Sur le pédantisme Rien n’étouffe plus la doctrine que de mettre à toute chose une robe de docteur… Vous ne pouvez plus être occupé à bien dire quand vous êtes effrayé par la crainte de dire mal… On vient nous poser un béguin sur la tête, pour nous crier à chaque mot : « Prenez garde de tomber ! […] Bien des gens me font de pareilles questions ; mais vous voyez bien que je n’irai pas lire tous ces livres pour les satisfaire ; j’ai mon bibliothécaire qui vous renseignera peut-être ; car il s’occupe nuit et jour à déchiffrer tout ce que vous voyez là. […] Leur oisiveté est toujours3 occupée. […] Le géomètre et le traducteur Je passais l’autre jour sur le Pont-Neuf avec un de mes amis : il rencontra un homme de sa connaissance qu’il me dit être géomètre ; je le vis plongé dans une rêverie profonde2 ; il fallut que mon ami le tirât longtemps par la manche et le secouât pour le faire descendre3 jusqu’à lui, tant il était occupé d’une courbe qui le tourmentait peut-être depuis plus de huit jours ! […] dit le géomètre, il y a deux mille ans qu’il y est2. — Vous ne m’entendez pas, reprit l’autre : c’est une traduction de cet ancien auteur que je viens de mettre au jour ; il y a vingt ans que je m’occupe à faire des traductions. — Quoi !
Ces digressions peuvent être de véritables ornements dans l’histoire ; elles y répandent une agréable variété qui charme l’esprit du lecteur sans cesser de l’occuper utilement. […] C’est le lot d’un monarque qui s’est occupé, pendant un règne orageux, du bonheur de ses sujets, et qui s’en est occupé avec succès. […] On aurait pu croire qu’il s’occupait de lui-même aussi bien que de la chose. […] Il faudrait présenter non seulement les rapports des causes et des effets qui occupent la scène du monde, mais encore les germes plus ou moins développés des catastrophes réservées aux siècles suivants. […] On a, en effet, ainsi des dictionnaires extrêmement riches, où les articles se comptent par milliers, et l’ouvrage entier occupe quelquefois un grand nombre de volumes.
Nos pères, en consacrant cette expression, avaient compris et témoigné que de toutes les études qui peuvent occuper la jeunesse, de toutes les gymnastiques intellectuelles, celle-ci est la plus puissante pour développer en même temps et à un égal degré les trois facultés essentielles de l’esprit humain. […] Il s’occupera des expressions figurées, des synonymes, des multisenses, etc. ; enfin, et comme complément obligé des travaux précédents, de l’étude historique de la langue. […] Ainsi beaucoup de grammaire, de lectures, de traductions en langue maternelle, peu de traductions ou de compositions en grec ou en latin, et, si l’on s’en occupe, qu’on leur donne pour principe l’imitation et presque la reproduction littérale des formes de l’antiquité. […] L’invention n’étant autre chose que l’acquisition des idées, ou du moins la recherche d’un procédé qui en facilite l’acquisition, que l’élève, tout en s’appliquant à l’étude de la langue maternelle et des langues anciennes, s’exerce à saisir les rapports des choses à lui et des choses entre elles ; qu’il apprenne, à mesure que ses facultés s’étendront, à s’observer lui-même, à observer la nature et les hommes qui l’entourent ; qu’il s’interroge souvent sur ses propres impressions ; qu’il s’habitue à s’en rendre compte, à chercher en tout les causes et les effets, à ne point voir d’un esprit distrait et avec indifférence les objets même les plus indifférents en apparence ; car tout ce qui peut occuper l’homme appartient à l’écrivain, et lui est, à l’occasion, sujet de composition ; Quidquid agunt homines, votum, timor, ira, voluptas, Gaudia, discursus, nostri est farrago libelli. […] Ce n’est pas seulement en augmentant le nombre des idées que ces études étrangères sont utiles, elles perfectionnent l’esprit même, parce qu’elles en exercent d’une manière plus égale les diverses facultés. » Chaque science éclaire l’esprit sur l’objet dont elle s’occupe, et l’esprit éclairé sur un point aperçoit mieux tous les autres.
