Cet ouvrage définitif participe à la perfection des écrivains qu’il analyse. […] Les révolutions de l’esprit, les changements du goût, les chefs-d’œuvre en sont les événements ; les écrivains en sont les héros. […] Que d’efforts pour être clair, simple, précis, pour ne se servir que des termes propres, c’est-à-dire pour n’être pas un méchant écrivain ! […] Ce que l’histoire anecdotique de nos grands écrivains nous raconte de ces manuscrits raturés à toutes les lignes, de ces rédactions premières qui n’ont été que des tâtonnements laborieux, nous autorise à dire que la langue française, si complaisante pour le lecteur, est sans pitié pour l’écrivain. […] L’écrivain qui jouit tout seul de son esprit ne mérite guère plus d’estime qu’un oisif, dans une société où tout le monde travaille.
Mais si l’on admet ces théories générales sur les mœurs d’après le sexe, on verra que les plus grands écrivains eux-mêmes ont souvent donné l’exception pour la règle. […] Quelles théories, quelle collection de faits et d’observations pourraient être plus utiles à l’écrivain que les réflexions solitaires de quelques heures passées, je suppose, dans le musée de Versailles ? […] Dans tous les cas, il est rare que les écrivains suffisent pour pénétrer bien avant dans l’intimité, en quelque sorte, d’un peuple. […] N’oublions pas que la partie intime de l’homme doit toujours avoir le pas, dans la pensée des écrivains, sur son revêtement extérieur ; l’âme et l’esprit doivent les occuper plus que le corps. […] Plusieurs de nos écrivains ont porté cette manière à l’abus le plus intolérable.
le bon sens de la majorité répond avec Dandin : C’est le laid ; et l’écrivain obscur ne devient jamais populaire. […] Quoi qu’on puisse dire en faveur des logogriphes philosophiques ou sociaux, un écrivain obscur sera toujours, à mes yeux, un écrivain incomplet. […] Que d’écrivains auxquels s’applique le paragraphe de la Bruyère sur Acis, le beau parleur ! […] Sont-ils consacrés par des écrivains éminents, ou légitimés par les corps littéraires ? […] L’écrivain pur obéit à l’esprit, le puriste est l’esclave de la lettre.
Le sujet est donné par les circonstances, ou l’écrivain le tire de son propre fond. […] A voir les choses d’un peu haut, il n’y a ni bons ni mauvais sujets, mais de bons et de mauvais écrivains. […] Cependant les aberrations même de ces écrivains prouvent qu’ils ne regardent pas le choix du sujet comme indifférent. […] Car dans le choix du sujet est compris celui de la forme, qui appelle également toute l’attention de l’écrivain. […] Enfin le sujet doit être en rapport avec le talent de l’écrivain.
Elles doivent être rendues telles qu’elles se présentent à l’esprit de l’écrivain. […] Ces sortes de pensées se présentent en foule à tout homme d’un sens droit, et naissent sans effort du sujet que traite l’écrivain. […] Un écrivain ne pense, ne parle que pour les autres. […] Dans ceux qui appartiennent à la mémoire, l’écrivain expose, raconte : il faut que son style soit uni, facile, naturel et rapide. […] C’est ce que font les meilleurs écrivains, plutôt que de rien laisser dans le discours, qui présente un sens entortillé.
Pour connaître et reproduire la nature, l’écrivain doit l’étudier dans ses phénomènes réguliers et irréguliers. […] Dans les passions, comme dans les mœurs, l’écrivain doit s’étudier d’abord ; mais comme il n’est pas absolument nécessaire, pour peindre ou inspirer la passion, de l’éprouver ou de l’avoir éprouvée soi-même, et qu’il suffit de la bien comprendre, il doit l’étudier aussi dans les autres, dans les assemblées publiques, dans la société intime, enfin, dans les écrivains qui ont su le mieux la traiter. […] Le style, dans la véritable acception de ce mot, est le procédé propre à chaque écrivain pour exprimer sa pensée. […] 2° Saisir le ton convenable à la nature du sujet et au but de l’écrivain. […] La connaissance des figures est nécessaire à tous et surtout à l’écrivain.
La description est, en effet, dit Blair, la pierre de touche de l’imagination, et fait aisément distinguer le grand écrivain de l’écrivain ordinaire. […] Les bons écrivains, surtout chez les anciens, ont senti cet avantage. […] C’est l’écueil des écrivains médiocres. […] Quel est le devoir de l’écrivain dans la narration légende ? […] Nommez les principaux écrivains épistolaires.
