Cependant, parmi les diverses méthodes, il en est une qui me parait, ainsi qu’à la majorité des rhéteurs, plus généralement applicable, et la voici : Qu’immédiatement après l’exorde, s’il y a exorde, l’écrivain expose le fait ou les faits dont il veut tirer une leçon ou un argument, les éléments de la science qu’il se propose de traiter, l’ensemble de vérités qu’il prétend établir ; que de là il passe aux preuves de ces faits, aux développements de ces données premières, à la démonstration de sa doctrine ; qu’enfin il s’attache à combattre les arguments et les moyens de ceux qui, sur les choses ou les personnes, les faits ou les idées, adoptent et soutiennent une opinion contraire à la sienne, ou tirent de la même opinion des conséquences différentes. […] Tantôt l’idée ou le fait serait mal établi, si les preuves préalables n’en préparaient d’abord la vraisemblance, si nous ne conduisions insensiblement et d’une manière détournée jusqu’à la vérité ; alors la confirmation prend le premier rang. […] Dans la thèse, l’écrivain établit les principes de la doctrine que la suite est destinée à développer, comme dans la narration l’orateur établit les faits de la cause. […] Pour y parvenir, l’écrivain rattachera la description tantôt aux héros du poëme, du drame, du roman, du discours, par l’harmonie ou les contrastes qu’il établit entre la nature extérieure et les sentiments qui les animent ; tantôt au lecteur lui-même, en mettant l’action en lui, en réveillant, pour les lui faire partager ou du moins comprendre, les émotions humaines qui dorment au sein de la nature, en faisant pénétrer enfin dans les objets physiques un élément moral.
Il suit de là qu’on ne peut diviser le style en catégories, d’après la nature des divers sujets, mais seulement d’après les divers écrivains, et par là même qu’il est inutile de chercher à établir des classifications de style. […] Il suit encore que l’on a mal compris Denys d’Halicarnasse, Cicéron et Quintilien quand on a voulu établir d’après eux les distinctions de style sublime, simple et tempéré 67. […] Tout ceci ne signifie pas que les anciens aient eu tort d’établir ces distinctions ; mais je crois que ceux qui les ont interprétés les ont parfois mal compris. […] Le seul passage où il semble établir des distinctions de ce genre se trouve au commencement de son traité sur l’éloquence de Démosthène, traité qui nous est d’ailleurs parvenu acéphale, comme on sait. […] Je ne prétends pas établir un parallèle entre les anciens et les modernes, et ne veux point dire que le français des bons écrivains de notre temps soit inférieur, comme français, à celui des âges précédents ; ce n’est pas là la question.
Quel que soit l’objet du discours, celui qui parle doit commencer par une espèce d’introduction, qui prépare l’esprit des auditeurs : il établit ensuite l’état de la question, expose celui des faits, et les appuie de preuves propres à fortifier l’opinion qu’il a de la bonté de sa cause, et à détruire les raisons de son adversaire. […] C’est elle qui nous montre le chemin que nous devons prendre pour porter l’émotion dans les cœurs, ou la conviction dans les esprits ; et c est d’après elle que les Aristote et les Cicéron ont établi en principe que le but de l’exorde était de gagner la bienveillance, de captiver l’attention, et de s’assurer la docilité de l’auditeur : Reddere auditores benevolos, attentos, dociles (Cic. […] Les faits qu’il rapporte sont la base nécessaire des raisonnements qu’il établira dans la suite. […] Mais Quintilien, qui fait cette remarque judicieuse, et qui proscrit si positivement l’abus, ne laisse pas d’établir partout la nécessité de l’usage, et d’observer qu’il faut posséder la dialectique en philosophe, et l’employer en orateur.