Les grands objets dont s’occupe cette espèce d’éloquence, sont encore une raison de plus pour n’en jamais perdre de vue l’utilité. […] Quant aux ornements, ils se présenteront d’eux-mêmes, si le sujet en est susceptible ; et quoique l’orateur public ne doive en aucun cas négliger ce moyen de faire triompher la raison, il doit toujours, et avant tout, s’occuper des choses : cura sit verborum, sollicitudo rerum . […] Le seul aspect d’une assemblée nombreuse, occupée d’une discussion importante, et attentive au discours d’un seul, dont elle attend, et dont peut en effet dépendre son sort, suffit pour élever l’esprit de l’orateur, pour échauffer son imagination.
Le moyen âge, croyez-le bien, et Dante occuperaient des hauteurs consacrées : aux pieds du chantre du Paradis l’Italie se déroulerait presque tout entière comme un jardin ; Boccace et l’Arioste s’y joueraient, et le Tasse retrouverait la plaine d’orangers de Sorrente. […] Plus tard la place est occupée ; les affaires, les soucis, les soins de chaque jour la remplissent, et il n’y a plus guère moyen qu’avec un trop grand effort de repousser la vie présente qui nous envahit de tous côtés et qui nous déborde, pour aller se reporter en idée à trois mille ans en arrière1. […] Aussi, j’y ai souvent pensé : de même qu’autour d’un vaisseau menacé d’être pris par les glaces on est occupé incessamment à briser le cercle rigide qui menace de l’emprisonner, de même chacun, à chaque instant, devrait être occupé à briser dans son esprit le moule qui est près de prendre et de se former. […] Un moraliste à la façon de Nicole les a très-bien définis en ces mots : « Ce sont des esprits trop remplis d’eux-mêmes et des images présentes qui les occupent, pour pouvoir s’ouvrir et faire place en eux à d’autres idées que les leurs, et surtout quand il s’agit d’admettre et de comprendre les choses du passé. » De ces esprits exclusivement voués au monde moderne, aux impressions actives de chaque jour, et qui ne sauraient s’en défendre, il en est, d’ailleurs, je le sais, de bien fermes, et, à tous autres égards, d’excellents.
Cependant la première occupe en hardiesse un degré plus élevé. […] Je vais donc m’occuper de l’éloquence proprement dite, ou discours oratoire. […] On oublie l’orateur ; le sujet seul occupe. […] On le perd de vue ; on n’est occupé que de Philippe qui envahit tout. […] Le sujet et les arguments ne les occupent pas encore.
On ne peut donc trop s’en occuper ; c’est même le seul moyen d’affermir, d’étendre et d’élever ses pensées ; plus ou leur donnera de substance et de force par la méditation, plus il sera facile ensuite de les réaliser par l’expression. » Le premier point à méditer dans la disposition d’un ouvrage, c’est l’unité. […] Il faut avant tout s’occuper de la preuve et du développement de l’antécédent. […] Ne nous occupons que de la première. […] Cet épisode, qui occupe le34, est plus naturel et plus logique que celui qui le précède. […] La naissance leur a tout donné ; ils n’ont plus qu’à jouir, pour ainsi dire, d’eux-mêmes ; leurs ancêtres ont travaillé pour eux ; le plaisir devient, pour ainsi dire, l’unique soin qui les occupe ; ils se reposent de leur élévation sur leurs titres ; tout le reste est pour les passions.
L’homme le plus occupé, l’homme placé dans la sphère la plus active, ne peut pas toujours être livré aux affaires. […] Dans celle qui nous occupe, il n’était pas strictement nécessaire de s’arrêter à quelque règle absolue. […] Nous sommes encore bien loin d’avoir réduit en système le sujet qui nous occupe. […] Après les couleurs, nous allons nous occuper des formes des corps. […] Le premier point va nous occuper d’abord, et nous y consacrerons le reste de cette Lecture.