En effet, un écrivain ne pense, ne parle que pour les autres. […] L’obscurité de la pensée vient de l’obscurité de l’esprit de l’écrivain. […] Dans les sujets qui appartiennent au sentiment, l’écrivain veut toucher : il faut que son style soit doux, insinuant, vif, animé, pathétique. […] Bossuet, le plus sublime des orateurs et des écrivains, se garde bien de l’être toujours. […] Faire et dire ce qui convient, voilà ce qui constitue l’homme parfait et l’excellent écrivain.
La langue nationale est l’instrument à l’aide duquel l’écrivain communique avec ses lecteurs. […] Plus tard, quand le jugement est bien assis, on peut sans doute aborder des écrivains douteux et inférieurs, mais avec précaution et sous la direction d’un maître habile. […] Combien ne cite-t-on pas d’écrivains qui se sont élevés dans certains sujets, et, quelquefois du premier bond, à une hauteur qu’il ne leur a été donné d’atteindre qu’une fois ? […] Encore quelques avis sur ces travaux préparatoires qui servent d’exercice au jeune écrivain et remplissent ce que l’on nomme dans les colléges l’année de rhétorique. […] Tant d’éléments sont nécessaires, dans notre état actuel de société, à la formation d’un penseur, d’un écrivain inventif 10.
Il faut que l’écrivain (qu’on me passe cette expression) fasse monter le lecteur de branche en branche, jusqu’à ce que celui-ci soit parvenu au sommet de l’arbre. […] L’écrivain doit même revenir plusieurs fois sur une même chose, quand elle ne peut être comprise à la première fois que par les lecteurs qui ont l’esprit pénétrant. […] On ne sait que trop que Voltaire est tombé dans les mêmes excès, à l’égard de plusieurs écrivains. […] On verra bientôt que les Grecs, les Latins, et les écrivains de notre nation l’ont employé avec le plus grand succès, pour traiter toutes sortes de matières. Écrivains didactiques ; écrivains critiques ; dialogueurs.
Soutiendrez-vous que l’écrivain ressente au même degré ces affections contraires ? […] Et grâces soient rendues à l’auteur de la nature qui l’a permis ainsi ; car on conçoit que, s’il en était autrement, la vie de l’écrivain et de l’orateur serait la plus intolérable existence qu’on pût imaginer. La vérité, à mon avis, c’est que l’écrivain qui veut communiquer ou exprimer la passion doit, non pas la ressentir, mais la comprendre ; ce qui est bien différent. […] La passion comprise, l’écrivain saura la feindre lui-même ou la prêter aux autres. […] Il serait difficile d’indiquer des sujets où il soit interdit à l’écrivain d’introduire la passion.
Il a le premier analysé les influences produites par le milieu social sur les écrivains, et par les écrivains sur la société qui les vit naître. […] Il sera le vengeur et le panégyriste des écrivains distingués. […] Cette étude doit être soutenue et tempérée par la méditation attentive de nos écrivains, et par l’examen des ressemblances de génie, et des différences de situation, de mœurs, de lumières, qui les rapprochent ou les éloignent de l’antiquité. […] Ce qu’il prescrit il le fait, et si quelque chose pouvait nous rappeler au respect des lois du beau, à l’amour et à l’étude des modèles, ce serait cette critique qui semble se monter au ton des grands écrivains qu’elle juge, et prendre les formes de leur talent pour en mieux faire sentir le charme. Son expression est grave, brillante, légère, éloquente, selon le génie des divers membres de cette glorieuse tribu d’écrivains qu’il passe en revue.
A l’étude des principes littéraires, il faut donc joindre la connaissance des grands écrivains qui les ont appliqués. […] Cette règle est fondée non seulement sur l’opinion de tous les rhéteurs, mais encore sur la pratique des plus grands écrivains de tous les temps. […] La raison suffirait pour nous apprendre que ceux qui cherchent à s’initier à l’art d’écrire, doivent s’attacher dans leurs lectures aux meilleurs ouvrages des écrivains les plus illustres. […] Ces ouvrages d’ailleurs sont toujours nuisibles au développement des qualités qui font le grand écrivain. […] A ce témoignage nous pouvons ajouter la pratique des plus illustres écrivains, qui tous se sont livrés à cet exercice, depuis Démosthènes, Virgile et Cicéron, jusqu’à Fénelon, Racine et J.
