Je ne méprise point les règles, il s’en faut ; jamais je n’accorderai tout au naturel, quelque bon qu’il soit ; mais tout en donnant beaucoup à l’art je donne plus encore au talent : car, on ne peut le nier, le talent a existé avant l’art, les modèles existèrent avant les préceptes. […] Le talent est donc créateur, et l’art n’est qu’imitateur : sans le talent, l’art n’aurait pu exister. […] Si vous l’imitez, vous suivrez un maître, vous apprendrez l’art, et vous ne vous fierez plus à votre talent. […] Personne n’avait appris à Lafontaine l’art de produire des chefs-d’œuvre en faisant parler des bêtes. […] On comprend que par le mot art j’entends la réunion des préceptes qui forment le code du rhéteur.
Il suit de là qu’on peut définir la poésie humaine, la création dans les arts. […] Mais la poésie, comme l’art, a un double but : outre l’imitation de la nature, elle aspire à l’idéal. […] À ce point de vue, la poésie n’est plus un art particulier, mais l’art suprême et unique qui comprend tous les autres, et les absorbe dans sa sublime généralité. Michel-Ange avait donc raison de dire que la poésie est le plus beau des arts : l’art, en effet, n’existe point, si la poésie ne le couronne de son auréole. […] La poésie de chacun de ces arts rejaillit ainsi sur les autres, et en relève le goût et la beauté.
(Boileau, Art p. […] (Boileau, Art p. […] (Boileau, Art. p. […] Trop resserré par l’art, sort des règles prescrites, Et de l’art même apprend à franchir leurs limites. (Boileau, Art p.
Elle n’est ennemie ni des sciences ni des arts ; au contraire, elle les aide de ses lumières ; elle grandit en tout l’horizon de l’esprit humain. […] Tout art, toute science a des principes, des règles dont on ne peut s’écarter impunément ; sans cela, le bon goût ne serait plus qu’un mot vide de sens. […] Comment analyser Corneille, Racine, Molière, si l’on ne connaît pas les règles principales de l’art dramatique ; Bossuet, si l’on ne sait ce que c’est que l’éloquence ; J. […] La plupart des traités sur l’art d’écrire sont des rhétoriques où l’on enseigne fort au long la manière de composer un discours. […] Nous avons voulu, dans la première partie, généraliser l’enseignement de l’art d’écrire.
Cet art, nous le possédons, nous en savons tous les secrets. […] Détachons nos yeux de la nature et voyons les arts. […] L’art, en effet, y apparaît trop. […] Tout l’art d’émouvoir consiste à être ému. […] Heureusement l’art peut sinon transformer la voix, au moins la corriger.
La Poétique ou l’Art poétique est un traité de l’art de la poésie. […] Dans tous les arts, les modèles ont devancé les préceptes. […] La dénomination pompeuse d’Art poétique, qui lui fut donnée plus tard par Quintilien, a été ratifiée par l’usage. […] Son Art poétique est divisé en trois chants. […] Enfin, Boileau-Despréaux, né à Paris, en 1636, et mort dans la même ville en 1711, a fait un Art poétique en quatre chants.
rhetorica, de ῥητωρική, s. ent. τέχνη) est l’art de l’orateur (ῥητωρ). […] L’art du style, dans la narration historique, ne doit jamais nuire à la vérité. […] C’est la langue poétique, et l’art qui en varie la structure cl la soumet à un rythme cadencé s’appelle art des vers, ou versification. […] Ce code s’appelle l’art poétique. […] Les décors et l’art du machiniste y jouent le plus grand rôle.
Rousseau est excessif dans l’art comme dans tout le reste. […] Le comble de l’art pour une pièce de théâtre serait de vous persuader que vous êtes en présence de la réalité. […] Si celle de l’art dramatique était seulement d’exciter au plus haut degré la pitié et la terreur, l’art serait le rival impuissant de la nature. […] Tout au contraire, c’en est fait de l’art dès que la sensibilité est trop excitée. […] La même révolution s’est opérée dans les arts à la même époque.