Sans cesse occupés d’expéditions militaires, les Romains négligèrent longtemps tous les arts : chez eux, tout fut grave, lent et austère. […] Chaque chose occupe la place qui lui convient ; il s’efforce de convaincre, avant de songer à émouvoir ; c’est sur les passions douces qu’il a en général le plus d’empire. […] On le perd de vue ; on n’est occupé que de Philippe qui envahit tout.
Ne sont-ce pas bien là ces outres d’Éole, qui, gonflées de vapeurs, occupent un espace immense, et se réduisent insensiblement à rien, lorsqu’une simple piqûre d’épingle a ouvert un libre passage à l’air qui les remplissait ? […] Si tu t’occupes de fortune, tu te mets toi-même à l’enchère. — Si ton âme est noble, ta fortune est l’honneur ; ta fortune est l’estime de ta patrie, l’amour de tes concitoyens, le bien que tu peux faire. […] Tout ce que le torrent des âges a emporté se reproduit à ses yeux. — Il voit la durée comme un espace immense, dont il n’occupe qu’un point : il calcule les jours, les heures, les moments ; il en ramasse toutes les parties, etc. » De quoi pensez-vous qu’il est question ici ?
Sous la régence du duc d’Orléans, il devint chancelier de France, et, sauf d’assez longs intervalles d’honorable disgrâce, il continua sous Louis XV à occuper ce poste jusque dans une vieillesse avancée. […] Il ne me reste, après cela, que de prier Dieu qu’il répande sa bénédiction sur l’étude que vous en ferez, qu’il vous préserve de cet esprit de curiosité qui se perd en voulant approfondir des questions vaines, inutiles ou même dangereuses, et qu’il vous inspire ce goût solide de la vérité, qui la cherche avec ardeur, mais avec simplicité, et qui s’occupe tout entier des vérités utiles, bien moins pour les connaître que pour les pratiquer. […] Toujours occupés de ce qu’ils veulent être et jamais de ce qu’ils sont, pleins de vastes projets, le seul qui leur échappe est celui de vivre contents de leur état.
Mais sans nous occuper d’établir ici un terme général plus convenable, ou de chercher une division plus rationnelle, empruntons-lui son titre et tachons de faire bien connaître successivement les pièces dont il parle. […] Quelque temps auparavant, lorsqu’on avait tiré Condé de Vincennes pour le transférer à Marcoussy, ses partisans et même ses ennemis étaient venus visiter les appartements qu’il avait occupés, les meubles qui lui avaient servi, les lieux où ses gardes étaient placés. […] Voici une autre charade sur le mot château (chat, eau), qui est plus développée, et que Beauzée cite dans l’Encyclopédie : Chez nos aïeux presque toujours J’occupais le sommet des plus hautes montagnes, Et là j’étais d’un grand secours. […] Qu’au Châtelet, doyens et candidats Plument tous les jours une dupe Qui dans un procès les occupe, Cela ne me surprend pas.
Denys d’Halicarnasse, qui s’en est spécialement occupé, distingue dans l’harmonie oratoire, comme dans la musique, la mélodie, le nombre, la variété, la convenance ; il calcule la portée de la voix, les intervalles, les chutes, la mesure composée d’un certain nombre de pieds, formés eux-mêmes d’un certain nombre de syllabes longues ou brèves, et présentant chacun leur caractère spécial, si bien que tout l’effet est manqué, même en prose, si vous mettez un dactyle au lieu d’un spondée, et un trochée au lieu d’un ïambe, etc. […] Aussi n’est-ce pas au moment de la composition qu’il faut s’occuper des soins minutieux de l’harmonie, ce doit être là une étude préliminaire comme celle de la langue elle-même, une habitude préalablement contractée et devenue en quelque sorte instinctive. […] Dès qu’on travaille sérieusement, c’est de la pensée qu’on doit s’occuper et des moyens de la rendre avec le plus de force, de clarté, de précision qu’il est possible79. » Indispensables au poëte, ces exercices préparatoires ne le sont guère moins au prosateur. […] tandis que vous le diriez exclusivement occupé de l’image et de l’harmonie, Bossuet ne leur sacrifie rien du sens.
