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22. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Madame de Staël 1766-1817 » pp. 218-221

. — Fort peu, répondit-il ; mais je sais seulement qu’il n’y a point d’homme dans toute la cour d’Espagne aussi pénétré de respect pour le pouvoir. C’est une véritable curiosité que de le voir saluer un ministre ; ses épaules se plient dès qu’il l’aperçoit, avec une promptitude et une activité tout à fait amusantes ; et quand il se relève, il le regarde avec un air si obligeant, si affectueux, je dirais presque si attendri1, que je ne doute pas qu’il n’ait vraiment aimé tous ceux qui ont eu du crédit à la cour d’Espagne depuis trente ans.

23. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VI. des mœurs  » pp. 75-88

Pour ne parler que des femmes, voyez ces femmes toutes viriles de Corneille, que Balzac appelait d’ adorables furies, et dans Racine, ces la Vallière égarées à la cour du roi de Pont et des empereurs de Rome ; parcourez ensuite les femmes idéales et vaporeuses du drame allemand ou anglais ; passez aux romanciers, depuis Richardson, peintre si souvent fidèle, et qu’en dépit de la fastidieuse minutie de ses détails d’intérieur, on a eu tort de condamner à un complet oubli, jusqu’aux belles et chastes figures de Walter Scott, jusqu’aux portraits si chaudement et si spirituellement faux de la plupart des romanciers français de notre âge. […] Calvin le Picard ressemble plus à Jérôme de Prague, et le due de Richelieu à Buckingham, qu’un huguenot farouche et républicain du xvie  siècle au grand seigneur esprit fort et libertin de la cour de Louis XV. […] On a ri de la stupéfaction de ce maître des cérémonies de la cour de France, lorsqu’il vit, au commencement de la révolution, un ministre entrer chez le Roi avec des souliers à cordons ; c’est que cet oubli des convenances était pour lui le présage de la dissolution de la monarchie ; rie qui voudra, mais l’oubli des bienséances littéraires est pour moi le présage de la dissolution de la littérature.

24. (1867) Rhétorique nouvelle « Introduction » pp. 2-33

J’ai déploré l’insuffisance de mes forces et appelé sur moi l’indulgence de la cour et du jury. […] Je fais appel aux sentiments des jurés, je remue leurs entrailles paternelles… plusieurs d’entre eux donnent des marques visibles d’émotion ; le président de la cour me fait des signes répétés de bienveillance : les dames tirent leurs mouchoirs… Le Juge. — Et vous perdez votre cause. […] Vous gagnez l’estime de la cour, l’admiration des dames, la sympathie du public, mais vous perdez votre péroraison, votre pathétique et votre procès.

25. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre XI. Poésies fugitives. »

Ô vous, l’honneur de ce mortel séjour, Ce n’est pas d’hui que ce proverbe court ; On ne l’a fait de mon temps ni du vôtre : Trop bien savez qu’en langage de cour Promettre est un, et tenir est un autre. […] Les petits genres de poésie dont nous venons de parler sont pour la plupart passés de mode ; ils ont été trop souvent le langage du bel esprit prétentieux, de la galanterie raffinée ; c’était la poésie des ruelles ; l’hôtel de Rambouillet se pâmait à la lecture d’une ballade, d’un rondeau, d’un madrigal : la cour et la ville se partageaient en deux camps, à propos des fades sonnets de Job et d’Uranie, par Benserade et par Voiture.

26. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre IX. Poésies fugitives. »

Ainsi fuit la gloire du monde, Et rien que Dieu n’est permanent ; et Maynard, n’ayant rien obtenu de la cour ou de Richelieu qu’il avait longtemps et vainement importuné de ses demandes, fit graver sur la porte de son cabinet, dans sa retraite d’Aurillac, ces vers philosophiques, imités de Martial : Las d’espérer et de me plaindre Des muses, des grands et du sort, C’est ici que j’attends la mort Sans la désirer ni la craindre. […]     Les curieux, pour me connaître,     Avec grand soin me font la cour. […] Mais qu’une cour tous les jours environne     Un faquin qui, sur un brancard,     Foule les coussins de brocart     Aux dépens du tiers et du quart,         C’est là ce qui m’étonne.

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