Le célèbre La Place 2 y faisait, au nom du gouvernement, l’examen de cent quatre-vingts candidats au grade d’élève sous-lieutenant. […] Dès les premières questions, La Place reconnaît une fermeté d’esprit qui le surprend. […] La Place est touché ; il embrasse le jeune homme, et lui annonce qu’il est le premier de la promotion 5 ; l’École se lève tout entière, et accompagne en triomphe dans la ville le fils du boulanger de Nancy, le général Drouot6. Vingt ans après, La Place disait à l’empereur : un des plus beaux examens que j’aie vu passer dans ma vie est celui de votre aide de camp, le jeune Drouot. […] La Place, célèbre géomètre, astronome et physicien français, naquit en 1749 d’une famille de pauvres cultivateurs, et mourut en 1827.
On sait que Théophraste achetant un jour des légumes sur la place, la marchande reconnut à son accent qu’il était étranger. […] L’ombre des écoles produit des sophistes ; c’est au soleil de la place publique que naissent les orateurs. […] Longtemps il stationnait dans l’Agora, la place aux nouvelles, aux commérages, aux scandales du jour. […] Et quand il ne peut y assister, n’y envoie-t-il pas ses esclaves pour présider à sa place ? […] Vous verra-t-on toujours aller aux nouvelles sur la place et vous demander : Qu’y a-t-il de nouveau ?
Prépare-toi, par des mœurs pures et par l’amour de la justice, une place dans l’heureux séjour de la paix1. […] Un homme mou et amusé ne peut jamais être qu’un pauvre homme2 ; et s’il se trouve dans de grandes places, il n’y sera que pour se déshonorer. […] En sa place, vous trouverez un je ne sais quoi qui n’a ni forme ni nom, qui n’en peut avoir, et que vous ne sauriez définir deux instants de suite de la même manière. […] J’irais de place en place jusque dans la dernière de la domination du roi. Je ne prêterais aucun serment, lorsque le roi n’aurait plus aucune place dans mon diocèse ; alors je ne m’en irais jamais volontairement, et je me laisserais mettre en prison plutôt que de quitter mon troupeau.
Quand le terme qui exprime l’objet principal a été mis à la place qui lui convient, on range à sa suite les termes accessoires, chacun selon le degré d’intérêt qu’il renferme. […] Veut-on savoir, dit Cicéron, combien il importe de donner à chaque mot la place qui lui convient ? […] Nous voyons, au contraire, le même sujet mis à la première place, dans la seconde proposition, parce que l’intérêt principal lui est revenu. […] Cette place lui est due, à raison de l’intérêt qu’il renferme ; il est suivi de ses compléments direct et indirect, et enfin du verbe debent, qui termine agréablement la première partie de la phrase. […] Vous avez traîné hors de chez lui le cadavre sanglant de Clodius, vous l’avez jeté sur la place publique, vous l’avez abandonné à la voirie pour servir de pâture aux chiens dévorants.
Place qui convient aux mœurs. […] Place dans la péroraison. […] Place de la description. […] Place de la réfutation. — 3. […] Place de la réfutation.
Je le lus et je le relus, ce cruel portrait ; je l’aurois trouvé très-joli, s’il eût été d’une autre que de moi et d’un autre que de vous : je le trouvai même si bien enchâssé, et tenant si bien sa place dans le livre, que je n’eus pas la consolation de me pouvoir flatter qu’il fût d’un autre que vous. […] Je trouvai que la place où étoit ce portrait étoit si juste, que l’amour paternel vous avoit empêché de vouloir défigurer cet ouvrage en l’ôtant d’un lieu où il tenoit si bien son coin. […] Le voilà donc mort, ce grand ministre, cet homme si considérable qui tenait une si grande place, dont le moi, comme dit M. […] Faites donc comme cet homme, tirez les mêmes conséquences, et songez que cette même ville a été autrefois baignée du sang d’un nombre infini de martyrs ; qu’aux premiers siècles toutes les intrigues du conclave se terminaient à choisir entre les prêtres celui qui paraissait avoir le plus de zèle et de force pour soutenir le martyre ; qu’il y eut trente-sept papes qui le souffrirent l’un après l’autre, sans que la certitude de cette fin leur fît fuir ni refuser cette place où la mort était attachée, et quelle mort ! […] C’est à dire de se faire payer à votre place.
