/ 346
134. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Corneille 1606-1684 » pp. 310-338

. —  Instruire d’exemple me paraît faire un très-bel effet en poésie ; cette expression même semble y être devenue d’usage : Il m’instruisait d’exemple au grande art des héros. […] Tout ce plaidoyer s’adresse à un cœur devenu sourd aux intérêts de la terre : aussi prévoit-on la réponse de Polyeucte. […] Devienne tous pareils à ces vaines idoles Ceux qui leur donnent l’être et les font adorer ! Devienne tout semblable à tous ces dieux frivoles   Quiconque en eux veut espérer ! […] Tu veux Ici, elle devient injuste, extrême, comme l’est toute passion ; chaque mot blesse et porte coup sur le vif, dans ces plaintes de la tendresse méconnue.

135. (1876) Traité de versification latine, à l'usage des classes supérieures (3e éd.) « SECONDE PARTIE. DE LA VERSIFICATION LATINE. — CHAPITRE IV. De la composition des vers. » pp. 295-331

Si c’est une consonne, il faut avoir bien soin que le mot suivant commence par une voyelle ou une diphthongue ; autrement la dernière syllabe de ce dactyle deviendrait longue par position. Ainsi, après le verbe cōndĕrĕt, si l’on mettait muros au lieu de urbem, la dernière syllabe, ret, deviendrait longue, et il n’y aurait plus de dactyle. […] Les finales de agricolam, de laudat, de juris, qui sont brèves de leur nature, deviennent longues par position. […] Il s’agit ici de peindre l’inquiétude de ce tendre père, qui redoute que cet instrument de salut ne devienne pour son enfant un instrument de mort. […] Il se souvient encore du faible germe qui est devenu un chêne immense ; et les bois qu’il a vus naître, il les a vus vieillir avec lui.

136. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre III. De la partie oratoire dans les Historiens anciens. Historiens grecs. »

Il faut remarquer surtout ce qu’étaient et ce que devinrent ensuite ces mêmes Perses : il suffira, pour cela, de rapprocher de ce discours celui de Charidème à Darius, où il fait précisément des Macédoniens opposés aux Perses, le tableau que Sandanis fait ici des Perses et des Lydiens. […] Quinte-Curce n’est pas toujours sage dans son style ; il est quelquefois tout prêt de l’enflure, et son expression cesse d’être naturelle à force de vouloir devenir élégante. Les maîtres ne sauraient mettre trop de soin à faire remarquer ces nuances légères, cette limite délicate où le trop de perfection commence à devenir un modèle d’autant plus dangereux, qu’il est plus aisé de s’en laisser séduire. […] On sait que la seconde campagne de cette guerre célèbre devint funeste aux Athéniens, par les revers qu’ils y éprouvèrent, et surtout par cette effroyable contagion qui ravagea l’Attique, et dont Thucydide et Lucrèce, après lui, nous ont laissé des tableaux si tristement fidèles.

137. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre III. Analyse et extraits des Harangues d’Eschine et de Démosthène, pour et contre Ctésiphon. »

On sent bien, d’après cela, qu’il lui devient presque superflu de réfuter des inculpations, que les auditeurs ont déjà perdues de vue, et dont l’impression est effacée. […] Je le dirai donc : quand même nous aurions tout prévu, quand toi-même, Eschine, toi qui n’osas pas alors ouvrir la bouche, devenu tout à coup prophète, tu nous aurais prédit l’avenir, il eût fallu faire encore ce que nous avons fait, pour peu que nous eussions eu sous les yeux la gloire de nos ancêtres et le jugement de la postérité. […] C’est un morceau brillant, mais qui ne pose que sur un sophisme, et où l’art oratoire devient malheureusement celui de la calomnie.

138. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Chateaubriand 1768-1848 » pp. 222-233

Né au milieu des orages d’une révolution, rejeté par elle au delà des mers, il y grandit librement, en dehors de toute imitation, n’écouta que la muse intérieure, et devint à l’école des malheurs publics et domestiques, l’éloquent interprète de tous les regrets et de toutes les espérances, l’instrument prédestiné d’une restauration littéraire, morale et religieuse. […] Le chant est aussi souvent la marque de la tristesse que de la joie : l’oiseau qui a perdu ses petits chante encore ; c’est encore l’air du bonheur qu’il redit, car il n’en sait qu’un ; mais, par un coup de son art, le musicien n’a fait que changer la clef 1 et la cantate du plaisir est devenue la complainte de la douleur. […] Ces deux voix sorties du tombeau, cette mort qui servait d’interprète à la mort m’ont frappé ; je suis devenu chrétien.

139. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Saint-Simon, 1675-1755 » pp. 223-233

Les premières pièces offraient les mugissements contenus des valets, désespérés de la perte d’un maître si fait exprès pour eux, et pour les consoler d’un autre qu’ils ne prévoyaient qu’avec transissement, et qui par celle-ci devenait le leur propre. […] Le rideau demeura ouvert, et cette chambre devint aussitôt le palais de Morphée. […] Gouverneur du duc de Bourgogne Il s’adjoignit Fénelon, dont il devint l’ami, et auquel il resta fidèle dans la disgrâce.

140. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Première section. Des genres secondaires de poésie — Chapitre II. Du genre pastoral » pp. 96-112

On peut ensuite la voir telle qu’elle est de nos jours : l’état des bergers est bas, servile, laborieux ; leurs occupations sont devenues pénibles et désagréables, leurs idées tristes et grossières. […] Il faut des images et des couleurs nouvelles, sous peine de devenir insipide et ennuyeux. […] Les légendes elles-mêmes et l’histoire de l’Église pourraient devenir une source inépuisable d’inspirations : Marie, la divine bergère, conduisant parmi les lis les blanches brebis de son Fils ; sainte Agnès, au nom si doux, qui fait entre ses bras un lit pour le céleste Agneau ; sainte Madeleine, visitée dans la Sainte-Baume par les anges, et chantant avec eux les louanges de Dieu sept fois le jour ; saint François d’Assise parlant aux oiseaux et les faisant taire lorsqu’il récitait son bréviaire ; sainte Germaine marchant sur les flots, quand le torrent voisin de Pibrac, grossi par l’orage, l’empêchait de se rendre à l’église, et commandant à ses brebis de rester paisible autour de sa houlette pendant son absence, — ou bien obtenant du ciel, pour apaiser sa marâtre, le changement en fleurs admirables, au milieu de l’hiver, de quelques morceaux de pain qu’elle destinait aux pauvres.

141. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

De pauvre on devient riche, et d’heureux misérable. […] Elle est trop chargée de faits et d’intrigues, et est si compliquée qu’elle en devient obscure et fatigante. […] Bientôt entre leurs mains ils devinrent plus beaux. […] L’inspiration faiblit, l’exécution devient molle et lâche. […] Que devenir ?

142. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre VI. D’Aguesseau et Séguier. »

Pourquoi ces grands modèles sont-ils devenus si rares ? […] Leur objet était d’éteindre la croyance, de faire prendre un autre cours aux esprits sur les institutions religieuses et civiles ; et la révolution s’est, pour ainsi dire, opérée ; les prosélytes se sont multipliés ; leurs maximes se sont répandues ; les royaumes ont senti chanceler leurs antiques fondements ; et les nations, étonnées de trouver leurs principes anéantis, se sont demandé par quelle fatalité elles étaient devenues si différentes d’elles-mêmes.

143. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — La Rochefoucauld. (1613-1680.) » pp. 15-19

Doué de beaucoup d’esprit naturel, de courage et d’ambition, il se mêla aux intrigues et aux combats de la Fronde, pendant la minorité de Louis XIV ; mais il sut se réconcilier à propos avec la cour et devint l’objet de plusieurs faveurs du prince. […] La complaisance est nécessaire dans la société, mais elle doit avoir des bornes : elle devient une servitude quand elle est excessive.

144. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Préface » pp. -

L’ensemble de ces modèles, qui s’enchaînent, se continuent et s’expliquent les uns les autres, devient ainsi l’abrégé d’une histoire agissante et vivante, qui nous permet de suivre les progrès ou les transformations de la langue nationale, comme on descend le cours d’un beau fleuve dont les eaux s’abandonnent à leur pente, et reflètent les paysages de leurs rives. […] De là vient que nous avons multiplié ces occasions de rapprochements et de comparaisons qui habituent l’œil à voir juste, à distinguer les styles, à reconnaître la facture d’un maître, à ne pas appliquer à la diversité des talents les lieux communs d’une appréciation vague et anonyme, en un mot, à devenir connaisseur.

145. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Préface » pp. -

L’ensemble de ces modèles, qui s’enchaînent, se continuent et s’expliquent les uns les autres, devient ainsi l’abrégé d’une histoire agissante et vivante, qui nous permet de suivre les progrès ou les transformations de la langue nationale, comme on descend le cours d’un beau fleuve dont les eaux s’abandonnent à leur pente, et reflètent les paysages de leurs rives. […] De là vient que nous avons multiplié ces occasions de rapprochements et de comparaisons qui habituent l’œil à voir juste, à distinguer les styles, à reconnaître la facture d’un maître, à ne pas appliquer à la diversité des talents les lieux communs d’une appréciation vague et anonyme, en un mot, à devenir connaisseur.

146. (1839) Manuel pratique de rhétorique

Ici les fonctions de l’orateur deviennent difficiles. […] Qu’est devenu ce sénat à qui nous avons été constamment attachés ? […] Qu’est devenue enfin, ô Cicéron, cette voix, cette éloquence, qui a été pour tant d’autres un si utile secours ? […] eussiez-vous dit, que sont devenus ces toits de chaume et ces foyers rustiques qu’habitaient jadis la modération et la vertu ? […] Dans les mouvements violents, le langage devient naturellement rapide, pressé, sans liaison, et imite le tumulte de l’âme agitée.

147. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Première partie - Préceptes généraux ou De la composition littéraire. — Chapitre troisième. De l’élocution. »

Le style deviendrait diffus par sa clarté même et le lecteur serait fâché de voir que vous le soupçonnez de paresse d’esprit ou de défaut d’intelligence. […] Gradation ascendante : Je deviens sacrilège, assassin, parricide. […] De simple et coupé, le style est devenu élégant et nombreux. […] Si l’élève a bien compris tout ce qui précède, ce genre d’analyse lui deviendra bientôt familier. […] Une fois accoutumés au mécanisme de décomposition, ils deviendront rapidement habiles.

148. (1825) Rhétorique française, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes pp. -433

Sans cette première culture, l’esprit même le plus naturellement disposé à devenir riche et fertile, le sera-t-il de son propre fonds ? […] L’éloquence est devenue l’un des ressorts de nos institutions politiques. […] Les ressources qu’on peut tirer de son esprit, de son cœur, des connaissances acquises, deviendraient inutiles si l’on voulait écrire ou parler sur une matière à laquelle on serait étranger. […] Ce qui fait plaisir dans la bouche d’un orateur à qui l’âge concilie le respect devient indécent et déplaît dans celle d’un jeune homme. […] Mais il y a long-temps que l’esprit est devenu la dupe du cœur.

149. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section II. De l’Art d’écrire agréablement. — Chapitre I. Du style. » pp. 181-236

Pline, son panégyriste, lui dit à ce sujet : vous êtes le seul à qui il soit permis d’être le père de la patrie, avant de le devenir . […] « S’il y a une occasion au monde, où l’âme pleine d’elle-même, soit en danger d’oublier son Dieu (premier membre), c’est dans ces postes éclatants, où un homme, par la sagesse de sa conduite, par la grandeur de son courage, par le nombre de ses soldats, devient comme le Dieu des autres hommes (second membre) et rempli de gloire, en lui-même, remplit tout le reste du monde d’admiration, d’amour ou de frayeur » (troisième membre). […] Dans cette phrase : l’orateur arrive à sa fin, qui est de persuader, d’une façon toute particulière ; ces derniers mots sont mal placés, et par-là deviennent susceptibles de divers rapports, puisqu’on pourrait les faire rapporter au verbe persuader, quoiqu’en effet ils se rapportent aux mots, arrive à sa fin. […] Donc c’est la loi de Dieu qui doit être la règle constante du temps, et non pas la variation des temps qui doit devenir la règle de la loi de Dieu. » Et dans celui-ci : « Il ne faut pas vivre pour manger : mais il faut manger pour vivre. » Adjonction. […] Si tu n’y prends garde, tu vas devenir le jouet des vents.

150. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Villemain 1790-1870 » pp. 251-256

La critique Lorsque la critique est devenue nécessairement un genre de littérature, souvent ceux qui l’exerçaient n’ont pas respecté dans les autres un titre qu’ils portaient eux-mêmes. […] Dans un esprit faible et impuissant, le bon goût se rappetisse, se rétrécit, devient craintif et superstitieux, et se proportionne à la mesure de l’homme médiocre qui s’en sert aussi timidement pour juger que pour écrire1.

151. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Voiture, 1598-1648 » pp. 21-25

Voiture 1598-1648 [Notice] Fils d’un fermier des vins qui fut échevin d’Amiens, protégé par son condisciple le comte d’Avaux, recherché des grands qu’il amusait en les flattant, devenu la merveille de l’hôtel de Rambouillet, maître de cérémonies chez Gaston d’Orléans, favori tour à tour de Richelieu et de Mazarin, interprète des ambassadeurs près de la reine, reçu à l’Académie française qui porta officiellement son deuil, Voiture fut un bel esprit, heureux et habile, dont le souvenir est inséparable de la société polie au milieu de laquelle s’épanouirent ses agréments. […] Voiture joue ici sur le sens de ce mot, devenu le surnom d’une faction qui, vers le même temps, au début de la régence d’Anne d’Autriche, préludait aux troubles de la Fronde.

152. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bourdaloue, 1632-1704 » pp. 133-137

C’est que, pour contenter une seule passion, qui est de s’élever à cet état, il faut s’exposer à devenir la proie de toutes les passions ; car y en a-t-il une en nous que l’ambition ne suscite contre nous ? […] « L’ambitieux ne jouit de rien : ni de sa gloire, il la trouve obscure ; ni de ses places, il veut monter plus haut ; ni de sa prospérité, il sèche et dépérit au milieu de son abondance ; ni des hommages qu’on lui rend, ils sont empoisonnés par ceux qu’il est obligé de rendre lui-même ; ni de sa faveur, elle devient amère dès qu’il faut la partager avec ses concurrents ; ni de son repos, il est malheureux à mesure qu’il est obligé d’être plus tranquille. » 1.

153. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre II. Application des principes à la première Philippique de Démosthène, et à la seconde Catilinaire de Cicéron. »

Il s’agit maintenant de rassurer le peuple sur les suites de cette guerre devenue inévitable, et l’objet des alarmes du moment. […] L’orateur termine, en ranimant la confiance des Romains, par l’idée consolante que les dieux ne peuvent abandonner une cause devenue la leur. […] Tous les abusent en un principe respectable ; et lorsque l’autorité passe à des hommes inhabiles ou mal intentionnés, cette innovation, introduite par des hommes capables de l’appliquer à propos, devient bientôt une arme dangereuse entre des mains capables d’en abuser. […] Bientôt après, une maison, une terre, un vase précieux, un vêtement enfin, tentèrent la cupidité et devinrent des titres de proscription. […] » Mais lorsque la république se fut accrue, lorsque les factions se fortifièrent par le nombre des factieux, l’innocence devint l’objet et souvent la victime de la calomnie.

154. (1865) De la Versification française, préceptes et exercices à l’usage des élèves de rhétorique. Première partie. Préceptes. Conseils aux élèves.

— Deviendrez-vous ainsi des poètes ? […] Mais, au moins, vous deviendrez des versificateurs, et alors vous pourrez, avec connaissance de cause, louer ou blâmer les vers des autres ; alors surtout, vous serez plus heureux d’admirer les grands poètes dont la France s’enorgueillit, à si juste titre, depuis le XVIIe siècle jusqu’à nos jours.     […] Mais lorsqu’on la néglige, elle devient rebelle ; Et pour la rattraper, le sens court après elle. […] Dans le temple des Juifs un instinct m’a poussée, Et d’apaiser leur Dieu j’ai conçu la pensée ; J’ai cru que des présents calmeraient son courroux, Que ce Dieu, quel qu’il soit, en deviendrait plus doux. […] Avec de telles qualités, et dans de pareilles conditions, nos deux auteurs devaient réussir également, chacun dans son genre, et devenir : l’un, le plus correct et le plus habile des versificateurs, le législateur du Parnasse, le maître des poètes17 ; l’autre, le poète même par excellence, le type et le modèle des poètes.

155. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre XII. Poésie dramatique. »

Dès que les princes des peuples sont pour quelque chose dans une action, l’intérêt devient en quelque sorte national, et excite plus vivement notre attention. […] Racine sut éviter tous ces défauts, et devint le plus parfait modèle des poètes tragiques. […] Il est inutile de dire que quand ces fautes dépassent une certaine mesure, l’ouvrage qui les admet devient tout à fait indigne de l’attention des littérateurs. […] Le poète peut associer à ce caractère principal d’autres caractères subalternes, sans que l’action en devienne plus chargée ou plus intriguée. […] Elle s’étend quelquefois à une pièce entière et devient ainsi une véritable comédie d’une certaine espèce.

156. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

« On compte, en le voyant, les ennemis qu’il a vaincus, non pas les serviteurs qui le suivent : tout seul qu’il est on se figure autour de lui ses vertus et ses victoires qui l’accompagnent : il y a je ne sais quoi de noble dans cette simplicité ; et moins il est superbe, plus il devient vénérable ». […] Quel charme attendrissant dans les plus petits détails, devenus si intéressants sous la plume de Tacite ! […] On y remarque, entre autres, un passage sur l’immortalité de l’âme, qui prouve que les belles âmes et les esprits bien faits n’ont eu, dans tous les temps, qu’un sentiment à cet égard ; et qu’il n’appartenait qu’à la frivolité moderne de traiter ces grands principes de la morale universelle, avec une légèreté qui est du moins ridicule, quand elle ne devient pas dangereusement exemplaire. […] Songez qu’on travaille pour ses propres intérêts, en s’occupant de ceux de son frère : l’illustration d’un frère devient pour nous une décoration personnelle, et nulle autre n’en saurait être autant honoré.

157. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Balzac. (1594-1655.) » pp. 2-6

Car comment eussent-ils pu trouver la vérité qu’ils cherchaient, puisqu’elle n’était pas encore née : il fallait que la vérité se fit chair3, afin de se rendre sensible et de devenir familière aux hommes, afin de se faire voir et toucher. […] Nous disons que l’âme de l’homme est un feu inextinguible et perpétuel ; qu’elle est originaire du ciel ; que c’est une partie de Dieu même1 : et par conséquent qu’il y a bien plus d’apparence qu’elle se ressente de la noblesse de sa race que de la contagion de sa demeure ; qu’il est bien plus à croire qu’elle dure, pour se réunir à son principe, pour acquérir la perfection de son être, pour devenir raison toute pure, qu’il n’est à croire qu’elle finisse, pour tenir compagnie à la matière, pour s’éloigner de sa véritable fin, pour courir la fortune de ce qui est son contraire plutôt que son associé.

158. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Bernardin de Saint-Pierre. (1737-1814.) » pp. 153-158

L’ordre et la beauté même que vous avez répandus sur toutes vos créatures, comme des degrés pour élever l’homme à vous, sont devenus des voiles qui vous dérobent à leurs yeux malades. […] Contre vous toute puissance est faiblesse ; avec vous toute faiblesse devient puissance.

159. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Madame de Maintenon 1635-1719 » pp. 94-99

Son dévouement, le charme de ses entretiens, la solidité de son esprit, et l’estime qu’elle inspira peuvent expliquer le crédit insensible qui l’achemina par degrés vers le trône d’un souverain devenu enfin soucieux de sa dignité. […] Je ne sais si c’est vous qui leur inspirez la fierté qu’elles ont, ou si ce sont elles qui vous donnent celle qu’on admire2 en vous : quoi qu’il en soit, comptez que vous serez insupportable à Dieu et aux hommes, si vous ne devenez plus humble et plus modeste que vous ne l’êtes.

160. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Retz, 1614-1679 » pp. 38-42

Il voulut régner selon son inclination, qui ne se prescrivait point de règles, même dans les choses où il ne lui eût rien coûté de s’en imposer ; et il fit si bien que, dans le cas où le destin lui eût donné un successeur de son mérite, je ne sais si la qualité de premier ministre qu’il a prise le premier n’aurait pas pu devenir, avec un peu de temps, aussi odieuse en France que le fut par l’événement celle de maire du palais et de comte de Paris1. […] Ce qui est étonnant, c’est que ce même homme, sur la fin de sa vie, n’était plus rien de tout cela, et qu’il devint doux, paisible, sans intrigue, et l’amour de tous les honnêtes gens de son temps ; comme si toute son ambition d’autrefois n’avait été qu’une débauche d’esprit, et des tours de jeunesse dont on se corrige avec l’âge ; ce qui prouve bien qu’en effet il n’y avait en lui aucune passion réelle.

161. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Poètes

Il suivit à Paris son père, devenu secrétaire d’Anne de Bretagne et poète de cour, et, pendant que Jean faisait et racontait en vers le Voyage de Gênes et le Voyage de Venise, Clément commençait et continuait ses études sous des pédants qu’il a ridiculisés, puis était successivement clerc de procureur, page chez M. de Villeroy, valet de chambre de la sœur de François Ier, Marguerite d’Angoulême, duchesse d’Alençon, valet de chambre du roi, qu’il suit au camp du Drap d’Or (1520), soldat dans l’armée du duc d’Alençon sous Mézières en 1521, soldat et vaillant soldat, à Pavie, où il fut blessé et pris. — Rendu à la liberté, commença pour lui, en 1526, cette vie de persécutions, d’incarcérations, de proscriptions, qui pendant dix ans le conduisit, des prisons d’où a plusieurs reprises le tira François Ier, à Pau, auprès de Marginalité, devenue reine de Navare, à Ferrare, auprès de Renée de France, enfin à Venise. — Une abjuration solennelle faite à Lyon en 1536 lui permit de reparaître à la cour. […] Voyla comment pouldre et cendre devint L’aysc plus grand71 qu’à moy oncques advint. […] Quand je regarde et pense à l’avenir, J’ay bon vouloir de sage devenir Mais sans support je ne puis retraire La ou sçavez. […] Il est mort à trente-cinq ans, sans avoir eu le temps d’être que le second de celui dont il fut peut-être devenu l’égal. […] Plus l’amoureux pasteur sur un tronq adossé, Enflant son flageolet à quatre trous persé, Son mastin a ses pieds, à son flanc la houlette, Ne dira plus l’ardeur de sa belle Janette ; Tout deviendra muet, Echo sera sans vois ; Tout deviendra campagne, et, en lieu de les bois, Dont l’ombrage incertain lentement se remue177, Tu sentiras le soc, le coultre178 et la charrue ; Tu perdras ton silence, et haletans d’effroy Ny Satyres ny Pans ne viendront plus chez toy.

162. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre V. De la disposition. »

Le grand art est de ménager l’attention du lecteur : si l’on épuise tout d’abord sa curiosité, le reste devient froid et languissant. […] C’est en vain qu’à travers les bois, Bech précipite sa marche pour tomber sur nos soldats épuisés : le prince l’a prévenu ; les bataillons enfoncés demandent quartier ; mais la victoire va devenir plus terrible pour le duc d’Enghien que le combat. […] Il faut convenir que la philanthropie est bien barbare, et qu’à force d’humanité, nous sommés devenus bien inhumains !

163. (1876) Traité de versification latine, à l'usage des classes supérieures (3e éd.) « SECONDE PARTIE. DE LA VERSIFICATION LATINE. — CHAPITRE III. Règles particulières de la quantité. » pp. 274-294

O final précédé d’une longue n’est devenu commun qu’à une époque postérieure. […] Les finales en m sont brèves de leur nature ; mais, dans les vers, elles deviennent longues devant une consonne, et s’élident devant une voyelle. […] Dans ce cas, ou la préposition devient brève, comme dans præire, dĕhiscere, dĕambulare ; ou bien elle s’élide, comme dans seōrsim (pour seōrsim), deēsse (pour dĕēsse), dehīnc (pour dĕhīnc), etc.

164. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre IX. Parallèle des Oraisons funèbres de Condé, par Bossuet et de Turenne, par Fléchier et Mascaron. »

« Certes, s’il y a une occasion au monde où l’âme pleine d’elle-même soit en danger d’oublier son Dieu, c’est dans ces postes éclatants où un homme, par la sagesse de sa conduite, par la grandeur de son courage, par la force de son bras, et par le nombre de ses soldats, devient comme le dieu des autres hommes, et rempli de gloire en lui-même, remplit tout le reste du monde d’amour, d’admiration ou de frayeur. […] Il y a je ne sais quoi de noble dans cette honnête simplicité ; et moins il est superbe, plus il devient vénérable ».

/ 346