Bientôt on voit paraître tout le clergé destiné à la cérémonie : c’est un vieux pasteur qui n’est connu que sous le nom de curé, et ce nom vénérable, dans lequel est venu se perdre le sien, indique moins le ministre du temple que le père laborieux du troupeau. […] Le chant est aussi souvent la marque de la tristesse que de la joie : l’oiseau qui a perdu ses petits chante encore ; c’est encore l’air du bonheur qu’il redit, car il n’en sait qu’un ; mais, par un coup de son art, le musicien n’a fait que changer la clef 1 et la cantate du plaisir est devenue la complainte de la douleur. […] La rivière qui coulait à mes pieds, tour à tour se perdait dans le bois, tour à tour paraissait brillante des constellations de la nuit, qu’elle répétait dans son sein.
Elles perdent cette exagération métaphorique pour ne plus conserver que les figures qui font image. […] Ce principe s’applique à tous les genres de style figuré, et ne doit jamais être perdu de vue. […] Après la mort de Démosthène, la Grèce perdit sa liberté. […] On le perd de vue ; on n’est occupé que de Philippe qui envahit tout. […] C’est là une différence caractéristique qu’on ne doit jamais perdre de vue.
Ce sont là des raisonnements qui perdraient leur vivacité par le développement syllogistique. […] Tout est dit pour le salut commun ; aucun mot n’est pour l’orateur ; on le perd de vue, on ne pense qu’à Philippe qui envahit tout. […] quand je perdis ton frère Antiloque, je t’avais pour me consoler ; je ne t’ai plus, rien ne me consolera ; tout est fini pour moi. […] je crois que c’est aujourd’hui que je vous perds tous les deux ; la mort de l’un rouvre la plaie que l’autre avait faite au fond de mon cœur. […] Quelle que soit la destinée de mes travaux, cet exemple, je l’espère, ne sera pas perdu.
La loi et la coutume présentent sans cesse et de toutes parts des limites qu’il n’est ni permis ni possible de franchir : l’imagination est sans cesse arrêtée dans son vol ; et l’avocat ne peut jamais perdre de vue la ligne, l’équerre et le compas : son devoir principal est d’en faire constamment un emploi judicieux. […] Nous ne saurions donc recommander trop scrupuleusement aux jeunes gens qui se destinent à la carrière du barreau, de se mettre de bonne heure en garde contre un défaut que rien ne rachète auprès d’un auditeur fatigué par un torrent de paroles inutiles, qui ne lui apprennent rien, qui lassent sa patience, lui font perdre de vue l’objet intéressant de la cause, et détruisent nécessairement tout l’effet que l’on se proposerait de produire.
L’hymne, au temps d’Homère, n’a rien perdu de sa puissance. […] Et puis, nous devions avoir à cœur, sans lui rien faire perdre de ses mérites, de lui donner, avec plus de précision, plus de correction. […] si la fortune perd ses menaces contre le boulevard de la vertu ? […] L’insulte est vengée, ils ont perdu leur fureur, ils fuient et cherchent un abri, effugiunt, teguntur. […] Va-t-elle perdre sa rivale et réveiller le courroux de Thésée contre un sang odieux, celui des Pallantides ?
L’amiral de Coligny est en présence des assassins qui vont lui ravir la vie : Compagnons, leur dit-il, achevez votre ouvrage, Et de mon sang glacé souillez ces cheveux blancs, Que le sort des combats respecta quarante ans ; Frappez, ne craignez rien, Coligny vous pardonne ; Ma vie est peu de chose et je vous l’abandonne J’eusse aimé mieux la perdre en combattant pour vous ! […] Une fatale révolution, une rapidité que rien n’arrête, entraîne tout dans les abîmes de l’éternité ; les siècles, les générations, les empires, tout va se perdre dans ce gouffre, tout y entre et rien n’en sort : nos ancêtres nous en ont frayé le chemin, et nous allons le frayer dans un moment à ceux qui viennent après nous.
Tandis que vous pensez à tant de choses, le canon gronde, votre tête est menacée ; mais ce qui est plus grave, des milliers d’hommes vous regardent, cherchent dans vos traits l’espérance de leur salut ; plus loin, derrière eux, est la patrie avec des lauriers ou des cyprès, et toutes ces images, on les chassera pour penser vite ; car, une minute de plus, et une combinaison infaillible a perdu son à-propos, et au lieu de la gloire, c’est la honte qui vous attend. […] Nous n’avons pas perdu la faculté d’être sensibles aux grandes choses ; en tout cas, notre siècle aurait suffi pour nous la rendre, et nous avons acquis cette expérience qui permet de les apprécier et de juger.