Il serait difficile aux modernes de lui assigner une place précise dans les quatre genres qu’ils ont créés. […] Worms, Spire, Mayence, Landau, vingt autres places de nom, ouvrent leurs portes ; Merci ne peut les défendre et ne paraît plus devant son vainqueur. […] On saura assigner à chaque partie de la disposition sa place naturelle et l’étendue qui lui convient. […] Dans la poésie, il ne faut point avoir égard aux hémistiches et s’y arrêter comme à une place marquée par le rhythme. […] Le goût et l’habitude auront bientôt indiqué la place où le repos sera le plus agréablement placé.
Enfin dans toutes les langues analytiques, en anglais, en italien, en espagnol, comme en français, le génie de la langue, le point de vue où l’on se place pour apprécier les relations logiques entre les mots, la liaison des idées surtout, loi souveraine de toute construction, justifient, exigent même, en certains cas, ces sortes de contraventions à la construction naturelle, mais on peut toujours, me semble-t-il, les expliquer facilement d’après ce que j’ai dit, et elles ne détruisent pas le principe. […] Une fois les relations clairement indiquées par les terminaisons, qu’importe la place des mots ? […] Enfin, les saillies de l’imagination, le concours d’une foule d’idées qui se présentent ensemble et se heurtent en quelque sorte pour se faire passage, la fougue, l’impatience, le délire de la passion qui s’emporte, et jettent le désordre dans l’esprit, peuvent engager l’écrivain à enlever les mots à leur place ordinaire, et à bouleverser même des phrases entières. […] Cette figure distrait les mots de leur place naturelle et les transporte dans une autre pour donner à la phrase plus de vigueur, d’élégance ou d’harmonie120. […] « Seulement, ajoute-t-il, nous ne sommes pas les maîtres, nous autres auteurs, de tailler les mots et de les polir pour les lier convenablement ensemble ; nous sommes forcés de les prendre tels qu’ils sont et de leur choisir une bonne place ; et l’un des moyens les plus efficaces pour rendre la phrase nombreuse, gracieuse, énergique, c’est de savoir intervertir à propos l’ordre des mots, nec aliud potest sermonem facere numerosum quam opportuna ordinis mutatio 121. » Naturellement les langues transpositives se prêtent beaucoup mieux à ces inversions que les langues analogues.
Deux vérités opposées s’éclairent en se rapprochant, comme deux couleurs opposées se font ressortir l’une l’autre ; exemples : La jeunesse vit d’espérance, la vieillesse de souvenir ; — ce ne sont pas les places qui honorent les hommes, mais les hommes qui honorent les places. — Pourquoi la forme de la phrase ne chercherait-elle pas à exprimer un contraste que comporte si bien le fond de l’idée ? […] Cette contre-vérité, par laquelle on loue en apparence ce qu’on blâme en réalité, trouve aussi bien sa place dans le ton noble et sérieux que dans le plaisant et le familier. […] Loin de rougir, ils briguent une frivole gloire, et triomphent de ce qu’on chante encore au pied du Capitole, et de ce que, à de place du fer de leur ancêtre, la lyre et le pinceau chargent leurs faibles moins. […] A la place du fer, ce sceptre des Romains.
Tantôt on commence par les plus faibles, tantôt au contraire on place en avant les plus fortes. […] Elle énonce clairement la vérité qu’on veut prouver, et se place immédiatement après l’exorde. […] La narration oratoire est l’exposé des faits nécessaires à l’intelligence de la cause ; elle se place après la proposition. […] La réfutation est plus facile alors, parce qu’on suit pas à pas son compétiteur et qu’on se place sur le même terrain. […] 6° Il met chacun à sa place les matériaux qui doivent servir à chaque partie du palais. — C’est l’ordre de la disposition.
Il est parti, il a quitté la place, il s’est enfui, il s’est élancé loin de nous. […] Verrès a été substitué en leur place. […] Les esclaves brisent les portes, arrachent les barres, ébranlent avec des leviers la statue pour l’ôter de sa place. […] Personne pendant ces jours n’a pu vous parler chez vous, ni vous voir sur la place publique. […] Plein de fureur, et ne respirant que le crime, il vient sur la place publique.
