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26. (1873) Principes de rhétorique française

Tout comme l’orateur, l’écrivain doit tenir compte : 1° de sa situation ; 2° du sujet qu’il traite ; 3° du lecteur auquel il s’adresse.. […] Dès les premiers mots, celui qui écrit ou qui parle doit s’emparer de l’esprit de son lecteur ou de son auditeur. […] L’intérêt du lecteur et de l’auditeur sera la conséquence de l’intérêt que le narrateur prend lui-même aux faits qu’il raconte. […] Elle a pour objet de frapper un dernier coup, d’agir une dernière fois sur l’esprit et l’imagination du lecteur ou des auditeurs. […] C’est ce rapport qui fait l’unité de l’œuvre et qui laisse le lecteur ou l’auditeur dans un état de pleine satisfaction d’esprit.

27. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Seconde partie. Moyens de former le style. — Chapitre II. De l’exercice du style ou de la composition » pp. 225-318

Comme l’intérêt ne peut pas aller du plus au moins sans dégoûter le lecteur, il faut faire en sorte qu’il se soutienne, et même, s’il se peut, qu’il suive une gradation ascendante. […] C’est ainsi que Virgile ne décrit la tempête qui jette sur les côtes d’Afrique les Troyens bientôt arrivés en Italie, que pour intéresser le lecteur au sort d’Énée en faisant ressortir son courage. […] L’ennui, la fatigue et même le dégoût ne tarderaient pas à s’emparer du lecteur, si on ne lui présentait pas un tout complet, un événement avec les circonstances qui l’ont précédé, accompagné ou suivi. […] Le grand art consiste donc à faire naître et à augmenter sans cesse dans l’esprit du lecteur le désir de connaître le dénoûment. […] Elle doit être simple, afin de disposer le lecteur à la bienveillance, et de permettre à l’auteur de s’élever à mesure qu’il avance, pour rendre l’intérêt de plus en plus vif.

28. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre XI. Grands poèmes. »

Ce serait là, pour un traité en prose, un désordre considérable ; dans un poème, ce n’est rien du tout, parce que cette légère interversion entre les trois genres est réparée immédiatement par le lecteur. […] Il n’avait pas non plus cette partie du talent poétique qui s’adresse au cœur du lecteur. […] On appelle ainsi dans l’épopée, comme dans le poème didactique, de petites actions subordonnées à l’action principale, pour délasser le lecteur par une variété étrangère à celle du sujet même : telle est, dans l’Énéide, l’aventure de Cacus, racontée par Évandre, et celle de Nisus et d’Euryale. […] En général, tout ouvrage où l’on voit l’action d’un particulier intéresse, plus que si on y voit l’action d’un peuple entier, parce que le lecteur, qui est particulier, rapporte tout à lui-même. […] Les caractères doivent se peindre le plus souvent par les actes ; c’est la manière à la fois la plus poétique et la plus frappante pour le lecteur.

29. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre IX. de la disposition. — proportions, digressions, transitions, variété  » pp. 118-130

Souvent le lecteur trouve long et par conséquent fastidieux ce qui dans le fait n’est que disproportionné37. […] Observez seulement qu’elle soit rare et rapide, qu’elle ne vienne point divertir trop souvent le lecteur, ni, en luttant d’importance avec l’idée principale, diviser l’intérêt qui doit être un, c’est la règle suprême. […] Elles frappent l’esprit du lecteur, elles le font penser et se fixent dans la mémoire par leur brièveté même. […] Ce qui le frappe plus vivement, lui, depuis longtemps familier avec sa matière, ne produira peut-être pas une impression pareille sur les auditeurs ou les lecteurs qui y sont étrangers.

30. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XIV. de la fin  » pp. 189-202

Et il a raison, en effet, de briser là, sans plus de façon ; cette brusquerie originale n’est nullement déplacée, pourvu que l’esprit du lecteur soit réellement satisfait ; qu’il comprenne que la matière est épuisée et que toute addition serait superflue. Sans doute la fin d’un ouvrage, quelque nom qu’on lui donne, épilogue, conclusion, catastrophe, dénoûment, péroraison, est une des parties les plus importantes, qui préoccupe et doit préoccuper dès l’abord et l’auteur et le lecteur ; elle est le but, et les autres ne sont que les moyens. […] Dans les dénoûments semblables, le lecteur demande ce que les rhéteurs appellent l’achèvement, c’est-à-dire les suites de l’événement qui dénoue l’intrigue. […] Passant ensuite aux diverses parties, elle trace les règles du début, montre comment il dépend de l’ensemble, quelles dispositions il doit faire naître dans l’esprit du lecteur ou de l’auditeur ; elle en indique les différentes espèces, les sources, les mérites et les défauts.

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