Addison et quelques autres écrivains ont indiqué la nouveauté. […] L’écrivain qui sait mettre de la propriété dans ses expressions évite les deux autres. […] C’est une perfection à laquelle il n’est donné qu’à un petit nombre d’écrivains de pouvoir atteindre. […] Dean Swift est un de nos écrivains les plus remarquables pour la précision du style. […] Cicéron, en ce genre de mérite, surpasse tous les écrivains anciens et modernes.
J’entends par style le procédé propre à chaque écrivain pour exprimer ses idées. […] La première ambition de l’écrivain doit être d’avoir ainsi un style à soi66. […] On peut fort bien dire que celui de certains écrivains est du mauvais style, et celui de MM. […] Mais songez que, par la pensée et jusqu’à un certain point par la forme, tout écrivain appartient toujours à son siècle, et ne peut se dérober à l’influence du milieu dans lequel il vit. […] Vous, au rebours, attachez-vous aux écrivains qui s’éloignent le plus des vices auxquels vous vous sentez enclin.
La seule différence entre l’écrivain et l’orateur, c’est que l’écrivain doit avoir encore plus de solidité dans la pensée, plus de calme dans la passion, plus de correction dans le style. […] — L’Invention fournit à l’orateur ou à l’écrivain le moyen de féconder son sujet. […] Les modernes ont plus d’écrivains que d’orateurs. […] — Les mœurs sont les qualités que manifestent l’orateur et l’écrivain. […] — Prouver est l’œuvre principale de l’orateur et de l’écrivain.
Le style est donc l’art ou la manière propre à chaque écrivain de formuler nettement et convenablement ses pensées et ses sentiments au moyen de la parole. […] L’art d’écrire ou le style est d’une très grande importance pour l’écrivain. […] Homère, Platon, Virgile, Horace, ne sont au-dessus des autre écrivains, dit la Bruyère, que par leurs expressions et leurs images. […] Puisque le style est l’homme même, il devra toujours avoir du rapport avec la manière de penser et de sentir de l’écrivain. […] Si le style est modifié par les qualités de l’esprit et de l’âme de l’écrivain, on a remarqué que les différents pays ont un genre de style particulier et analogue au caractère et au génie de leurs habitants.
Le professeur trouvera dans les écrivains même les plus ingénieux, dans la Bruyère et dans la Rochefoucauld, la justification de la remarque de Condillac. […] Je ne connais guère d’écrivain de notre siècle auquel on puisse appliquer l’épithète de naïf. […] Dire au jeune écrivain : tâchez d’être naïf, c’est presque lui dire : réfléchissez à être irréfléchi. […] Le même rhéteur indique avec détailles occasions où l’écrivain et l’orateur qui se respectent doivent s’abstenir de toute plaisanterie. […] « Il y a des écrivains, dit-il encore, qui veulent toujours être énergiques et ingénieux.
Il a le premier analysé les influences produites par le milieu social sur les écrivains, et par les écrivains sur la société qui les vit naître. […] Il sera le vengeur et le panégyriste des écrivains distingués. […] Les grands écrivains du siècle de Louis XIV avaient reçu du siècle précédent l’exemple d’étudier l’antiquité ; mais l’enthousiasme du goût remplaça pour eux l’idolâtrie de l’érudition. […] Son expression est grave, brillante, légère, éloquente, selon le génie des divers membres de cette glorieuse tribu d’écrivains qu’il passe en revue. […] Pourquoi du moins ne s’en pas tenir aux critiques honnêtes avec nos écrivains ?
Dans la thèse, l’écrivain établit les principes de la doctrine que la suite est destinée à développer, comme dans la narration l’orateur établit les faits de la cause. […] La netteté d’esprit et l’attention suffisent généralement pour arriver là dans le poëme, le discours, le roman, partout où l’écrivain prend lui-même la parole. […] Vous comprenez donc que, par son importance, la narration ou thèse appelle au plus haut degré l’attention de l’écrivain, et vous voyez que son mérite essentiel est la clarté. […] Wey ; et, selon la Bruyère, « tout excellent écrivain est excellent peintre. » Qu’il me soit done permis de m’arrêter sur ce point. […] Francis Wey, un des rhéteurs qui, à mon sens, a considéré cette partie sous le point de vue le plus pratique, le plus utile au jeune écrivain.