Quelles choses vous furent dites dans la place où je me trouve ! […] Que sont devenus ces importants personnages qui méprisaient Homère, qui ne songeaient dans la place qu’à l’éviter, qui ne lui rendaient pas le salut, ou qui le saluaient par son nom, qui ne daignaient pas l’associer4 à leur table, qui le regardaient comme un homme qui n’était pas riche, et qui faisait un livre ? […] Un homme de mérite, et qui est en place, n’est jamais incommode par sa vanité ; il s’étourdit moins du poste qu’il occupe, qu’il n’est humilié par un plus grand qu’il ne remplit pas, et dont il se croit digne : plus capable d’inquiétude que de fierté ou de mépris pour les autres, il ne pèse qu’à soi-même. […] Aux curieux L’on court les malheureux pour les envisager, l’on se range en haie, ou l’on se place aux fenêtres, pour observer les traits et la contenance d’un homme qui est condamné, et qui sait qu’il va mourir : vaine, maligne, inhumaine curiosité1. Si les hommes étaient sages, la place publique serait abandonnée, et il serait établi qu’il y aurait de l’ignominie seulement à voir de tels spectacles.
Elles constatent, d’un côté, l’existence d’un mouvement qui ne pourrait se prolonger sans péril pour l’instruction littéraire de la jeunesse ; et, de l’autre, la nécessité de réagir puissamment contre cette direction, en accordant une place plus considérable à l’enseignement des belles-lettres. […] Plusieurs questions qui, malgré leur importance, trouvent rarement place dans les traités élémentaires, ont été de notre part l’objet d’un soin particulier. […] D’illustres princes de l’Église n’ont pas dédaigné d’applaudir à nos efforts ; de nous féliciter d’avoir publié ce travail consciencieux, qui non seulement ne contient rien de contraire aux principes de la saine doctrine en ce qui concerne la foi et les bonnes mœurs, mais encore est très propre à éclairer l’esprit des jeunes humanistes, à épurer leur goût et à orner leur cœur, et qui mérite une place distinguée parmi les livres classiques édités de nos jours ; de nous louer d’avoir mis de la netteté dans notre plan, de la clarté dans notre méthode, de la justesse dans nos définitions, et surtout d’avoir rattaché à notre enseignement les modèles si parfaits qu’offrent les poètes bibliques et liturgiques, trop indignement méconnus ; de nous permettre de compter sur leurs plus favorables dispositions à l’égard de nos travaux, et sur la reconnaissance de tous les amis des lettres, mais surtout des lettres chrétiennes ; d’apprécier toute l’importance de notre œuvre, et d’appeler sur elle les bénédictions les plus abondantes ; enfin, de nous exhorter à servir la cause des bonnes-lettres avec un zèle qui ne se ralentisse jamais.
Noblesse, fortune, un rang, des places, tout cela rend si fier ! […] On me dit que, pendant ma retraite économique, il s’est établi dans Madrid un système de liberté sur la vente des productions, qui s’étend même à celle de la presse ; et que, pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs. […] Le désespoir m’allait saisir : on pense à moi pour une place ; mais, par malheur, j’y étais propre : il fallait un calculateur, ce fut un danseur qui l’obtint.