Il ira, cet ignorant dans l’art de bien dire, avec cette locution1 rude, avec cette phrase qui sent l’étranger, il ira en cette Grèce polie, la mère des philosophes et des orateurs, et, malgré la résistance du monde, il y établira plus d’églises que Platon n’y a gagné de disciples par cette éloquence qu’on a crue divine. […] Elle a renversé les idoles, établi la croix de Jésus, persuadé à un million d’hommes de mourir pour en défendre la gloire ; enfin, dans ses admirables Epîtres, elle a expliqué de si grands secrets, qu’on a vu les plus sublimes esprits, après s’être exercés longtemps dans les plus hautes spéculations où pouvait aller la philosophie, descendre de cette vaine hauteur, où ils se croyaient élevés, pour apprendre à bégayer humblement dans l’école de Jésus-Christ, sous la discipline de Paul. […] Tant de parties si bien arrangées, et si propres aux usages pour lesquels elles sont faites ; la disposition des valvules, le battement du cœur et des artères ; la délicatesse des parties du cerveau, et la variété de ses mouvements, d’où dépendent tous les autres ; la distribution du sang et des esprits ; les effets différents de la respiration, qui ont si grand usage dans le corps : tout cela est d’une économie, et s’il est permis d’user de ce mot, d’une mécanique si admirable, qu’on ne la peut voir sans ravissement, ni assez admirer la sagesse qui en a établi les règles. […] Vous êtes, messieurs, un conseil réglé et perpétuel, dont le crédit, établi sur l’approbation publique, peut réprimer les bizarreries de l’usage et tempérer les déréglements de cet empire trop populaire. […] Massillon devait parler à peu près de même, dans son discours de réception à l’Académie, en 1719 : « Le cardinal de Richelieu, à qui il était donné de penser au-dessus des autres hommes, comprit que l’inconstance de la nation avait besoin d’un frein, et que le goût n’aurait pas chez nous une destinée plus invariable que les usages, s’il n’établissait des juges pour le fixer. » 1.
On remarquera que les trois ordres se rencontrent en un point : poser des universaux et en déduire l’hypothèse à établir ; seulement, dans les deux derniers, la déduction est précédée d’une analyse, d’un examen, d’une induction dont le premier se passe ; il n’a pas besoin d’amener ses prémisses ; il lui suffit de les énoncer. […] Vous voulez prouver par le dilemme que Dieu a créé le monde parfait en son espèce : — « Majeure : Si Dieu n’a pas créé le monde parfait, cela ne peut venir que d’un défaut de volonté ou d’un défaut de puissance ; — Mineure : mais cela ne vient ni d’un défaut de volonté, car alors il serait méchant, c’est-à-dire il ne serait pas Dieu ; ni d’un défaut de puissance, car alors il serait impuissant, c’est-à-dire encore il ne serait pas Dieu ; — Conclusion : donc il a créé le monde parfait en son espèce. » Je passe d’autres espèces d’arguments ; ce livre n’est pas un traité de logique ; mais ce peu de mots peut suffire, ce me semble, à établir le principe et les modes les plus ordinaires de la logique formelle. […] Nous venons d’établir les règles de l’argumentation ; vous qui les avez étudiées et appliquées, prouvez que votre adversaire a péché contre elles, soit par sa propre faiblesse, soit, et je le préfère ainsi, par celle de sa cause ; il y a en effet adresse et bon goût à lui accorder assez de talent et d’esprit pour que sa défaite soit regardée comme une conséquence nécessaire de l’opinion qu’il défend, et non de la manière dont il la défend. […] Si j’ai donc pensé ne pouvoir passer sous silence une division qu’Aristote établit dès le principe, et que tant de rhéteurs ont regardée comme capitale, d’un autre côté, je n’ai point cru devoir, dans un livre didactique, admettre comme fondamentale une division dont l’influence sur la partie didactique me paraît si faible.
Sans la disposition, qui établit dans les idées l’enchaînement nécessaire pour que chacune soit à sa place et produise son effet, l’invention n’est rien ; ce n’est plus le monde, c’est le chaos. […] On a distingué plusieurs espèces d’unités : l’unité d’action, l’unité d’intérêt, l’unité de mœurs, spécialement recommandées toutes trois dans l’épopée, dans le drame, dans le roman ; l’unité de ton, partout nécessaire, qui rend le style soutenu, analogue au sujet, semblable à lui-même d’un bout à l’autre, mais qui tient plutôt à l’élocution qu’à la disposition ; enfin l’unité de dessein, la plus importante, qui consiste à établir dans un écrit un point fixe auquel tout se rapporte, un but unique vers lequel tout se dirige. […] Ici, tout se réduit à l’origine de nos idées ; là, à cette proposition : — « Le meurtre de Clodius fut un acte licite. » Nous avons blâmé la forme brusque et tranchante des premiers mots de l’Emile : « Tout est bien sortant des mains de l’Auteur des choses, tout dégénère entre les mains de l’homme. » Mais, d’autre part, de ce principe une fois bien posé découle l’idée unique qui circule jusqu’à la fin du volume : « L’éducation consiste donc à se rapprocher le plus possible de l’état de nature, à s’éloigner le plus possible de l’état de société. » Que cette proposition soit ou non un paradoxe, ce n’est ici le lieu ni de la justifier, ni de la combattre ; je ne prétends établir qu’une chose, c’est qu’elle communique au livre de Jean Jacques l’intérêt et la rapidité, en lui donnant, comme à l’éducation même, l’unité de dessein. […] Il faut établir, expliquer, développer. […] Au lieu d’expliquer comment les obstacles traversent les plaisirs des autres hommes, l’orateur se contente d’établir que ceux des grands n’éprouvent point d’obstacles, ce qu’il développe par l’énumération des parties, une analyse entre deux synthèses 27, et par les semblables, l’exemple de David28.
