Je conviens avec vous que les belles-lettres et les sciences ont causé quelquefois beaucoup de mal. […] Les épines attachées à la littérature et à un peu de réputation ne sont que des fleurs en comparaison des autres maux qui de tout temps ont inondé la terre. […] J’ai soixante-seize ans, et je sors à peine d’une grande maladie qui a traité fort mal mon corps et mon âme pendant six semaines. […] Mes yeux sont enfoncés de trois pouces ; mes joues sont du vieux parchemin mal collé sur des os qui ne tiennent à rien. […] Voltaire, de tous les malades, est celui qui a parlé le plus joliment de ses maux.
Ils se conservent dans un repos de corruption, et parmi des maux connus et accoutumés. […] J’ai la bouche forte, et les lèvres assez rouges d’ordinaire, et ni bien ni mal taillées. […] Ce qu’il y a encore de mal en moi, c’est que j’ai quelquefois une critique trop sévère. […] que j’étais mal instruite d’une santé qui m’est si chère ! […] combien d’intentions droites mal expliquées, et combien de saintes actions empoisonnées ?
Que je voudrais bien tenir un de ces puissants de quatre jours, si légers sur le mal qu’ils ordonnent, quand une bonne disgrâce a cuvé son orgueil ! […] Le mal est fait, il germe, il rampe, il chemine, et rinforzando 3, de bouche en bouche, il va le diable ; puis tout à coup, ne sais comment, vous voyez la calomnie se dresser, siffler, s’enfler, grandir à vue d’œil. […] Voici ce qu’il écrivait à un de ses amis, l’abbé Nicaise : « La calomnie ne m’a fait aucun mal : j’en ai avalé le calice, où, dans la vérité, je n’ai trouvé l’amertume que l’on pourroit croire.
Il faut donc s’attendre qu’en vivant avec les hommes on trouvera des humeurs fâcheuses, des gens qui se mettront en colère sans sujet, qui prendront les choses de travers, qui raisonneront mal, qui auront un ascendant plein de fierté, ou une complaisance basse et désagréable. […] Quelque grands que soient les travers que nous trouvons auprès de nous, ils ne nuisent qu’à ceux qui les ont et ne nous font aucun mal, à moins que nous n’en recevions volontairement l’impression. […] Ces maux de nos semblables, si nous pouvions les regarder d’une vue tranquille et charitable, nous seraient des instructions d’autant plus utiles, que nous en verrions bien mieux la difformité que des nôtres, dont l’amour-propre nous cache toujours une partie ; ils nous pourraient donner lieu de remarquer que les passions font d’ordinaire un effet tout contraire à celui que l’on prétend.