Pour moi, je pleurais de joie, lorsque je lisais ces pages ; je ne passais point de nuit sans parler à Alcibiade, Agésilas et autres ; j’allais dans la place de Rome, pour haranguer avec les Gracques, et pour défendre Caton, quand on lui jetait des pierres4. […] Mais il rachetait ces défauts par les qualités qui donnent le succès ; il était enjoué, plaisant, laborieux, d’une conversation légère et agréable, d’une repartie vive, quoiqu’il parlât sans feu et sans énergie ; enfin, à cette sagesse spécieuse qui plaît aux esprits modérés, il joignait les agréments variés qui usurpent si souvent la place des talents solides, et leur enlèvent la faveur du monde et les récompenses des princes1. […] « Je vais lire vos Portraits, lui écrivait Voltaire ; si jamais je veux faire celui du génie le plus naturel, de l’homme du plus grand goût, de l’âme la plus haute et la plus simple, je mettrai votre nom au bas. » Vauvenargues disait ailleurs : « On doit se consoler de n’avoir pas les grands talents, comme on se console de n’avoir pas les grandes places : on peut être au-dessus de l’un et de l’autre par le cœur. » Citons encore de lui quelques pensées détachées : « Les feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire. » « Les orages de la jeunesse sont environnés de jours brillants. » « Les premiers jours du printemps ont moins de grâce que la vertu naissante d’un jeune homme. » « La servitude abaisse l’homme jusqu’à s’en faire aimer. » « La liberté est incompatible avec la faiblesse. » « Le fruit du travail est le plus doux plaisir. » « C’est un grand signe de médiocrité que de louer toujours modérément. » « Si vous avez quelque passion qui élève vos sentiments, qui vous rend plus généreux, plus compatissant, plus humain, qu’elle vous soit chère. » « Les conseils de la vieillesse éclairent sans échauffer, comme le soleil d’hiver. » « Les longues prospérités s’écoulent quelquefois en un moment, comme les chaleurs de l’été sont emportées par un jour d’orage. » 1. […] Vauvenargues n’a pas ce courage intéressé qui aime la guerre pour l’avancement, pour ce qu’elle rapporte, et place l’héroïsme à intérêts ; ce qui lui plaît, c’est la mort qu’on brave, c’est l’emploi des qualités fortes, la fermeté, la patience, les nuits laborieuses, les longues marches, avec la faim et la soif pour compagnes, tout ce qui trempe l’âme, tout ce qui l’élève.
Mais s’ils sont employés dans un sens déterminé, il faut mettre l’article : = Cet homme n’est pas dépourvu des grands talents qu’exige sa place. Le substantif, talents, a ici un sens déterminé, que ces mots, qu’exige sa place, servent à lui donner. […] Mais si on le place après ces substantifs, il faut suivre la règle ordinaire, et dire, les pieds nus, les jambes nues, la tête nue. […] Place des adjectifs. […] Le verbe faire peut être mis à la place d’un verbe qu’on ne veut point répéter.
Plus soucie encore de plaire que d’instruire, de charmer que d’être utile, il chercha surtout le bruit, l’éclat, la gloire, la première place dans un siècle sur lequel il régna et dont l’influence régnait elle-même sur l’Europe. […] Un mot mis hors de sa place gâte la plus belle pensée. […] Les places destinées aux gens de lettres sont données à l’intrigue, non au talent. […] La principale origine de ces horribles couplets, qui ont perdu à jamais le célèbre et malheureux Rousseau, vient de ce qu’il manqua la place qu’il briguait à l’Académie. […] Lorsqu’on m’attaque sur ma naissance, ne dois-je pas à ma famille de répondre que je suis né égal à ceux qui ont la même place que moi, et que si j’ai parlé sur cet article avec la modestie convenable, c’est parce que cette même place a été occupée autrefois par les Montmorency et par les Châtillon ?
Chaque vérité est mise en sa place par rapport au tout. […] Mais il faut avoir tout vu, tout pénétré, et tout embrassé, pour savoir la place précise de chaque mot2. […] Changez seulement les noms ; mettez les poëtes et les orateurs en la place des architectes. […] Que votre grandeur ne vous empêche jamais de descendre avec bonté jusqu’aux plus petits pour vous mettre en leur place, et que cette bonté n’affaiblisse jamais ni votre autorité, ni leur respect. […] La place de chaque mot.
Sans la disposition, qui établit dans les idées l’enchaînement nécessaire pour que chacune soit à sa place et produise son effet, l’invention n’est rien ; ce n’est plus le monde, c’est le chaos. […] Et, en effet, il faut avoir tout vu, tout pénétré, tout embrassé, pour savoir la place précise de chaque mot. » Les plus profonds rhéteurs du xviiie siècle semblent renfermer toute la rhétorique dans la disposition et l’élocution. […] « L’écrivain, dit Fénelon, doit remonter d’abord à un premier principe… De ce principe, comme du centre, se répandra la lumière sur toutes les parties de l’ouvrage, de même qu’un peintre place dans son tableau le jour, en sorte que d’un seul endroit il distribue à chaque partie son degré de lumière. […] Cette unité de dessein fait qu’on voit d’un seul coup d’œil l’ouvrage entier, comme on voit de la place publique d’une ville toutes les rues et toutes les portes, quand les rues sont droites, égales et en symétrie. […] L’unité de dessein bien déterminée, il s’agit de distribuer les groupes d’idées, de les mettre chacun en sa place, d’après leur génération et leur dépendance, d’enchaîner l’un à l’autre tous les anneaux, à mesure qu’on les reconnaît, sinon de la même forme, au moins du même métal.