L’oraison funèbre de la reine d’Angleterre est assez connue : toutes les rhétoriques en ont cité les endroits marquants ; tout le monde les a répétés, et la supériorité de ce discours sur tous les autres s’est établie d’une manière incontestable. […] Quelle conclusion l’orateur tirera-t-il maintenant des vérités établies dans ce discours, sur les faits les plus propres à en inspirer la conviction ? […] Comme rien n’établit et n’assure mieux la supériorité réelle d’un écrivain sur ses concurrents, que le parallèle raisonné de ses productions et des leurs, nous allons comparer ici Fléchier à Bossuet, et rapprocher le portrait de la dauphine de celui de la duchesse d’Orléans.
Les citoyens d’une ville bien policée jouissent de l’ordre qui y est établi, sans songer combien il en coûte de peines à ceux qui l’établissent ou le conservent, à peu près comme tous les hommes jouissent de la régularité des mouvements célestes sans en avoir aucune connaissance ; et même, plus l’ordre d’une police ressemble par son uniformité à celui des corps célestes, plus il est insensible ; et par conséquent il est toujours d’autant plus ignoré qu’il est plus parfait. […] Il a quelquefois accommodé à ses propres dépens des procès, même considérables ; et un trait rare en fait de finances, c’est d’avoir refusé, à un renouvellement de bail, cent mille écus qui lui étaient dus par un usage établi : il les fit porter au trésor royal… Autant que par sa sévérité, ou plutôt par son apparence de sévérité, il savait se rendre redoutable au peuple dont il faut être craint, autant, par ses manières et par ses bons offices, il savait se faire aimer de ceux que la crainte ne mène pas.
Telles sont les distinctions à établir en ces matières. […] Il est établi par nous que la tragédie est l’imitation d’une action parfaite et entière, ayant une certaine étendue. […] Pour quelques noms, il n’existe pas d’analogue établi ; néanmoins on parlera par analogie. […] Si donc le cas est resté indéterminé et qu’il soit nécessaire d’établir une loi, il faut s’exprimer en termes généraux. […] Pour en établir la créance on la non-créance, on ne les traite pas autrement que les témoignages.
Conseils à un jeune homme 7 Vous ignorez, monsieur, que vous écrivez à un pauvre homme accablé de maux8, et, de plus, fort occupé9, qui n’est guère en état de vous répondre , et qui le serait encore moins d’établir avec vous la société que vous lui proposez. Vous m’honorez1 en pensant que je pourrais vous être utile, et vous êtes louable du motif qui vous la fait désirer ; mais, sur le motif2 même, je ne vois rien de moins nécessaire que de venir vous établir à Montmorcency. […] Il demandait à s’établir à Montmorency, (où Rousseau demeurait alors,) pour profiter de ses leçons.
Elle a toujours enseigné à ses enfants qu’on ne doit point rendre le mal pour le mal ; qu’il faut céder à la colère, ne point résister à la violence ; rendre à chacun ce qu’on lui doit, honneur, tribut, soumission ; obéir aux magistrats et aux supérieurs, même injustes, parce qu’on doit toujours respecter en eux la puissance de Dieu qui les a établis sur nous. […] Tout le monde sait qu’il n’est jamais permis aux particuliers de demander la mort de personne, et que quand un homme nous aurait ruinés, estropiés, brûlé nos maisons, tué notre père, et qu’il se disposerait encore à nous assassiner et à nous perdre d’honneur3, on n’écouterait point en justice la demande que nous ferions de sa mort : de sorte qu’il a fallu établir des personnes publiques qui la demandent de la part du roi, ou plutôt de la part de Dieu. Est-ce par grimace et par feinte que les juges chrétiens ont établi ce règlement ; et ne l’ont-ils pas fait pour proportionner les lois civiles à celles de l’Évangile, de peur que la pratique extérieure de la justice ne fût contraire aux sentiments intérieurs que des chrétiens doivent avoir ? […] Elle consiste donc dans une correspondance qu’on tâche d’établir entre l’esprit et le cœur de ceux à qui l’on parle d’un côté, et de l’autre les pensées et les expressions dont on se sert ; ce qui suppose qu’on aura bien étudié le cœur de l’homme pour en savoir tous les ressorts, et pour trouver ensuite les justes proportions du discours qu’on veut y assortir.