Ensuite Socrate montre que la rhétorique, c’est-à-dire l’art de ces orateurs-là, n’est pas un art véritable. Il appelle l’art une discipline réglée qui apprend aux hommes à faire quelque chose qui soit utile à les rendre meilleurs qu’ils ne sont ; par là il montre qu’il n’appelle art que les arts libéraux, et que ces arts dégénèrent toutes les fois qu’on les rapporte à une autre fin qu’à tonner les hommes à la vertu. […] Ce sont des choses simples : la nature se montre partout ; partout l'art se cache soigneusement. […] Si vous employez l’art, cachez-le si bien par L’imitation, qu’on le prenne pour la nature même. […] C’est par cet art que Virgile s’est élevé quelquefois dans l’églogue.
Il faut beaucoup d’art pour donner au style cet air naturel. […] Dans tous les arts il est toujours important d’avoir une idée juste de la perfection de cet art, du but qu’il se propose d’atteindre, et des progrès qu’il a faits parmi les hommes. […] C’est surtout sous ce point de vue qu’elle est devenue l’objet de l’art, et, sous ce rapport, elle peut être définie l’art de la persuasion. […] Le premier principe de l’art est de respecter les bienséances. […] Surtout étudiez l’art d’intéresser votre auditoire.
De l’art oratoire ou rhétorique. — Des diverses parties de la rhétorique. […] De l’art oratoire. […] Ceux-là connaissent, l’art oratoire, et l’ont usage de la Rhétorique. […] Cette division est commune à tous les arts, et elle est éternelle. […] V. plus haut page 14, Art poétique et poésie.
C’est pour cela que dans l’éducation même des jeunes personnes on introduit de nos jours, outre les arts, des notions élémentaires de diverses sciences. […] C’est surtout dans la poésie et dans les arts que l’imagination peut déployer ses richesses. […] Dans les arts, un beau talent suppose toujours une vive imagination. […] Tout art a des secrets, tout art a une méthode ; l’élève ne peut pas tout deviner ; il faut l’aider par de bons principes. L’art du maître consiste à faire marcher simultanément la pratique et les règles.
Hésiode décrivit en vers les travaux de la campagne, et donna des préceptes sur le premier et le plus utile des arts. […] Le goût de cet art merveilleux s’empara de tous les esprits ; et les plus illustres citoyens de la république s’y distinguèrent. […] Les arts s’y réfugièrent, et y jetèrent par intervalles quelques faibles lueurs. […] Mais le Dante et Pétrarque furent les premiers poètes, qui, en illustrant l’Italie, annoncèrent la renaissance des arts. […] L’Italie fut l’heureuse contrée, où les lettres et les arts fleurirent avec le plus d’éclat.
Ces maîtres de la parole ont montré qu’ils excellaient dans l’art de remuer les passions, comme dans tous les autres arts où s’est exercé leur merveilleux génie. […] » On admire l’art des poëtes qui ont su rendre avec cette vérité les cris de la nature ; mais on n’admire pas moins la sagesse des législateurs athéniens qui interdirent à cet art dangereux l’accès des tribunaux. […] L’art militaire ? […] Tout votre art prétendu n’est que charlatanisme et fourberie. […] Jamais l’art n’a été porté plus loin.
Hommes faits, la philosophie, les sciences, les arts utiles et pratiques rempliront votre vie. […] Vivre pour l’art, c’est renaître, c’est se renouveler comme la nature, qui, sans cesse, renouvelle ses aspects. […] Mais ce don, sans le travail qui le transforme et en fait un art, languit et demeure stérile. […] Que le commerce, l’industrie, la finance, les arts, n’aient pas de secrets pour vous. […] Lisez et relisez sans cesse nos classiques, ces maîtres immortels dans l’art de bien dire, mais ne méprisez pas les contemporains.
Tant qu’il y eut peu de relations entre les humains, tant que la force et la violence décidèrent seules dans les discussions, il est tout simple que l’art qui concilie les esprits par le raisonnement et la persuasion, fût un art à peu près inconnu. […] Il faut arriver à l’origine des républiques de la Grèce, pour rencontrer des traces sensibles de l’éloquence, devenue l’art de persuader. […] Ces grands exemples ne pouvaient qu’ajouter à l’ardeur naturelle des Athéniens pour l’éloquence ; elle devint alors un art qui eut ses règles et ses professeurs. […] Socrate se prononça contre eux, fit sentir l’absurdité de leur dialectique et le vide de leur prétendue éloquence, et tâcha de rappeler ses concitoyens à des idées plus justes sur l’art de raisonner. […] Il professa la rhétorique avec succès, et eut l’art de concilier deux choses, devenues presque inconciliables depuis, la fortune et la réputation.
