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174. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre V. — Qualités particulières du Style »

Alors une foule de dangers menaçants se présentent à son imagination effrayée : ce sont des fossés escarpés, des précipices affreux, des abîmes sans fond, des gouffres sans issue ; ne distinguant plus la terre solide de l’eau non encore glacée, il redoute également et le marais fangeux et le lac paisible d’où sort une source qui arrose ses prairies. […] Il se trouve dans la bouche de ce vieillard de Syracuse qui s’adresse au peuple assemblé pour délibérer sur le sort des prisonniers athéniens, après la guerre de Sicile. […] Vous n’avez point sans doute oublié que ce même Nicias, sur le sort duquel vous allez prononcer, est celui qui plaida votre cause dans rassemblée des Athéniens, et qui employa tout son crédit et toute son éloquence pour les détourner de vous faire la guerre. […] Vous répande les ténèbres, et la nuit est sur la terre : c’est alors que les bêtes de forêts marchent dans l’ombre ; alors les rugissements des lionceaux appellent la proie, et demandent à Dieu la nourriture promise au animaux, Mais le soleil s’est levé, et déjà les bêtes sauvages se sont retirées ; elles sont allées se placer dans leurs tanières : l’homme alors sort pour le travail du jour, et accomplit son œuvre jusqu’au soir.

175. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — La Fontaine 1622-1695 » pp. 339-378

La beauce 3 La Beauce avait jadis des monts en abondance,   Comme le reste de la France :   De quoi la ville d’Orléans, Pleine de gens heureux, délicats, fainéants,   Qui voulaient marcher à leur aise,   Se plaignit, et fit la mauvaise ;   Et messieurs les Orléanais   Dirent au sort tout d’une voix,   Une fois, deux fois et trois fois,   Qu’il eût à leur ôter la peine De monter, de descendre, et remonter encor. […] leur répondit le Sort, Vous faites les mutins ! […] Allons, vieillard, et sans république Il n’importe à la république Que tu fasses ton testament. » La Mort avait raison : je voudrais qu’à cet âge On sortît de la vie ainsi que d’un banquet1, Remerciant son hôte1, et qu’on fit son paquet : Car de combien peut-on retarder le voyage ? […] Je sors de la vie comme d’une maison où j’ai reçu l’hospitalité, disait Caton.

176. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre II. Des qualités du style » pp. 79-118

En général, on doit se garder des archaïsmes, mais cela ne doit pas aller jusqu’à la crainte de réintégrer dans la langue quelques mots heureux, utiles, qui n’en auraient pas dû sortir. […] A peine nous sortions des portes de Trézènes ; Il était sur son char ; ses gardes affligés Imitaient son silence, autour de lui rangés. […] …………………………………………………………………… Sors donc de devant moi, monstre d’impiété.

177. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre IV. des topiques ou lieux. — lieux applicables a l’ensemble du sujet. » pp. 48-63

« Sans doute, dit-il, celui qui se borne à dire qu’une ville a été prise embrasse dans ce seul mot toutes les horreurs que comporte un pareil sort ; mais il ne remue pas les entrailles, et a l’air d’annoncer purement et simplement une nouvelle : mais développez tout ce qui est renfermé dans ce mot, alors on verra les flammes qui dévorent les maisons et les temples ; alors on entendra le fracas des toits qui s’abîment, et une immense clameur formée de mille clameurs ; on verra les uns fuir à l’aventure, les autres étreindre leurs parents dans un dernier embrassement ; d’un côté, des femmes et des enfants qui gémissent, et de l’autre, des vieillards qui maudissent le sort qui a prolongé leur vie jusqu’à ce jour ; puis, le pillage des choses profanes et sacrées, les soldats courant en tout sens pour emporter ou pour chercher leur proie, chacun des voleurs poussant devant soi des troupeaux de prisonniers chargés de chaînes, des mères s’efforçant de retenir leurs enfants, enfin les vainqueurs eux-mêmes se battant entre eux à la moindre apparence d’un plus riche butin.

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