Il trouve l’invention de dépenser sans paraître, de perdre sans jouer, et de payer sans s’acquitter. […] Cela saisit Vatel ; il dit plusieurs fois : « Je suis perdu d’honneur ; voici un affront que je ne supporterai pas. » Il dit à Gourville6 : « La tête me tourne, il y a douze nuits que je n’ai dormi ; aidez-moi à donner des ordres. » Gourville le soulagea en ce qu’il put. […] Il attend quelque temps ; les autres pourvoyeurs ne viennent point ; sa tête s’échauffait, il croit qu’il n’aura point d’autre marée ; il trouve Gourville, et lui dit : « Monsieur, je ne survivrai pas à cet affront-ci3 ; j’ai de l’honneur, de la réputation à perdre. » Gourville se moqua de lui.
Il y a encore ceux qui, si une peine leur a été infligée, peuvent en repousser l’exécution ou gagner du temps, ou qui, vu leur indigence, n’auront rien à perdre. […] Nous ne perdons pas de vue ce qui nous inspire de l’intérêt. […] Voilà pourquoi tout le monde aime ceux qui ont cette constance envers ceux de leurs amis qu’ils ont perdus. […] Sont encore à craindre ceux qui ont perdu des gens plus puissants que nous, et même ceux qui s’attaquent à des gens moins puissants que nous. […] Ils ne sont pas généreux, parce que, pour eux, l’argent est une des choses nécessaires et que, en même temps, ils savent par expérience qu’il est difficile d’acquérir et facile de perdre.
Nous avancions lentement au pas de nos chevaux fatigués, les yeux attachés sur les murs gigantesques, sur les colonnes éblouissantes et colossales, qui semblaient s’étendre, grandir, s’allonger à mesure que nous approchions : un profond silence régnait dans toute notre caravane ; chacun aurait craint de perdre une impression de cette heure, en communiquant celle qu’il venait d’avoir. […] Voici les nuances qui les distinguent : Une armée est vaincue, quand elle a perdu le champ de bataille ; elle est battue, quand elle l’a perdu avec un échec considérable, c’est-à-dire, beaucoup de morts et de prisonniers : elle est défaite lorsque cette défaite va au point que l’armée est dissipée, ou tellement affaiblie qu’elle ne puisse plus tenir la campagne. […] Toutes ces périodes respirent une harmonie continuelle : pour atteindre à cette précieuse qualité du style, nous remarquerons que tout le talent consiste à conserver le plus d’égalité possible entre les membres de la période ; à éditer les périodes trop longues et les phrases trop courtes : car les premières feraient perdre haleine, et les secondes obligeraient à chaque instant de s’arrêter ; à savoir dispenser les chutes masculines et féminines à la fin de chaque membre ; à bannir les mots qui riment ensemble, les consonances désagréables, et enfin à terminer le dernier membre d’une manière mélodieuse.
Avant que de se perdre, il a eu le loisir de perdre les peuples et les Etats, de mettre le feu aux quatre coins de la terre, de gâter le présent et l’avenir par les maux qu’il a faits et par les exemples qu’il a laissés… Mais il faut toujours en venir là.
Il ne me reste, après cela, que de prier Dieu qu’il répande sa bénédiction sur l’étude que vous en ferez, qu’il vous préserve de cet esprit de curiosité qui se perd en voulant approfondir des questions vaines, inutiles ou même dangereuses, et qu’il vous inspire ce goût solide de la vérité, qui la cherche avec ardeur, mais avec simplicité, et qui s’occupe tout entier des vérités utiles, bien moins pour les connaître que pour les pratiquer. […] Par une espèce de possession anticipée, l’âme jouit d’un bien qu’elle n’a pas encore ; mais elle le perdra aussitôt qu’elle aura commencé de le posséder véritablement, et le dégoût abattra l’idole que le désir avait élevé.
