Les salons ont remplacé, au commencement du xviie siècle, ce qui est indispensable à toute littérature ; un public, — en attendant que peu à peu, par les progrès du goût, se formât un véritable public, digne des auteurs, et capable de les apprécier. […] Partout nous y trouvons les influences mondaines, partout aussi, chez les écrivains, la préoccupation de rendre au public ce qu’ils lui ont emprunté. […] Vous supposerez qu’après la lecture publique de l’Iliade, un de ses disciples l’en remercie. […] Je ne veux pas dire par là que notre grand Corneille ait enfin trouvé un rival ou un successeur, quoique la voix publique le proclame ; la voix publique a souvent tort, dans ces matières délicates. […] Est-ce une raison pour que la Cour le néglige avec le public, et oublie sa gloire passée ?
S’il rapporte des choses fausses, ou qu’il donne pour des vérités de simples conjectures, il trompe le public, il en impose à l’univers pour lequel il écrit. […] Dans la première, on considère l’homme public, plus que l’homme privé. Dans la seconde, on considère autant l’homme privé que l’homme public. […] Elles y joignent, au récit des événements publics et généraux, les particularités de leur vie, ou leurs principales actions. […] Cet ouvrage est un chef-d’œuvre, et le plus propre, en ce genre, à former les hommes, soit pour la vie publique, soit pour la vie privée.
Ce fut une fête pour la curiosité publique ; et ce succès toujours croissant, qui étonna la modestie d’un auteur désintéressé, lui ouvrit les portes de l’Académie en 1693. […] Si on le prie de s’asseoir, il se met à peine sur le bord d’un siége ; il parle bas dans la conversation, et il articule mal : libre néanmoins sur les affaires publiques, chagrin contre le siècle, médiocrement prévenu1 des ministres et du ministère, il n’ouvre la bouche que pour répondre ; il tousse, il se mouche sous son chapeau, il crache presque sur soi, et il attend qu’il soit seul pour éternuer, ou, si cela lui arrive, c’est à l’insu de la compagnie ; il n’en coûte à personne ni salut, ni compliment : il est pauvre 2. […] Commence-t-il à chanceler dans le poste où on l’avait mis, tout le monde passe facilement à un autre avis ; en est-il entièrement déchu, les machines qui l’avaient guindé si haut, par l’applaudissement et les éloges, sont encore toutes dressées pour le faire tomber dans le dernier mépris ; je veux dire qu’il n’y en a point qui le dédaignent mieux, qui le blâment plus aigrement, et qui en disent plus de mal, que ceux qui s’étaient comme dévoués à la fureur1 d’en dire du bien2 Pamphile ou le vaniteux Un Pamphile est plein de lui-même, ne se perd pas de vue, ne sort point de l’idée de sa grandeur, de ses alliances, de sa charge, de sa dignité : il ramasse, pour ainsi dire, toutes ses pièces, s’en enveloppe3 pour se faire valoir ; il dit : Mon ordre, mon cordon bleu 4 ; il l’étale ou il le cache par ostentation : un Pamphile, en un mot, veut être grand ; il croit l’être, il ne l’est pas, il est d’après un grand1 Si quelquefois il sourit à un homme du dernier ordre, à un homme d’esprit, il choisit son temps si juste qu’il n’est jamais pris sur le fait ; aussi la rougeur lui monterait-elle au visage s’il était malheureusement surpris dans la moindre familiarité avec quelqu’un qui n’est ni opulent, ni puissant, ni ami d’un ministre, ni son allié, ni son domestique2 Il est sévère et inexorable à qui n’a point encore fait sa fortune : il vous aperçoit un jour dans une galerie, et il vous fuit ; et le lendemain, s’il vous trouve en un endroit moins public, ou, s’il est public, en la compagnie d’un grand, il vient à vous, et il vous dit : Vous ne faisiez pas hier semblant de nous voir. […] « Phédon, de son côté, a toujours “les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre…” Il est toujours “libre sur les affaires publiques, chagrin contre le siècle, médiocrement prévenu des ministres et du ministère”. […] Voudrait-il insulter à la crainte publique, Et que le chef des Grecs, irritant les destins, etc.
Huit ans après, porté à l’assemblée nationale par les suffrages de l’admiration publique, il se démit de son mandat après la journée orageuse du 15 mai. […] Là où la vie publique est établie, tout homme riche est patricien ou peut le devenir. […] Dès ses jeunes années, le fils du patricien, c’est-à-dire de l’homme public, envisage avec passion l’avenir qui l’attend en face de ses concitoyens. […] Mais, chez les peuples vivants, la culture des lettres est, après la religion, le premier trésor public, l’arome de la jeunesse et l’épée de l’âge viril1. […] Le droit est la seconde initiation à la vie publique.