Arrêtez-ici vos regards : il se prépare contre le prince quelque chose de plus formidable qu’à Rocroi, et pour éprouver sa vertu, la guerre va épuiser toutes ses inventions et tous ses efforts. […] Forme. — Arrêtez-ici vos regards. […] L’orateur s’anime et semble épouvanté ; il voit donc quelque chose qui effraie les regards de l’homme, et nous ne sommes pas bien loin de nous effrayer nous-mêmes.
Son regard est inquiet et mobile ; il n’ose fixer le mur de la salle du festin, dans la crainte d’y voir des caractères funestes. […] Un jour ou l’autre il frappe à notre porte, il s’assied au foyer désert ou rempli, et d’un de ses regards jeté sur notre cœur, il en tire cette larme unique où nous lisons ce qu’il est.
Libre des opinions vulgaires, et pensant d’une manière qui n’appartient qu’à lui seul, il parle un langage, vrai dans le fond, mais nouveau et singulier, qui blesserait l’oreille des autres hommes ; vaste et profond dans ses vues, et s’élevant toujours par ses notions abstraites et générales, qui sont pour lui comme des livres abrégés, il échappe à tout moment aux regards de la foule, et s’envole fièrement dans les régions supérieures.
Il faut à la modestie de l’expression joindre encore celle des regards, du geste et du ton de voix.
Chénier (1764-1811) : Quand Sous le crime heureux tout languit abattu, Malheur au citoyen coupable de vertu, Et dont la gloire pure offensa, dans l’armée, Tibère impatient de toute renommée, Les délateurs, vendant leurs voix et leurs écrits, Viennent dans son palais marchander les proscrits ; Lui seul des tribunaux fait pencher la balance ; Le sénat le contemple, et décrète en silence ; Les regards sont muets, les lois n’osent parler ; Tibère à ses genoux voit l’univers trembler, Et, subissant lui-même un tyrannique empire, Éprouve, en l’ordonnant, la frayeur qu’il inspire.
heureux séjour, montagnes renommées, De lavande, de thym, de citron parfumées1, Que de fois sous tes plants d’oliviers toujours verts, Dont la pâleur s’unit au sombre azur des mers, J’égarai mes regards sur ce théâtre immense !
Cicéron, dans le discours pour Marcellus, établit un contraste entre la clémence de César et ses exploits ; Mascaron fait ressortir par les contraires la piété de Turenne au milieu des camps ; M. de Bonald met en regard la barbarie des sauvages et celle des peuples policés de notre époque.
La nouveauté, par exemple, a été signalée comme un de ces principes ; un objet qui n’a nulle autre qualité pour attirer nos regards que d’être extraordinaire et nouveau, produit cependant sur notre esprit une vive et agréable émotion qui naît de cette passion de curiosité si naturelle à l’homme ; la nouveauté et la singularité éveillent notre esprit par une impulsion vive et agréable. […] Ils offrent à nos regards plus d’objets à la fois qu’un écrivain diffus et faible ne pourrait nous en présenter en tournant et retournant l’objet sous plusieurs aspects. […] Ses regards, ses gestes, tout en lui est persuasif, et la nature se montre alors bien plus puissante que l’art. […] » Qu’on juge de l’effet que devaient produire de pareils discours, lorsqu’en les prononçant l’orateur joignait à l’action de Démosthène un front audacieux, un regard sombre et plein d’expression, des formes athlétiques, une voix retentissante et impérieuse. […] L’émotion intime de l’orateur ajoute au pathétique de ses paroles ; ses regards, ses gestes, tout son être, exercent sur ceux qui l’entendent une puissance presque irrésistible.
J’ai souvent admiré un cheval arabe ainsi enchaîné dans le sable brûlant, les crins descendant épars, la tête baissée entre ses jambes pour trouver un peu d’ombre, et laissant tomber de son œil sauvage un regard oblique sur son maître. […] L’Arabie Qu’on se figure un pays sans verdure et sans eau, un soleil brûlant, un ciel toujours sec, des plaines sablonneuses, des montagnes encore plus arides, sur lesquelles l’œil s’étend et le regard se perd, sans pouvoir s’arrêter sur aucun objet vivant ; une terre morte, et pour ainsi dire écorchée par les vents, laquelle ne présente que des ossements, des cailloux jonchés, des rochers debout ou renversés, ou le voyageur n’a jamais respiré sous l’ombrage, où rien ne l’accompagne, rien ne lui rappelle la nature vivante.
