En effet, dit Cicéron, la nature nous apprend à ne pas entrer brusquement en matière et à préparer d’avance les esprits ; à exposer ensuite le point dont il s’agit ; à raconter les faits, s’il y a lieu ; à prouver la proposition en faisant valoir nos raisons et en détruisant celles qui nous sont contraires, et enfin à donner au discours une conclusion convenable. […] Quelques-uns aiment mieux Je premier genre ; mais d’autres, parmi lesquels il faut compter Fénelon, préfèrent la forme historique, et pensent que le meilleur moyen de louer un saint est de raconter sa vie. « Amas d’épithètes, mauvaise louange, dit La Bruyère ; ce sont les faits qui louent, et la manière de les raconter. » 347. […] Comme ces discours sont moins des monuments historiques que des tableaux faits pour réveiller de grandes et nobles idées, il ne suffit pas de raconter des faits, il faut parler à l’âme et captiver l’imagination. […] Narration oratoire. — Lally-Tollendal raconte le procès et la mort de son père.
Il faudrait un volume pour raconter toutes les transformations subies alors par un idiome encore indécis et flottant, qui comptait presque autant de vocabulaires qu’il y eut d’écrivains ambitieux de l’enrichir ou de le fixer.
Qu’on lui raconte une aventure qui l’intéresse, et qu’on l’oblige à la retracer, cet exercice peut lui être utile ; mais les grands procédés de l’éloquence, la délibération, la contestation, l’amplification des faits et des moyens, ce qui demande toute la force d’une raison mûre et solide, toutes les ressources d’un esprit cultivé, profondément instruit, peut-on le proposer à l’impéritie d’un écolier ? […] Amas d’épithètes, mauvaises louanges : ce sont les faits qui louent, et la manière de les raconter. […] Il ne faut point vous rapporter tout ce qu’il dit sur l’inutilité de cette rhétorique, parce que tout ce que je vous en ai dit comme de moi-même est tiré de lui ; il vaut mieux vous raconter ce qu’il dit sur les maux que ces vains rhéteurs causent dans une république. […] Par exemple, un froid historien qui raconterait la mort de Didon, se contenterait de dire : elle fut si accablée de douleur après le départ d’Enée, qu’elle ne put supporter la vie : elle monta au haut de son palais, elle se mit sur un bûcher, et se tua elle-même. […] Plus l’action et la voix paraissent simples et familières dans les endroits où l’on ne fait qu’instruire, que raconter que s’insinuer, plus préparent-elles de surprise et d’émotion pour les endroits où elles s’élèveront à un enthousiasme soudain.