Il faut mépriser le monde, et connaître néanmoins le besoin de le ménager ; il faut s’en détacher par religion, mais il ne faut pas l’abandonner par nonchalance et par humeur particulière2 Contre la mollesse Souvenez-vous que la mollesse énerve tout, qu’elle affadit tout, qu’elle ôte leur séve et leur force à toutes les vertus et à toutes les qualités de l’âme, même suivant le monde. […] toi-même qui jouis maintenant d’une jeunesse si vive et si féconde en plaisirs, souviens-toi que ce bel âge n’est qu’une fleur qui sera presque aussitôt séchée qu’éclose : tu te verras changer insensiblement ; les grâces riantes, les doux plaisirs qui t’accompagnent, la force, la santé, la joie s’évanouiront comme un beau songe ; il ne t’en restera qu’un triste souvenir ; la vieillesse languissante et ennemie des plaisirs viendra rider ton visage, courber ton corps, affaiblir tes membres, faire tarir dans ton cœur la source de la joie, te dégoûter du présent, te faire craindre l’avenir, te rendre insensible à tout, excepté à la douleur. […] Gardez-vous bien de dire : « Demain nous irons nous divertir dans un tel jardin. » L’homme d’aujourd’hui ne sera point celui de demain ; celui qui vous promet maintenant, disparaîtra tantôt ; vous ne saurez plus le prendre3 pour le faire souvenir de sa parole.
Il est froid, artificiel ; il a le génie indigent, il se traîne sur des lieux communs mythologiques ; il travaille de mémoire, et pourtant, lorsqu’il est soutenu par un modèle ou des souvenirs, il a de l’harmonie, du rhythme, parfois même de la couleur et de la noblesse dans les détails du style. […] Cependant votre âme, attendrie Par un douloureux souvenir, Des malheurs d’une sœur chérie7 Semble toujours s’entretenir.
La France se souviendra avec plaisir que sous le règne du plus grand de ses rois a fleuri le plus grand de ses poëtes. […] Louis XIV écrivait au comte de Coligny, après la bataille de Saint-Gothard, 1664 : « Je désire que vous témoigniez aux officiers et soldats qui se sont distingués le gré que je leur sais, les assurant que je connais le mérite de leurs services et qu’ils ne doivent pas douter que je n’en garde le souvenir. » Et dans une autre lettre adressée au duc de Beaufort, qui venait de vaincre les corsaires algériens, 1665, il disait encore : « Je veux savoir si le capitaine des Lauriers a laissé femme et enfants, pour les gratifier, étant bien aise que l’on voie que ceux qui meurent en me servant vivent toujours dans mon souvenir. » 1.
Quelques-unes de ces fleurs artificielles ont conservé de la fraîcheur et de la grâce2 Le vieillard de virgile Aux lieux où le Galèse1, en des plaines fécondes, Parmi les blonds épis roule ses noires2 ondes, J’ai vu, je m’en souviens, un vieillard fortuné3 Possesseur d’un terrain longtemps abandonné : C’était un sol ingrat, rebelle à la culture, Qui n’offrait aux troupeaux qu’une aride verdure4, Ennemi des raisins, et funeste5 aux moissons. […] mon cœur bat à ce seul souvenir ! […] Ce mot veut dire ici sentiment qui se souvient.
Ses mœurs étaient aussi pures que sa doctrine, et je ne puis me souvenir de cet air de candeur et de vérité, qui accompagnait ses actions et ses paroles, et qui le rendait si agréable, que je ne regrette le temps que j’ai passé loin de lui. […] Je n’ai pas oublié les bonnes qualités que j’ai remarquées autrefois en cette demoiselle presque dans son enfance2 : un esprit vif, une gaieté modeste, un air plein de discrétion et de prudence, au delà même de son âge, et je ne doute pas qu’elle ne vous fût très-utile pour la conduite de votre maison, et pour le soulagement de madame sa mère ; mais j’ai loué Dieu des bonnes dispositions qu’il lui a inspirées à la fin de sa vie ; elles vous rendront sa mort précieuse, par le souvenir de sa foi, de sa résignation, de son courage. […] Je leur écris cette lettre aussi bien qu’à vous, et j’espère qu’ils se souviendront de moi dans vos prières.