Les lieux les plus riants sans lui nous touchent peu ; C’est un temple désert qui demande son dieu ; Avec lui mouvement, plaisir, gaîté, culture, Tout renaît, tout revit : ainsi qu’à la nature La présence de l’homme est nécessaire aux arts ; C’est lui dans vos tableaux que cherchent nos regards. […] Ils employaient assez souvent des descriptions dans leurs poèmes didactiques, pour délasser l’esprit du lecteur, comme nous l’avons vu précédemment ; mais jamais ils ne décrivaient uniquement pour décrire, en passant d’un objet à un autre, sans autre cause que la mobilité du regard et de la pensée, et sans antre liaison que des transitions souvent plus apparentes que réelles.
quel regard terrible !
Flamme capricieuse et vagabonde, elle aime les espaces sans bornes qui séparent le ciel de la terre ; là, comme un météore changeant, elle fascine nos regards, nous étonne, nous enchante, nous éblouit.
Au contraire, l’homme accoutumé à faire des réflexions étend ses regards plus loin, et considère avec curiosité les abîmes presque infinis dont il est environné de toutes parts.
Walckenaer : « Seul il eût suffi à la gloire de cet écrivain, et il a donné seul la mesure de la force et de la grandeur de son génie. » Voici en quels termes Rivarol, ce grand improvisateur, a parlé aussi de Montesquieu (voy. la Revue des deux mondes, 1er juin 1849) : « Son regard d’aigle pénètre à fond les objets, et les traverse en y jetant la lumière.
Tantôt le monde entier, dans un profond silence, A mes regards errants n’est plus qu’un vide immense.
Tout en écrivant, j’ai tourné la tête vers la fenêtre, et mon regard a été inondé de teintes si douces, si molles, si veloutées ; j’ai vu tant de choses merveilleuses à l’horizon, que je n’ai pu m’empêcher de jeter ici cette exclamation de ravissement.
Le ton de la voix, les regards, les gestes, n’expriment-ils pas aussi bien que les mots nos idées et nos affections ? […] Examinez quels regards, quels gestes accompagnent dans la conversation ordinaire l’expression des mouvements d’animosité, d’indignation, de compassion, et prenez-les pour modèles. La plupart de ces gestes et de ces regards sont communs à tous les hommes ; mais quelques-uns ont dans chaque individu un caractère particulier. […] La vivacité de son esprit se peignait dans ses regards ; son âme était belle comme ses yeux. […] Lorsqu’elle jette un regard au berger qui la poursuit, que ses pieds et ses yeux s’accordent mal ensemble !
Mais du jour importun ses regards éblouis Ne distinguèrent point, au fort de la tempête, Les foudres menaçans qui grondaient sur sa tête ; Et bientôt, fatigué d’un moment de réveil, Las, et se rejetant dans les bras du sommeil, Entre ses favoris, et parmi les délices, Tranquille, il s’endormit au bord des précipices. […] Valois se réveille, ses regards sont éblouis du jour importun : ils ne distinguent rien ; et bientôt fatigué de ce moment de réveil, le prince se jette dans les bras du sommeil, et se rendort.
Quoique ses yeux soient couverts d’un bandeau, ses regards pénètrent l’avenir ; quelquefois elle tient des fleurs naissantes dans la main, quelquefois une coupe pleine d’une liqueur enchanteresse. […] Ici, en regard du repos de la nature et de la douceur du spectacle, règnent par un habile contraste le mouvement et la majesté.
