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193. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome I (3e éd.)

Le choc de deux grandes armées est ce que la puissance humaine peut produire de plus fort, et fait naître en nous une foule de pensées sublimes ; aussi est-ce le spectacle le plus magnifique et le plus imposant qui puisse s’offrir aux yeux ou se peindre à l’imagination. […] Dans les faibles efforts de l’homme pour produire des objets sublimes (je dis faibles, comparativement à la puissance de la nature), il s’attache davantage à la grandeur des dimensions. […] Je suis porté à croire que la puissance et la force accompagnées ou non de terreur, employées soit à nous défendre, soit à nous effrayer, ont plus de titres à être considérées comme la base du sublime, que tout ce dont il a été question jusqu’ici. J’ai toujours remarqué que dans tout ce qui m’a paru sublime, il entrait quelque idée de puissance, d’énergie et de force, soit que cette idée est inséparable du sublime en lui-même, soit parce que nous ne pouvons nous dispenser d’associer à l’objet qui nous paraît sublime l’idée d’un pouvoir supérieur qui a dû concourir à sa production. […] Le langage, au point de perfection où il est arrivé de nos jours, a presque la même puissance que la musique, et cette belle faculté rehausse encore le prix que nous devons attacher à sa merveilleuse invention.

194. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

Vos mains n’ont subjugué Tigrane et Mithridate, Votre sang n’a rougi les ondes de l’Euphrate, Que pour enorgueillir d’indignes sénateurs, De leurs propres appuis lâches persécuteurs, Grands, par vos travaux seuls ; et qui, pour récompense, Vous permettaient de loin d’adorer leur puissance.

195. (1912) Morceaux choisis des auteurs français XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles

En quoi il n’est pas vraisemblable que tous se trompent ; mais plutôt cela témoigne que la puissance de bien juger et distinguer le vrai d’avec le faux, qui est proprement ce qu’on nomme le bon sens ou la raison, est naturellement égale en tous les hommes, et ainsi que la diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les uns sont plus raisonnables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies, et ne considérons pas les mêmes choses. […] Toutes ces belles raisons de sympathie646, de force magnétique647 et de vertu occulte, sont si subtiles et délicates, qu’elles échappent à mon sens matériel, et, sans parler du reste, jamais il n’a été en ma puissance de concevoir comme648 on trouve écrit dans le ciel jusqu’aux plus petites particularités de la fortune du moindre homme. […] J’ai dit encore que c’était un des plus odieux… Car qu’y a-t-il de plus odieux qu’un homme à la censure de qui chacun se trouve exposé ; dont il n’y a personne, de quelque condition qu’il soit, qui se puisse dire exempt ; et de qui les puissances mêmes ne peuvent éviter les traits ? […] De ce travail naquit un livre savant et profond sur la matière1043, dont le système allait à une répartition exacte, à soulager le peuple de tous les frais qu’il supportait et de beaucoup d’impôts, qui faisait entrer les levées directement dans la bourse du Roi, et, conséquemment, ruineux à l’existence des traitants, à la puissance des intendants, au souverain domaine des ministres des finances1044. […] Sophie eut tous les honneurs d’une souveraine : son buste sur les monnaies, la signature pour toutes les expéditions1102, la première place au conseil, et surtout la puissance suprême.

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