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2. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre V. Analyse de l’éloge de Marc-Aurèle, par Thomas. »

Dès ce moment il n’eut qu’une passion, celle de se former aux vertus les plus pénibles : tout ce qui pouvait l’aider dans ce dessein était pour lui un bienfait du ciel. […] Marc-Aurèle (et ici Apollonius fixa un moment les yeux sur le nouvel empereur), tremble surtout quand tu seras sur le trône. […] Dans ce moment, je délibérai si je ne renoncerais pas à ce pouvoir dangereux et terrible ; et je fus un instant résolu : oui, je fus résolu d’abdiquer l’empire… » Je ne m’arrêtai pas longtemps à ce projet de renoncer à l’empire. […] Son visage cicatrisé était mâle et terrible, mais ses traits à demi sauvages semblaient adoucis dans ce moment par la douleur. […] Prince, il parut se ranimer un moment pour toi : sa main mourante te présenta à tous ces vieillards qui avaient servi sous lui ; il leur recommanda ta jeunesse.

3. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Saint-Marc Girardin Né en 1801 » pp. 275-278

Parmi elles, deux sœurs, avec un recueillement et une présence d’esprit admirables, choisirent à ce moment, parmi les psaumes, celui qui convenait le mieux à leur danger, et se mirent à lire à haute voix, alternativement, les versets suivants : « Dieu est notre retraite, notre force et notre secours dans les détresses. […] Oui, il n’y a plus, à ce moment, sur les eaux, que la voix du Seigneur, et celle de l’homme que la foi unit à Dieu. […] Le matelot, arrivé à son poste, parcourut des yeux tout l’horizon ; ce fut un moment d’angoisse inexprimable ; puis, tout à coup, agitant son chapeau, il s’écria : Une voile sous le vent ! […] Le transbordement était difficile à cause de la violence de la mer ; il devait être long, et cependant, d’un moment à l’autre, le vaisseau devait sombrer.

4. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Modèles

Point de force chrétienne dans les moments les plus solennels de la vie ! […] Il trouvait encore des moments à leur donner, au milieu des devoirs et des fatigues de l’épiscopat. […] Je meurs dans un moment : la mort va me délivrer de vos mains. […] Junon, dans ce moment, aurait versé la première larme, si de larmes pouvaient mouiller l’œil d’une immortelle. […] Heureux dans ce moment, les peuples à qui des sages ont révélé les mystères de la nature !

5. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Joubert, 1754-1824 » pp. 388-398

Maillet, qui a une ambition que tous les lauriers du Parnasse ne couronneraient pas assez, et une modération que le suffrage d’un enfant contenterait ; qui donnerait tous les biens de ce monde, quoique occupé de ceux de l’autre, pour une louange, et toutes les louanges de la terre pour une des vôtres, ou pour un moment de votre bienveillance et de votre attention ; M. […] Qu’il me soit permis un moment de dire comment je voudrais être regretté1 ? […] Nos passions ont fait de notre dernière heure un sujet de désespoir et d’effroi, un moment haï, d’où la prévoyance et le souvenir se détournent également. […] Au lieu de nous accoutumer dès l’enfance, par la pensée et par les sens, à ne regarder cette séparation que comme le moment du départ pour un voyage sans retour, voyage que nous ferons un jour nous-mêmes, sans doute pour nous réunir dans des régions invisibles, on n’a rien oublié de ce qui était propre à en faire un objet d’horreur. […] Vous en êtes digne, et vous en avez besoin ; vous en êtes même plus capable que vous ne pensez, car votre douleur, en ce moment, calomnie votre raison.

6. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre VI. Massillon. »

On peut prier sans aucune pensée distincte ; il ne faut qu’un retour du cœur d’un moment ; encore ce moment peut-il être employé à quelque autre chose. La condescendance de Dieu à notre faiblesse est si grande, qu’il nous permet de partager pour le besoin ce moment entre lui et les créatures. Oui, dans ce moment occupez-vous selon vos emplois : il suffit que vous offriez à Dieu, ou que vous fassiez, avec une intention générale de le glorifier, les choses les plus communes que vous êtes engagés à faire. […] Si elle lui fait un devoir quelquefois de sacrifices en apparence plus pénibles, ou réellement coûteux pour l’amour-propre, que l’on y réfléchisse un moment, et l’on verra bientôt que l’ordre social et l’intérêt du bonheur individuel commandent impérieusement ces sacrifices ; et l’on sera forcé de se prosterner devant ce chef-d’œuvre de la législation morale. […] Rapprochons un moment de Masillon un homme dont les philosophes récuseront peut-être l’autorité, par cela seul qu’il a raison ici, et qu’il a eu raison surtout de mépriser certains philosophes, qu’il connaissait bien, et qu’il a peints, comme il peignait tout ce qu’il sentait fortement.

7. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

Encore quelques moments, un Dieu qui vous seconde Va mettre entre vos mains la maîtresse du monde. […] Dans ce moment où je vais cesser d’être, j’ai la consolation de voir que vous me survivrez, vous que le ciel m’a donnés pour fils. […] Le moment est favorable, les dangers, l’indigence vous pressent de toutes parts, et les riches dépouilles que vous promet le succès de l’entreprise, doivent vous parler plus éloquemment que mes discours. […] Mais mon âme prenant sans cesse un nouvel essor, s’élançait avidement vers la postérité, persuadée qu’elle ne vivrait en effet que du moment où elle s’échapperait de ce qu’on appelle si improprement la vie ! Pourquoi les derniers moments du philosophe vertueux sont-ils si calmes, si tranquilles ; et ceux de l’insensé, agités de tant de trouble ?

8. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre IX. Parallèle des Oraisons funèbres de Condé, par Bossuet et de Turenne, par Fléchier et Mascaron. »

« Au moment que j’ouvre la bouche pour célébrer la gloire immortelle de Louis de Bourbon, prince de Condé, je me sens également confondu et par la grandeur du sujet, et, s’il m’est permis de l’avouer, par l’inutilité du travail. […] Condé et Turenne avaient été l’un et l’autre rebelles un moment : cette circonstance délicate, et trop marquante cependant pour être écartée d’un éloge historique, présentait à leurs panégyristes un endroit difficile à traiter. […] Bossuet met, dans l’aveu de la même faute, cette franchise courageuse qui ne cherche point à déguiser la faiblesse d’un moment, quand on lui peut opposer une vie entière de vertus. […] Ce ne sont pas seulement des hommes à combattre : ce sont des montagnes inaccessibles, ce sont des ravines et des précipices, d’un côté ; c’est, de l’autre, un bois impénétrable, dont le fond est un marais, et derrière, des ruisseaux, de prodigieux retranchements : ce sont partout des forts élevés et des forêts abattues qui traversent des chemins affreux ; et au-dedans, c’est Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de succès et de la prise de Fribourg : Merci, qu’on ne vit jamais reculer dans les combats ; Merci, que le prince de Condé et le vigilant Turenne n’ont jamais surpris dans un mouvement irrégulier, et à qui ils ont rendu ce grand témoignage, que jamais il n’avait perdu un seul moment favorable, ni manqué de prévenir leurs desseins, comme s’il eût assisté à leurs conseils.

9. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre premier. Apologie de Socrate par Platon. »

Il faut donc nous en tenir à l’idée du philosophe grec ; et, en la renfermant dans ses bornes naturelles, nous verrons que Platon n’a rien dit de trop, et que cette diction presque poétique est le plus ordinairement celle du genre d’éloquence qui nous occupe pour le moment ; et c’est Platon lui-même qui va nous le prouver. […] De là, ces trois fameux Dialogues qui contiennent les derniers moments de Socrate, depuis celui où il est traîné aux pieds d’un tribunal qui l’avait condamné d’avance, jusqu’à l’instant fatal où la ciguë lui est présentée. […] Partout on voit l’homme certain du sort qu’on lui prépare, et peu jaloux de s’y dérober ; mais défendant jusqu’aux derniers moments les principes qu’il avait professés, parce qu’il les croyait utiles, et que le bonheur des hommes y semblait essentiellement attaché. […] Que n’attendiez-vous un moment de plus ?

10. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre II. Application des principes à la première Philippique de Démosthène, et à la seconde Catilinaire de Cicéron. »

C’est ainsi que nous perdons des moments précieux à fabriquer des nouvelles. […] Il s’agit maintenant de rassurer le peuple sur les suites de cette guerre devenue inévitable, et l’objet des alarmes du moment. […] Mes discours accusateurs l’ont poursuivi jusqu’au dernier moment. […] Il a été perdu, notre triomphe a été complet, du moment où nous l’avons forcé de renoncer à l’obscurité de ses intrigues, pour être ouvertement un brigand ». […] Plus vous y mettrez de vigueur, et moins vous leur laisserez d’audace : qu’ils vous voient mollir un moment, et vous leur rendez toute la férocité de leur extravagance.

11. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre VIII. L’éloquence militaire. »

) Il faut prévenir encore l’inexpérience des jeunes gens, qu’il est aussi impossible d’établir les préceptes de l’éloquence militaire, qu’il serait ridicule de prétendre deviner et de vouloir régler l’inspiration du moment. Qu’ils apprennent donc à distinguer ces traits de caractère, ces expressions échappées à l’âme d’un grand homme, dans un moment décisif, ou dans une circonstance importante, de ces harangues composées à loisir, et placées par le poète ou par l’historien dans la bouche d’un héros. […] Dans le moment même où il substituait une forme de gouvernement à tous les désordres de l’anarchie la plus complète, on lui objecte la constitution.

12. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Lamartine 1790-1869 » pp. 506-523

En vain je vais fermer la couche où te voilà, Je sais qu’en ce moment mon ami n’est plus là… Il est où ses vertus ont allumé leur flamme ; Il est où ses soupirs ont devancé son âme !  […] elle conçut l’envie De revoir pas à pas la scène de sa vie, La maison, le jardin, et de tout parcourir, D’y revivre un moment, fallût-il en mourir ! […] Ma mère, dont la joue avait repris couleur, Ma mère, dont la force, un moment ranimée, Empruntait de la vie à cette terre aimée, Parcourant du regard et le ciel et les lieux, Voyait tout son passé remonter sous ses yeux ; Le nuage des pleurs qui flottaient sur sa vue Laissait à chaque aspect percer son âme émue. […] » Puis tombant elle-même à genoux sur le bord, Et des mains embrassant le pilier de la couche, Comme nous en pleurant elle y colla sa bouche ; Ses larmes sur le bois ruisselaient à grands flots, Et la chambre un moment fut pleine de sanglots1… Mais des pieds de chevaux dans la cour résonnèrent, Le marteau retentit, et les cloches sonnèrent. […] rentrer tout seul dans sa maison déserte, Sans voir à votre approche une fenêtre ouverte, Sans qu’en apercevant son toit à l’horizon On dise : « Mon retour réjouit ma maison ; Une sœur, des amis, une femme, une mère, Comptent de loin les pas qui me restent à faire ; Et dans quelques moments, émus de mon retour, Ces murs s’animeront pour m’abriter d’amour ! 

