Mes désirs, mes craintes et mes espérances cessent tout d’un coup ; tous les mouvements dé mon âme se relâchent, et je n’ai point de passions, ou, si j’en ai, je les gouverne comme des bêtes apprivoisées.... […] Y a-t-il rien de plus bas et de plus honteux que cette passion, qui fait d’un homme une bête féroce ? […] L’union qui est entre les hommes n’est fondée que sur cette mutuelle tromperie ; et peu d’amitiés subsisteraient, si chacun savait ce que son ami dit de lui lorsqu’il n’y est pas, quoiqu’il en parle alors sincèrement et sans passion. […] Ainsi il agissait sans crainte et suivait aveuglément toutes ses passions, les couvrant la plupart sous des apparences de justice. […] Recherché dans les sociétés les plus délicates du temps pour l’agrément de sa conversation, Fontenelle passa à juste titre pour un homme d’un esprit brillant, mais d’un cœur sec et dénué de toute passion généreuse.
C’est un corps animé d’une infinité de passions différentes qu’un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie ; c’est une troupe d’hommes armés qui suivent aveuglément les ordres d’un chef dont ils ne savent pas les intentions ; c’est une multitude d’âmes pour la plupart viles et mercenaires, qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants ; c’est un assemblage confus de libertins qu’il faut assujettir à l’obéissance, de lâches qu’il faut mener au combat, de téméraires qu’il faut retenir, d’impatients qu’il faut accoutumer à la confiance. » Vous pressentez la conclusion, et vous voyez comment la définition de l’idée armée sert de développement à cette proposition : le commandement est chose difficile.
Son triomphe est dans l’éloquence de la chaire, de la tribune, du barreau, de l’académie, et j’ajouterai, en dépit des diatribes contre la tirade, dans l’éloquence du drame et de la passion.