour-propre. […] Et cela était rigoureusement vrai : mais il ne l’était pas moins qu’il n’avait rien fait non plus pour étendre son domaine ; et que, sagement renfermé dans les bornes de son talent, il n’a jamais tenté de s’élever à ces beautés neuves et hardies, qui supposent un génie, et exigent des forces qu’il ne se sentait pas. […] En général, M. de La Harpe ne paraît pas avoir toujours assez sagement consulté la mesure et l’étendue de ses forces poétiques : de là ses chutes fréquentes et l’inégalité constante d’un vol dont on n’a calculé ni la durée, ni la hauteur. […] Delille a lutté pendant quinze ans contre les beautés, inimitables pour tout autre, des Géorgiques de Virgile : cette constance même ne prouve-t-elle pas la force irrésistible de la vocation particulière qui l’appelait à ce genre, dans lequel il nous a donné depuis de si aimables preuves de sa fécondité ? […] Ajoutez à cela le mérite d’un style plein de force et de véhémence dans les harangues des premiers chants ; de grâce, de mollesse et d’abandon, dans les amours d’Adam et d’Ève ; de vigueur et d’énergie, dans la description des combats, et vous aurez une idée juste d’une traduction évidemment supérieure à l’original.

33. (1885) Morceaux choisis des classiques français, prose et vers, … pour la classe de rhétorique

Il a gardé en lui un type idéal de sa vraie et primitive nature ; il s’efforce à la reconquérir ; mais ses propres forces n’y suffisent point. […] Il livre, pour sa propre conservation, des combats continuels contre les forces de la nature ; il les craint, mais il les adore. […] Chaque jour ils recommencent et varient chaque jour, selon la force des vents et la hauteur des marées. […] Naguère, quant à la force de la lumière, les phares modernes étaient à peine supérieurs aux anciens. […] Ils croient tout savoir et affirment avec force ; c’est la cause de l’excès qu’ils mettent en tout.

34. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre premier. Division générale. »

Le poète inspiré a comme une révélation mystérieuse et intime de la beauté infinie ; il s’échauffe par l’admiration qu’il conçoit pour elle ; il cherche à la réaliser dans son œuvre, à la faire descendre du ciel sur la terre : il ne réussit jamais qu’imparfaitement, car ses forces sont bornées, et le fini ne peut jamais contenir l’infini ; mais il parvient, comme Prométhée, à dérober quelques rayons de cette flamme céleste, idéal de ses rêves ; il les communique aux mortels ravis, qui, en reconnaissance, lui décernent l’immortalité. […] De la contrainte rigoureuse Où l’esprit semble resserré, Il reçoit cette force heureuse Qui l’élève au plus haut degré : Telle, dans les canaux pressée, Avec plus de force élancée, L’onde s’élève dans les airs ; Et la règle, qui semble austère, N’est qu’un, art plus certain de plaire, Inséparable des beaux vers, La Faye. […] C’est encore quelque chose de plus, qu’il n’est pas facile de définir : c’est une force vague et mystérieuse qui s’impose par elle-même, et dont tout le monde reconnaît l’autorité, parce qu’elle est douce et irrésistible. […] Un ne peut dire avec précision où finit Le beau et où commence le sublime, parce que ce ne sont que les manifestations diverses d’une même force à différents degrés. […] Peu à peu l’humanité sort de l’enfance pour entrer dans la jeunesse, époque de passions fougueuses, de force expansive et de combats gigantesques.

35. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Modèles

Je n’ai pas la force de commencer par vous. […] Point de force chrétienne dans les moments les plus solennels de la vie ! […] Tout fut uni par la force de son génie. […] Ici on n’a pas la force de songer aux figures ; la pensée a tout couvert. […] Cette puissance, ce charme, c’était la prière, la force n’avait pas rencontré quelque part une barrière pour l’arrêter, s’il n’ y avait eu ici-bas que force contre la force, c’en était fait des petits et des malheureux.

36. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XIII. du corps de l’ouvrage. — argumentation, confirmation, réfutation  » pp. 175-188

Or c’est dans l’argumentation que réside toute l’adresse et la force de l’éloquence judiciaire, d’une grande partie du genre délibératif, de la polémique, de la plupart des écrits philosophiques et didactiques. […] Mais puisque, en dépit de Boileau, on n’apprend pas à penser avant que d’écrire, force nous est, tout en confessant notre insuffisance, d’indiquer au moins sommairement les principes d’argumentation, et les principaux termes affectés aux diverses espèces d’arguments. […] Si au contraire une prémisse est tellement évidente qu’elle puisse être supprimée sans diminuer la force de l’argumentation, retranchez-la. […] C’est là que doivent se concentrer toutes les forces de l’argumentation. […] La seule règle à peu près universelle, et que la nature enseigne, avant les rhéteurs, c’est de garder les arguments les plus décisifs pour les derniers, soit en employant simplement la gradation, soit en frappant d’abord un grand coup, et en laissant passer ensuite les preuves médiocres, pour terminer avec plus de force et de solidité que l’on n’avait commencé.

37. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie —  Vauvenargues, 1715-1747 » pp. 336-343

Trop indulgent pour nos passions, il les regarda comme des forces qu’on peut tourner à la vertu, et crut trop à la bonté originelle de notre nature ; mais ne lui reprochons pas l’idée généreuse de concilier cette grandeur et cette misère qui avaient effrayé l’imagination de Pascal. […] L’on ne mesure bien, d’ailleurs, la force et l’étendue de l’esprit et du cœur humains que dans ces siècles fortunés ; la liberté découvre, jusque dans l’excès du crime, la vraie grandeur de notre âme ; là, brille en pleine lumière la force de la nature ; là, paraît la vertu sans bornes, le plaisir sans infamie, l’esprit sans affectation, la hauteur sans vanité, le vice sans bassesse et sans déguisement. […] Il me tomba, en même temps, un Sénèque dans les mains, je ne sais par quel hasard ; puis, des lettres de Brutus à Cicéron, dans le temps qu’il était en Grèce, après la mort de César : elles sont si remplies de hauteur, d’élévation, de passion et de courage, qu’il m’était bien impossible de les lire de sang-froid1 ; je mêlais ces trois lectures, et j’en étais si ému, que je ne contenais plus ce qu’elles mettaient en moi ; j’étouffais, je quittais mes livres, et je sortais comme un homme en fureur, pour faire plusieurs fois le tour d’une assez longue terrasse2, en courant de toute ma force, jusqu’à ce que la lassitude mît fin à la convulsion. […] Cependant, cet aimable stoïcien, que sa constante vertu, son génie, son humanité, son inflexible courage me rendaient infiniment cher, m’a fait verser bien des larmes sur la faiblesse de sa mort : c’est une extrême pitié de voir tant de vertu, tant de force et de grandeur d’âme vaincues, en un moment, par le plus léger revers au milieu de tant de ressources, et de tant de faveurs de la fortune !

38. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Bossuet. (1627-1704.) » pp. 54-68

C’est ramasser toutes ses forces, c’est unir tout ce qu’elle a de plus redoutable que de joindre, comme elle fait, aux plus vives douleurs l’attaque la plus imprévue. […] La délicatesse des parties, quoiqu’elle aille à une finesse inconcevable, s’accorde avec la force et avec la solidité. […] Les vaisseaux ont leurs soupapes ou valvules, tournées en tout sens ; les os et les muscles ont leurs poulies et leurs leviers : les proportions qui font et les équilibres, et la multiplication des forces mouvantes, y sont observées dans une justesse où rien ne manque. […] Ce mot est pris ici dans le sens de force, conformément à l’étymologie du mot latin virtus (vis). […] C’est-à-dire, consterner, épouvanter… Étonner avait autrefois beaucoup plus de force qu’aujourd’hui.

39. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre second. Définition et devoir de la Rhétorique. — Histoire abrégée de l’Éloquence chez les anciens et chez les modernes. — Chapitre II. De l’Éloquence chez les Grecs. »

Tant qu’il y eut peu de relations entre les humains, tant que la force et la violence décidèrent seules dans les discussions, il est tout simple que l’art qui concilie les esprits par le raisonnement et la persuasion, fût un art à peu près inconnu. […] Dédaignant l’affectation et le style fleuri des rhéteurs de son temps, il choisit Périclès pour le modèle de son éloquence, et son caractère distinctif est la force et la véhémence. […] Est-il étonnant que de pareilles harangues soient devenues, entre ses mains, des chefs-d’œuvre de force et de cette véritable énergie que donne et que soutient l’esprit public ? […] La vérité est dans sa main un trait perçant qu’il manie avec autant d’agilité que de force, et dont il redouble sans cesse les atteintes.

40. (1866) Cours élémentaire de rhétorique et d’éloquence (5e éd.)

Attendez-vous donc à la vérité dans toute sa force, à la vérité dans toute son étendue, à toutes les vérités. […] La plupart des beautés qui nous frappent dans les bons écrivains sont dues à la force de cette faculté. […] Il consiste uniquement à donner à ses raisonnements de la force, de l’ampleur et de la dignité. […] Accoutumez-vous à sentir avec force tout ce qui est juste et vrai. […] François de Sales, par la force de sa douceur, a triomphé de l’hérésie.

41. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Buffon, 1707-1788 » pp. 175-184

La force de son caractère, l’amour de la gloire et le dévouement à une idée l’élevèrent au-dessus des querelles de son temps ; au lieu de se dépenser au jour le jour, il économisa si bien ses facultés qu’il ne se laissa pas distraire un instant du sujet grandiose auquel il avait consacré son existence. […] C’est surtout dans les yeux3 qu’elles se peignent et qu’on peut les reconnaître : l’œil appartient à l’âme plus qu’aucun autre organe ; il semble y toucher, et participer à tous ses mouvements ; il en exprime les passions les plus vives et les émotions les plus tumultueuses, comme les mouvements les plus doux et les sentiments les plus délicats ; il les rend dans toute leur force, dans toute leur pureté, tels qu’ils viennent de naître ; il les transmet par des traits rapides qui portent dans une autre âme le feu, l’action, l’image de celle dont ils partent : l’œil reçoit, et réfléchit en même temps la lumière de la pensée, et la chaleur du sentiment : c’est le sens de l’esprit, et la langue de l’intelligence4. […] Rien ne s’oppose plus à la chaleur que le désir de mettre partout des traits saillants ; rien n’est plus contraire à la lumière qui doit faire un corps et se répandre uniformément dans un écrit, que ces étincelles qu’on ne tire que par force en choquant les mots les uns contre les autres, et qui ne nous éblouissent pendant quelques instants, que pour nous laisser ensuite dans les ténèbres. […] Il convient de lire après cette page celle de Bossuet que voici : « L’homme a presque changé la face du monde ; il a su dompter par l’esprit les animaux qui le surmontaient par la force ; il a su discipliner leur humeur brutale, et contraindre leur liberté indocile ; il a même fléchi par adresse les créatures inanimées : la terre n’a-t-elle pas été forcée par son industrie à lui donner des aliments plus convenables, les plantes à corriger en sa faveur leur aigreur sauvage, les venins même à se tourner en remèdes pour l’amour de lui ? […] « Pensez maintenant comment aurait pu prendre un tel ascendant une créature si faible, et exposée, selon le corps, aux insultes de tous les autres, si elle n’avait en son esprit une force supérieure à toute la nature visible, un souffle immortel de l’Esprit de Dieu, un rayon de sa face, un trait de sa ressemblance : non, non, il ne se peut autrement.

42. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

Il n’en résulte pas moins que ce discours, plein de force et de vérité, est un des plus beaux monuments de l’éloquence historique, et fait peut-être mieux connaître ce hardi conspirateur, que vingt pages de l’histoire la plus scrupuleusement fidèle. […] Quelle différence entre des vers qui se traînent sans force et sans vigueur, et la prose que l’on va lire ! […] J’ai toujours cru voir mes forces augmenter avec le nombre de mes années, en sorte que, dans ma vieillesse même, je ne me suis senti ni moins fort, ni moins vigoureux qu’aux jours même de ma jeunesse. […] — Mais si la foi du serment, si la religion, si la piété sont sans force auprès de toi, poursuis ton projet, mais tremble de te perdre en l’exécutant. — Insensé ! […] laisse-toi fléchir, il en est temps encore ; ne me force pas à une victoire dont je rougirais ; et que mes prières puissent sur mon fils ce qu’elles ont pu aujourd’hui sur d’autres en sa faveur » !

43. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre I. — Défauts et qualités de la phrase »

Tout est découverte pour lui, chaque essai de ses forces lui donne une jouissance : l’univers en mouvement claie à ses yeux, surpris le mélange des couleurs les plus riches et les plus variées. […] Battre suppose la supériorité des forces de la part de celui qui bat ; l’infériorité ou le non-usage des forces de la part de celui qui est battu. […] Frapper n’a aucun rapport aux forces de celui qui reçoit l’action. […] On est humilié d’être battu, et on l’est moins d’être frappé, parce qu’on n’est pas supposé avoir fait usage de ses forces pour se défendre. […] Rousseau, elle donne aussi de la force au style.

44. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre second. Définition et devoir de la Rhétorique. — Histoire abrégée de l’Éloquence chez les anciens et chez les modernes. — Chapitre III. De l’Éloquence chez les Romains. »

Personne n’a connu, comme lui, la force et le pouvoir des mots. […] Lorsqu’un objet important exaltait son âme, et exigeait de la force et de l’indignation, il abandonnait le ton déclamatoire, et le remplaçait par la force et la véhémence ; et l’homme vraiment éloquent, qui foudroie Antoine, Verrès et Catilina, n’est plus l’orateur fleuri, l’écrivain élégant qui parlait pour Marcellus, pour Ligarius ou pour le poète Archias. […] Mais, trop curieux de charmer l’oreille, il sacrifie souvent la force à la richesse du nombre.

45. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Pascal. (1623-1662.) » pp. 35-39

On ne s’en étonnera pas, s’il est vrai, comme il faut le reconnaître avec Vauvenargues, « qu’il ait été l’homme de la terre qui sut mettre la vérité dans un plus beau jour et raisonner avec le plus de force ». […] Quand la force combat la force, la plus puissante détruit la moindre ; quand on oppose les discours aux discours, ceux qui sont véritables et convaincants confondent et dissipent ceux qui n’ont que la vanité et le mensonge : mais la violence et la vérité ne peuvent rien l’une sur l’autre. […] Montesquieu a dit, dans un sens analogue, « qu’une belle action était celle où il y avait de la force et de la bonté ».

46. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Retz, 1614-1679 » pp. 38-42

La république romaine avait été anéantie par Jules César ; la puissance dévolue par la force des armes à ses successeurs subsista autant de temps qu’ils purent eux-mêmes conserver l’autorité des lois. Aussitôt qu’elles perdirent leurs forces, celle des empereurs s’évanouit, et elle s’évanouit par le moyen de ceux mêmes qui, s’étant rendus maîtres de leur sceau et de leurs armes par la faveur qu’ils avaient auprès d’eux, convertirent en leur propre substance celle de leurs maîtres, dont ils firent leur proie, à l’abri de ces lois anéanties. L’empire romain mis à l’encan et celui des Ottomans exposé tous les jours au cordeau nous marquent par des caractères bien sanglants l’aveuglement de ceux qui ne font consister l’autorité que dans la force. […] Il se distingua en Sorbonne ; on remarqua de fort bonne heure la force et la vivacité de son esprit.

47. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XIX. des qualités accidentelles du style. — noblesse, richesse, énergie, sublime  » pp. 257-273

« Le style grave, dit Voltaire, évite les saillies, les plaisanteries : s’il s’élève quelquefois au sublime, si dans l’occasion il est touchant, il rentre bientôt dans cette sagesse, dans cette simplicité noble qui fait son caractère ; il a de la force, mais peu de hardiesse. […] Condenser le sentiment ou la pensée est assurément un moyen de lui donner cette force et ce ressort ; mais il arrive souvent aussi qu’il reçoit la même efficacité d’un mouvement prolongé ou d’une suite de mouvements dépendant d’un principe unique d’action. […] Parfois la métaphore a le même résultat que l’antithèse, c’est-à-dire que l’image communique la force à l’idée. […] La véhémence dépend moins de la force de l’expression que de la vivacité et de la variété du tour et du mouvement de la phrase. […] « En effet, dit Cicéron, il ne suffit pas au gladiateur et à l’athlète de frapper avec force et de parer avec adresse, il doit se mouvoir toujours avec grâce : Sa verbis quidem ad aptam compositionem ac decentiam.

48. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre II. Les Oraisons ou discours prononcés. »

Il s’appliquera surtout à les développer avec netteté et précision, à les présenter sous un jour si lumineux, que les personnes les moins intelligentes puissent les comprendre, et en sentir la force et la certitude. […] La beauté du style ne sert qu’à les faire valoir davantage18 ; mais cette beauté n’est pas le fond même de la confirmation : c’est la force des preuves et leur bon arrangement qui y est d’abord nécessaire. […] C’est là qu’elle paraît dans toute sa pompe, dans toute sa dignité, qu’elle déploie toute sa force et toutes ses grâces pour étonner l’imagination, pour intéresser le sentiment. […] Tout doit y être plein de force et de dignité. […] Il ne manque ni de force ni d’élévation ; il joint à ces qualités la noblesse des pensées, toute l’harmonie et toutes les grâces de l’élocution.

49. (1863) Principes de rhétorique et de littérature appliqués à l’étude du français

Mais ma force est au Dieu dont l’intérêt me guide.... […] — Il ne suffit pas de choisir et de disposer les preuves : il faut en tirer tout l’effet possible, en leur donnant toute leur force. […] La passion est une arme toute-puissante quand elle a pour soutien la force de la vérité. […] Les membres de la période augmentent ou diminuent de nombre selon l’étendue de la pensée et la force de l’attention. […] Il a plus de force et d’abondance que le premier, mais moins d’élévation que le second.

50. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Deuxième partie. Préceptes des genres. — Chapitre troisième. Du discours. »

mais aussi que de forces et de moyens pour le patriote, le vrai philosophe, l’homme éloquent, car tous ces caractères, qui faisaient l’ ancien orateur, doivent alors être ceux du nôtre. […] Mais lorsque son adversaire l’avait échauffé en le réfutant, et croyait l’avoir terrassé, tout-à-coup il se relevait avec une force effrayante. […] Le premier, redoutable mais suspect à ses juges, qui, a force de le croire habile, le regardaient comme dangereux ; le second, précédé au barreau par cette réputation d’honnête homme, qui est la plus forte recommandation d’une cause, et peut-être la première éloquence d’un orateur. De tout ce que je viens de dire, de l’art de ménager ses forces, il ne s’en suit pas que l’orateur doive mettre en avant ce qu’il a de plus faible, mais seulement qu’il doit réserver pour sa conclusion ce qu’il a de plus éminent. […] Dès la première phrase votre ton devra respirer l’indignation ; mais ce ton sera calculé de manière à aller toujours en augmentant, jusqu’à l’exclamation qui fait éclater la force tout entière de l’indignation.

51. (1867) Rhétorique nouvelle « Tableau des arguments » pp. 306-

Dans son discours sur l’indemnité des émigrés (21 février 1825), le général Foy commence ainsi : « Le droit et la force se disputent le monde : le droit, qui institue et conserve les sociétés ; la force, qui subjugue et pressure les nations. […] Ce n’est donc pas la force, c’est le droit qu’ils peuvent invoquer. » — L’orateur prouve ensuite que les émigrés n’ont pas plus le droit pour eux que la force, et sa démonstration est complète.

52. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Descartes, 1596-1650 » pp. 11-20

Je savais que les langues que l’on y apprend sont nécessaires pour l’intelligence des livres anciens ; que la gentillesse des fables réveille l’esprit ; que les actions mémorables des histoires le relèvent, et qu’étant lues avec discrétion elles aident à former le jugement ; que la lecture de tous les bons livres est comme une conversation avec les plus honnêtes gens des siècles passés, qui en ont été les auteurs, et même une conversation étudiée en laquelle ils ne nous découvrent que les meilleures de leurs pensées ; que l’éloquence a des forces et des beautés incomparables ; que la poésie a des délicatesses et des douceurs très-ravissantes ; que les mathématiques ont des inventions très-subtiles, et qui peuvent beaucoup servir tant à contenter les curieux qu’à faciliter tous les arts et diminuer le travail des hommes ; que les écrits qui traitent des mœurs contiennent plusieurs enseignements et plusieurs exhortations à la vertu qui sont fort utiles ; que la théologie enseigne à gagner le ciel ; que la philosophie donne moyen de parler vraisemblablement1 de toutes choses et de se faire admirer des moins savants ; que la jurisprudence, la médecine et les autres sciences apportent des honneurs et des richesses à ceux qui les cultivent ; et enfin, qu’il est bon de les avoir toutes examinées, même les plus superstitieuses et les plus fausses2, afin de connaître leur juste valeur et se garder d’en être trompé. […] Outre que les fables font imaginer plusieurs événements comme possibles qui ne le sont point, et que même les histoires les plus fidèles, si elles ne changent ni n’augmentent la valeur des choses pour les rendre plus dignes d’être lues, au moins en omettent-elles presque toujours les plus basses et moins illustres circonstances, d’où vient que le reste ne paraît pas tel qu’il est, et que ceux qui règlent leurs mœurs par les exemples qu’ils en tirent sont sujets à tomber dans les extravagances des paladins de nos romans et à concevoir des desseins qui passent leurs forces. […] Mais, après que j’eus employé quelques années à étudier ainsi dans le livre du monde et à tâcher d’acquérir quelque expérience, je pris un jour résolution d’étudier aussi en moi-même, et d’employer toutes les forces de mon esprit à choisir les chemins que je devais suivre ; ce qui me réussit beaucoup mieux, ce me semble, que si je ne me fusse jamais éloigné ni de mon pays ni de mes livres1. […] 1 Monsieur, Je viens d’apprendre la triste nouvelle de votre affliction, et bien que je ne me promette pas de rien mettre en cette lettre qui ait grande force pour adoucir votre douleur, je ne puis toutefois m’abstenir d’y tâcher, pour vous témoigner au moins que j’y participe. […] Or, je ne veux point vous conseiller d’employer toutes les forces de votre résolution et constance pour arrêter tout d’un coup l’agitation intérieure que vous sentez ; ce serait peut-être un remède plus fâcheux que la maladie : mais je vous conseille aussi d’attendre que le temps seul vous guérisse, et beaucoup moins d’entretenir ou prolonger votre mal par vos pensées ; je vous prie seulement de tâcher peu à peu de l’adoucir, en ne regardant ce qui vous est arrivé que du biais qui vous le peut faire paraître le plus supportable, et en vous divertissant le plus que vous pourrez par d’autres occupations3.

53. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre I. Du Discours oratoire. »

On sent qu’elles doivent donner un grand poids et une grande force aux preuves. […] Il ne manquera pas alors de peindre avec force, de rendre son discours passionné, et d’émouvoir, par ce moyen, les passions de ses auditeurs. […] Il s’appliquera surtout à les développer avec netteté et précision, à les présenter sous un jour si lumineux, que les personnes les moins intelligentes puissent les comprendre, et en sentir la force et la certitude. […] Mais après tout, vous n’avez vaincu pour lors que ce qui était de nature et de condition à être vaincu ; car il n’est rien de si puissant ni de si redoutable, dont le fer et la force ne puissent enfin venir à bout. […] Du moins je puis me flatter d’avoir rempli mon ministère selon mes forces, si je n’ai pu le faire selon mes désirs.

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