13. (1811) Cours complet de rhétorique « Notes. »

Peut-être les critiques sévères ne trouvent-ils pas encore la réparation assez complète ; mais que l’on rapproche un moment la manière un peu légère dont il avait parlé d’abord de J. […] Telle est en effet l’inappréciable avantage des bonnes études ; elles impriment au goût une direction, et aux idées un caractère de justesse, qui ne manquent jamais de ramener tôt ou tard vers le but, dont on avait pu s’écarter un moment. […] Reportons-nous un moment à l’époque où l’auteur d’Atala s’annonça avec tant d’éclat dans la carrière des lettres ; rappelons-nous le triste et long silence des muses françaises, et nous concevrons, nous excuserons même l’enthousiasme avec lequel fut accueillie la première production de M. de Chateaubriand. […] Ainsi une nouvelle manière introduisit un nouveau genre ; la poésie quitta un moment la scène, pour y reporter bientôt des idées nouvelles, une pompe plus théâtrale, des mœurs que l’on n’y avait jamais étalées, et des maximes qui n’y avaient point encore été entendues. […] On sait trop quel jargon scientifique, quelle morale sèche et guindée remplacèrent le langage de la raison et de la science ; et quelle langue barbare, quel néologisme ridicule succédèrent au langage harmonieux que la poésie avait prêté un moment aux sciences naturelles.

14. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre IV. Beautés morales et philosophiques. »

Ce n’est pas que quelques étincelles de cette céleste lumière ne sortent par intervalles des écrits des philosophes anciens : mais ce ne sont que des lueurs fugitives, qui éclairent un moment, pour replonger bientôt le malheureux qui les suit dans les horreurs de ténèbres inexplicables. […] » Je demande, et saisis avec un cœur avide »  Ces moments que m’éclaire un soleil si rapide ; » Dons à peine obtenus qu’ils nous sont emportés ; » Moments que nous perdons, et qui nous sont comptés. […] L’Éternel lui-même s’est fait un jeu d’abandonner un moment son ouvrage à la puérilité de leurs discussions : Tradidit mundum disputationi eorum (Ecc.) […] C’était un de ces favoris insolens, qui, parvenus à force de bassesses au faîte du pouvoir, ne s’y maintiennent qu’à force de crimes et d’attentats ; et qui, après avoir fait gémir la terre de leur élévation, lui donnent par leur chute un moment de consolation. […] Mais comme il faut que tout ce qui n’est que de l’homme porte inévitablement le caractère de l’insuffisance ; comme il faut bien qu’il y ait une distance sensible à tous les yeux, entre les leçons de la sagesse divine, et celles de la sagesse humaine, ce même Horace, si admirable quelquefois dans ses réflexions morales, tombe le moment d’après dans tous les excès de la dépravation la plus complète, et ce philosophe si sage n’est plus qu’un cynique effronté, sans frein, comme sans pudeur, et dont Quintilien lui-même disait qu’il serait bien fâché de le faire voir tout entier à ses élèves : Horatium in quibusdam nolim interpretari .

15. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre VI. Analyse du discours sur l’esprit philosophique, par le P. Guénard. »

C’est par le coup d’œil observateur, qui découvre à tout moment dans ces objets des propriétés, des analogies, des différences, un nouvel ordre de choses, un nouveau monde que l’œil du vulgaire n’aperçoit jamais ; c’est pour le talent singulier, non de raisonner avec plus de méthode, mais de trouver les principes même sur lesquels on raisonne ; non de compasser ses idées, mais d’en faire de nouvelles et de les multiplier sans cesse par une réflexion féconde : talent unique et sublime, don précieux de la nature, que l’art peut aider quelquefois, mais qu’il ne saurait ni donner, ni suppléer par lui-même. […] Les philosophes d’un génie vulgaire sont toujours noyés dans les détails : incapables de remonter aux principes d’où l’on voit sortir les conséquences, comme une eau vive et pure de sa source, ils se fatiguent à suivre le cours de mille petits ruisseaux qui se troublent à tout moment, qui les égarent dans leurs détours, et les abandonnent ensuite au milieu d’un désert aride. […] Libre des opinions vulgaires, et pensant d’une manière qui n’appartient qu’à lui seul, il parle un langage, vrai dans le fond, mais nouveau et singulier, qui blesserait l’oreille des autres hommes ; vaste et profond dans ses vues, et s’élevant toujours par ses notions abstraites et générales, qui sont pour lui comme des livres abrégés, il échappe à tout moment aux regards de la foule, et s’envole fièrement dans les régions supérieures. […] Il est aisé de le dire : la nature elle-même l’avertit à tout moment de sa faiblesse, et lui marque, en ce genre, les étroites limites de son intelligence.

16. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — J. B. Rousseau. (1671-1741.) » pp. 254-266

Mais, ô moment terrible, ô jour épouvantable, Où la mort saisira ce fortuné coupable4, Tout chargé des liens de son iniquité ! […] Et que vous reste-t-il en ces moments suprêmes ? […]         Là, ses yeux errants sur les flots D’Ulysse fugitif semblaient suivre la trace : Elle croit voir encor son volage héros ; Et, cette illusion soulageant sa disgrâce,         Elle le rappelle en ces mots, Qu’interrompent cent fois ses pleurs et ses sanglots :         « Cruel auteur des troubles de mon âme1         Que la pitié retarde un peu tes pas :         Tourne un moment tes yeux sur ces climats ;         Et, si ce n’est pour partager ma flamme,         Reviens du moins pour hâter mon trépas. […]         « Cruel auteur des troubles de mon âme,         Que la pitié retarde un peu tes pas :         Tourne un moment tes yeux sur ces climats ;         Et, si ce n’est pour partager ma flamme,         Reviens du moins pour hâter mon trépas. » C’est ainsi qu’en regrets sa douleur se déclare : Mais bientôt, de son art employant le secours, Pour rappeler l’objet de ses tristes amours, Elle invoque à grands cris tous les dieux du Ténare.

17. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Canevas

Mais il faut que vous sachiez que tout cela ne dure qu’un moment. […] es enfers à un visiteur, son supplice et ses derniers moments. […] Dans quel monde ignoré, dans quels climats nouveaux le moment du trépas va-t-il plonger mon être ? […] Ma compagne chérie, partout ; en toutes saisons, et dans tous mes moments ! […] Consolations de la Religion à nos derniers moments.

18. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Fénelon 1651-1715 » pp. 118-132

Travaille-t-il, les moments lui paraissent des heures ; s’amuse-t-il, les heures ne lui paraissent plus que des moments. […] N’allez pas lui parler des choses qu’il aimait le mieux il n’y a qu’un moment ; par la raison qu’il les a aimées, il ne les saurait plus souffrir. […] Étudiez-le bien ; puis dites-en tout ce qu’il vous plaira ; il4 ne sera plus vrai le moment d’après que vous l’aurez dit : ce je ne sais quoi5 veut et ne veut pas ; il menace, il tremble ; il mêle des hauteurs ridicules avec des bassesses indignes ; il pleure, il rit, il blandine, il est furieux ; dans sa fureur la plus bizarre et la plus insensée, il est plaisant et éloquent, subtil, plein de tours nouveaux, quoiqu’il ne lui reste pas seulement une ombre de raison. […] Mais attendez un moment : voici une autre scène.

19. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre V. Des sermons de Bossuet. »

Ce ne sont point là de ces froids jeux de mots, de ces antithèses puériles où l’esprit s’est mis à la torture pour faire contraster quelques mots, ou donner par l’opposition un moment d’éclat à des pensées communes : c’est un rapprochement naturel commandé par la force du sujet, et qui frappe d’autant plus, qu’il s’est offert avec plus de facilité. […] « Qu’est-ce que cent ans, qu’est-ce que mille ans, puisqu’un seul moment les efface ? […] Encore une rature laisserait-elle quelques traces du moins d’elle-même, au lieu que ce dernier moment qui effacera d’un seul trait toute votre vie, s’ira perdre lui-même avec tout le reste dans ce grand gouffre du néant ; il n’y aura plus sur la terre aucuns vestiges de ce que nous sommes.

20. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bourdaloue, 1632-1704 » pp. 133-137

Ce qui fit un héros du prince de Condé J’appelle le principe de ces grands exploits cette ardeur martiale qui ; sans témérité ni emportement, lui faisait tout oser et tout entreprendre ; ce feu qui, dans l’exécution, lui rendait tout possible et tout facile ; cette fermeté d’âme que jamais nul obstacle n’arrêta, que jamais nul péril n’épouvanta, que jamais nulle résistance ne lassa, ni ne rebuta ; cette vigilance que rien ne surprenait ; cette prévoyance à laquelle rien n’échappait ; cette étendue de pénétration avec laquelle, dans les plus hasardeuses occasions, il envisageait d’abord tout ce qui pouvoit ou troubler, ou favoriser l’événement des choses : semblable à un aigle dont la vue perçante fait en un moment la découverte de tout un vaste pays ; cette promptitude à prendre son parti, qu’on n’accusa jamais en lui de précipitation, et qui, sans avoir l’inconvénient de la lenteur des autres, en avait toute la maturité ; cette science qu’il pratiquait si bien, et qui le rendait si habile à profiter des conjonctures, à prévenir les desseins des ennemis presque avant qu’ils fussent conçus, et à ne pas perdre en vaines délibérations ces moments heureux qui décident du sort des armées ; cette activité que rien ne pouvait égaler, et qui, dans un jour de bataille, le partageant, pour ainsi dire, et le multipliant, faisait qu’il se trouvait partout, qu’il suppléait à tout, qu’il ralliait tout, qu’il maintenait tout : soldat et général tout à la fois, et, par sa présence, inspirant à tout le corps d’armée, jusqu’aux plus vils membres qui le composaient, son courage et sa valeur, ce sang-froid qu’il savait si bien conserver dans la chaleur du combat, cette tranquillité dont il n’était jamais plus sûr que quand on en venait aux mains, et dans l’horreur de la mêlée ; cette modération et cette douceur pour les siens, qui redoublaient à mesure que sa fierté pour l’ennemi était émue ; cet inflexible oubli de sa personne, qui n’écouta jamais la remontrance, et auquel constamment déterminé, il se fit toujours un devoir de prodiguer sa vie, et un jeu de braver la mort ; car tout cela est le vif portrait que chacun de vous se fait, au moment que je parle, du prince que nous avons perdu ; et voilà ce qui fait les héros1.

21. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Regnard. (1655-1709.) » pp. 242-253

Une école maudite Me coûte, en un moment, douze trous tout de suite1. Me coûte, en un moment, douze trous tout de suite. […] Nérine2 sort d’ici, qui m’a dit qu’Angélique Pour Dorante, votre oncle, en ce moment s’explique ; Que vous jouez toujours, malgré tous vos serments, Et qu’elle abjure enfin ses tendres sentiments. […] De serpents mon cœur est dévoré : Tout semble en un moment contre moi conjuré.

22. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Mirabeau, 1749-1791 » pp. 368-376

D’insignifiantes questions, des conjectures hasardées, des tâtonnements infidèles, voilà tout ce qui, dans ce moment, est en notre pouvoir. […] Manquer le moment décisif, acharner notre amour propre à changer quelque chose à un plan que nous n’avons pas même conçu, et diminuer, par notre intervention indiscrète, l’influence d’un ministre dont le crédit financier est et doit être plus grand que le nôtre. […] Le ciel réserve aux humains, jusqu’à leurs derniers moments, le recours de son indulgence et de ses faveurs. […] Son parti était partout, dans le peuple, dans l’assemblée, dans la cour même ; dans tous ceux enfin auxquels il s’adressait dans le moment.

23. (1882) Morceaux choisis de prosateurs et de poètes des xviii e et xix e siècles à l’usage de la classe de rhétorique

où prendre des jours et des moments de reste dans une vie qui n’est qu’un moment elle-même ? […] Tallart devint stupide depuis quelques moments, et le maréchal de Villeroy perdit toute contenance. […] On part à son moment, on s’arrête à sa volonté, on fait tant et si peu d’exercice qu’on veut. […] Il revient, et dans quel moment ? […] Je ne l’observais qu’à des moments perdus.

24. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre V. De l’Éloquence politique chez les Français. »

Mais quelle idée se fera la postérité, de ce prodigieux Mirabeau, de ce géant politique qui pesa un moment sur la France entière, et qui l’eût peut-être écrasée du poids de son ascendant populaire, si la providence n’eût brisé tout à coup l’instrument qu’elle avait daigné employer pour donner de grandes et terribles leçons aux princes et aux peuples de la terre ? […] Il ne nous serait que trop facile de le prouver par des citations ; mais nous en avons dit assez pour indiquer ce qu’étaient devenus alors le langage de la tribune, et l’éloquence des Mirabeau et des Maury ; nous nous hâtons d’arriver à une époque où l’importance de la cause et le talent de l’orateur ramenèrent, pour un moment, le langage de la raison et la véritable éloquence, dans une assemblée qui comptait encore quelques hommes capables d’entendre l’un et d’apprécier l’autre. […] Renfermée alors dans les paisibles fonctions de la magistrature, et réduite à ne plus se montrer que dans les jours d’apparat, elle ne parle plus qu’un langage étudié, étranger aux beaux mouvements de la véritable éloquence, et froidement subordonné aux convenances, qui glacent à tout moment son enthousiasme, et viennent arrêter son essor.

25. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Voltaire. (1694-1778.) » pp. 140-145

Ils firent lancer sur le toit, contre les portes et contre les fenêtres, des flèches entortillées de mèches allumées : la maison fut en flammes en un moment ; le toit tout embrasé était près de fondre sur les Suédois. […] Charles et ses principaux officiers étaient armés d’épées et de pistolets : chacun tira deux coups à la fois, à l’instant que la porte s’ouvrit, et, dans le même clin d’œil, jetant leurs pistolets et s’armant de leurs épées, ils firent reculer les Turcs plus de cinquante pas ; mais, le moment d’après, cette petite troupe fut entourée. […] Au moment que le roi se vit saisi, la violence de son tempérament et la fureur où un combat si long et si terrible avait dû le mettre firent place tout à coup à la douceur et à la tranquillité ; il ne lui échappa pas un mot d’impatience, pas un coup d’œil de colère ; il regardait les janissaires en souriant, et ceux-ci le portaient en criant Allah, avec une indignation mêlée de respect.

26. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Saint-Simon, 1675-1755 » pp. 223-233

Elle allait et venait du cabinet dans la chambre, en attendant le moment d’aller au passage du roi ; et son maintien, toujours avec ses mêmes grâces, était un maintien de trouble et de compassion que celui de chacun semblait prendre pour douleur. […] Quelques moments après, je vis de loin, vers la porte du petit cabinet, monseigneur le duc de Bourgogne avec un air fort ému et peiné ; mais le coup d’œil que j’assénai vivement sur lui ne m’y rendit rien de tendre, et ne me rendit que l’occupation profonde d’un esprit saisi. […] Monseigneur n’était plus ; on le savait, on le disait, nulle contrainte ne retenait plus à son égard, et ces premiers moments étaient ceux des premiers mouvements peints au naturel et pour lors affranchis de toute politique, quoique avec sagesse, par le trouble, l’agitation, la surprise, la foule, le spectacle confus de cette nuit si rassemblée. […] Un moment après, elles virent un gros bras presque nu relever tout à coup le pavillon, qui leur montra un bon gros Suisse entre deux draps, demi-éveillé et tout ébahi, très-long à reconnaître son monde qu’il regardait fixement l’un après l’autre, et qui, enfin, ne jugeant pas à propos de se lever en si grande compagnie, se renfonça dans son lit et ferma son pavillon.

27. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Seconde section. Des grands genres de poésie — Chapitre IV. Du genre dramatique. » pp. 252-332

Quoique ce danger doive aller toujours croissant, il doit cependant y avoir des moments où la crainte cesse pour faire place à l’espérance. […] Dans ce moment, Auguste mande les principaux d’entre eux : quelle alarme ! […] Mais comme la passion a ses moments de calme, ses repos et ses intervalles, le poète distingue dans le discours de ses personnages le moment tranquille du moment passionné. […] Le discours passionné, c’est-à-dire le moment où les passions se montrent dans leur force, dans leur variété, dans leur désordre, est rendu par un chant qui porte le nom d’air ou d’ariette. […] Il ne songe qu’au moment présent ; il abonde en tableaux délicats, gracieux, en plaisanteries fines, décentes et agréablement exprimées par des couplets.

28. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Chapitre I. Du Pathétique. » pp. 280-317

Mais deux choses en ceci sont bien remarquables : l’une, que le soleil, quoiqu’éclipsé, ne perd rien du fond de ses lumières, et que malgré sa défaillance, il ne laisse pas de conserver la rectitude de son mouvement : l’autre, qu’au moment qu’il s’éclipse, c’est alors que tout l’univers est plus attentif à l’observer et à le contempler, et qu’on en étudie plus curieusement les variations et le système : symbole admirable des états où Dieu a permis que se soit trouvé notre Prince, et où je me suis engagé à vous le représenter. […] Mais, ô moment terrible ! […] Et que vous reste-t-il en ces moments suprêmes ? […] Nos ancêtres nous en ont frayé le chemin, et nous allons le frayer dans un moment à ceux qui viennent après nous. […] Le torrent des âges et des siècles coule devant ses yeux ; et il voit avec un air de vengeance et de fureur de faibles mortels, dans le temps même qu’ils sont emportés dans le cours fatal, l’insulter, en passant, profiter de ce seul moment pour déshonorer son nom, et tomber au sortir de là entre les mains éternelles de sa colère et de sa justice. » Celui-ci est la description du jugement dernier dans le poème de la Religion par Racine le fils.

29. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre VI. De l’Harmonie du Style. »

Ces principes d’harmonie sont donc essentiellement dans la nature, qui n’est elle-même qu’harmonie, et qui ne pourrait subsister un moment sans l’accord admirable de toutes ses parties. […] Mais dans des moments plus tranquilles, dans la peinture des émotions de l’âme, l’éloquence française a prouvé mille fois le pouvoir et le charme de l’harmonie. […] Voilà pourquoi, en grande partie, le Claudien de la prose française, Thomas, est déchu si rapidement de la réputation collégiale dont il avait joui un moment.

30. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Madame de Sévigné 1626-1696 » pp. 52-64

n’a-t-il pas eu un seul moment ? […] Dans ce moment, le cheval s’arrête, le héros tombe entre les bras de ses gens ; il ouvre deux fois de grands yeux et la bouche, et demeure tranquille pour jamais : songez qu’il était mort, et qu’il avait une partie du cœur emportée. […] Il y eut un service solennel dans la ville, et, en un moment, ils se cotisèrent tous pour cette dépense, qui monta à cinq mille francs, parce qu’ils reconduisirent le corps jusqu’à la première ville, et voulurent défrayer tout le train. […] mon Dieu, accordez-moi2 un peu de temps : je voudrais bien donner un échec au duc de Savoie, un mat au prince d’Orange. — Non, non, vous n’aurez pas un seul, un seul moment. » Faut-il raisonner sur cette étrange aventure ?

31. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre III. De la partie oratoire dans les Historiens anciens. Historiens grecs. »

Comme nous ne considérons pour le moment ces beaux discours que sous le rapport de l’art oratoire, nous pourrions nous dispenser de répondre à ces reproches ; mais comme rien de ce qui tend à infirmer la confiance des jeunes gens dans les monuments qu’on leur cite pour des modèles, ne doit rester sans réponse, nous nous bornerons ici à quelques observations générales. […] Son éloquence est aussi animée, aussi entraînante alors, qu’elle vient de vous paraître tranquille et raisonnée, il n’y a qu’un moment. […] Nos troupes sont composées de soldats d’Argos, de Mantinée, d’Athènes, des principales îles : comment, avec de si braves compagnons, douter un moment de la victoire ? […] Le signal est entendu de tous ; se présenter de front, tourner l’ennemi, se déployer sur deux ailes, changer à tout moment la face du combat, est la science du simple soldat, comme des chefs eux-mêmes. […] » Ignores-tu donc que les grands arbres sont longtemps à croître, et qu’il ne faut qu’un moment pour les déraciner ?

32. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Napoléon Ier , 1769-1821 » pp. 428-446

Soldats, lorsque le peuple français plaça sur ma tête la couronne impériale, je me confiai à vous pour la maintenir toujours dans ce haut état de gloire qui seul pouvait lui donner du prix à mes yeux ; mais, dans le même moment, nos ennemis pensaient à la détruire et à l’avilir ; et cette couronne de fer, conquise par le sang de tant de Français, ils voulaient m’obliger à la placer sur la tête de nos plus cruels ennemis : projets téméraires et insensés, que, le jour même de l’anniversaire du couronnement de votre empereur, vous avez anéantis et confondus. […] L’Oder, la Wartha, les déserts de la Pologne, les mauvais temps de la saison n’ont pu vous arrêter un moment. […] Le moment qui nous sépare de l’objet que nous aimons est terrible ; il nous isole de la terre ; il fait éprouver au corps les convulsions de l’agonie. […] J’ai eu de nombreux flatteurs, et le moment présent appartient aux détracteurs acharnés1. […] « Soldats, je dirigerai moi-même tous vos bataillons : je me tiendrai loin du feu, si, avec votre bravoure accoutumée, vous portez le désordre et la confusion dans les rangs ennemis ; mais si la victoire était un moment incertaine, vous verriez votre empereur s’exposer aux premiers coups ; car la victoire ne saurait hésiter, dans cette journée surtout, où il y va de l’honneur de l’infanterie française, qui importe tant à l’honneur de toute la nation.

33. (1868) Morceaux choisis des écrivains contemporains à l’usage des classes supérieurs de l’enseignement classique et spécial. Prose et poésie

Son corps reste encore un moment debout, étendant des mains convulsives, objet d’épouvante et de pitié. […] Il y eut un moment de terreur dans l’armée d’outre-mer. […] On avait donc le temps de passer avant le moment du grand danger. […] Cet acte singulier de bienfaisance, dans un moment de si grande préoccupation, est digne d’attention. […] Dans ce moment, les troupes cheminaient par le sentier d’Albaredo.

34. (1875) Poétique

Quand, à Argos, la statue de Mytis tomba sur celui qui avait tué ce même Mytis et l’écrasa au moment qu’il la considérait, cela fut intéressant, parce que cela semblait renfermer un dessein. […] Qu’un ennemi tue son ennemi, il n’y a rien qui excite la pitié, ni lorsque la chose se fait, ni lorsqu’elle est près de se faire ; il n’y a que le moment de l’action. […] Il y a encore une troisième manière, qui est d’aller jusqu’au moment d’achever, parce qu’on ne connaît pas, et de reconnaître avant que d’achever. […] Être au moment d’achever avec connaissance et ne pas achever, est la plus mauvaise de toutes ces manières. […] Quel que soit le sujet qu’on traite, il faut commencer par le crayonner en général : par exemple, s’il s’agit d’Iphigénie, vous direz : « Une jeune princesse était au moment d’être sacrifiée ; tout à coup elle est enlevée sous le couteau des prêtres, et se trouve transportée dans une contrée lointaine, où elle devient elle-même prêtresse.

35. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Eugénie de Guérin , 1805-1848. » pp. 578-584

Partout ta place sans t’y voir… Ces jeunes filles, ces jeunes gens, nos parents, nos voisins, qui remplissent en ce moment le salon, qui sont autour de toi mort, t’entoureraient vivant et joyeux ; car tu te plaisais avec eux, et leur jeune gaieté t’égayait. […] Ce serait un beau moment de poésie, et je regrette de n’en avoir aucune en train. […] Nous voilà redevenus tranquilles ; rien ne bruite en ce moment que ma plume sur le papier, et une mouche qui bourdonne dans ma chambre.

36. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre II. Éloge de Démosthène par Lucien. »

Mais si sa vie n’a été qu’une suite non interrompue de belles actions et de beaux ouvrages, de grandes vertus et de talents supérieurs, les circonstances de sa mort sont encore au-dessus ; et pour le prouver, Thersagoras propose à Lucien de lui communiquer un ouvrage que lui seul possède, et qui renferme le récit des exploits d’Antipater, et les derniers moments de Démosthène. […] Telle est donc l’heureuse influence des hommes supérieurs, que lors même que les siècles ont dégénéré, leur seule idée réveille et ranime pour un moment quelques étincelles, du moins, des vertus ou des talents qui les ont immortalisés !

37. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie —  Vauvenargues, 1715-1747 » pp. 336-343