La critique est l’application du bon sens et du goût à tous les arts. Dans les belles-lettres, la critique n’est autre chose que l’art de juger un ouvrage d’esprit, pour en connaître les beautés et en signaler les défauts. […] C’est l’art d’exprimer sa pensée d’après ces règles générales que l’on appelle style. […] On devra d’abord poser les règles générales de l’art d’écrire ou du style, règles qui, nous venons de le dire, s’appliquent à tous les genres de compositions. […] Enfin, on s’occupera des principes de la rhétorique ou de l’art de bien dire.
On ne peut avoir aucune connaissance précise de l’époque où les arts furent inventés. […] On sent que les premières ébauches de ces arts durent être bien informes et bien grossières. Mais les arts ne furent pas moins inventés. […] Qui, par l’art imité, ne puisse plaire aux yeux4. […] Boileau, Art Poét., Chap.
» Admirateur des Grecs, il opéra une renaissance de l’art français. […] Je lui montrerai l’art, ignoré du vulgaire, De séparer aux yeux, en suivant leur lien, Tous ces métaux unis dont j’ai formé le mien. […] Vauvenargues disait : « Il ne faut pas croire que le caractère original doive exclure l’art d’imiter. […] C’est l’art de la greffe, mais il faut savoir le pratiquer. […] C’est toute la pensée des strophes suivantes ; mais avec quel art le poëte saura varier ce motif !
L’art de composer un ouvrage, d’en assortir si bien les diverses parties qu’il forme un tout indivisible, manquait à ce poète. […] Il doit donc être naturel, c’est-à-dire paraître sans art, sans apprêt, et comme né de l’action. […] C’est là, plus que partout ailleurs, que le poète est obligé de faire de-son art le plus noble et le plus digne usage. […] C’est en vain que les auteurs de traités et de poétiques ont cherché à déterminer et à faire connaître l’art du poète dans les choses ; puis son art dans la narration, puis son art dans son style et dans ses vers 139. Sans doute, il y a beaucoup d’art dans tout cela, mais de cet art que le poète garde pour lui, et dont il ne peut donner le secret à personne, pas plus qu’on ne peut le lui ravir.
(De Art. […] qui pourrait contester l’utilité des règles de l’art ? […] (Art Poét. […] (Art. […] C’est le plus grand précepte de la rhétorique. » (Art.
Cette imitation est même devenue un de leurs arts. […] Pour elles, la rhétorique n’est pas tant un art pratique qu’une science spéculative. […] C’est à la nature que nous devons la première ; la culture et l’art produisent la seconde. […] Dans tous les exemples qu’il rapporte, la variété est tellement unie à la beauté, qu’il semble n’être pas tombé dans une grande erreur lorsqu’il dit que l’art de produire de belles formes est l’art de les varier heureusement. […] L’art d’écrire, en général, et la poésie surtout, ne peuvent pas être considérés comme des arts imitatifs.
En quoi consiste l’art de peindre ? […] Ut pictura poesis, a dit Horace (Art poét. […] Horace lui-même, dans son Art poét. […] Chez elle un beau désordre est un effet de l’art, a dit en effet Boileau, IIe chant de l’Art poétique. […] C’est la traduction de cette remarque d’Horace dans son Art poét.
Remarquons toutefois qu’il y a une grande différence entre l’art de peindre à l’imagination et l’art de peindre au cœur. […] Ici l’art et l’imitation sont sans effet. […] Les modernes nous offrent plus d’art, plus d’exactitude, mais bien plus de faiblesse. […] Il possède l’art d’ennoblir et de rendre agréables les détails les plus ordinaires de la vie champêtre. […] Son action est conduite avec un art admirable ; il s’élève par une gradation soutenue.
Nous allons voir ce que l’art a fait pour diriger vers un but vraiment utile, un plan si positivement indiqué par la nature elle-même. […] On sent tout ce qu’un pareil sujet présentait. d’obstacles à l’orateur, et tout ce qu’il fallait d’art pour les surmonter avec le succès qui couronna le discours de Cicéron. […] Mais en remplissant cette tâche délicate, l’orateur ne doit pas oublier que le point essentiel, que le comble de l’art est ici de faire disparaître entièrement l’art. […] Aucun orateur n’a porté ce grand art plus loin que Cicéron ; et il n’y a presque pas une de ses narrations oratoires qui ne soit un modèle à citer. […] Toute cette partie de l’art oratoire appartient au raisonnement ; et c’est là que l’avocat doit se montrer logicien aussi profond qu’orateur habile.