Cousin, qui joignait a l’esprit le plus positif ces grandes vues où le vulgaire des penseurs ne voit qu’une imagination ardente, et qui ne sont pas moins que le regard rapide et perçant du génie, le vainqueur d’Arcole et de Marengo, rendant compte à la postérité de ses desseins vrais ou simulés sur cette Italie qui devait lui être chère à plus d’un titre, commence par une description du territoire italien, dont il tire toute l’histoire passée de l’Italie et le seul plan raisonnable qui ait jamais été tracé pour sa grandeur et sa prospérité.
Tandis que la fierté indomptable et la téméraire ardeur de la jeunesse respiraient sur son front et dans ses regards, l’amère ironie, le profond mépris pour Rome et la cour esclave qu’elle s’asservissait, se peignaient dans les coins relevés de cette bouche dédaigneuse.
Quoique ses yeux soient couverts d’un bandeau, ses regards pénètrent l’avenir.
Voilà les maîtres vers lesquels il faut sans cesse porter ses regards, quand on a quelques sentiments de l’art véritable, et qu’on aime cette admirable langue française, fidèle image de l’esprit et du caractère national, qui ne peut se soutenir et durer que par le perpétuel renouvellement des causes qui l’ont formée et élevée, à savoir les grands sentiments et les grandes pensées, ces foyers immortels du génie des écrivains et des artistes, aussi bien que de la puissance des nations.
Observez-vous vous-mêmes et jetez un regard sur votre passé si court encore et qui vous paraît déjà si long.
Pour traiter ainsi les affaires publiques, l’orateur doit avoir acquis une connaissance profonde du passé, du présent, et par l’un et l’autre un regard pénétrant et prolongé dans l’avenir : du passé, les exemples et les autorités, monumens de l’expérience ; du présent, la constitution de l’état, sa situation actuelle, ses relations, ses intérêts, ses ressources, ses principes de droit public ; de l’avenir, les précautions, les espérances, les craintes, les obstacles, les mouvemens de la politique et ceux de la fortune à calculer et à prévoir, les révolutions à éviter, en un mot, la balance des événemens à tenir dans ses mains, et à faire pencher vers le parti qu’on se propose. […] Je l’observais hier, et je voyais ses yeux Lancer sur le lieu saint des regards furieux ; Comme si, dans le fond de ce vaste édifice, Dieu cachait un vengeur armé pour son supplice. […] C’est un homme dont les devoirs sont aussi étendus que sa puissance, qui répond à Dieu d’un peuple entier, et participe par ses vertus à tous les honneurs dus au génie : un homme qui se sanctifie par son pouvoir même, lorsqu’il rend ses sujets heureux : un homme dont les actions sont des exemples, les paroles des bienfaits, les regards même des récompenses : un homme qui n’est élevé au-dessus des autres que pour découvrir les malheureux de plus loin ; c’est enfin une victime honorable de la félicité publique, à qui la providence a donné pour famille une nation, pour témoin l’univers, tous les siècles pour juges. » (L’abbé Maury, Panég. de saint Louis.) […] L’imagination représente les objets avec une fidélité qui fait illusion ; la sensibilité ressent profondément, exprime avec vivacité et communique rapidement les impressions ; la voix le regard, le geste, frappent les sens et remuent l’âme de l’auditeur.
Dans l’éloge du grand Condé, Bossuet, après l’avoir comparé à l’aigle, ajoute : Aussi vifs étaient les regards, aussi prompte et aussi impétueuse était l’attaque, aussi fortes et inévitables étaient les mains du prince de Condé. Les regards, l’attaque, les mains, voilà trois objets qu’il voulait mettre au grand jour. […] Il offre une image très naturelle et très vraie : d’abord, nous voyons un rocher qui domine la plaine ou la montagne ; portant plus haut les regards, nous rencontrons la cime du rocher ; en les élevant plus haut encore, nous voyons le berger sur cette cime.
L’homme de génie, au contraire, vivement impressionné par la vue de l’objet, en pénètre les véritables beautés, et le présente à nos regards sous un aspect qui frappe à l’instant l’imagination et l’échauffe. […] Le parallèle est une description composée de deux portraits, de deux caractères, de deux peintures, que l’on met en regard et que l’on rapproche afin de faire ressortir les rapports de similitude ou de dissimilitude qui se rencontrent entre deux personnes, deux choses, deux qualités, ou même deux états différents de la même personne. […] Le parallèle a pour résultat de rendre la pensée plus frappante et de relever les traits les plus saillants des personnes ou des choses que l’on met en regard.