Dans le corps humain, si vous mettez une partie à la place d’une autre, quoique le reste demeure comme il était, n’aurez-vous pas un monstre ? […] Et ne mettez-vous pas dans votre esprit, à la place du héros dont parle l’Écriture, celui dont je viens vous parler ? […] Conduites d’armées, sièges de places, prise de villes, passages de rivières, attaques-hardies, retraites honorables, campements bien ordonnés, combats soutenus, batailles gagnées, ennemis vaincus par la force, dissipés par l’adresse, lassés et consumés par une sage et noble patience ? […] La narration se place ordinairement à côté de la proposition : elle contient le récit des faits qui se rattachent au sujet ; mais ce récit peut se placer ailleurs, si on le juge à propos. […] « Quel sera le crime de l’homme du roi, qui, trompé dès le début de son expédition, frustré de la moitié des forces qu’on s’était engagé à lui fournir, enchaîné bientôt par une puissance absolue, dépourvu de tous moyens, sans vivres, sans argent, sans vaisseaux, sans soldats, traversé par mille obstacles, oublié de sa cour, tandis que les ennemis recevaient des renforts multipliés de la leur ; malgré l’excessive infériorité de ses forces, malgré l’esprit de sédition et de vertige répandu dans une armée qui n’a ni solde, ni nourriture ; malgré la désertion journalière et la défection totale de cette armée sans cesse quittant ses drapeaux pour aller joindre l’ennemi, trouve moyen de faire la guerre pendant trois ans sans interruption ; prend dix places, en manque une, et la manque parce que son escadre l’abandonne et laisse la mer libre à l’escadre ennemie ; gagne dix batailles, en perd une, et la perd, parce qu’une partie de ses troupes disparaît au commencement de l’action, et le laisse sur le champ de bataille, au moment où il fond sur l’ennemi ; dispute le terrain pied à pied ; lorsqu’il ne peut plus se défendre, tient pendant cinq mois en échec des forces vingt fois supérieures aux siennes ; et après avoir épuisé toutes les ressources que son zèle et son imagination pouvaient lui suggérer, après avoir payé et nourri de son argent le peu de troupes qui lui restait, est enfin obligé de rendre une ville2 bloquée par terre et par mer, une ville prise par la famine, où il ne restait pas un grain de riz, où l’on avait mangé les arbres et le cuir, sans autre défense, en un mot, que quelques canonniers, et une poignée de soldats, qui n’avaient plus la force de remuer un canon, même pas celle de se trainer jusqu’aux remparts.
[Notice] Jean Racine, le plus accompli de nos poëtes, eût sans aucun doute pris place, s’il avait recherché cette gloire, entre nos premiers prosateurs : on le reconnaîtra par ses lettres, quelques œuvres polémiques et des fragments d’histoire, fort bien écrits, qu’il nous a laissés, surtout par l’éloge qu’il a fait de Pierre Corneille. […] Ainsi, lorsque, dans les âges suivants, on parlera avec étonnement des victoires prodigieuses et de toutes les grandes choses qui rendront notre siècle l’admiration de tous les siècles à venir, Corneille, n’en doutons point, Corneille tiendra sa place parmi toutes ces merveilles. […] Il a toujours reconnu lui-même les places qu’il a voulu attaquer ; et, en cette noble fonction de capitaine, il a eu plusieurs fois des hommes tués et blessés à côté de lui. […] Il n’est pas croyable combien de citadelles il a fait construire, combien il en a réparé, de combien de nouveaux bastions il a fortifié ses places.