Nous pouvons citer en ce genre les Géorgiques, de Virgile, l’Art poétique d’Horace, celui de Boileau, etc. […] L’art de lier les épisodes à son sujet est, pour le poète didactique, un objet de grande importance. […] Il possède l’art d’embellir les plus petits détails. […] Quel est, d’après Delille, le grand art d’intéresser dans le genre descriptif ? N’allez pas, dit Delille, Toujours peindre et toujours décrire : Dans l’art d’intéresser consiste l’art d’écrire.
La rhétorique, comme art, en suppose deux autres : l’art de penser, qui est la logique, et l’art de parler correctement, qui est la grammaire. […] — Qu’est-ce qu’un Art ? — Comme art, quels autres arts suppose la Rhétorique ? […] — Sans le talent naturel l’art est-il utile ? […] Ici l’art est nécessaire et peut se montrer.
Boileau, Art poét. […] C’est ici que tout le talent du poète est nécessaire pour triompher de la plus grande difficulté de l’art dramatique. […] Là, tout est fait pour émouvoir, étonner, enchanter le spectateur, pour ravir à la fois les sens et l’imagination par la réunion de tous les arts. […] Elle résulte, soit d’une habile combinaison dans le plan, soit d’une situation amenée avec art et naturel, soit de la peinture vigoureuse des caractères. […] Art poét.
À mesure qu’ils étendirent leurs conquêtes, ils ne surent que piller les monuments des arts, sans jamais savoir les imiter. Il fallut que les vaincus prissent le soin de polir et de former leurs vainqueurs ; et les Romains durent tous les arts du génie à ces mêmes Grecs, dont ils furent en tous les disciples, les admirateurs et les tyrans. […] Quoique généralement trop diffus, il sait se varier avec art, et toujours d’une manière convenable à son sujet. […] L’art est trop sensible dans la plupart de ses discours : il y est même poussé quelquefois jusques à l’ostentation. […] L’art y est merveilleux, mais on l’entrevoit.
C’est bien moins encore à lui à donner des leçons à ceux qui gouvernent : il y a un peu trop loin de la science qui étudie les hommes, du talent même qui les connaît, au grand art qui les gouverne ; et Thomas lui-même l’avait dit : « Le philosophe, par sa vie obscure, doit mieux juger les choses que les hommes ». […] Rien de plus facile que d’en imposer au plus grand nombre, par cet appareil d’érudition ; et, pour nous borner ici à l’exemple de Thomas, qui ne serait tenté de le prendre, en lisant l’éloge de Maurice, pour un militaire consommé dans l’étude et la connaissance de son art ? […] Aussi vous dira-t-il, que « Cent mille hommes opposés à cent mille hommes forment des masses redoutables qui s’étudient, s’observent, combinent avec une sage lenteur tous leurs mouvements, et balancent avec un art terrible et profond la destinée des états ». […] Veut-on savoir comment le maréchal de Saxe se formait au grand art de la guerre ? Rien de plus aisé à comprendre : « Il étudiait l’art qui enseigne les propriétés du mouvement, qui mesure les temps et les espaces, qui calcule les vitesses et commande aux éléments dont il s’assujétit les forces ; l’art de faire mouvoir tous ces vastes corps, d’établir un concert et une harmonie de mouvement entre cent mille bras, de combiner tous les efforts qui doivent concourir ensemble, de calculer l’activité des forces et le temps de l’exécution. — Maurice écartait les barrières du préjugé pour reculer les limites de son art : après avoir trouvé le bien, il cherchait le mieux. — Il s’élançait au-delà du cercle étroit des événements, et créait des combinaisons nouvelles ; imaginait des dangers pour trouver des ressources ; étudiait surtout la science de fixer la valeur variable et incertaine du soldat, et lui donner le plus grand degré d’activité possible ».