Voici deux exemples de pensées brillantes : Les premiers feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire. […] Dans l’Énéide, un jeune guerrier se rappelle en mourant sa douce patrie, Argos, et jette vers elle un tendre regard : Et dulces moriens reminiscitur Argos.
Celle-ci se trouve partout, jusque dans le reste et dans le regard, à plus forte raison dans un mot ou dans un cri du cœur. […] L’action oratoire des anciens était toute une science de la pantomime, où le rhéteur notait jusqu’à la direction du regard, jusqu’à la pose de la main et aux mouvements des doigts. […] L’estime et le respect sont de justes tributs Qu’aux plus fiers ennemis arrachent les vertus ; Et c’est ce que vient rendre à la haute vaillance, Dont je ne fais ici que trop d’expérience, L’ardeur de voir de près un si fameux héros Sans lui voir en la main piques ni javelots, Et le front désarmé de ce regard terrible Qui dans nos escadrons guide un feras invincible. […] Écoutons Massillon décrire la mort du pécheur : « Il sort de ses yeux mourants je ne sais quoi de sombre et de farouche, qui exprime les fureurs de son âme ; il pousse du fond de sa tristesse des paroles entrecoupées de sanglots, qu’on n’entend qu’à demi, et on ne sait si c’est le désespoir ou le repentir qui les a formées ; il jette sur un Dieu crucifié des regards affreux, et qui laissent douter si c’est la crainte ou l’espérance, la haine ou l’amour qu’ils expriment ; il entre dans des saisissements, où l’on ignore si c’est le corps qui se dissout, ou l’âme qui sent l’approche de son juge ; il soupire profondément, et l’on ne sait si c’est le souvenir de ses crimes qui lui arrache ces soupirs, ou le désespoir de quitter la vie. […] Les regards étincelants, le feu du courage, le fruit du crime, les traits du céleste courroux, mille autres locutions semblables, les unes rares et brillantes, les autres fréquentes et familières, appartiennent aux diverses familles des Tropes.
Il sort de ses yeux mourans je ne sais quoi de sombre et de farouche qui exprime les fureurs de son âme ; il pousse, du fond de sa tristesse, des paroles entrecoupées de sanglots, qu’on n’entend qu’à demi, et qu’on ne sait si c’est le désespoir ou le repentir qui les a formées ; il jette sur un Dieu crucifié des regards affreux, et qui laissent douter si c’est la crainte ou l’espérance, la haine ou l’amour qu’ils expriment : il entre dans des saisissements ou l’on ignore si c’est le corps qui se dissout, ou l’âme qui sent l’approche de son juge : il soupire profondément, et l’on ne sait si c’est le souvenir de ses crimes qui lui arrache ces soupirs, ou le désespoir de quitter la vie.
La majesté de vos autels, Elle-même en est offensée ; Car sachez que les immortels Ont les regards sur vous.
Mais cette activité féconde de la nature fut réglée, pour ainsi dire, par la fortune et les regards d’un seul homme.
En tenant continuellement les regards élevés, nos esprits eux-mêmes s’élèvent ; et tout ainsi qu’un homme, en s’abandonnant aux habitudes de dédain et de mépris pour les autres, est sûr de descendre au niveau de ce qu’il méprise, ainsi les habitudes opposées d’admiration et de respect enthousiaste pour le beau nous communiquent à nous-mêmes une partie des qualités que nous admirons ; et ici, comme en toute autre chose, l’humilité est la voie la plus sûre à l’élévation. » Entendez ces belles paroles du docteur Arnold comme elles le méritent, et dans le sens où elles sont dites en effet, — avec religion, non avec idolâtrie.