Cependant, cet aimable stoïcien, que sa constante vertu, son génie, son humanité, son inflexible courage me rendaient infiniment cher, m’a fait verser bien des larmes sur la faiblesse de sa mort : c’est une extrême pitié de voir tant de vertu, tant de force et de grandeur d’âme vaincues, en un moment, par le plus léger revers au milieu de tant de ressources, et de tant de faveurs de la fortune ! […] Plus on le lit, plus on croit voir un homme enseveli vivant, qui ferait un continuel effort pour soulever la pierre de son sépulcre, et retomberait épuisé au moment même où il entrevoit la lumière. » (Prévost-Paradol. […] « Je vais lire vos Portraits, lui écrivait Voltaire ; si jamais je veux faire celui du génie le plus naturel, de l’homme du plus grand goût, de l’âme la plus haute et la plus simple, je mettrai votre nom au bas. » Vauvenargues disait ailleurs : « On doit se consoler de n’avoir pas les grands talents, comme on se console de n’avoir pas les grandes places : on peut être au-dessus de l’un et de l’autre par le cœur. » Citons encore de lui quelques pensées détachées : « Les feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire. » « Les orages de la jeunesse sont environnés de jours brillants. » « Les premiers jours du printemps ont moins de grâce que la vertu naissante d’un jeune homme. » « La servitude abaisse l’homme jusqu’à s’en faire aimer. » « La liberté est incompatible avec la faiblesse. » « Le fruit du travail est le plus doux plaisir. » « C’est un grand signe de médiocrité que de louer toujours modérément. » « Si vous avez quelque passion qui élève vos sentiments, qui vous rend plus généreux, plus compatissant, plus humain, qu’elle vous soit chère. » « Les conseils de la vieillesse éclairent sans échauffer, comme le soleil d’hiver. » « Les longues prospérités s’écoulent quelquefois en un moment, comme les chaleurs de l’été sont emportées par un jour d’orage. » 1.

38. (1885) Morceaux choisis des classiques français, prose et vers, … pour la classe de rhétorique

Mais pas un moment sa foi et son espérance ne furent ébranlées. […] Il avait dans ces moments l’activité et l’ascendant des hommes supérieurs, et il retombait ensuite dans la nonchalance des hommes ordinaires. […] Vous m’en voyez moi-même, en cet heureux moment, Saisi d’horreur, de joie et de ravissement. […] Moment de stupeur. — Antinoüs va voir, dans la cour, si la flèche a réellement passé par les anneaux. […] Vous, que rien n’y retient, partez dès ce moment, Et méritez mon choix par votre empressement.

39. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

Les anciens genres renouvelés obtinrent un moment de vogue extraordinaire. […] Toute sa sensibilité est dans sa tête ; cependant, par moments, le cœur semble battre en lui. […] moment trop attendu ! […] d’allonger les moments        Cultivez l’utile habitude ! […] Prouvez-le-moi donc, et dans ce moment même.

40. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre quatrième. De la disposition oratoire, ou de l’Ordre mécanique du discours. — Chapitre II. Application du chapitre précédent au discours de Cicéron pour Milon. »

Aussi cet appareil formidable, ces forces militaires, qui étaient, il n’y a qu’un moment, le motif de ses craintes, vont-ils devenir celui de sa confiance. […] Vous voyez par quelle éloquente gradation l’orateur s’élève insensiblement au-dessus des considérations qui semblaient devoir l’arrêter, il n’y a qu’un moment. […] Arrêtons-nous un moment à la belle prosopopée, dans laquelle l’orateur introduit Milon lui-même se glorifiant de la mort de Clodius, et s’écriant : 118« Occidi, occidi, non Sp.  […] « J’ai tué ; oui, Romains, j’ai tué, non un Spurius Mélius, qui encourut le soupçon d’aspirer à la royauté, pour avoir, dans un moment de disette, sacrifié tout son bien à la classe indigente du peuple ; non un Tiberius Graccbus, dont le crime était d’avoir soulevé la multitude pour faire déposer un de ses collègues : et cependant les meurtriers de ces deux grands hommes ont rempli l’univers de la gloire de leur nom.

41. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Jean-Jacques Rousseau, 1712-1778 » pp. 313-335

Ils emploieraient volontiers leur fortune à consumer leur vie entière ; et il n’y en a peut-être pas un qui n’eût réduit ses ans à très-peu d’heures, s’il eût été le maître d’en ôter, au gré de son ennui, celles qui lui étaient à charge, et, au gré de son impatience, celles qui le séparaient du moment désiré. […] si dans ces moments quelque idée de Paris, de mon siècle et de ma petite gloriole d’auteur, venait troubler mes rêveries, avec quel dédain je la chassais à l’instant, pour me livrer sans distraction aux sentiments exquis dont mon âme était pleine ! […] Mais un corps qui souffre ôte à l’esprit sa liberté ; désormais je ne suis plus seul, j’ai un hôte qui m’importune ; il faut m’en délivrer pour être à moi, et l’essai que j’ai fait de ces douces jouissances ne sert plus qu’à me faire attendre avec moins d’effroi le moment de les goûter sans distraction2. […] Si, enfin, dans un moment fatal, toute la race humaine avilie cessait de croire à la justice pour ne plus croire qu’à l’intérêt et au plaisir, si jamais nos yeux devaient voir dans le monde l’abjecte unité de la dépravation, ah ! […] « Un continuel besoin d’épanchement met à tout moment mon cœur sur mes lèvres.

42. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre II. Qualités et devoirs de l’Orateur du Barreau. »

Ce qu’on appelle esprit peut être de quelque usage au barreau, lorsqu’il ne consiste toutefois que dans une réplique vive et animée, dans une saillie du moment, dans une de ces réponses qui portent des coups d’autant plus sûrs, qu’ils sont plus imprévus, et que l’adversaire, frappé comme de la foudre, a laissé à l’audience tout le temps d’apprécier la réponse, avant qu’il ait eu celui de lui trouver une réplique. […] Il ne faut qu’un moment de l’attention la plus légère, pour s’en convaincre et pour reconnaître combien la probité est nécessaire à l’avocat.

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