En admirant le philosophe, que Boileau surnomma le contemplateur, on aime le comédien qui mourut victime de son art et de sa bienfaisance. […] Elle nous fera voir qu’Aristote a consacré des veilles au théâtre et s’est donné le soin de réduire en préceptes l’art de faire des comédies. […] il n’y a chose si innocente où les hommes ne puissent porter du crime, point d’art si salutaire dont ils ne soient capables de renverser les intentions, rien de si bon en soi qu’ils ne puissent tourner à de mauvais usages. La médecine est un art profitable, et chacun la révère comme une des plus excellentes choses que nous ayons ; et cependant il y a eu des temps où elle s’est rendue odieuse, et souvent on en a fait un art d’empoisonner les hommes. […] Je dis bien que le grand art est de plaire, et que, cette comédie ayant plu à ceux pour qui elle est faite, je trouve que c’est assez pour elle et qu’elle doit peu se soucier du reste.
Telles sont les différences des arts quant aux moyens avec lesquels ils imitent. […] De l’art d’embellir les caractères. […] Les détails sur cette partie sont encore de l’art métrique. […] Outre cela, il n’en est pas de la poésie comme de la politique ou des autres arts qui n’imitent point. […] Or l’épopée est à l’art chargé-de la tragédie ce que les anciens acteurs sont aux nouveaux.
(Boileau, Art poétique, 1. 175.) […] (Boileau, Art poétique, I, 153.) […] Art poétique, I.) […] Je vous l’ai déjà dit : tout l’art des bons orateurs ne consiste qu’à observer ce que la nature fait quand elle n’est point retenue. […] Si vous employez l’art, cachez-le si bien par l’imitation, qu’on le prenne pour la nature même.
Vous appelez l’art une religion ; soit. […] Des autels, des fleurs, de l’encens pour l’art, mais qu’on n’aille pas le cacher par delà les nuages, au-dessus de tout contrôle humain, en dehors de toute société humaine. […] Cousin, l’art pour l’art, mais pourvu que l’art lui-même soit bien compris, pourvu que l’on sache bien que, sous peine de mentir à sa nature, il doit offrir, comme conséquence de ses œuvres, la vérité, la moralité, la beauté. En vain nous crie-t-on que « l’on ne sait pas en quoi sont faites les limites de l’art ; que de géographie précise du monde intellectuel, on n’en connaît pas ; qu’on n’a pas encore vu les cartes routières de l’art avec les frontières du possible et de l’impossible tracées en rouge et en bleu ; qu’enfin on a fait cela parce qu’on a fait cela. » Sophismes ! l’art a ses limites.
Comme don, elle renferme la faculté d’être ému, qui vient de la nature ; comme art, c’est la faculté de communiquer aux autres l’émotion par le moyen de la parole. […] Ceux qui ont défini l’éloquence l’art de persuader, n’en ont donné qu’une idée incomplète et inexacte ; car, comme nous venons de le dire, l’art ne fait pas toute l’éloquence ; elle suppose toujours l’émotion éprouvée et transmise aux autres ; de plus, elle n’a pas toujours pour effet la persuasion : le poète, l’écrivain, l’orateur, peuvent être éloquents sans persuader, et persuader sans être éloquents. […] Aussi l’éloquence sacrée n’est-elle pas un art ordinaire ; elle n’a pas besoin de ces ménagements, de ces artifices dont fait usage l’éloquence profane, et qui montrent qu’elle se défie de ses forces. […] Il peut, il doit même mettre de l’art dans son discours, bien ordonner ses preuves, les développer avec vigueur, argumenter avec l’élan de la conviction ; enfin, dans certains cas où le sentiment n’est pas déplacé, il peut avoir recours aux mouvements pathétiques et faire partager à l’auditoire la passion qui l’anime. […] On peut y déployer un art pompeux, des images éclatantes et hardies, une harmonie périodique et soutenue.
Mais là, comme ailleurs, y a-t-il réellement un art des transitions ? […] Telle est, semble-t-il, la doctrine de Boileau et de M. de la Harpe, quand ce dernier dit à propos de la Bruyère et de la Rochefoucauld : « En écrivant par petits articles détachés, et faisant ainsi un livre d’un recueil de pensées isolées, ils s’épargnèrent, comme l’observait Boileau, le travail des transitions, qui est un art pour les bons écrivains, et un écueil pour les autres. » Je n’en disconviens pas ; mais cet art, et c’est là précisément ce qui le rend si difficile, ne me parait autre chose que la fusion même des pensées diverses. […] Si vous l’aimez, si vous le réclamez dans l’art, soyez du moins conséquents, et reprenez-le dans la vie réelle ; s’il vous faut toujours Quasimodo pour faire ressortir Esmeralda, rétablissez la cour des Miracles au cœur de Paris, et donnez à vos officiers des gardes des hauts-de-chausse mi-partis rouge et bleu. […] On peint avec art leurs commencements, leurs progrès, leur force et leur étendue. […] C’est alors seulement, c’est après cette préparation oratoire, œuvre de génie plus encore que d’art, qu’éclate tout l’effet de cet appel auquel doit répondre un silence de mort : Paraissez maintenant, justes, où êtes-vous !