Les arts exilés de ces belles contrées, vinrent établir leur empire dans Rome, et y brillèrent du plus vif éclat sous César et sous Auguste. […] Richelieu, après avoir pacifié le royaume, établissait la balance de l’Europe, lorsque le grand Corneille, père de notre Théâtre, créa une tragédie nouvelle, et partagea le laurier de Sophocle.
Amphictyon, troisième roi d’Athènes, désirant maintenir l’union parmi les Grecs, l’avait établi, l’an 1522 avant J. […] Ce héros paraissait craindre alors de compromettre sa réputation si solidement établie. […] Juda (royaume de), composé seulement de deux tribus du peuple de Dieu, Juda et Benjamin, mais aussi puissant que celui d’Israël que les dix autres avaient établi. […] Ils étaient de la maison Claudia, dont le premier auteur fut Attus Clausus, un des plus puissants seigneurs de la Sabine, qui, après l’expulsion des Tarquins, fut avec cinq mille de ses vassaux s’établir à Rome, sous le nom d’Appius Claudius. […] Ses concitoyens divisés par la guerre civile, concernant l’espèce de gouvernement qu’ils voulaient établir, le nommèrent unanimement Archonte, et souverain législateur.
Aussi, après avoir successivement parcouru tout ce qui peut faire sur la terre la gloire, le plaisir ou le bonheur de l’homme ; après avoir vu que toutes ces prérogatives brillantes se réduisaient au même néant : Omnia vanitas , il trouve cependant une exception à cette grande vanité des choses terrestres ; et cette exception, toute philosophique (dans le sens où la philosophie est la sagesse), établit d’un seul trait toute la différence qui existe en effet entre ce qu’un Dieu a dicté, et ce que l’homme imagine. […] et quelle conclusion le philosophe sacré tirera-t-il de toutes les vérités qu’il vient d’établir ? […] Il est fâcheux seulement que les opinions du philosophe aient nui ici au talent du poète, et l’aient empêché de s’arrêter avec l’un égal intérêt sur les endroits de l’Ecclésiaste qui établissent d’une manière si positive l’immortalité de l’âme, et la certitude de son rappel au lieu de son origine. […] Cette grande vérité d’un avenir, cette base immuable sur laquelle reposent à jamais la morale et la vertu, a été établie par tous les moralistes, chantée partons les poètes anciens et modernes.
Lorsque l’ordre des pensées est établi, on examine quelle marche on doit suivre dans leur exposition. […] La division n’est pas absolument nécessaire ; elle est un peu froide ; il est bon cependant de l’établir, afin de soulager la mémoire de l’auditeur. […] Lorsqu’on a établi une preuve, on cherche à détruire les objections qu’on peut y faire, ou les preuves contraires que l’adversaire a exposées.
Mais qu’est-ce que la santé la mieux établie ? […] Telle, sans aucun attrait pour la retraite, se consacre au Seigneur par pure fierté, parce que n’ayant pas de quoi soutenir son nom et s’établir convenablement dans le monde, un asile saint lui paraît plus honorable aux yeux des hommes qu’une fortune obscure et rampante. […] Mais quand sa souveraineté ne lui donnerait pas ce droit sur la créature, sa sagesse devrait l’établir seul arbitre de nos destinées.
Pendant la durée du ve siécle, les peuples du nord de l’Europe s’emparèrent des différentes parties de l’empire, et les Francs s’établirent dans la Gaule (486). […] La réfutation se lie naturellement à la confirmation ; car une vérité n’est établie que lorsque les objections qui s’élevaient contre elles ont été détruites. […] La pensée est encore juste, quand elle établit entre deux faits un rapport réel, comme quand je dis : Le mensonge est un mal ; j’établis alors, entre l’idée de mal et celle de mensonge, un rapport que ma raison affirme être vrai. […] Celui-ci, n’ayant point payé l’amende de mille drachmes à laquelle il avait été condamné, alla s’établir à Rhodes, où il ouvrit un cours d’éloquence. […] Il revint pourtant, établit l’une des pompes en face de la première maison qui brûlait sur le port, et l’autre vis-à-vis de celle qui brûlait au milieu de la rue.
