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31. (1873) Principes de rhétorique française

Le meilleur moyen de se faire écouter des juges, c’est d’intéresser à sa cause la raison et l’humanité. […] Il faut que dès l’abord celui qui écoute soit persuadé de la bonne foi et de la probité de celui qui, parle. […] — La narration est intéressante lorsqu’elle éveille l’émotion dans l’âme de celui qui écoute ou qui lit. […] Ecoutez Virgile, il mettra le fait devant vos yeux. […] Ce n’est plus Virgile que vous écoutez ; vous êtes trop attentif aux dernières paroles de la malheureuse Didon pour penser à lui.

32. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Corneille 1606-1684 » pp. 310-338

L’obéissance On va d’un pas plus ferme à suivre qu’à conduire ; L’avis est plus facile à prendre qu’à donner : On peut mal obéir comme mal ordonner ; Mais il est bien plus sûr d’écouter que d’instruire. […] Le déplorable état où je vous abandonne Est bien digne des pleurs que mon amour vous donne ; Et si l’on peut au ciel sentir quelques douleurs,J’y pleurerai pour vous l’excès de vos malheurs ; Mais si, dans ce séjour de gloire et de lumière, Ce Dieu tout juste et bon peut souffrir ma prière, S’il y daigne écouter un conjugal amour, Sur votre aveuglement il répandra le jour. […] Si tu peux rejeter de si justes désirs, Régarde au moins ses pleurs, écoute ses soupirs ; Ne désespère pas une âme qui t’adore9 polyeucte. […] Parlez, j’écoute.

33. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Avouons-le, on sent la force et l’ascendant de ce rare esprit, soit qu’il prêche de génie et sans préparation, soit qu’il prononce un discours étudié et oratoire, soit qu’il explique ses pensées dans la conversation : toujours maître de l’oreille et du cœur de ceux qui l’écoutent, il ne leur permet pas d’envier ni tant d’élévation, ni tant de facilité, de délicatesse, de politesse ; on est assez heureux de l’entendre, de sentir ce qu’il dit, et comme il le dit ; on doit être content de soi si l’on emporte ses réflexions et si on en profite. […] S’il conte une nouvelle, c’est moins pour l’apprendre à ceux qui l’écoutent que pour avoir le mérite de la dire, et de la dire bien ; elle devient un roman entre ses mains ; il fait penser les gens à sa manière, leur met en la bouche ses petites façons de parler, et les fait toujours parler longtemps ; il tombe ensuite en des parenthèses qui peuvent passer pour des épisodes, mais qui font oublier le gros de l’histoire, et à lui qui vous parle, et à vous qui le supportez. […] Vos esclaves me disent que vous êtes enfermé, et que vous ne pouvez m’écouter que d’une heure entière. […] « Ce qui fait que peu de personnes sont agréables dans la conversation, c’est que chacun songe plus à ce qu’il a dessein de dire qu’à ce que les autres disent, et que l’on n’écoute guère quand on a bien envie de parler. » (La Rochefoucauld, Réfl. diverses, de la Conversation.)

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