La réputation de Schullembourg dépendait d’échapper au roi de Suède ; le roi, de son côté, croyait sa gloire intéressée à prendre Schullembourg et le reste de son armée : il ne perd point de temps ; il fait passer sa cavalerie à un gué. […] Le kan des Tartares et le bacha, qui voulaient prendre le roi en vie, honteux de perdre du monde et d’occuper une armée entière contre soixante personnes, jugèrent à propos de mettre le feu à la maison pour obliger le roi à se rendre.
Accueilli d’abord avec bonté par l’impératrice Catherine, il perdit bientôt ses bonnes grâces, quitta la Russie, erra quelque temps en Pologne et rentra en France épuisé par ces fatigues et dénué de toute ressource. […] Ils vous ont perdu en se perdant.
Ne perdez point de vue, au fort de la tempête, Ce panache éclatant qui flotte sur ma tête : Vous le verrez toujours au chemin de l’honneur. » A ces mots, que ce roi prononçait en vainqueur, Il voit d’un feu nouveau ses troupes enflammées Et marche en invoquant le grand Dieu des armées1. […] « Tout est perdu, dit-il, mourons, brave Mayenne. […] Je te vois dans mes bras et pleurer et frémir ; Sur ton front pâlissant Dieu met le repentir : Je vois la vérité dans ton cœur descendue ; Je retrouve ma fille après l’avoir perdue, Et je reprends ma gloire et ma félicité En dérobant mon sang à l’infidélité1.
Nous ne perdrons pas notre peine à débrouiller leurs gloses encore plus obscures que le texte. […] Ha pauure Pantagruel, tu as perdu ta bonne mere, ta doulce nourrisse, ta dame19 tres aymée. […] -C.), né à Côme ou plutôt à Vérone, soldat, orateur, gouverneur de l’Espagne, préfet de la flotte de Misène, composa une histoire naturelle et d’autres ouvrages, aujourd’hui perdus.
Arrivés qu’ils furent, il fit dire la messe en sa chambre, et comme le prestre estoit sur l’élévation du Corpus Domini, ce pauvre gentilhomme s’eslance au moins mal qu’il peut, comme à corps perdu sur son lict, les mains joinctes, et en ce dernier acte rendit son esprit à Dieu : qui fut un beau miroir de l’intérieur de son âme. » Nous n’aurons pas l’impertinence de juger en quelques mots un tel homme, et un tel écrivain. […] De maniere que3, ayant aymé, plus que toute aultre chose, feu4 monsieur de La Boëtie, le plus grand homme, à mon advis, de nostre siecle, je penserois lourdement faillir à mon debvoir, si, à mon escient5, je laissois esvanouïr et perdre un si riche nom que le sien, et une memoire si digne de recommandation6, et si je ne m’essayois, par ces parties là7, de le ressusciter et le remettre en vie. […] Tant qu’elle durera, ie n’auray faute de retraicte, où rendre mes abboys12 : suffisante à me faire perdre le regret de tout’autre retraicte.
Mais pourtant, les grammairiens commençaient à perdre le sens de ces locutions ; car quelques-uns usaient déjà de l’apostrophe pour marquer par ce signe la chute de l’e qu’ils croyaient supprimé. […] 4° Mille petites nuances l’attestent, par exemple, le pronom démonstratif ce, qui jadis avait sa fonction importante, dont il a trop perdu mémoire. […] Ce qui plus tard sera réputé audace d’orateur ou de poète était alors non pas licence tolérée, mais droit reconnu de tous, ou plutôt essor spontané d’imaginations toutes jeunes que n’avait point intimidées la férule des régents. « S’enveilloit Gargantua entre… Possible est de… Hasardé n’est point que (ce que) Dieu garde… Si cesse la charrue… — Qui l’arbre transforme, greffe en nouvelle sorte… Pour mieux son œuvre commencer. » Ou je me trompe fort, ou nous avons moins gagné que perdu à nous interdire cette indépendance de tours, qui communiquait à la pensée la grâce d’un premier mouvement. […] Le même calcul modifia le groupe latin gn qui, originairement, perdait le g, (benin de benignus, poin de pugnus) ; ces mots et leurs pareils donnèrent donc bening, poing, etc. — Tandis que les premiers âges changeaient en n l’m latin appuyé sur une consonne, (songe de somnium, conter de computare), les contemporains de la Renaissance adoptèrent compter. — Le d qui disparaissait toujours devant une consonne (avenir d’advenire) fit de nouveau son apparition dans advenir. — Ignorant que ct latin se métamorphose en it, et est représenté par i dans trait (de tractum), et fait (de factum), les réformateurs nous déchirerent les oreilles par traict et faict. — Ils allèrent plus loin. […] Pour s’en abstenir, elle eut bien ses raisons ; car, si elle l’avait essayé, elle aurait pu y perdre son latin.