De là, ces moyens de l’éloquence populaire, si souvent et si heureusement employés par ce grand orateur dans des circonstances purement judiciaires ; de là, ces moyens pathétiques, que nous renverrions avec raison au théâtre, où ils nous sembleraient à leur place naturelle ; ressources que les anciens avocats ont prodiguées, au point qu’elles ne produisaient plus aucun effet, ce qui arrive nécessairement à tous les grands moyens, quand ils sont trop multipliés. […] Cette insatiable avidité de parler s’exerce indifféremment sur tout, dévore tout comme un vaste incendie, et fait contracter à un jeune homme la déplorable habitude de parler de tout avec une légèreté dont on ne sent ni ne veut sentir les conséquences ; de sacrifier les ridicules des personnes présentes, la réputation et l’honneur des absents, avec une précipitation dont on serait soi-même effrayé, si une réflexion solide pouvait trouver sa place dans une tête vide d’idées, et étourdie du bruit qu’elle-même excite autour d’elle. […] Mais ce n’est ni le cas, ni la place de tout dire à ce sujet ; et nous nous bornerons à conclure, avec le poète Martial, que c’est quelque chose que de savoir se taire ; res est magna tacere, Matho .
Si l’on attaque cette place, continue-t-il, on lèvera le siége. […] Si les ennemis viennent de perdre une bataille où il soit demeuré sur la place quelque neuf à dix mille hommes des leurs, il en compte jusqu’à trente mille, ni plus ni moins ; car ses nombres sont toujours fixes et certains, comme de celui2 qui est bien informé. […] Si les nôtres assiégent une place très-forte, très-régulière, pourvue de vivres et de munitions, qui a une bonne garnison, commandée par un homme d’un grand courage, il dit que la ville a des endroits faibles et mal fortifiés, qu’elle manque de poudre, que son gouverneur manque d’expérience, et qu’elle capitulera après huit jours de tranchée ouverte. […] Ce style, trop ferme et trop décisif pour Démophile, n’est pour Basilide ni assez pompeux ni assez exagéré : il a bien d’autres expressions en tête ; il travaille aux inscriptions des arcs et des pyramides qui doivent orner la ville capitale un jour d’entrée ; et, dès qu’il entend dire que les armées sont en présence ou qu’une place est investie, il fait déplier sa robe et la mettre à l’air, afin qu’elle soit toute prête pour la cérémonie de la cathédrale3.
Le feu prend pendant la nuit dans la place de Saint-Pierre à côté du Vatican. […] Il propose à l’officier vandale, à qui le jeune homme était tombé en partage, de le prendre lui-même à sa place pour esclave. […] Elle se résigne à aller demander cette place. […] Artabane, voulant se faire roi à sa place, l’assassina l’an 471 avant J. […] Il rencontre un pauvre prêtre français et le contraint de remplir à leur place cet affreux ministère.
Ajoutons que Jocelyn gardera sa place à côté de Paul et Virginie : cette épopée domestique et intime est peut-être la seule que comporte notre pays, surtout dans le siècle où nous vivons. […] Tout était encor là, tout à la même place ; Chacun de nos berceaux avait encor sa trace ; Chacun de nous touchait son meuble favori, Et, comme s’il avait compris, jetait un cri. […] Un jour, ta haute salle de fête s’ouvrira pour tous les hommes de bien ; je viendrai alors, moi aussi, prendre ma place au festin. » 2. […] M. de Lamartine prend le mot simple, et le rend poétique par la place et le tour qu’il lui donne. […] « Voilà sa vie et ses plaisirs ; ses cheveux blanchissent, ses mains tremblent en élevant le calice, sa voix cassée ne remplit plus le sanctuaire, mais retentit encore dans le cœur de son troupeau ; il meurt ; une pierre sans nom marque sa place au cimetière, près de la porte de son église.
Tous ne sont-ils pas unanimes pour répéter le précepte d’Horace : … Si vis me flere, dolendum est Primum ipsi tibi… vérité si incontestable aux yeux de Boileau, qu’il se contente de la traduire : Pour me tirer des pleurs, il faut que vous pleuriez ; et qu’ailleurs, après avoir accordé à l’amour une place dominante dans les écrits, comme dans les sentiments et les actions des hommes, il ajoute : Mais pour bien exprimer ces caprices heureux, C’est peu d’être poëte, il faut être amoureux. […] Mais, ainsi que le praticien s’instruit principalement dans les hôpitaux et au lit des malades, c’est surtout dans les assemblées politiques ou religieuses ; dans la place et la voie publique, au parterre des théâtres, dans la société intime où l’a placé la nature ou le hasard, que l’écrivain étudiera les passions : Segnius irritant animos demissa per aurem, Quam quæ sunt oculis subjecta fidelibus… Un fait dont on a été témoin, un mot, un signe caractéristique, échappés d’instinct à la passion, que l’observation les recueille, que la méditation les mûrisse, et ce travail sera plus utile que tous les commentaires de la philosophie, que tous les modèles de la poésie et de l’éloquence. […] Les six morceaux sont réunis dans les Leçons de littérature de Noël et de la Place.