Le nez dans sa longueur dessinant le visage, Par une ligne adroite, avec art le partage : Tandis que, déployant son contour gracieux, La joue au teint vermeil s’arrondit à nos yeux. […] L’imitation entre dans tous les arts de l’esprit. […] Il n’est point de serpent, ni de monstre odieux, Qui, par l’art imité, ne puisse plaire aux yeux. […] Les critiques ont regardé constamment le discours comme le premier ou le principal des arts d’imitation, et c’est avec raison qu’ils lui donnent, à certains égards, la préférence, lorsqu’ils le comparent à la peinture et à la sculpture. […] Cependant quand le poète ou l’historien introduisent dans leurs ouvrages un personnage qui parle réellement ; quand, par les discours qu’ils lui prêtent, ils lui font dire ce qu’il est supposé avoir dit en effet, l’art de l’écrivain peut être plus strictement regardé comme imitation, et c’est le cas où se trouve l’art dramatique ; mais cette dénomination rigoureuse ne peut convenir ni aux narrations, ni aux descriptions10.
En admirant le philosophe, que Boileau surnomma le contemplateur, on aime le comédien qui mourut victime de son art et de sa bienfaisance. […] Souffre que dans leurs arts s’avançant chaque jour, Par leurs ouvrages seuls ils te fassent leur cour2. […] Et de l’art même apprend à franchir ses limites. […] Je ne suis point de ceux-là qui étudient les moindres actions de leur vie, et apportent de l’art à tout ce qu’ils font et à tout ce qu’ils ne font pas. […] C’était le secret de son génie, il l’a pour jamais emporté dans la tombe. » De l’Art et du Beau. — Garnier, p. 280.)
L’éloquence est l’art de persuader, et la rhétorique est la théorie de cet art. […] Voilà ce que fait la nature pour l’orateur, voilà les grands traits qui caractérisent son ouvrage ; et il est clair que celui qu’elle a si heureusement disposé, trouvera plus de ressources et de moyens qu’un autre dans les préceptes de l’art : mais il lui sera toujours indispensable de les connaître ; et plus il les approfondira, plus il les rapprochera des grands modèles, plus il se convaincra que ce qu’on appelle un art, n’est autre chose que le résultat de la raison et de l’expérience mis en pratique, et que son but est d’épargner, à ceux qui nous suivront, tout le chemin qu’ont fait ceux qui nous ont précédés. […] Il n’y a donc que des charlatans en littérature, et des hérésiarques en matière de goût, qui puissent faire croire à la multitude ignorante que, soit en parlant, soit en écrivant, on a plus de force à proportion qu’on a moins d’art. « La vérité, dit Quintilien, est que l’art ôte en effet quelque chose à la composition ; mais comme la lime au fer qu’elle polit, comme la pierre au ciseau qu’elle aiguise, comme le temps au vin qu’il mûrit ». Quintilien se demande ensuite si l’art fait plus pour l’éloquence que la nature ; et il résout la question par une comparaison aussi ingénieuse que décisive. […] Tantôt, l’orateur ne cherche pas uniquement à plaire, il s’efforce d’instruire et de convaincre ; il emploie tout son art, il rassemble toutes ses forces pour détruire les préventions qui peuvent s’élever contre lui ou contre sa cause, pour réunir ses preuves et les disposer de la manière la plus favorable à sa défense.
Dans son premier volume (quoique chaque volume soit indépendant et forme un tout complet), intitulé le Style, l’auteur expose les principes généraux de l’art d’écrire, principes qui sont communs à tous les genres de compositions littéraires. […] Le volume suivant, la Poétique, qui donne les règles du premier des arts agréables, est pour la Seconde. Et le dernier volume, la Rhétorique, qui offre les préceptes de l’art de bien dire, est approprié pour la classe de ce nom. […] Il renferme, en substance, tous les préceptes légués par les anciens, et reproduits par les modernes, sur l’art d’écrire, sur la poésie et sur l’éloquence. […] Je suis ravi que vous ayez combattu la théorie funeste de l’art pour l’art, en traçant avec fermeté le but moral du poète et de l’orateur, aussi bien qu’en donnant l’idée la plus pure et la plus haute de la noble mission de l’écrivain.
