C’est la plus variée dans ses formes, et la plus riche : on images et eu beautés ; elle est faite pour plaire à. l’esprit et nous faire connaître les objets avec les qualités qui leur appartiennent et les circonstances qui s’y rattachent ; elle rappelle les événements passés et nous les place sous les yeux comme s’ils s’accomplissaient au moment où nous les lisons ; elle nous fait partager toutes les sensations que les écrivains ou leurs héros ont éprouvées eux-mêmes.
Tout cela est bien pur et bien innocent ; et néanmoins l’Église abhorre tellement le sang, qu’elle juge encore incapables du ministère de ses autels ceux qui auraient assisté à un arrêt de mort, quoique accompagné de toutes ces circonstances si religieuses51 : par où il est aisé de concevoir quelle idée l’Église a de l’homicide52. […] En effet, un homme qui meurt après avoir prédit lui-même clairement toutes les circonstances de sa mort ; un homme qui meurt en faisant des miracles, et les plus grands miracles, pour montrer qu’il n’y a rien que de surhumain et de divin dans sa mort ; un homme dont la mort, bien considérée, est elle-même le plus grand de tous les miracles, puisque bien loin de mourir par défaillance, comme le reste des hommes, il meurt au contraire par un effort de sa toute-puissance ; mais ce qui surpasse tout le reste, un homme qui par l’infamie de sa mort parvient à la plus haute gloire, et qui, expirant sur la croix, triomphe par sa croix même du prince du monde, dompte par sa croix l’orgueil du monde, érige sa croix sur les ruines de l’idolâtrie et de l’infidélité du monde, n’est-ce pas un homme qui meurt en Dieu, ou, si vous voulez, un Homme-Dieu167 ? […] À l’entendre parler de sa passion longtemps avant sa passion même, et sans que les Juifs eussent encore formé nul dessein contre lui, on dirait qu’il en parle comme d’un événement déjà arrivé et dont il raconte l’histoire : tant il est exact à en marquer jusqu’aux moindres circonstances ; et, à le voir le jour de sa mort subir les différents supplices qu’il endure, on croirait que les bourreaux qui le tourmentent sont moins les exécuteurs des jugements rendus contre sa personne que de ses prédictions… C’est moi, disait-il à ses disciples, en les entretenant de sa mort prochaine, c’est moi qui suis cet homme de douleur annoncé par Isaïe168.
Selon ses propres expressions, « il cherche d’autres enrichissements et étend davantage les circonstances de ses récits ». […] Il faut bien déclarer cependant que, si Jean-Baptiste Rousseau se montre souvent habile versificateur, on ne peut reconnaître en lui qu’un poète lyrique de parti pris, par calcul et de circonstance.
Préface Ce choix de morceaux destinés à être lus, médités et appris par cœur vient après mille autres excellents recueils qui l’ont préparé ; s’il se recommande à l’attention, c’est par l’exactitude avec laquelle a été réalisé le programme suivant. Tous ces extraits ont été gradués d’après l’ordre de difficulté croissante, avec un tel soin, que par degrés l’esprit peut passer de l’anecdote intime et familière à l’expression la plus noble du sentiment moral et religieux. Pour mettre ces études littéraires d’accord avec les autres études de nos élèves, les sujets contenus dans chaque volume se rattachent autant que possible aux questions d’histoire, aux programmes de sciences, aux ouvrages des auteurs classiques grecs, latins et français qui sont imposés à chaque classe. Ces rapports concourent à l’unité de l’instruction, facilitent le travail de la mémoire et donnent le goût et l’habitude de l’ordre et de la méthode ; par-là toutes les parties de l’enseignement peuvent se soutenir et se compléter. En adoptant l’ordre logique des sujets, de préférence à l’ordre chronologique des auteurs, il a été possible de rapprocher un poète d’un orateur, un ancien d’un moderne ; rapprochement fécond qui contient plus d’une leçon de goût et provoque la curiosité critique du lecteur.