Quand elles se mêlent régulièrement, on les appelle rimes croisées : Source délicieuse, en misères féconde, Que voulez-vous de moi, flatteuses voluptés ? […] Les divers canaux qui formaient ces îles semblaient se jouer dans la campagne : les uns roulaient leurs eaux claires avec rapidité ; d’autres avaient une eau paisible et dormante ; d’autres, par de longs détours, revenaient sur leurs pas, comme pour remonter vers leur source, et semblaient ne pouvoir quitter ces bords enchantés. » (Télémaque, livre Ier.) […] « Port-Royal donna le goût d’une diction sérieuse et nourrie, qui rapprochait la langue française des sources antiques d’où elle est sortie. […] Ajoutons, à la gloire de Fénelon, qu’il a donné le ton et le modèle de la critique dans les Dialogues et la Lettre sur l’Éloquence, où les principes éternels du goût sont exprimés avec l’exquise justesse d’une raison excellente, avec le charme de ces grâces naturelles qui coulaient de source, comme parle Saint-Simon, de cet esprit facile, ingénieux, agréable, dont il tenait pour ainsi dire le robinet, pour en verser la qualité et la quantité exactement convenables à chaque chose.
Les secours mutuels que se prêtent des genres, en apparence si opposés, et les grandes beautés qui résultent, pour la tragédie, de la connaissance raisonnée des anciens, devraient bien convaincre les jeunes écrivains de l’importante nécessité de remonter à ces sources du vrai beau, de se pénétrer de l’esprit qui anime ces magnifiques compositions, avant de hasarder si légèrement d’informes essais, dont le mépris public ne tarde pas à faire une justice qui devrait être plus utile pour le goût.
Source féconde des réalités, tout sort de lui, tout y rentre ; et, tandis qu’envoyés au dehors pour attester sa puissance, et pour célébrer sa gloire dans tous les points de l’espace et des temps, ses innombrables créatures, leur mission remplie, reviennent déposer à ses pieds la portion d’être qu’il leur départit, et que sa justice rend aussitôt à plusieurs d’entre elles, ou comme récompense, ou comme châtiment ; seul, immobile au milieu de ce vaste flux et reflux des existences, unique raison de son être, et de tous ses Êtres, il est à lui-même son principe, sa fin, sa félicité.