quelle fatale influence te porta à répandre tant de sang, et à perdre tant de vaillants hommes, qui eussent pu te rendre maîtresse de l’Europe ! […] Ce ne sont pas seulement des hommes à combattre : ce sont des montagnes inaccessibles, ce sont des ravines et des précipices, d’un côté ; c’est, de l’autre, un bois impénétrable, dont le fond est un marais, et derrière, des ruisseaux, de prodigieux retranchements : ce sont partout des forts élevés et des forêts abattues qui traversent des chemins affreux ; et au-dedans, c’est Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de succès et de la prise de Fribourg : Merci, qu’on ne vit jamais reculer dans les combats ; Merci, que le prince de Condé et le vigilant Turenne n’ont jamais surpris dans un mouvement irrégulier, et à qui ils ont rendu ce grand témoignage, que jamais il n’avait perdu un seul moment favorable, ni manqué de prévenir leurs desseins, comme s’il eût assisté à leurs conseils.
C’est qu’un temps regretté vous est en lui rendu ; C’est qu’on retrouve alors tout ce qu’on a perdu : Le passé, la jeunesse, hélas ! […] Un héros y perdrait sa peine.
La mort d’un bouvreuil Ces premiers souvenirs de bonheur ou de peine, Par instant on les perd, mais un rien les ramène. […] Ton sang n’est point perdu.
Quelle douce harmonie, et surtout, quelle image vraie nous offrent ces vers : Ou lorsque le héron, les ailes étendues, De nos marais s'élance et se perd dans les nues ! […] Enfin il ne suffit pas que la pensée soit représentée avec les traits qui lui sont propres, avec la simplicité ou la majesté qui lui convient, il faut encore que le discours, l'ouvrage, ne se ressente point d'un travail quelquefois pénible, et que la narration des faits particuliers ou épisodes ne fasse point, par sa trop grande longueur, perdre de vue le sujet principal. […] » — Mon fils, cette eau fuit pour toujours : Après mille et mille détours, Ce ruisseau va se perdre au sein des mers profondes ; Et la course de ses ondes Est l'image de nos jours. […] Les poëmes d'Homère, l'Eneïde de Virgile, la Jérusalem délivrée de Le Tasse, la Lusiade de Camoëns, le Paradis perdu de Milton et la Henriade de Voltaire sont les seuls poëmes épiques dignes d'être cités pour exemples, et tous ces poëmes renferment des fautes. […] Voici des exemples : Faut-il qu'en un moment un scrupule timide Perde… Mais quel bonheur nous envoie Athalide ?
Gaston ; mais Lucain attend, et attendra longtemps encore un vengeur parmi nous : ce n’est pas du moins l’essai de M. de Laurès, qui cependant n’était pas totalement dénué de mérite ; ce sera moins encore l’esquisse de M. de La Harpe, qui feront goûter Lucain à des lecteurs français, parce qu’il faut, pour le goûter, le voir tel qu’il est, et que c’est le seul peut-être de tous les auteurs anciens, dont les défauts tiennent si essentiellement au caractère de son génie, qu’il est presqu’impossible de lui ôter une tache sans lui faire perdre une beauté. […] La langue poétique y perdit, il est vrai, quelque chose de la correction difficile et de la sévère élégance où elle était parvenue ; mais elle étendit le cercle de ses attributions ; elle tenta d’exprimer, et elle exprima avec succès des choses rebelles jusqu’alors à la poésie. […] Voici le jugement que portait de ces deux traducteurs comparés le La Harpe de la littérature anglaise, le célèbre Johnson : « Si l’on compare, dit-il, ces deux versions, le résultat sera que Dryden subjugue, entraîne le lecteur par la vigueur et par la véhémence qui dominent en général dans son style, et que Pitt force quelquefois ce même lecteur de s’arrêter pour admirer tel ou tel vers en particulier ; que les fautes de Dryden se perdent, englouties dans un océan de beautés réelles, et que les beautés de Pitt sont à peine sensibles pour un lecteur glacé par le froid mortel d’une correction trop étudiée ; que Pitt pourra plaire à certains critiques, mais que Dryden a pour lui le peuple des lecteurs ; que Pitt enfin est cité, mais que Dryden est et sera lu ». […] Delille, sa traduction du Paradis perdu de Milton.