L’objet qui nous occupe se présente à nous avec les idées accessoires qui l’accompagnent, et nous prononçons le nom de celle de ces images qui nous frappe le plus. […] Pollion s’occupait d’une tragédie sur les guerres civiles dont Rome venait d’être le théâtre. […] C’est, comme on voit, toujours une métaphore ; mais la métaphore proprement dite ne s’occupe que d’une idée, tandis que l’allégorie en continue le développement complet, en présentant toujours le sens figuré au lieu du sens propre. […] Fortiter occupa portum, ah ! […] Fuyez sur ce point un ridicule excès, a dit Boileau ; et ce conseil, généralement applicable à l’emploi de tous les tropes, l’est surtout à l’égard de l’hyperbole dont nous allons nous occuper.
Sous ce rapport, elle appartiendra de droit au style magnifique dont nous aurons à nous occuper un peu plus tard. […] Autant les pensées dont nous venons de nous occuper jettent d’éclat sur les productions de l’esprit, autant les pensées suivantes les ternissent et demandent à être soigneusement bannies du style. […] 1° Accord des Pensées, ou Unité Lorsqu’il s’agit d’unir plusieurs pensées, la première condition, c’est qu’elles soient d’accord entre elles, qu’elles se rapportent à un objet unique, et qu’elles forment un tout pour produire sur l’esprit une seule impression, il faut donc rejeter les pensées qui ne seraient point utiles au sujet dont on s’occupe. […] Seigneur, qui éclaire les plus sombres replis de nos consciences, et qui voyez dans nos plus secrètes intentions ce qui n’est pas encore, comme ce qui est, recevez dans le sein de votre gloire cette âme qui bientôt n’eût été occupée que des pensées de votre éternité ; recevez ces désirs qui vous lui aviez vous-même inspirés.
C’est un corps animé d’une infinité de passions différentes, qu’un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie : c’est une troupe d’hommes armés qui suivent aveuglément les ordres d’un chef, dont ils ne savent pas les intentions : c’est une multitude d’âmes, pour la plupart viles et mercenaires, qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants : c’est un assemblage confus de libertins, qu’il faut assujétir à l’obéissance ; de lâches qu’il faut mener au combat ; de téméraires, qu’il faut retenir ; d’impatients, qu’il faut accoutumer à la confiance, etc. » Malgré le respect dû au nom de Fléchier, et surtout à l’oraison funèbre de Turenne, son plus bel ouvrage, qui ne voit, dans le premier de ces deux morceaux, le véritable orateur, l’écrivain plein de son sujet ; et, dans le second, le rhéteur presque uniquement occupé du soin d’assembler et de faire contraster des mots ? […] « Sybarites tranquilles dans le sein de nos cités florissantes, occupés des raffinements de la mollesse, devenus insensibles à tout, et au plaisir même, pour avoir tout épuisé ; fatigués de ces spectacles journaliers, dont le moindre eût été une fête pour nos pères, et de ces repas continuels plus délicats que les festins des rois ; au milieu de tant de voluptés si accumulées et si peu senties, de tant d’arts, de tant de chefs-d’œuvre si perfectionnés et si peu considérés ; enivrés et assoupis dans la sécurité et dans le dédain, nous apprenons la nouvelle d’une bataille : on se réveille de sa douce léthargie, pour demander avec empressement des détails, dont on parle au hasard, pour censurer le général, pour diminuer la perte des ennemis, pour enfler la nôtre.