Et aujourd’hui que dirons-nous, à notre tour, au jeune écrivain français ? […] Jusqu’à Balzac, on n’en trouve guère, même dans les meilleurs écrivains, qui ne soit boiteuse et déhanchée, en quelque sorte. […] Les grands écrivains rencontrent parfois la première ; mais celle-ci, ils l’ont travaillée longtemps et l’étudient sans cesse. […] deux écrivains qui assurément n’ont pas suivi la même route, la Fontaine et Bossuet, y excellent. […] Je lis dans un journal une anecdote qui prouve jusqu’à quel point certains grands écrivains sont parvenus à se donner l’habitude de l’harmonie.
Un écrivain de génie peut être un critique d’un goût peu sûr ; et, au contraire, sans être un grand écrivain, on peut exceller dans la critique. […] Tout écrivain est peintre, dit La Bruyère, et tout excellent écrivain, excellent peintre. […] La clarté est la qualité la plus indispensable pour un écrivain. […] Ce mérite est beaucoup plus rare dans les écrivains de nos jours. […] C’est le défaut de quelques écrivains de nos jours.
Ce sont celles que l’abbé de Radonvilliers105 appelle tropes d’usage ou de la langue, pour les distinguer des tropes d’invention ou de l’écrivain, dont le mouvement plus libre a besoin par là même d’être guidé dans sa route et modéré dans ses écarts. […] Vous conclurez de tout ceci que plus la comparaison, qui est la base du trope, est rigoureuse et entière, moins celui-ci laisse place à l’arbitraire dans son emploi ; plus, au contraire, elle est vague et indéterminée, plus l’écrivain a de latitude pour créer, modifier et façonner à son gré les applications du trope. […] D’où j’arrive à la formule suivante : un trope étant donné, il est trope d’usage ou de langue, en raison directe de sa compréhension, et inverse de son extension ; et, au contraire, il est trope d’invention ou d’écrivain, en raison directe de son extension et inverse de sa compréhension. […] Les esprits vifs, pleins de feu et qu’une vaste imagination emporte hors des règles de la justesse, ne peuvent s’assouvir de l’hyperbole. » Elle est le vice dominant des écrivains de l’Orient, de l’Afrique, de l’Espagne et de l’Italie. […] Les écrivains sérieux, comme les comiques, en donnent des preuves et des exemples.
L’art de l’écrivain est de saisir cette harmonie : il faut qu’on aperçoive dans son style ce ton qui plaît dans un beau tableau. » Aujourd’hui enfin l’on demande encore mieux. […] Magicienne universelle, elle transforme, au gré de l’écrivain, tout être et toute chose, et la nature entière lui offre à profusion les images et les couleurs qui vivifient les idées. […] Si ces deux écrivains ont infiniment d’esprit, de verve et d’originalité de style, ce sont bien, d’autre part, les plus étranges fabricateurs de figures triviales que la France ait produits. […] Ces écrivains ont aussi tout un système d’allusions verbales, qui n’est pas moins déplacé. […] De tout temps l’écrivain qui s’est respecté lui-même a respecté la décence.
Mais cela n’empêche pas ces travaux préliminaires d’aider l’écrivain, comme le peintre, à inventer dans l’occasion, et dussent-ils n’avoir aucune application rigoureusement spéciale, ils auront du moins exercé le coup d’œil et assoupli la main. […] Je dis au rhéteur, remarquez, et non pas à l’écrivain. […] Il n’en va pas ainsi de l’écrivain. […] Les orateurs, les poëtes, les écrivains de toute espèce vous fourniront de nombreux exemples de cette sorte de définition. […] C’est le défaut mortel de presque tous les écrivains de la fin du seixième siècle et du commencement du dix-septième, des avocats surtout et des prédicateurs.
Descartes est un grand écrivain, parce qu’on ne peut pas ne pas l’être, quand on pense et quand on sent avec grandeur : mais s’il est permis de le dire, l’écrivain dans Descartes a moins d’art que de génie ; et en prose c’est Pascal qui doit être considéré comme le premier grand artiste qu’ait produit la France. […] Nul écrivain, Pascal excepté, n’a laissé sur la langue une pareille empreinte. […] Cependant pour être un écrivain d’un siècle de décadence, Rousseau n’en est pas moins, comme Tacite, un grand écrivain. […] Pardonnons beaucoup à celui qui a écrit tant de belles pages sur la liberté, sur la vertu et sur Dieu ; mais réservons notre admiration tout entière pour les écrivains du dix-septième siècle, parce qu’en eux la simplicité, la naïveté même est unie à la grandeur, que la grâce y est la parure de la force, et la solidité l’essence même de leur génie. […] Nul n’a poussé plus loin que lui le scrupule d’un écrivain désireux d’atteindre la plus haute perfection.