Que dirai-je de l’art qui consiste à émouvoir la compassion ? […] Ne louez pas, si vous ignorez l’art très difficile de louer. […] Cet exorde brusque et sans art décèle un grand art dans le poète ; il a voulu peindre le caractère d’Ajax, héros sans doute moins instruit dans l’art de parler qu’habile à manier les armes. […] Mais l’art n’est jamais plus parfait que lorsqu’il est dissimulé. […] C’est par cet art que Virgile s’est élevé quelquefois dans l’églogue.
Plein d’onction et de sentiment, il excelle dans l’art de toucher et de persuader. […] Mais l’art y paraît trop à découvert : tout ce que l’éloquence a de plus brillant, y est étalé avec trop de pompe. […] C’est ce qu’on appelle, en termes de l’art, lieux oratoires extérieurs. […] L’Orateur peut employer les ressources de l’art pour l’embellir. […] Une heureuse facilité règne dans ses discours : l’art et le travail ne s’y font point sentir.
Puisque l’importance des belles-lettres est proclamée d’une voix unanime, quelle serait la position d’un jeune homme, dans la bonne société, s’il n’était pas initié à la connaissance des principes littéraires, s’il ignorait les règles relatives aux éléments, aux qualités, aux ornements du style, ainsi que les moyens de se former à l’art d’écrire, et s’il ne possédait pas des notions exactes sur la poésie et sur l’éloquence ? […] Réservant pour la Rhétorique les préceptes de l’art de bien dire, et pour la Poétique les règles du premier des arts agréables, nous exposerons, dans ce volume, les principes généraux de l’art d’écrire, principes qui sont communs à tous les genres de productions littéraires. […] Comme notre Poétique, tout en complétant le cours, peut être facilement séparée des deux autres volumes, on aura dans le Style et dans la Rhétorique tous les principes de l’art d’écrire et toutes les règles de l’éloquence. […] Là, nous étudions surtout les pensées, les mots, la phrase, comme étant les fondements indispensables de l’art d’écrire.
C’est ce jugement pur et fin, composé de connaissances et de réflexions, que possèdera d’abord la critique ; il a pour fondement l’étude des anciens, qui sont les maîtres éternels de l’art d’écrire, non pas comme anciens, mais comme grands hommes. […] Donc les arts sont jugés par de prétendus connaisseurs qui ne peuvent les pratiquer. Il en est ainsi souvent de l’art d’écrire ; et nulle part l’abus n’est plus ridicule et plus nuisible. […] Fléchier imitait l’art savant des rhéteurs antiques. […] On ne saurait être plus courtois, plus juste et plus sévère dans l’art de dire toutes les vérités, celles qui flattent et celles qui inquiètent l’amour propre.
• De l’état des arts sous le règne de Louis XIV. […] Les Grecs ont été les précepteurs de l’art, non seulement pour les modernes, mais pour les Latins même. […] Pour atteindre à l’éloquence, il faut avoir un naturel sensible, prompt à s‘émouvoir, et l’art de faire partager son émotion. […] En un mot, l’art est incomparablement au-dessus de la nature. […] dira-t-on, la critique, en matière d’art, serait l’ennemie du sentiment !
Boileau, Art. […] Art Poét. […] Art Poét., Ch. […] Art. […] Art Poét.
L’éloquence, dans la tribu, n’est que l’expression vraie d’un sentiment ; l’éloquence, dans la cité, est un art difficile, mais c’est le plus noble, le plus utile et le plus apprécié de tous les arts. […] Mais l’orateur, qui les connaît, sait l’art de les calmer. […] Aussi l’éloquence n’est-elle, à vrai dire, que l’art de persuader en remuant les passions : art méprisable, si les passions auxquelles il s’adresse sont viles ; art sublime, si elles sont nobles. […] Elle a un art à elle de reprendre sans offenser, et de flatter sans corrompre ; art naturel, qui ne s’apprend pas dans les écoles, et dont toute la formule peut se résumer en un mot : Pour convaincre, soyez convaincu. […] Mais où il excelle surtout, c’est dans l’art de glisser le blâme sous l’éloge.