C’était un jeune soldat qui, inutilement rappelé par ses camarades, s’élançait hors des rangs. […] Il se rappelle avec horreur ce qu’il vient de voir, d’entendre, de faire. […] Il rentre dans son palais, morne et pensif ; il fait enlever de ses appartements tout ce qui pouvait lui rappeler le souvenir de son fils ; le nom de Léon ne sort plus de sa bouche ; il ne soutire pas qu’en sa présence se fasse la plus légère allusion à son fils ; il semble que Léon n’existe plus, ou plutôt qu’il n’a jamais existé.
La troisième espèce est par le souvenir ; lorsqu’à la vue d’un objet on éprouve quelque affection marquée : comme dans les Cypriens de Dicéogène, où le héros, voyant un tableau, laisse échapper des larmes ; et, dans l’apologue d’Alcinoüs, Ulysse entend le joueur de cithare : il se rappelle un souvenir, et pleure ; ce qui le fait reconnaître.
Cette expression en rappelle une plus naturelle encore et plus touchante.
On a dû faire du style ce qu’on a fait de l’architecture : on a entièrement abandonné l’ordre gothique, que la barbarie avait introduit pour les palais et pour les temples : on a rappelé le dorique, l’ionique et le corinthien : ce qu’on ne voyait plus que dans les ruines de l’ancienne Rome et de la vieille Grèce, devenu moderne, éclate dans nos portiques et dans nos péristyles. […] Fragments du discours à l’Académie Rappelez en votre mémoire (la comparaison ne vous sera pas injurieuse), rappelez ce grand et premier concile où les Pères qui le composaient étaient remarquables chacun par quelques membres mutilés ou par les cicatrices qui leur étaient restées des fureurs de la persécution : ils semblaient tenir de leurs plaies le droit de s’asseoir dans cette assemblée générale de toute l’Église : il n’ y avait aucun de vos illustres prédécesseurs qu’on ne s’empressât de voir, qu’on ne montrât dans les places, qu’on ne désignât par quelque ouvrage fameux qui lui avait fait un grand nom, et qui lui donnait rang dans cette académie naissante qu’ils avaient comme fondée : tels étaient ces grands artisans de la parole, ces premiers maîtres de l’éloquence française ; tels vous êtes, Messieurs, qui ne cédez ni en savoir ni en mérite à nul de ceux qui vous ont précédés. […] Cet autre54 vient après un homme loué, applaudi, admiré, dont les vers volent en tous lieux et passent en proverbe ; qui prime, qui règne sur la scène ; qui s’est emparé de tout le théâtre : il ne l’en dépossède pas ; il est vrai ; mais il s’y établit avec lui : le monde s’accoutume à en voir faire la comparaison : quelques-uns ne souffrent pas que Corneille, le grand Corneille, lui soit préféré ; quelques autres, qu’il lui soit égalé : ils en appellent à l’autre siècle, ils attendent la fin de quelques vieillards qui, touchés indifféremment de tout ce qui rappelle leurs premières années, n’aiment peut-être dans Œdipe que le souvenir de leur jeunesse.
C’était alors que le barreau devenait une arène intéressante par le contraste des deux athlètes, l’un plus vigoureux et plus ferme, l’autre plus souple et plus adroit ; Cochin, avec un air austère et imposant, qui lui donnait quelque ressemblance avec Démosthènes ; Le Normand, avec un air noble, intéressant, qui rappelait la dignité de Cicéron.