. : Il jette ses regards et les nations sont dispersées. […] Pour résumer en peu de mots ce qui a été expliqué sur ce sujet, nous dirons que le caractère du style biblique est la simplicité et la grandeur, les images frappantes et vives qui nous présentent Dieu assis sur les chérubins, porté sur les nuées, dont le regard fait trembler la terre, dont la colère ébranle les fondements des montagnes, qui voit au fond des abîmes : toutes ces images sont pleines de hardiesse et de vivacité, ici le cœur parle avec tendresse, avec amour ; là les comparaisons sont toutes expressives : ce sont les palmes et les cèdres, les lions et les aigles, objets communs en Palestine et qui donnent au style une feinte caractéristique, connue sous le nom de Couleur locale.
On sent, comme le philosophe, que pour avoir une connaissance de cette campagne, il faut arrêter ses regards successivement d’un objet sur un autre, observant d’abord ceux qui appellent plus particulièrement l’attention, qui sont plus frappants, qui dominent, autour desquels et pour lesquels les autres semblent s’arranger ; ensuite, quand on a la situation respective des premiers, passant successivement à tous ceux qui remplissent les intervalles ; enfin, ne décomposant ainsi que pour recomposer, afin qu’une fois les connaissances acquises, les choses, au lieu d’être successives, aient dans l’esprit le même ordre simultané qu’elles ont au dehors.
Une situation peut-être encore plus saisissante est celle de Guillaume Tell, si admirablement rendue par la musique de Rossini, au moment où le malheureux père adresse à son fils ses dernières recommandations : Reste immobile, et vers la terre Abaisse un regard suppliant… 89.
Aussitôt qu’il eut porté de rang en rang l’ardeur dont il était animé, on le vit presque en même temps pousser l’aile droite des ennemis, soutenir la nôtre ébranlée, rallier les Français à demi vaincus, mettre en fuite l’Espagnol victorieux, porter partout la terreur, et étonner de ses regards étincelants ceux qui échappaient à ses coups.
Bourbon tourna sur eux des regards pleins de grâce, Où régnaient à la fois la douceur et l’audace : « Soyez libres, dit-il ; vous pouvez désormais Rester mes ennemis ou vivre mes sujets… Choisissez. » A ces mots d’un roi couvert de gloire, Sur un champ de bataille, au sein de la victoire, On voit en un moment ces captifs éperdus2, Contents de leur défaite, heureux d’être vaincus : Leurs yeux sont éclairés, leurs cœurs n’ont plus de haine ; Sa valeur les vainquit, sa vertu les enchaîne ; Et, s’honorant déjà du nom de ses soldats, Pour expier leur crime, ils marchent sur ses pas.
Il en faut voir chaque partie l’une après l’autre, et, au lieu de tout embrasser d’un coup œil, il faut arrêter ses regards successivement d’un objet sur un autre objet.
Le talent, au contraire, ne découvre pas le premier et par lui-même ; il vérifie ce que le génie a découvert, il achève et perfectionne les détails que le génie a négligés ; il va glaner sur les traces du génie et compose une couronne de fleurs qui ont échappé à ses regards et qu’il a dédaigné de cueillir. […] Que sous un fer sacré des taureaux gémissants Dévoilent l’avenir à leurs regards perçants ? […] Lamartine a dit, en parlant de Dieu : Il est ; tout est en lui : l’immensité, le temps, De son être infini sont les purs éléments ; L’espace est son séjour ; l’éternité son âge ; Le jour est son regard, le monde est son image ; Tout l’univers subsiste à l’ombre de sa main ; L’être à flots éternels découlant de son sein, Comme un fleuve nourri par une source immense, S’en échappe et revient finir où tout commence. […] Quoique ses yeux soient couverts d’un bandeau, ses regards pénètrent l’avenir. […] La lecture, c’est trop souvent un regard furtif et rapide jeté sur un ouvrage ; la traduction, c’est la contemplation laborieuse et prolongée des pensées et des secrets du génie.
quels affreux regards elle jette sur moi !