Le mérite d’un homme, ou savant, ou guerrier, Trouve sa récompense aux chapeaux de laurier4, Dont la vanité grecque a donné les exemples5, Le sien, je l’ose dire, est si grand et si haut, Que, si comme nos dieux il n’a place en nos temples, Tout ce qu’on lui peut faire est moins qu’il ne lui faut. […] Rappelons ces vers de Boileau : il faut les savoir par cœur : Enfin, Malherbe vint ; et le premier, en France, Fit sentir dans les vers une juste cadence, D’un mot mis en sa place enseigna le pouvoir, Et réduisit la muse aux règles du devoir, Par ce sage écrivain la langue réparée, N’offrit plus rien de rude à l’oreille épurée ; Les stances avec grâce apprirent à tomber, Et le vers sur le vers n’osa plus enjamber. […] Voiture parlait ainsi de Richelieu : « Oui, lorsque dans deux cents ans, ceux qui viendront après nous liront en notre histoire que le cardinal de Richelieu a démoli la Rochelle et abattu l’hérésie, et que par un seul traité, comme par un coup de rets, il a pris trente ou quarante de ses villes pour une fois ; lorsqu’ils apprendront que, du temps de son ministère, les Anglais ont été battus et chassés, Pignerol conquis, Cazal secouru, toute la Lorraine jointe à cette couronne, la plus grande partie de l’Alsace mise sous notre pouvoir, les Espagnols défaits à Veillane et à Avein ; et qu’ils verront que, tant qu’il a présidé à nos affaires, la France n’a pas un voisin sur lequel elle n’ait gagné des places ou des batailles : s’ils ont quelque goutte de sang français dans les veines et quelque amour pour la gloire de leur pays, pourront-ils lire ces choses sans s’affectionner à lui, et, à votre avis, l’aimeront-ils ou l’estimeront-ils moins, à cause que, de son temps, les rentes sur l’Hôtel de Ville se seront payées un peu plus tard, ou que l’on aura mis quelques nouveaux officiers à la chambre des comptes ?
et ne mettez-vous pas dans votre esprit, à la place du héros dont parle l’Écriture, celui dont je viens vous parler ? […] « Verrès vient lui-même sur la place, ivre de fureur et respirant le crime. […] Une lettre d’affaires veut être claire, méthodique et précise ; et, pour arriver à la clarté, à la précision, il faut avoir médité la place de chaque pensée. […] et que j’occupe peu de place dans cet abîme immense du temps ! […] Aussitôt qu’il a pris place à la tête de l’armée, il porte la terreur dans les rangs ennemis.
où serait la place de ces talents cultivés avec tant de soin ? […] On demande où serait leur place ! […] Quelles choses vous furent dites dans la place où je me trouve ! […] Les connaisseurs seuls les ont mis tous trois à leur place. […] Il est bon que chaque chose soit à sa place.