À quoi donc nous occupons-nous, Quand vous et moi, tisons, nous sommes tête à tête ? […] Ce que j’ai vu le jour, se retrace le soir Dans mon esprit, comme dans un miroir ; Le fracas d’une grande ville, Où chez les petits et les grands, Les passions sont le premier mobile ; Tous ces gens animés d’intérêts différents, Qui pleins de leurs projets, occupés de leurs vues, Toujours pressés, toujours courants, Roulent de toutes parts ainsi que des torrents, Et viennent inonder les rues…. […] Occupés à ronger leur frein, Ils se font de leurs maux une triste habitude ; Et malgré la rigueur d’un sort trop inhumain, Victimes de leur servitude, Ils recommenceront encor le lendemain. […] Il semblait occupé tout entier hors du royaume, et on le retrouvait tout entier au-dedans. […] Tout s’administrait par ses avis absolus, comme s’il se fût multiplié lui-même pour faire les fonctions de tous les emplois, et, ce qui peut faire connaître l’étendue de son génie, tandis qu’il paraissait devoir succomber sous le poids de tant d’affaires, on le voyait occupé à lier des intrigues de Cour, à placer ses créatures, à établir sa maison, à élever des bâtiments : on le voyait dans les Académies s’entretenir avec les savants, et se prêter à des spectacles et à des divertissements publics, comme s’il avait été libre de toute autre occupation…… Le cardinal de Richelieu n’eut qu’une passion ; mais elle fut extrême : ce fut une ambition démesurée, qui ne put être satisfaite que par toute l’autorité souveraine, et qui n’eut d’autres bornes que le nom et le titre de roi.
Pendant son absence, le tribun Sextius, de concert avec Pompée, et tous les bons citoyens, s’occupèrent si efficacement de son retour, qu’il fut en effet rappelé par un décret du sénat, et reçu par toutes les classes de citoyens, avec les démonstrations de la joie la plus vive et la plus sincère. […] « Si l’on s’étonnait, par le passé, que dans une république aussi puissante, et dans un aussi illustre empire, il se rencontrât si peu de citoyens assez fermes, assez intrépides, pour oser dévouer leur personne et leur vie au salut de l’état et au maintien de la liberté commune ; que l’on s’étonne bien plus aujourd’hui de rencontrer encore de braves et généreux citoyens, que de trouver des hommes timides et plus occupés d’eux-mêmes que des intérêts de la patrie. […] « Aimons donc la patrie, soyons soumis au sénat, prenons les intérêts des gens de bien ; oublions les avantages présents, pour ne nous occuper que de la gloire à venir ; regardons comme le plus utile ce qui sera le plus juste ; espérons tout ce que nous voudrons, mais supportons tout ce qui nous arrivera ; pensons enfin que, dans les grands hommes, le corps seul est mortel, que les conceptions de leur âme et la gloire de la vertu sont éternelles ; et si nous voyons cette opinion consacrée dans la personne d’Hercule, ce héros vénérable, dont l’immortalité même vint, dit-on, recueillir l’âme et les vertus, dès que les flammes du bûcher eurent consumé son corps, nous devons croire aussi que ceux qui, par leurs conseils ou par leurs travaux, ont défendu, accru, sauvé une république aussi florissante, sont parvenus à une gloire qui ne mourra jamais ».
[Notice] Né en 1646 à Dourdan (Seine-et-Oise), La Bruyère, dont les talents devaient tant occuper la postérité, vécut, par l’effet de sa modestie, presque obscur : de là beaucoup d’incertitude sur tout ce qui le concerne et même sur la date de sa naissance1. […] Le peuple, paisible dans ses foyers au milieu des siens, et dans le sein d’une grande ville où il n’a rien à craindre ni pour ses biens ni pour sa vie, respire le feu et le sang, s’occupe de guerres, de ruines, d’embrasements et de massacres ; souffre impatiemment que des armées qui tiennent la campagne ne viennent point à se rencontrer ; ou, si elles sont une fois en présence, qu’elles ne combattent point ; ou, si elles se mêlent, que le combat ne soit pas sanglant, et qu’il y ait moins de dix mille hommes sur la place1. […] Il est curieux de voir Montesquieu traçant le même caractère : « Les nouvellistes, dit-il, s’assemblent dans un jardin magnifique (les Tuileries), où leur oisiveté est toujours occupée.