et ce regard d’Annibal, ce front terrible qui met en fuite les armées, qui épouvante le peuple romain, seul en braveras-tu la majesté96 ? […] quelle admirable opposition entre des armées entières qui ne peuvent soutenir le visage d’Annibal, le peuple romain même que ses regards font trembler, et un faible assassin, tu ! […] Lorsque, après le mot conspectu, nous arrêtons notre prononciation sur celui-ci, nullam, nous croyons être à la place d’un homme qui jette au loin ses regards et ne découvre rien. […] Qu’on substitue l’ordre grammatical : Les regards du prince de Condé étaient aussi vifs, son attaque était aussi vite et impétueuse, etc. ce tour n’a plus de vivacité. […] Virgile a voulu fixer nos regards sur le front même du dieu, parce que le front est le siège de la sérénité : placidum caput 164.
Où trouverez-vous ailleurs des soldats que la gloire console du malaise et de la faim, qu’un regard, une parole précipitent dans le danger ?
D’autres découvertes précoces et restées célèbres prouvèrent qu’en tout ordre de connaissances son regard avait une intuition divinatrice.
La Fontaine a de même fait valoir la noblesse des sentiments et du langage dans son Paysan du Danube, en présentant d’abord la peinture de sa physionomie grossière : … Voici Le personnage en raccourci : Son menton nourrissait une barbe touffue ; Toute sa personne velue Représentait un ours, mais un ours mal léché : Sous un sourcil épais il avait l’œil caché, Le regard de travers, nez tortu, grosse lèvre, Portait sayon de poil de chèvre, Et ceinture de joncs marins. […] L’ordre grammatical aurait demandé à propos du portrait du prince de Condé : Les regards du prince étaient aussi vifs, son attaque aussi vite et impétueuse, etc. Avec quelle heureuse hardiesse Bossuet emploie la construction inversive : Aussi vifs étaient les regards, aussi vite et impétueuse était l’attaque, aussi fortes et inévitables étaient les mains du prince.
Les occasions préviennent presque leurs désirs : leurs regards, si j’ose parler ainsi, trouvent partout des crimes qui les attendent : l’indécence du siècle et l’avilissement des cours honorent même d’éloges publics les attraits qui réûssissent à les séduire : on rend des hommages indignes à l’effronterie la plus honteuse : un bonheur si honteux est regardé avec envie, au lieu de l’être avec exécration ; et l’adulation publique couvre l’infamie du crime publie.
La leçon ne fut pas perdue, et parmi les fureurs qui attristent des années à jamais néfastes, nos regards se reposeront avec respect sur de nobles figures, le chancelier de l’Hospital (1505-1573), aussi grand citoyen qu’éloquent orateur, et le président de Thou, dont la gravité rappellerait Thucydide s’il n’avait pas écrit en latin son impartiale histoire.
Sa voix, son geste, son regard, tout est tendu et forcé : elle ne cherche à plaire que par l’effroi qu’elle inspire.
L’enfant louche, et le père parle de son regard oblique ; il l’appelle tendrement mon poulet, quand sa taille est ridiculeusement petite, comme jadis celle de l’avorton Sisyphe ; si ses jambes sont torses ou ses pieds contrefaits, il balbutie les noms de Varus et de Scaurus.
Elles présentent la nature humaine sous un aspect différent de celui sous lequel les autres sciences l’offrent à nos regards, et nous font apercevoir des nuances diverses que l’on n’eût jamais observées sans elles, et qui, quoique infiniment délicates, exercent une puissante influence sur les circonstances de la vie. […] Quoique une immense plaine soit un grand objet, néanmoins une haute montagne au sommet de laquelle se portent nos regards, un précipice effroyable ou une tour imposante au bas desquels notre vue se plonge, ont plus de grandeur encore. […] Portez vos regards sur la situation où se trouvait le genre humain à l’époque où les langues commencèrent à se former. […] Les tons, les regards, les gestes qui accompagnent le discours, et que l’écriture ne peut exprimer, le rendent, lorsqu’ils sont employés à propos, bien plus clair, bien plus expressif et bien plus précis. Les tons, en effet, les regards et les gestes, sont les interprètes naturels des affections de l’âme.