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2. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Buffon, 1707-1788 » pp. 282-302

(Époques de la nature.) […] Son génie fut égal à la majesté de la nature. […] Voilà la nature qui se montre à vous, vous n’avez qu’à la suivre. Si vous employez l’art, cachez-le si bien par l’imitation, qu’on le prenne pour la nature même. […] Cette page justifie par son air grandiose ce mot appliqué à Buffon, comme à Pline : « son génie égale la majesté de la nature ».

3. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre premier. Division générale. »

La poésie se trouve dans la nature entière, dans le monde physique, moral et intellectuel. […] L’imagination est comme le caractère permanent, la physionomie habituelle des natures poétiques. […] Mais la poésie, comme l’art, a un double but : outre l’imitation de la nature, elle aspire à l’idéal. […] Dans la nature, le beau se manifeste à l’homme par une sorte de rayonnement céleste ; et dans les arts, l’homme exprime l’idée qu’il en a conçue dans son double rapport avec Dieu et avec la nature. […] En présence de Dieu et de la nature, son cœur s’épanouit d’admiration, d’enthousiasme ou de reconnaissance.

4. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre premier. de la rhétorique en général  » pp. 13-23

En d’autres termes, qui nous donne les idées et leur expression, la nature ou l’art ? […] Il est d’heureuses natures qui, de bonne heure, sentent, imaginent et formulent vivement : c’est le très-petit nombre. […] L’éclat est le même, seulement il est passager ; car la passion, c’est la nature accidentellement surexcitée. […] La nature, premier et indispensable élément, inégalement distribué entre les divers individus ; l’art, élément secondaire, mais d’une utilité d’autant moins contestable, qu’il peut se modifier d’après les natures différentes. […] « Quel est le peintre, dit Quintilien, qui ait appris à représenter tout ce qui existe dans la nature ?

5. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Origine et principe des beaux-arts »

Mais en quoi consiste cette imitation de la belle nature ? […] Par la belle nature, on entend ces mêmes objets présentés avec toute la perfection dont ils sont susceptibles. […] Voilà une imitation de la nature, c’est-à-dire, une représentation fidèle d’un objet qui existe réellement. […] Voilà une imitation de la belle nature, c’est-à-dire, une représentation fidèle d’un objet aussi parfait que nous pouvons le concevoir. […] Si donc un écrivain nous trace le caractère d’un roi, connu dans l’histoire, ou qui n’a pas existé, mais qui a pu exister ; il imitera la nature.

6. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Notions préliminaires. »

On imite la nature, en représentant fidèlement un objet tel qu’il existe, ou tel qu’il peut vraisemblablement exister. […] Actions, sentiments, images, tout doit être tiré du sein de la belle nature. […] Ainsi le poète qui voudra, par exemple, mettre sous nos yeux un sauvage, nous le représentera non comme un homme civilisé ; ce ne serait point dans la nature ; mais comme un homme parfait d’entre les sauvages, avec leurs mœurs, leurs passions, leurs vertus : ce sera alors dans la nature et dans la belle nature. […] Mais rien n’est hors de la nature : tout en est une copie fidèle. […] C’est ainsi qu’il imite, qu’il exprime la belle nature dans toute sa noblesse, dans toute sa vérité, dans toute sa perfection.

7. (1827) Résumé de rhétorique et d’art oratoire

Ainsi la nature est le type suprême et la source du vrai goût. […] Mais dès que l’utile n’est plus le but de la nature, la variété devient la source du beau. […] La nature sévère des matières qui appartiennent à la chaire demande de la gravité. […] C’est la nature elle-même qui semble nous indiquer cette marche. […] La nature a adapté à chaque émotion ou passion une série d’objets correspondants.

8. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Bernardin de Saint-Pierre. (1737-1814.) » pp. 153-158

Harmonies de la nature, II. […] Votre nature vaine occuperait leur vanité ; vous seriez un objet proportionné à leurs pensées craintives et rampantes. […] Études de la nature (étude Ire). […] Il sait que la nature ne peut plaire longtemps à l’homme, si elle ne l’entretient pas de lui-même. […] C’était une noble réclamation du sentiment religieux contre les doctrines du dix-huitième siècle, qui tendaient à rejeter Dieu de la nature, pour l’exiler ensuite de la société.

9. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Pascal, 1623-1662 » pp. 56-71

Car, enfin, qu’est-ce que l’homme dans la nature ? […] Car ce qui est nature aux animaux, nous l’appelons misère en l’homme, par où nous reconnaissons que la nature étant aujourd’hui pareille à celle des animaux, il est déchu d’une meilleure nature qui lui était propre autrefois. […] L’homme n’est qu’un roseau le plus faible de la nature, mais c’est un roseau pensant. […] Qu’il s’aime, car il a en lui une nature capable de bien ; mais qu’il n’aime pas pour cela les bassesses qui y sont. […] Pascal veut dire que l’instinct et la nature se moquent des règles de convention.

10. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre premier. Du Goût. »

Le paysan le plus stupide trouve un certain plaisir aux contes qu’on lui fait, et n’est pas insensible aux grands effets de la nature, dans le ciel ou sur la terre. […] De toutes les facultés qui ornent la nature de l’homme, le goût est celle, sans contredit, qui est la plus susceptible de perfectionnement. […] Réfléchissons pour nous pénétrer de cette vérité, que les productions du génie ne sont, pour la plupart, que des imitations de la nature, des peintures du caractère, des actions ou des mœurs des hommes. […] Le temps, en effet, détruit les illusions de l’opinion et les bizarreries du caprice ; mais il confirme les décisions de la nature. […] toutes les raisons que nous en pouvons donner sont toujours très imparfaites : la nature semble nous avoir fait de ces premiers principes du sens interne un mystère impénétrable.

11. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Buffon. (1707-1788.) » pp. 146-152

Ce n’est donc que depuis environ trente siècles que la puissance de l’homme s’est réunie à celle de la nature, et s’est étendue sur la plus grande partie de la terre : les trésors de sa fécondité jusqu’alors étaient enfouis, l’homme les a mis au grand jour ; ses autres richesses, encore plus profondément enterrées, n’ont pu se dérober à ses recherches, et sont devenues le prix de ses travaux. Partout, lorsqu’il s’est conduit avec sagesse, il a suivi les leçons de la nature, profité de ses exemples, employé ses moyens, et choisi dans son immensité tous les objets qui pouvaient lui servir ou lui plaire. […] Époques de la nature 2, VIIe et dernière époque. […] Les pierres et les métaux polis par notre art ne sont pas comparables à ce bijou de la nature : elle l’a placé dans l’ordre des oiseaux au dernier degré de l’échelle de grandeur ; son chef-d’œuvre est le petit oiseau-mouche ; elle l’a comblé de tous les dons qu’elle n’a fait que partager aux autres oiseaux : légèreté, rapidité, prestesse, grâce et riche parure, tout appartient à ce petit favori. […] C’est-à-dire que la nature.

12. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VI. des mœurs  » pp. 75-88

La marche des anciens était conforme à la nature et à la raison. […] Ce sont là, si je l’ose dire, les mœurs de la nature. […] M’est-il permis d’appeler tout cela les passions de la nature ? […] Elle tient d’un côté à la nature, de l’autre à l’institution. […] Chaque jour la civilisation étend ses conquêtes sur la nature.

13. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XV. de l’élocution  » pp. 203-216

Le style dépend donc non pas de la nature du sujet, mais encore et surtout du tempérament, du cœur, de l’esprit, du goût de l’écrivain, le tout forcément modifié par l’influence du siècle et du pays. […] Mais je vais plus loin, et Cicéron n’ayant pas défini le ton, j’adopte pour ce mot la définition de Buffon : « Le ton n’est que la convenance du style à la nature du sujet. […] Sur la part de la nature dans la formation du style, le rhéteur n’a rien à dire ; quant à celle de l’art, il appuiera principalement sur deux préceptes. […] « La poésie, l’histoire et la philosophie, dit Buffon, que je ne puis rappeler assez, ont toutes le même objet, et un très-grand objet, l’homme et la nature. […] « Le style est l’homme même signifie, dit-il, que le style manifeste la nature propre de l’intelligence qui le produit.

14. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Résumé. » pp. 388-408

L’étude des mœurs et des passions n’est pas moins féconde pour l’invention, puisque les observations à cet égard ont pour objet l’homme et la nature dans un temps, un lieu et des circonstances données, et que le sujet le plus habituel de l’écrivain est nécessairement la nature et l’homme. Pour connaître et reproduire la nature, l’écrivain doit l’étudier dans ses phénomènes réguliers et irréguliers. […] On ne peut donc, comme plusieurs l’ont fait, subdiviser le style, d’après la nature du sujet, en style simple, sublime et tempéré. Cette division s’appliquerait plutôt au ton, qui n’est réellement que la convenance du style à la nature du sujet. […] 2° Saisir le ton convenable à la nature du sujet et au but de l’écrivain.

15. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Notions préliminaires » pp. 2-15

Le beau dans les lettres, qui résulte de l’imitation de la nature et de l’aspiration vers le beau absolu, et dont la fin doit être le bon et l’utile, exige l’unité, la variété, la vérité, l’ordre, l’élévation et la moralité. […] Il n’y a rien dans notre nature de plus général que le sentiment de la beauté sous toutes ses formes variées d’ordre et de proportion, de grandeur, d’harmonie, de nouveauté. […] Dans son état le plus parfait, il est le produit de la nature et de l’art. […] Le goût fait aussi usage de l’imagination, mais sans s’y livrer, et en consultant toujours la nature. […] Comme on le voit, la délicatesse tient plus à la sensibilité, et est plutôt un don de la nature ; la pureté tient plus au jugement, et est plutôt un produit de l’art.

16. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Cousin 1792-1867 » pp. 257-260

Je contemple avec ravissement cette nature inconnue, ce ciel du Nord avec ses étoiles éclatantes, mille fois plus belles que le jour pâle et sombre qui leur succède2. […] L’analyse chimique la plus subtile ne parvient point à une nature morte et inerte, mais à une nature organisée à sa manière, et qui n’est dépourvue ni de forces ni de lois. […] Contemplons la nature avec les yeux de l’âme aussi bien qu’avec les yeux du corps : partout une expression morale nous frappera, et la forme nous saisira comme un symbole de la pensée. […] De l’âge d’or, jadis vanté, C’est la plus fidèle peinture ; Mais toujours la simplicité Ne fait pas la belle nature. […] Oui, voilà pourquoi l’art n’est pas l’imitation servile de la nature, mais l’interprète du sentiment, des idées, de l’expression, de l’âme intérieure qui donne aux objets leur physionomie.

17. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre IX. de la disposition. — proportions, digressions, transitions, variété  » pp. 118-130

Toute règle qui ne peut se justifier par un rapport direct avec notre nature est chose de convention et de mince valeur. […] La nature vous les indiquera. […] Défendre à l’écrivain cette liberté d’allure, ces écarts d’imagination qui vont si bien à certaines natures d’élite, c’est afficher un rigorisme nuisible au talent. […] En effet, si le sentiment de l’unité, de l’ordre, de la symétrie, des proportions exactes, est dans notre nature, elle comporte également et à un aussi haut degré celui de la variété, des contrastes, de la surprise. […] Ainsi faisant, nous restons encore dans la nature.

18. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre VII. Vers, stances, classification des poèmes. »

Cette invention et ce talent de peindre ou d’imiter la nature, comme on dit, sont des dispositions particulières, que l’étude développe mais qu’elle ne donne pas. […] Disons seulement à propos de l’imitation de la nature, que c’est surtout la belle nature qu’il faut imiter dans la poésie. […] Ainsi, eu égard à nous-mêmes, nous divisons les objets naturels en objets laids et en objets beaux ; autrement dit, il y a pour nous une nature laide, et une nature belle ; c’est dans celle-ci qu’il faut prendre nos sujets d’imitation. Ce n’est pas tout ; le poète doit même, dans ses compositions, embellir la nature. — L’embellir ? […] — Non, mais il rassemble les plus beaux traits de la même espèce qu’il voit épars dans la nature, et qui peuvent former un tout parfait en son genre.

19. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome II (3e éd.)

Cette faculté est regardée comme un don de la nature, et ce n’est pas sans raison ; mais ici l’art peut prêter à la nature d’utiles secours. […] Suivez donc la nature. […] Pope a parfaitement bien assorti la coupe à la nature du sujet. […] Quels riches modèles à décrire la nature nous offre de toutes parts ! […] Il avait étudié la nature avec soin, et s’appliquait à la copier avec fidélité.

20. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Buffon, 1707-1788 » pp. 175-184

Après deux voyages en Italie et en Angleterre, nommé en 1739 intendant du jardin royal, et associé à l’Académie des sciences, il conçut, à l’âge de trente-deux ans, le projet d’exposer l’Histoire de la nature. […] A sa noble aisance, à la facilité, à la liberté de ses mouvements sur l’eau, on doit le reconnaître non-seulement comme le premier des navigateurs ailés, mais comme le plus beau modèle que la nature nous ait offert pour l’art de la navigation. […] L’homme peut donc non-seulement faire servir à ses besoins tous les individus de l’univers, mais, avec le temps, changer, modifier et perfectionner les espèces : c’est le plus beau droit qu’il ait sur la nature. […] Son génie fut égal à la majesté de la nature. […] « Pensez maintenant comment aurait pu prendre un tel ascendant une créature si faible, et exposée, selon le corps, aux insultes de tous les autres, si elle n’avait en son esprit une force supérieure à toute la nature visible, un souffle immortel de l’Esprit de Dieu, un rayon de sa face, un trait de sa ressemblance : non, non, il ne se peut autrement.

21. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre premier. Beautés de détail. »

Cet être-là sera le dieu d’Homère ou de Virgile, mais ne sera pas à coup sûr celui de David, d’Isaïe, de la nature. […] Aux petits des oiseaux il donne leur pâture, Et sa bonté s’étend sur toute la nature. […] Il est certain que les poètes hébreux ont fait ce que font, ce que doivent faire les écrivains qui transportent dans leurs ouvrages la nature telle qu’elle s’offre à leurs yeux, et font, dans ce qui les environne, le choix des accidents les plus heureux, des rapports les plus harmoniques. Ainsi chaque contrée aura des métaphores, des comparaisons particulières, un style figuré qui lui sera propre ; et qui, toujours emprunté des scènes de la nature, nous offrira une espèce de topographie poétique, qui n’est ni sans charme, ni sans intérêt. […] Voilà ce qu’offrait au poète judaïque une nature stérile et bornée.

22. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre V. — Qualités particulières du Style »

Si quelquefois il s’élève et s’anime, il change de nature et de nom ; il devient oratoire. […] Il s’élève et s’abaisse suivant la nature des faits qu’il raconte ou les réflexions qu’il expose. […] La nature travaille sur un plan éternel, avec une sage lenteur, et sait ainsi donner la perfection à ses œuvres. […] La poésie, l’histoire et la philosophie ont toutes le même objet, et un très grand objet : l’homme et la nature. […] Jusques à quand ne verrez-vous pas que la nature, votre mère commune, présente également la nourriture tous ses enfants ?

23. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome I (3e éd.)

Ce talent, ce n’est pas à la seule nature que nous le devons. […] C’est à la nature que nous devons la première ; la culture et l’art produisent la seconde. […] Cette règle est cependant si bien fondée sur la nature, qu’il est fatal de s’en écarter. […] Il emprunte une chaleur fictive pour suppléer à celle que la nature lui a refusée. […] Au génie que la nature nous a donné, il faut joindre le travail et l’attention.

24. (1879) L’art d’écrire enseigné par les grands maîtres

Celles qui, dans la chaleur de la composition, ne se présentent pas d’elles-mêmes, décèleraient trop l’artifice ; la nature les a inventées, la nature doit les placer. […] La nature, qui seule est bonne, est toute familière et commune. […] Pour tout le reste, la poésie n’est autre chose qu’une fiction vive qui peint la nature. […] Le système de la nature en est un grand exemple. […] L’auteur de ce livre dit d’abord (page 1) que l’homme est l’ouvrage de la nature, qu’il existe dans la nature, qu’il ne peut même sortir de la nature par la pensée, etc… que pour un être formé par la nature et circonscrit par elle, il n’existe rien au-delà du grand tout dont il fait partie, et dont il éprouve les influences ; qu’ainsi les êtres qu’on suppose au-dessus de la nature, ou distingués d’elle-même, seront toujours des chimères.

25. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre VII. De l’Harmonie imitative. »

Les sons, sains être figurés, peuvent fournir, et ont fourni à l’homme, soit par leur nature, soit par leur durée, une sorte de langage inarticulé pour exprimer, au moins jusqu’à un certain point, un certain nombre de choses. […] Le poète va plus loin, et prouve, par l’exemple et avec le style de Virgile, qu’il a suffi d’ouvrir les yeux et d’observer la nature, pour arriver à cette fidélité d’expression imitative. […] Ouvrez Homère, et vous lui rendrez partout la justice que lui rendait Virgile lui-même, qui reconnut, après avoir bien étudié l’un et l’autre, qu’Homère et la nature étaient une seule et même chose. C’est la nature qui avait appris à Homère que, pour peindre la beauté, il fallait choisir les voyelles les plus douces. […] Didon veille seule dans toute la nature, seule, et en proie à sa douleur !

26. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre II. division de la rhétorique. — de l’invention  » pp. 24-37

Dans un système de lectures habilement graduées, l’élève étudiera les vocables individuellement, en quelque sorte ; il en observera la nature, les ressemblances et les différences6 ; il cherchera à apprécier non-seulement les lois, mais les habitudes qui déterminent leurs relations réciproques. […] Les rhéteurs romains aimaient dans l’adolescence ce luxe de végétation qui trahit les natures riches et vigoureuses. […] Sans espérer que notre élève sera un de ces phénix qui suffit à la gloire d’un demi-siècle, nous croyons que, bien dirigé dans la voie tracée plus haut, il aura singulièrement ajouté à la somme de génie inventif que lui a départie la nature. […] Remarquez que je ne considère point ici la nature et l’origine des idées, je les constate comme existant, et je dis que, quelque opinion que l’on se forme de leur origine et de leur nature, il n’en est pas moins vrai qu’une fois que l’intelligence pense aux idées (notez l’expression, et distinguez-la de celle-ci, pense ses idées), elle ne peut que se les rappeler, les juger, les combiner, et que, sous ce rapport, les résultats de l’activité intellectuelle sont toujours des faits de mémoire, des faits de jugement, ou des faits d’imagination. […] Je n’attendrai rien de la nature d’un enfant en qui le jugement devance l’esprit… Ils ne cherchent qu’à éviter les défauts, et tombent par là même dans le pire des défauts, celui de n’avoir aucune qualité. »Quintit.., Institut. orat., II, 4.

27. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre V. Des sermons de Bossuet. »

La chair changera de nature, le corps prendra un autre nom ; même celui de cadavre ne lui demeurera pas longtemps : il deviendra, dit Tertullien, un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue. […] Mais, qu’est-ce donc que ce corps, que cette machine si vile et si méprisable par sa nature, et qui cependant a tenté et opéré de si grandes choses ? […] « Pensez, maintenant, comment aurait pu prendre un tel ascendant une créature si faible, et si exposée, selon le corps, aux insultes de toutes les autres, si elle n’avait en son esprit une force supérieure à toute la nature visible, un souffle immortel de l’esprit de Dieu, un rayon de sa face, un trait de sa ressemblance : non, non, il ne se peut autrement. […] il t’a établi pour t’en servir : il a mis, pour ainsi dire, en tes mains toute la nature, pour l’appliquer à tes usages ; il t’a même permis de l’orner et de l’embellir par ton art ; car, qu’est-ce autre chose que l’art, sinon l’embellissement de la nature ? […] Que s’il est ainsi, qui ne voit que toute la nature conjurée ensemble n’est pas capable d’éteindre un si beau rayon ; et qu’ainsi notre âme, supérieure au monde et à toutes les vertus qui le composent, n’a rien à craindre que de son auteur » ?

28. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre III. Discours académiques de Racine, de Voltaire et de Buffon. »

Les premiers poètes formèrent le génie de leur langue ; les Grecs et les Latins employèrent d’abord la poésie à peindre les objets sensibles de toute la nature. […] La langue grecque reçut de ce grand peintre de la nature la supériorité qu’elle prit chez tous les peuples de l’Asie et de l’Europe. […] Vous eûtes en tous les genres cette foule de grands hommes que la nature fit naître, comme dans le siècle de Léon X et d’Auguste. […] Nous en demandons bien pardon aux rhéteurs de tous les temps : mais il nous semble qu’aucun d’eux n’avait défini l’éloquence, comme va le faire l’historien et le peintre de la nature. […] « Pourquoi, continue Buffon, les ouvrages de la nature sont-ils si parfaits ?

29. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Seconde partie. Moyens de former le style. — Chapitre II. De l’exercice du style ou de la composition » pp. 225-318

Elle le caractérise en déterminant sa nature, et en faisant connaître les attributs et les qualités qui le distinguent de tout ce qui n’est pas lui. […] Au reste, c’est la nature de l’action qui détermine le genre d’exposition qu’il convient d’adopter. […] La nature de la narration indique qu’il faut faire plus agir que parler dans ce genre de composition. […] La douceur, au contraire, et un ton affectueux sont de nature à lui gagner les cœurs. […] Nous allons réunir sous ces trois titres les différentes espèces de lettres, pour en faire connaître la nature et en déterminer les règles.

30. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Pascal. (1623-1662.) » pp. 35-39

Et depuis qu’il a perdu le vrai bien, tout également peut lui paraître tel, jusqu’à sa destruction propre, quoique si contraire à Dieu, à la raison et à la nature tout ensemble… C’est en vain, ô hommes, que vous cherchez dans vous-mêmes le remède à vos misères. […] Ils vous ont fait penser que vous lui étiez semblables et conformes par votre nature. […] S’il eût voulu surmonter l’obstination des plus endurcis, il l’eût pu en se découvrant si manifestement à eux qu’ils n’eussent pu douter de la vérité de son essence, comme il paraîtra au dernier jour, avec un tel éclat de foudres et un tel renversement de la nature, que les morts ressusciteront, et les plus aveugles le verront. […] La vraie nature de l’homme, son vrai bien, et la vraie vertu, et la vraie religion, sont choses dont la connaissance est inséparable. […] Cousin, qui parle ainsi dans son remarquable ouvrage sur les Pensées de Pascal : « Il est venu à cette heureuse époque de la littérature et de la langue où l’art se joignait à la nature dans une juste mesure pour produire des œuvres accomplies.

31. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXI. des figures  » pp. 289-300

Il est probable que ces noms ont été en grande partie déterminés par ce penchant à l’imitation, à l’observation des rapports et des similitudes, qu’Aristote proclame le père des arts, et par cette liaison des idées, ce réveil de l’une par l’autre, qui est aussi un des éléments de notre nature intellectuelle. […] Si l’on n’en perd de vue ni l’origine, ni la nature, il sera facile d’en apprécier le but, d’en déterminer et d’en limiter l’usage, d’en saisir et d’en signaler les défauts. […] Elles sont fondées, nous l’avons dit aussi, sur des qualités ou des besoins de notre nature, penchant à l’imitation, association d’idées, imagination, passion, etc. ; leurs avantages, sous ce rapport, sont incontestables. […] En général, comme je l’ai déjà dit, je fais assez bon marché des nomenclatures, persuadé que dans toutes les sciences de création humaine et qui n’ont point pour objet la nature réelle, le point essentiel est de bien saisir le fond des idées, et laissant d’ailleurs aux gens du métier liberté entière de ranger et de classer à leur goût. […] Voici une remarque aussi juste que profonde d’un des plus savants hommes de notre siècle : « Dès que l’homme, en interrogeant la nature ne se contente pas d’observer, mais qu’il fait naître des phénomènes sous des conditions déterminées ; dès qu’il recueille et enregistre les faits pour étendre l’investigation au delà de la courte durée de son existence, la philosophie de la nature se dépouille des formes vagues et poétiques qui lui ont appartenu dès son origine ; elle adopte un caractère plus sévère, elle pèse la valeur des observations, elle ne devine plus, elle combine et raisonne.

32. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Première partie - Préceptes généraux ou De la composition littéraire. — Chapitre premier. De l’invention. »

Les ouvrages de la nature ne sont si parfaits que parce que chacun d’eux est un tout, et qu’elle travaille sur un plan dont elle ne s’écarte jamais. […] On peut le puiser dans les quatre mondes différents qui constituent ce qu’on appelle la nature. […] Chacun sait bien qu’il est d’une importance extrême de représenter fidèlement les hommes, et que tout ce qui est hors nature est forcé et blâmable. […] Pour être toujours vraisemblable dans l’invention, il faut étudier la nature, et la copier en ce qu’elle a de beau. […] On imite donc forcément la nature, et le talent de l’invention se montre d’autant plus qu’elle est imitée plus fidèlement et plus noblement en même temps.

33. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Brizeux, 1803-1858 » pp. 557-563

La religion, la patrie, la nature et l’art, voilà les sources auxquelles il a puisé. […] … A sa franche nature, oh ! […] Sainte-Beuve : « Brizeux est un poëte d’élite, et qui compte : c’est une nature très-fine ; ses élégies douces et discrètes sont d’une qualité rare, mais il a trop l’affectation de la simplicité. » — Ses œuvres, publiées par MM. […] Ces paysages n’ont rien de convenu, ni d’artificiel ; c’est peint d’après nature. […] Que ces vers vous apprennent à regarder la nature attentivement, et avec réflexion, pour peindre les objets avec exactitude.

34. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre VI. Analyse du discours sur l’esprit philosophique, par le P. Guénard. »

Disciple de la lumière, au lieu d’interroger les morts et les dieux de l’école, il ne consulta que les idées claires et distinctes, la nature et l’évidence. […] Nous le voyons, c’est un petit nombre de principes généraux et féconds qui a donné la clef de la nature, et qui, par une mécanique simple explique l’ordre de l’architecture divine. […] » Mais si la nature, en vous accordant le talent de penser en philosophe, vous a refusé cette heureuse sensibilité qui saisit le beau avec transport, et le reproduit avec force ; si vous n’êtes qu’un esprit toujours réfléchissant, la règle devient plus sévère à votre égard, et vous bannit de l’empire du goût ; éloignez-vous : la raison séparée des grâces, n’est qu’un docteur ennuyeux qu’on laisse tout seul au milieu de son école. […] Il est aisé de le dire : la nature elle-même l’avertit à tout moment de sa faiblesse, et lui marque, en ce genre, les étroites limites de son intelligence. […] Je ne ferai aucune remarque sur les beautés de détail, qui étincellent en foule dans cette étonnante production : elles sont de nature à frapper tous les yeux, à parler à toutes les âmes, et n’appartiennent en rien à la critique littéraire.

35. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — [Notice] Maurice de Guérin, 1810-1839. » pp. 598-606

c’était quelque chose d’étrange et d’admirable, un de ces moments d’agitation sublime et de rêverie profonde tout ensemble, où l’âme et la nature se dressent de toute leur hauteur l’une en face de l’autre. […] Heureux qui peut contempler la nature déserte et solitaire ! […] Pour peu que le vent m’apporte de fois à autre quelques bouffées de parfums sauvages, et que mon oreille saisisse quelques accents éloignés des mélodies de la nature, qu’aurai-je à regretter ? […] La voix de la nature a pris un tel empire sur moi que je parviens rarement à me dégager de la préoccupation habituelle qu’elle m’impose, et que j’essaye en vain de faire le sourd. […] Il n’était pas de ces mélancoliques orgueilleux qui se croient composés d’une essence raffinée et se révoltent contre la nature ou la société.

36. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VII. des passions  » pp. 89-97

Sans doute la nature individuelle a d’admirables révélations, des inspirations sublimes ; mais pour être sûr de saisir et de conserver cette sublimité, il faut, en quelque sorte, l’arrêter au passage par la réflexion, la généraliser par l’abstraction, s’élancer au-delà des bornes étroites de l’individu, contempler un modèle plus grand et plus haut placé, pressentir enfin d’imagination et de génie la nature universelle, et la rendre par la combinaison de l’enthousiasme idéal et du sang-froid personnel. […] Et grâces soient rendues à l’auteur de la nature qui l’a permis ainsi ; car on conçoit que, s’il en était autrement, la vie de l’écrivain et de l’orateur serait la plus intolérable existence qu’on pût imaginer. […] C’est au jeune écrivain à en rechercher les symptômes et les diagnostics dans les maîtres ; qu’il étudie avec soin la manière dont quelques grands copistes de la nature les ont présentées et nuancées, dont ils les ont fait ressortir par les contrastes et les repoussoirs. […] Les natures impressionnables sont excellentes ici. […] Et c’est encore une objection contre la passion réelle, que son égoïsme exclusif rend presque toujours si loquace et si monotone, quand l’art ne vient pas en aide à la nature.

37. (1882) Morceaux choisis de prosateurs et de poètes des xviii e et xix e siècles à l’usage de la classe de rhétorique

C’est un grand peintre de nature et de paysage. […] C’est que la nature leur a donné du goût et du sentiment pour l’harmonie. […] Nous avons sous les yeux, non l’état idéal, mais l’état réel de nature. […] c’est comme le Créateur, pour la célérité ; c’est comme la nature, pour la vérité. […] Étudier la nature, c’est donc servir son prince et le genre humain.

38. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Diderot, 1713-1784 » pp. 303-312

c’est comme le Créateur, pour la célérité ; c’est comme la nature, pour la vérité. […] comme ces vapeurs éparses sur les objets de la nature les ont rafraîchis et vivifiés ! […] Chardin, grand peintre de nature morte et de genre, mort en 1779. […] Diderot dit ailleurs de Vernet : « Ce qu’il y a d’étonnant, c’est que l’artiste se rappelle ces effets à deux cents lieues de la nature, et qu’il n’a de modèle présent que dans son imagination ; c’est qu’il peint avec une vitesse incroyable ; c’est qu’il dit : Que la lumière se fasse, et la lumière est faite ; que la nuit succède au jour, et le jour aux ténèbres, et il fait nuit, et il fait jour ; c’est que son imagination, aussi juste que féconde, lui fournit toutes ces vérités ; c’est qu’elles sont telles, que celui qui en fut spectateur froid et tranquille au bord de la mer en est émerveillé sur la toile ; c’est qu’en effet ces compositions prêchent plus fortement la grandeur, la puissance, la majesté de la nature, que la nature même. […] La Bruyère a dit : « Combien d’art pour rentrer dans la nature !

39. (1867) Rhétorique nouvelle « Troisième partie. la rhétorique » pp. 194-

La nature, mieux que l’art, nous montre que cette marche est la seule possible. […] Car la nature, si prodigue envers lui, n’a encore fait qu’une ébauche. […] Détachons nos yeux de la nature et voyons les arts. […] Tous les mouvements de la nature sont gradués, et l’art, en ce point comme en tous les autres, doit être l’imitation de la nature. […] Voilà la question générale dans laquelle peuvent rentrer tous les cas particuliers de cette nature.

40. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre second. Définition et devoir de la Rhétorique. — Histoire abrégée de l’Éloquence chez les anciens et chez les modernes. — Chapitre premier. Idée générale de l’Éloquence. »

Sans doute, c’est la nature qui fait les orateurs, comme l’on a dit qu’elle faisait les poètes, nascuntur poetæ  ; c’est-à-dire que c’est elle qui donne aux uns et aux autres ce génie actif qui s’élance hors de la sphère commune ; cette âme de feu qui sent et qui s’exprime avec une vigueur qui étonne, et une chaleur qui entraîne l’auditeur. Voilà ce que fait la nature pour l’orateur, voilà les grands traits qui caractérisent son ouvrage ; et il est clair que celui qu’elle a si heureusement disposé, trouvera plus de ressources et de moyens qu’un autre dans les préceptes de l’art : mais il lui sera toujours indispensable de les connaître ; et plus il les approfondira, plus il les rapprochera des grands modèles, plus il se convaincra que ce qu’on appelle un art, n’est autre chose que le résultat de la raison et de l’expérience mis en pratique, et que son but est d’épargner, à ceux qui nous suivront, tout le chemin qu’ont fait ceux qui nous ont précédés. […] Qui doute qu’un Shakespeare (le plus frappant exemple de ce que peut la nature toute seule) ait fait des pièces plus régulières, moins défigurées par le mélange continuel du bas et du trivial, avec ce que le génie peut concevoir de plus grand, s’il eût connu Aristote comme notre Corneille, et imité les anciens comme Racine ! […] Quintilien se demande ensuite si l’art fait plus pour l’éloquence que la nature ; et il résout la question par une comparaison aussi ingénieuse que décisive. […] C’est là son triomphe, et c’en est assez pour faire sentir aux jeunes gens que le caractère distinctif de l’éloquence est une action pleine de chaleur, plus ou moins véhémente, selon la nature et la force des obstacles que son sujet lui donne à renverser.

41. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XIII. du corps de l’ouvrage. — argumentation, confirmation, réfutation  » pp. 175-188

Avant tout, il faut bien savoir quelle nature d’argumentation est applicable aux idées que l’on veut communiquer et faire admettre. […] Voilà trois ordres d’assentiment auxquels on peut rapporter les propositions de toute nature. […] Enfin il ne suffit pas d’avoir trouvé ses preuves et d’en avoir reconnu la nature, sachez encore les choisir, les disposer, les traiter. […] En un mot, qu’il n’oublie pas que les natures et les institutions humaines sont choses flexibles et ondoyantes, ne comportant guère que les demi-vérités, et s’accommodant rarement de la rigueur de l’expression logique. […] ce dont je ne sens point, je l’avoue, la nécessité, je préférerais encore la première, sous le rapport de la nature des genres divers, et des préceptes à appliquer, et je distinguerais l’éloquence de la tribune, du barreau, de la chaire, de l’académie, et de la presse.

42. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Première section. Des genres secondaires de poésie — Chapitre II. Du genre pastoral » pp. 96-112

On peut l’envisager telle qu’on s’imagine qu’elle était dans des temps plus anciens, où les mœurs étaient plus simples : c’était une vie aisée et abondante, avec l’ingénuité de la nature, la douceur de l’innocence et la noblesse de la liberté. […] Des trois états que nous venons d’indiquer, le second est trop bas et trop triste, le dernier trop raffiné et trop étranger à la simplicité de la nature, pour qu’on puisse en faire la base de la poésie pastorale. […] Selon que le sujet est triste ou gai, il convient de donner à la nature des formes et des couleurs qui correspondent aux sentiments que le poète veut inspirer ou décrire. […] D’ailleurs, outre que la naïveté, la pureté des mœurs qui conviennent aux bergers, sont les qualités ordinaires de la religion et de la piété, il est certain que rien n’est plus propre à élever l’âme vers Dieu que le spectacle de la nature et la solitude des campagnes. […] Après tout ce que nous avons dit sur la nature de la pastorale, et sur les mœurs et le langage des bergers, il est facile de se former une idée juste du ton et du style que demande ce genre de poésie.

43. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre II. Des qualités du style » pp. 79-118

Les qualités particulières varient selon la nature de l’ouvrage ou la différence du genre. […] De toutes ces citations nous dirons avec Molière : Ce n’est que jeux de mots, qu’affectation pure, Et ce n’est pas ainsi que parle la nature. […] Il nous reste à examiner les qualités qui varient selon la nature du sujet, et qu’on appelle qualités particulières. […] La naïveté, chez ces deux écrivains, n’est pas seulement un don de la nature, c’est encore une heureuse imitation du naïf de Joinville et le fruit d’un art très profond. […] Cette accumulation d’une foule d’idées en un petit nombre de mots est de nature à saisir vivement l’esprit, et à produire sur l’âme une impression profonde.

44. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre quatrième. De la disposition oratoire, ou de l’Ordre mécanique du discours. — Chapitre premier. »

Nous allons voir ce que l’art a fait pour diriger vers un but vraiment utile, un plan si positivement indiqué par la nature elle-même. […] C’est de toutes les parties du discours celle qui quelquefois doit le plus à l’art, et celle cependant qui paraît le plus dans la nature. […] On sent bien que le discours est fait, après un pareil exorde, et que, quels que soient la nature, le nombre, et la force des preuves, l’orateur est sûr de diriger à son gré un auditoire si heureusement disposé. […] Ce que la nature a mis de sensibilité dans le cœur du juge, est le commentaire heureux du texte impassible de la loi. […] ) Mais si la nature de la cause donne lieu à une éloquence véhémente, le résumé doit être suivi d’un mouvement oratoire, qui sera ou d’indignation ou de commisération.

45. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Chapitre II. Des petits Poèmes. »

On verra que, pour y exceller, il faut avoir reçu de la nature un grand talent poétique. […] Celles de Rome d’Ardène offrent en général des images riantes et des tableaux qui sont dans la nature. […] Le poète traite dans l’une et dans l’autre des sujets de même nature, et, à peu de chose près, de la même manière. […] Ce poète a peint la nature simple, mais quelquefois négligée. […] Ses églogues sont embellies de toutes les grâces de la nature.

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