D’un maître trop fameux trop fidèle interprète, De mon heureux espoir désormais détrompé, Je dois donc, du plaisir à toute heure occupé, Consacrer les moments de ma course rapide A la divinité que tu choisis pour guide1 : Et la mère des jeux, des ris et des amours Doit ainsi qu’à tes vers présider à mes jours… Tu veux me rassurer, et tu me désespères. […] Des siècles à venir je m’occupe sans cesse : Ce qu’ils diront de moi m’agite et m’intéresse. […] Son père, qu’il perdit très-jeune, s’était aussi beaucoup occupé de sa première éducation.
toujours ancienne et toujours nouvelle, ô vie pure et bienheureuse de tous ceux qui vivent véritablement, s’ils vous cherchaient seulement au dedans d’eux-mêmes ; si vous étiez un amas d’or, ou un roi victorieux qui ne vivra pas demain, ils vous apercevraient, et vous attribueraient la puissance de leur donner quelque plaisir : votre nature vaine occuperait leur vanité3. […] Du bon sens plus que de science, et pour toute philosophie beaucoup de christianisme ; une maison propre et commode ; un revenu médiocre, mais assuré ; peu de maître et peu de valets ; assez d’occupation pour n’être jamais oisif ; assez d’oisiveté pour n’être jamais occupé ; point d’ambition ; point de procès ; point d’envie ni d’avarice ; si l’on pouvait conserver sa santé par la sobriété et le travail plutôt que par les remèdes ; garder sa foi, ne haïr que ce qui est haïssable ; n’aimer que ce qu’il est juste d’aimer ; laisser couler ce qui ne doit pas toujours durer, attendre avec confiance ce qui durera toujours. » 4. […] « Vous ne trouverez dans cette grande ville que des gens occupés d’eux-mêmes et jamais de la triste situation des autres, si ce n’est peut-être pour s’en divertir.
Il y en a qui ont allumé du feu sous une roche ; ils s’occupent à ranimer une femme expirante, et j’espère1 qu’ils y réussiront. […] Alors sa bouche se serait entr’ouverte, ses regards distraits se seraient portés au loin, le travail de sa tête fortement occupée se serait peint sur son visage ; et Michel eût fait une belle chose. […] La guerre civile régna parfois au camp des philosophes : Diderot et Rousseau se brouillèrent, après avoir été fort amis : un mot du maréchal de Castries, conservé par Chamfort, nous montre combien cette querelle occupait le public : « Mon Dieu, disait le maréchal, partout où je vais, je n’entends parler que de ce Rousseau et de ce Diderot.
La bataille de Fontenoy y devait tenir et y occupe une place distinguée. […] l’amitié est également inconnue, et chez les infortunés uniquement occupés de leurs travaux et chez les heureux souvent endurcis, et dans le travail des campagnes, et dans les occupations des villes, et dans les intrigues des cours.
Heureusement les moines s’occupaient, dans leur solitude, à copier des livres, et nous conservèrent ainsi les trésors de l’antiquité. […] Des savants de cette ville furent appelés dans les états des Médicis qui régnaient à Florence, et qui occupaient le trône de l’Église.
Quand les consuls regardaient le Capitole, le temple de Jupiter se montrait à eux au-dessus des destinées de la République, et, si chère que Rome leur fût, telle place qu’elle occupât dans leurs cœurs, ils entendaient une voix obscure qui leur demandait davantage et leur prophétisait au delà. […] Enfin, je puis bien aussi m’occuper de la question en ce qui m’est personnel. […] Nous nous surfaisons tous le bruit de notre nom ; nous croyons tous que tout le monde s’occupe de nous. […] ceux-là sont les plus innocents où l’on n’est occupé que de choses vaines et frivoles, et où vous êtes entièrement oublié ; puisque, s’il arrive que votre saint nom y soit proféré, c’est presque toujours pour y être déshonoré et outragé par des impiétés et des blasphèmes.
Sans doute, l’importance de ces préceptes est incontestable, et l’on ne s’étonnera pas que les mœurs et les passions, l’ithos et le pathos, occupent une si grande place dans les écrits des anciens, et qu’Aristote, par exemple, y ait consacré presque tout le second livre de sa Rhétorique ; mais nous aurions tort aujourd’hui de placer dans l’ invention les passions et les mœurs, si nous les prenions dans l’acception antique. […] Mais il y a presque toujours entre nous et nos prédécesseurs cette différence qui n’est pas à notre avantage : c’est qu’ils ne s’occupaient que des généralités, tandis que nous avons le tort de ne peindre d’ordinaire que les exceptions, exceptions le plus souvent monstrueuses, sans but moral, sans utilité pour l’exemple, sans profit pour la littérature. […] N’oublions pas que la partie intime de l’homme doit toujours avoir le pas, dans la pensée des écrivains, sur son revêtement extérieur ; l’âme et l’esprit doivent les occuper plus que le corps.