Malgré la différence que nous venons d’établir, et qui existe réellement entre notre barreau et celui des anciens, il ne faut pas croire cependant que l’éloquence y doive être constamment étrangère : il y a longtemps que les Patru, les Cochin et d’autres avocats célèbres, ont su prouver le contraire. […] C’est avec la plus grande clarté qu’il faut établir la question, fixer le point de la contestation, ce que l’on admet, ce que l’on récuse, et où commence, entre les deux parties, la ligne de démarcation qui les sépare : cette même clarté doit présider encore à l’ordre, à l’arrangement de toutes les parties du plaidoyer.
C’est un point arrêté, que tout ce que nous sommes, Issus de pères rois et de pères bergers1, La parque également sous la tombe nous serre : Et les mieux établis au repos de la terre N’y sont qu’hôtes et passagers. […] A la différence de Ronsard, dont il détruisit trop absolument la réputation, il voulut, c’est là sa gloire, fonder l’unité de la langue dans un pays qui avait conquis l’unité politique, et il réussit à l’établir.
Il établit que l’éloquence est un art pratique ; il la ramena à son seul et véritable but, la persuasion. […] En effet, comme on ne peut réfuter les preuves contraires sans établir celles qui sont favorables, ni établir celles-ci sans réfuter les autres, ou, ce qui revient au même, comme on est forcé d’attaquer ]en se défendant et de se défendre en attaquant, ne s’ensuit-il pas que ces deux parties sont liées si étroitement l’une à l’autre que, si on a pu les séparer dans la théorie, il est impossible de le faire dans la pratique ? Pourquoi encore avoir établi deux genres de causes : l’un comprenant les questions générales, l’autre les questions déterminées ? […] Que si la rhétorique a la prétention d’établir des règles applicables à toutes les causes, elle est le plus puéril et le plus vain de tous les exercices. […] Sa manière d’établir ses preuves est de détruire celles de l’adversaire, et toute son argumentation se concentre dans la réfutation.
il t’a établi pour t’en servir : il a mis, pour ainsi dire, en tes mains toute la nature, pour l’appliquer à tes usages ; il t’a même permis de l’orner et de l’embellir par ton art ; car, qu’est-ce autre chose que l’art, sinon l’embellissement de la nature ? […] Voilà pourquoi nous avons multiplié les citations, et prouvé partout, par l’exemple des grands maîtres, la solidité des principes que nous avions établis ; voilà pourquoi nous n’avons dissimulé ni les défauts ni les endroits faibles de ceux que nous proposons d’ailleurs comme des modèles.
Marmontel nous en indique la différence en ces termes : « L’une trace la méthode et l’autre la suit ; l’une enseigne les moyens et l’autre les emploie ; l’une indique les sources et l’autre y va puiser ; l’une abat une forêt de matériaux et l’autre en fait le choix et les met en œuvre avec intelligence ; et enfin l’éloquence est née avant les règles de la rhétorique, de même que les langues se sont formées avant la grammaire. » Laissons un instant parler Buffon sur ce sujet ; il nous expliquera clairement comment il comprend l’éloquence, et quelle différence il établit entre elle et cet avantage dont la plupart des hommes sont doués de parler avec une certaine facilité naturelle. […] des personnages de théâtre : tout y roule sur le faux ; ce n’est partout que représentations ; et tout ce qu’on y voit de plus pompeux et de mieux établi n’est l’affaire que d’une scène : qui ne le dit tous les jours dans le siècle ?
Voilà les raisons insurmontables que l’impie oppose à la foi de tout l’univers ; voilà cette évidence qui l’emporte, dans son esprit, sur tout ce qu’il y a de plus évident et de mieux établi sur la terre » ! […] Il tire ensuite de toutes les vérités qu’il vient d’établir, la conclusion suivante : « Que conclure de ce discours ? Que l’impie est à plaindre de chercher dans une affreuse incertitude sur les vérités de la foi, la plus douce espérance de sa destinée : qu’il est à plaindre de ne pouvoir vivre tranquille, qu’en vivant sans foi, sans culte, sans Dieu, sans confiance : qu’il est à plaindre, s’il faut que l’évangile soit une fable ; la foi de tous les siècles, une crédulité ; le sentiment de tous les hommes, une erreur populaire ; les premiers principes de la nature et de la raison, des préjugés de l’enfance ; en un mot, s’il faut que tout ce qu’il y a de mieux établi dans l’univers se trouve faux, pour qu’il ne soit pas éternellement malheureux.