Image naïve des peuples, et du prince qui les gouverne, s’il est bon prince2 Giton ou le riche Giton a le teint frais, le visage plein, et les joues pendantes, l’œil fixe et assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche ferme et délibérée : il parle avec confiance, il fait répéter celui qui l’entretient, et il ne goûte que médiocrement tout ce qu’il lui dit ; il déploie un ample mouchoir3, et se mouche avec grand bruit ; il crache fort loin, et il éternue fort haut ; il dort le jour, il dort la nuit, et profondément ; il ronfle en compagnie ; il occupe à table et à la promenade plus de place qu’un autre ; il tient le milieu en se promenant avec ses égaux ; il s’arrête, et l’on s’arrête ; il continue de marcher, et l’on marche ; tous se règlent sur lui ; il interrompt, il redresse ceux qui ont la parole ; on ne l’interrompt pas, on l’écoute aussi longtemps qu’il veut parler, on est de son avis ; on croit les nouvelles qu’il débite. […] Il n’occupe point de lieu, il ne tient point de place ; il va les épaules serrées, le chapeau abaissé sur ses yeux pour n’être point vu ; il se replie et se renferme dans son manteau ; il n’y a point de galeries si embarrassées et si remplies de monde où il ne trouve moyen de passer sans effort, et de se couler sans être aperçu. […] L’Homme en place Vient-on de placer quelqu’un dans un nouveau poste, c’est un débordement de louanges2 en sa faveur qui inonde les cours et la chapelle, qui gagne l’escalier, les salles, la galerie, tout l’appartement : on en a au-dessus des yeux ; on n’y tient pas. […] Il y a cependant quelques traits à ajouter : « Giton a toujours le teint frais, le visage plein… l’œil fixe et assuré, les épaules larges… la démarche ferme et délibérée… » Il est toujours “enjoué, grand viveur, impatient, présomptueux, colère, libertin…” Il se croit toujours des talents et de l’esprit ; mais il a de plus son système sur l’état de la société : il croit que les rangs sont bien distribués, que tout y est à sa place, hommes et choses : il est riche. […] Il s’avance déjà sur le théâtre d’autres hommes qui vont jouers dans une même pièce les mêmes rôles : ils s’évanouiront à leur tour ; et ceux qui ne sont pas encore, un jour ne seront plus ; de nouveaux acteurs ont pris leur place.
Quand les consuls regardaient le Capitole, le temple de Jupiter se montrait à eux au-dessus des destinées de la République, et, si chère que Rome leur fût, telle place qu’elle occupât dans leurs cœurs, ils entendaient une voix obscure qui leur demandait davantage et leur prophétisait au delà. […] Il faut qu’il sorte de cet étroit horizon, et se prépare à marquer sa place dans cette société haletante où tous, ayant les mêmes droits dans les mêmes devoirs, vont lui disputer la gloire de vivre. Tout à l’heure il descendra l’escalier paternel, il paraîtra dans la place publique ; son oreille entendra le choc douloureux des ambitions qui se heurtent, des idées qui se repoussent, et, comme une feuille tombée dans les flots d’une mer émue, il s’étonnera pour la première fois du prix que coûte la vie et des mystères qu’elle contient. […] J’ai la certitude qu’aucun parti ne me soutiendra jamais, parce que jamais je ne donnerai de gages à un parti humain ; j’ai aussi cette autre certitude que, demeuré à une place trop visible, je prêterai toujours le flanc aux attaques de mes ennemis par la naïveté de mes impressions et la hardiesse de mon discours2. […] Il me répondit : “D’abord ma place est dans mon département, et nous sommes, comme les évêques, obligés à résidence ; mais, de plus, à vous parler franchement, je n’aime pas beaucoup votre monde de Paris. — Pourquoi cela ?
Deuxième partie L’éloquence du barreau I caractères généraux de l’éloquence romaine Quand la conquête macédonienne eut renversé la tribune et étouffé la voix de Démosthène, l’éloquence, bannie de la place publique, se réfugia dans les écoles. […] Habitués à vivre dès l’enfance sous les yeux de leurs concitoyens, ces hommes regardaient la place publique comme leur maison et ne craignaient pas de s’y donner en spectacle. […] Manlius étale sur la place les dépouilles de trente ennemis qu’il a tués de sa main, et quarante récompenses militaires : il montre au peuple huit citoyens qu’il a arrachés à la mort dans les combats, et quatre cents malheureux qu’il a sauvés, en payant leurs dettes, de la confiscation et de l’emprisonnement. […] C’est au choc des passions de la place publique qu’elle allume toutes ses foudres et lance tous ses éclairs. […] Un jour l’orateur Crassus défendait un citoyen accusé par un certain Brutus, quand, au milieu de son plaidoyer, vint à passer sur la place le convoi funèbre de Junia, tante de l’accusateur.
On le place avant les noms substantifs, lorsqu’on veut les tirer d’une signification vague, pour leur en donner une précise et déterminée. […] Mais observons ici que quand on place le pronom je après la première personne, on change l’e muet en e fermé. […] Demeurer, signifiant rester, prend toujours être : = il est demeuré deux mille hommes sur la place. […] Ces mots en sont appelés le régime ; et les prépositions sont ainsi nommées, parce qu’on les place toujours avant ces mots qu’elles régissent. […] Le pronom tient la place d’un nom, en rappelle l’idée, et en fait éviter la répétition.