Si vous éprouvez le besoin des transitions, si vous avez la conscience d’une lacune à combler entre deux idées, prenez garde ; c’est qu’alors votre méditation a été incomplète, c’est que vous n’avez pas saisi avec assez de puissance l’ensemble de votre sujet et les relations des diverses parties, ou bien encore que vous vous occupez trop de l’ingénieux, du piquant de la diction et des sentences détachées. […] Ce sont elles qui vont nous occuper. […] Je vous regarde comme si vous étiez seuls sur la terre ; et voici la pensée qui m’occupe et m’épouvante.
C’est ce que les rhéteurs, uniquement occupés de l’art oratoire, appellent la narration, la confirmation et la réfutation. […] Creuser patiemment son sujet, s’identifier avec les hommes, les faits ou les idées dont on s’occupe ; ne dédaigner aucun détail ; s’intéresser soi-même à l’antagonisme des forces contraires qui fait le nœud de tout récit ; en ordonner l’action et la résistance avec l’habileté stratégique d’un grand général, et, comme l’écrivain a cet avantage sur le général qu’il dispose à la fois des deux partis, ménager les succès, faire pencher alternativement la balance, de manière à tenir l’anxiété du lecteur éveillée jusqu’au dénoûment : voilà ce qui donne la véhémence et le pathétique dans les grands sujets ; dans les petits, la grâce, la finesse, la naïveté ; partout, le choix des détails, la variété des tours ; et voilà ce qui nous attache à une exposition quelle qu’elle soit. […] Quant à la classification des rhéteurs, je pense qu’on peut réduire toutes leurs espèces de description à deux, celle des choses, qui vient d’être traitée, et celle des personnes, que j’appelle simplement caractère ou portrait, et dont nous allons nous occuper.
Nous allons actuellement nous occuper de l’argumentation ou raisonnement. […] Nous avons encore à nous occuper du geste ou de l’action. […] Ce propos fort sage peut s’appliquer au sujet qui nous occupe. […] Entre ces deux extrêmes il est un juste milieu qu’elle peut encore occuper avec succès. […] Mais ne nous occupons pas de cette vaine controverse.
Mon père, admis déjà aux demeures célestes, vit dans la société des Dieux ; mais nous devons nous occuper du gouvernement des choses humaines, et c’est à vous qu’il appartient de régler, d’affermir la situation des affaires. […] Déjà comblé d’honneurs par vous, je ne puis me féliciter en termes assez dignes de l’estime que vous me témoignez maintenant ; je pense en effet qu’il ne convient ni à vous d’user à mon égard d’une bienveillance inépuisable, ni à moi, d’occuper toujours un commandement. […] Ainsi, Romains, pour ces motifs, et pour d’autres encore, permettez-moi de jouir du repos, de diriger mes affaires personnelles, afin que je m’occupe de mes intérêts domestiques et que je ne périsse pas épuisé de fatigue. […] César occupe des murs désolés, une ville déserte, où les lois sont réduites au silence, où les tribunaux en deuil ont fermé leur enceinte. […] Nous sommes-nous jamais occupés de celles des Romains ?
Aussi ce grand esprit qui n’a été occupé jusqu’à présent qu’à songer aux moyens de fournir aux frais de la guerre, à lever de l’argent et des hommes, à prendre des villes et à gagner des batailles, ne s’occupera désormais qu’à rétablir le repos, la richesse et l’abondance.
Il leur déroba des marches, occupa des passages avantageux, sacrifia quelque cavalerie pour donner le temps à son infanterie de se retirer en sûreté. […] Le kan des Tartares et le bacha, qui voulaient prendre le roi en vie, honteux de perdre du monde et d’occuper une armée entière contre soixante personnes, jugèrent à propos de mettre le feu à la maison pour obliger le roi à se rendre.