L’histoire des grands écrivains ne confirme-t-elle pas cette vérité ? […] voilà donc l’instrument qu’il importe le plus de savoir manier pour celui-là même à qui le nom d’orateur semblerait mieux convenir que le nom d’écrivain. […] Sans le travail, et un travail obstiné, point d’écrivain. […] « Quoique les règles, dit parfaitement bien Condillac, soient le fruit de l’expérience et de la réflexion, quelques écrivains les ont combattues, comme si elles n’étaient que de vieux préjugés. […] Concluons de ce qui précède que trois éléments concourent à la formation de l’écrivain : la nature, l’art et l’exercice.
Les modernes ont plus d’écrivains que d’orateurs. […] Il devenait, comme la plume, un confident du travail et de l’inspiration, presque un ami pour l’écrivain. […] L’élocution appartient à tout le monde ; le style est à l’écrivain. […] Tous les grands et tous les bons écrivains sont naturels. […] Son histoire est celle de tous les grands écrivains.
Passant du sens primitif au sens dérivé, et dans une acception plus étendue, il est devenu la forme personnelle et vivante que l’écrivain donne à sa pensée. […] Tous les bons écrivains sont naturels. […] Dans la bouffonnerie même il y a une mesure dont ne doit jamais s’écarter un écrivain de bon goût. […] L’analyse raisonnée des œuvres des grands écrivains est une excellente école de goût. […] On pourrait diviser les écrivains en trois classes : 1° les hommes de génie, 2° les hommes de talent, 3° ceux qui écrivent d’une façon convenable, mais sans éclat ni élévation, si toutefois ces derniers méritent le nom d’écrivains.
Sous la plume d’un écrivain habile, les circonstances se développent avec art ; elles s’animent pour offrir un tableau pittoresque : la composition prend de la chaleur et de la vie. […] Il est difficile de donner là-dessus des règles positives ; les bienséances se sentent mieux qu’elles ne s’enseignent : ce sont les délicatesses du sentiment de l’écrivain ; elles tiennent à mille nuances qui varient dans chaque circonstance. […] Les bienséances dont nous venons de parler concernent principalement l’écrivain. […] L’écrivain qui sent le plus vivement est celui qui a le plus de succès. […] Un écrivain, quand il raisonne, a soin de déguiser l’argument, de l’embellir, de l’étendre ; il change l’ordre des propositions à son gré.
Sans la langue, en un mot, l’auteur le plus divin Est toujours, quoi qu’il fasse, un méchant écrivain. […] Les écrivains médiocres, dont la pensée est toujours enveloppée de nuages, ne savent pas aller droit au but ; ils prennent des détours, accumulent les mots et affaiblissent l’idée. […] L’écrivain qui sent le nombre règle la longueur de sa phrase sur l’objet dont il parle, sur l’harmonie de la cadence et le besoin de la respiration. […] La métonymie emploie : 1° La cause pour l’effet : Cet écrivain vit de sa plume. […] L’écrivain qui se creuserait l’esprit à l’avance pour faire des antithèses, des métaphores, des hyperboles ou des apostrophes, serait bien certainement un mauvais écrivain, un artisan de mots ; il manquerait de ce naturel, qui est le principe vital de toute œuvre littéraire.
Cette ressource, que nous ne saurions trop recommander, nous offre un double avantage : celui de nous instruire, et celui de nous faire voir comment un homme de goût a lui-même tiré parti de l’instruction qu’il a puisée dans les bons écrivains. […] Elle a aussi pour but de bien faire connaître l’objet qui occupe l’écrivain. […] Elle doit caractériser essentiellement tout écrivain qui veut réussir ; point d’éloquence sans elle ; le cœur est le sanctuaire où elle réside. […] C’est dans son cœur que l’écrivain puisera cette sensibilité qui donnera la vie à ses ouvrages. […] Heureux l’orateur ou l’écrivain qui s’empare de ces mouvements du cœur fondés, sur la raison !