Elle se laisse toucher et manier : elle ne perd rien à être vue de près ; plus on la connaît, plus on l’admire. […] J’ai perdu Zénobie : après ce coup affreux, Peux-tu me demander encor ce que je veux ? […] Si l’on joue, il gagne au jeu : il veut railler celui qui perd, et il l’offense. […] On apercevait de loin des collines et des montagnes qui se perdaient dans les nues, et dont la figure bizarre formait un horizon à souhait pour le plaisir des yeux.
Cependant, comme il serait peu raisonnable d’aller sur ce point jusqu’au précepte, je ferais en sorte de n’avoir dans mes goûts que des objets respectables : c’est le seul moyen de restituer par un côté ce que l’amour fait toujours perdre de l’autre à l’exacte vertu. […] Je suis certaine encore que vous ne perdrez jamais le souvenir de ce que vous devez à ceux qui vous ont dirigé dans l’École que vous quittez, et principalement à ce Citoyen vertueuxa que ses grandes qualités ont, pour ainsi dire, associé à l’œuvre immortelle de ce règne. Je vous aimerai alors de tendresse et de fierté ; et tandis que confinée dans un château, je partagerai ma vie entre les soins de mon sexe et des amusements littéraires, je vous perdrai de vue dans le chemin de la gloire.
À force de se charger de mauvaises causes, d’excellents avocats perdent les meilleures, parce qu’ils ont compromis, en plaidant les premières, leur probité oratoire et leur prudence, leurs lumières. […] II est hors de doute que l’avocat qui posséderait dans leur intégrité les mœurs oratoires, ne perdrait jamais une seule cause. […] D’autres fois deux moyens devront être employés : Si je n’ai pas de preuves authentiques de ma créance, le juge devra apprécier ma probité qui m’empêcherait de vouloir tromper, ma bienveillance qui me fait recourir avec confiance à son équité, ma modestie qui éviterait un scandale judiciaire et des débats publics, et ma prudence qui m’aurait retenu, si j’avais craint de perdre ma cause ; et tout cela formera un corps de preuves morales qui décidera le gain de ma cause.
Il fut sur le point de ramener ses chevaux en arrière, et de retarder le jour, pour rendre le repos à celui qui l’avait perdu. « Je veux, dit-il, qu’il dorme : le sommeil rafraîchira son sang, apaisera sa bile, lui donnera la santé et la force dont il aura besoin pour imiter les travaux d’Hercule ; lui inspirera je ne sais quelle douceur tendre qui pourrait seule lui manquer. […] Sitôt qu’on l’écoute et qu’on marchande avec elle, tout est perdu. […] il est perdu dans la mêlée ; il n’en est plus question : il ne sait plus ce qui l’a fâché ; il sait seulement qu’il se fâche, et qu’il veut se fâcher ; encore même ne le sait-il pas toujours1.
Ce qui me perd aujourd’hui, ce n’est pas le défaut de moyens, mais le manque d’audace et d’impudence, indispensables pour s’en servir : c’est de n’avoir pas flatté vos oreilles par des choses agréables, de ne vous avoir pas offert le spectacle de Socrate pleurant et gémissant à vos pieds… Que d’autres accusés emploient ces moyens : ils sont indignes de moi. […] Crois-tu donc qu’une ville puisse subsister, si les jugements publics y perdent leur force, si chaque citoyen peut les enfreindre à son gré ?
On y perd son capital, son temps et ses sueurs. […] Parfois un bon sujet de drame, délayé dans un roman, a perdu tout son intérêt, et souvent une idée féconde a échoué dans un drame, qui eût réussi dans le cadre plus vaste du roman.
On ne peut guère citer des romans par extraits, puisque alors ils perdent l’enchaînement des événements qui fait un de leurs mérites. […] Quoique son époux ait perdu au jeu tout ce qu’elle lui a apporté en mariage, quoiqu’elle ait vendu toutes les pierreries qu’elle avait, et jusqu’à ses habits, elle est inconsolable de sa perte ; elle maudit les cartes qui en sont la cause ; elle maudit celui qui les a inventées ; elle maudit le tripot et tous ceux qui l’habitent.