Il n’y a pas de règle absolue à établir sur la manière de construire un plan ; il dépend toujours de la matière elle-même, du genre de composition et du but que l’on veut atteindre. […] « Quel sera le crime de l’homme de la Compagnie (des Indes), qui, sacrifiant généreusement ses intérêts à ceux de cette Compagnie, lui laisse la totalité des appointements qu’elle lui doit, fournit les magasins de son propre argent, vend jusqu’à ses effets, jusqu’à ceux de son secrétaire, pour nourrir la colonie, et s’expose aux plus grands dangers pour établir dans les différentes administrations, une intégrité et un ordre que n’avaient jamais connus la plupart de ceux qui les dirigeaient ? […] Songez au moins qu’un ennemi cent fois plus terrible vous menace… Les rats, à qui les chats imposent encore, les rats, Messieurs, sont aux aguets ; ils n’attendent que le moment où vous aurez prononcé l’arrêt fatal que mon adverse partie sollicite, pour entrer en campagne et venir s’établir dans vos habitations, que vous serez forcés, oui, Messieurs, que vous serez forcés de leur abandonner.
Ce sont des moyens différents dont le but est le même, c’est-à-dire d’énoncer les différentes vues de l’esprit, et d’établir des rapports. […] Ce changement important est parfaitement établi dans l’ingénieuse dissertation d’Adam Smith sur la formation des langues. […] Mais aujourd’hui qu’elles sont établies, il serait inexact d’appeler métaphore toute figure sans distinction. […] Dans la dernière partie de sa vie, il alla s’établir à Athènes, où il vécut jusqu’à l’âge de cent cinq ans. […] Je vais maintenant m’occuper à établir les règles de la construction du discours qui sont communes à ces trois genres.
C’est ce qu’on appelle établir un alibi. […] — La comparaison. — Vous établissez des rapports entre deux idées, et de ces rapports vous concluez soit du plus au moins, soit du moins au plus, soit d’égal à égal.
Avec un tel secours, le jugement de l’élève se forme en même temps que son goût s’établit et s’épure. […] Quelques congrégations l’ont établi dans leurs colléges, et il est classique dans plusieurs séminaires de Belgique.
Tout ce qui est propre à établir une vérité, à constater un fait, porte le nom de preuve. […] Dans celles où le fait seul est en question, lorsqu’il est établi, la loi prononce. […] Elle renferme ordinairement un axiome de morale, de droit, de politique, ou une opinion qu’on établit comme règle. […] Aristote établit une règle bien propre à diriger l’orateur dans le choix dont il s’agit. […] L’orateur doit établir un rapport entre lui le sujet et ses auditeurs.
que la plus indispensable des dispositions dans un traducteur, est cette espèce d’analogie naturelle qui le rapproche, à son insu, du modèle qu’il se propose d’imiter, qui établit d’avance entre eux un rapport de goût et de sentiments, sans lequel le traducteur, quel que soit d’ailleurs son talent, restera toujours infiniment au-dessous de son auteur. […] Il faut établir le principe de ces fréquentes inégalités ; faire voir en quoi consistent précisément ces beautés et ces défauts : et s’il reste démontré que leur imitation introduirait parmi nous une école d’autant plus dangereuse qu’elle s’appuierait d’un grand nom et d’exemples séduisants, il en faudra bien conclure que M. de Chateaubriand occupe et conservera un rang à part, et qu’il a traité un genre dans lequel il n’est point à désirer qu’il fasse des imitateurs. […] Craignons donc de laisser ou de voir s’établir une école nouvelle, qui, en confondant tous les genres et tous les styles, prêterait indiscrètement à la théologie le langage de la poésie, et à la poésie le style et les formes théologiques : craignons d’adopter une poétique qui constituerait les fautes en principes, et qui poserait pour règle première la violation de la plus essentielle des règles, l’accord indispensable des choses et du style ; et cette précieuse unité, sans laquelle le vrai et le beau n’existent plus dans les ouvrages de l’imagination. […] Il partit donc d’un principe tout opposé à celui qui avait si bien dirigé Racine : il établit, comme maxime fondamentale, que des vers, pour être bons, doivent avoir la correction grammaticale et la simplicité élégante d’une bonne prose.