Il n’en est pas de même de ce vers de Virgile : Littora tùm patriæ lacrymans, portusque relinquo, Et campos ubi troja fuit.
Mais si Horace met Virgile sur la même ligne que Plaute, dans la concession de son privilége, y aurait-il mis plus tard Stace on Juvénal ?
C’est par l’imagination que Virgile nous transporte aux Champs-Élysées, que le Tasse construit le palais d’Armide au sein des nuages, que Milton nous fait assister à la perte du Paradis.
Par exemple, il faut que Virgile disparaisse, et que je m’imagine voir ce beau lieu : Muscosi fontes et somno mollior herba265, etc. […] L’incendie de Troie, dans Virgile, n’est point décrit avec les grâces d’une élégie de Tibulle : il plaît par des beautés fortes. […] Un poème ne peut faire d’effet s’il n’est élégant : c’est un des principaux mérites de Virgile.
Les amours d’Énée et de Didon, si bien décrites dans l’Énéide, sont une pure fiction de Virgile. […] L’énorme cheval de bois, où ils enfermèrent des troupes, et qui fut introduit dans la ville par les Troyens même, est une pure fiction de Virgile.
C’est ainsi que nous la voyons prendre la forme de la pastorale dans l’idylle de Moschus sur la mort de Bion, ainsi que dans la Mort de Daphnis, par Virgile ; et celle de l’ode, dans la pièce adressée à Virgile, par Horace, sur la mort de Quintilius Varus, leur ami.
C’est ainsi qu’on attribue à Racine ce qui n’appartient qu’à Virgile, et qu’on s’attend toujours à trouver, dans Raphael, des beautés qui se rencontrent plus souvent peut-être dans les œuvres de deux ou trois peintres que dans les siennes.
Troie a pourtant fait la gloire de Virgile, comme elle a fait celle d’Homère. […] Rappelez-vous les paroles que Priam laisse tomber aux pieds d’Achille en lui redemandant le cadavre de son fils, plus d’un vers de Virgile, des scènes entières du Cid et de Polyeucte, la prière d’Esther agenouillée devant Dieu, les chœurs d’Esther et d’Athalie, Dans le chant célèbre de Pergolèse, Stabat mater dolorosa, on peut demander ce qui émeut le plus de la musique ou des paroles. […] Né à Blois en 1793, il recevait encore enfant, à la lecture des Martyrs de M. de Chateaubriand, comme le premier pressentiment de sa vocation, et, bien des années après, il consacrait ce souvenir éloigné en adressant à l’écrivain de génie qui domine notre siècle littéraire l’hommage que le Dante rend à Virgile : Tu duca, tu signore, e tu maestro .
Jugement de Montaigne sur quelques écrivains Il m’a tousiours semblé qu’en la poésie, Virgile, Lucrèce, Catulle et Horace tiennent de bien loing le premier reng ; et signamment Virgile en ses Georgiques, que i’estime le plus accomply ouvrage de la poésie : à comparaison duquel on peult recognoistre ayseement qu’il y a des endroicts de l’Aeneïde ausquels l’aucteur eust donné encores quelque tour de pigne, s’il en eust loisir ; et le cinquiesme en l’Aeneïde me semble le plus parfaict. […] Ceulx des temps voisins à Virgile se plaignoient de quoy aulcuns luy comparoient Lucrèce : ie suis d’opinion que c’est à la verité une comparaison ineguale ; mais i’ay bien à faire à me r’asseurer en cette créance, quand ic me treuve attaché à quelque beau lieu de ceulx de Lucrèce. […] I’estime que les anciens avoient encores plus à se plaindre de ceulx qui apparioient Plaute à Terence (cettuy cy sent bien mieulx son gentilhomme), que Lucrèce à Virgile. […] Mais qui voudroit dire que la Grecque et la Romaine eussent tousjours esté en l’excellence qu’on les a veues du temps d’Homere et de Demosthene, de Virgile et de Ciceron ? […] Chante moy d’une musette bien resonnante et d’une fluste bien jointe ces plaisantes Eglogues, rustiques à l’exemple de Theocrite et de Virgile, marines à l’exemple de Sannazar, gentilhomme Neapolitain184.
Or, regardant plus loin dans la triste carrière, Je vis une autre foule au bord d’une rivière Et m’écriai : « Virgile, ô poète ! […] » — « Si cet homme vivant dans ton domaine arrive, Dit Virgile au vieillard, c’est parce qu’on le veut, Pilote de l’enfer, dans l’endroit où l’on peut Toujours ce que l’on veut. « Et le nocher, avide Conducteur des damnés sur ce marais livide, Éteignit ses regards comme la braise ardents. […] Le sage, dit Virgile, ne compatit point à l’indigence. — Qu’il y a loin de ce froid égoïsme à la charité chrétienne ! […] Au vaisseau de Virgile Qu’ainsi la reine de Cythère Et les frères d’Hélène, astres brillants des cieux, Te dirigent sur l’onde amère ! […] Dépose aux champs athéniens Virgile qu’aujourd’hui l’amitié te confie : Mes jours sont suspendus aux siens ; Sauve, en les conservant, la moitié de ma vie.
Homère et Virgile s’en sont servis dans la poésie épique. […] Virgile emploie cette figure, lorsqu’en parlant de l’Amazone Camille a, il dit pour exprimer sa légèreté à la course : « Plus rapide que le vent, elle aurait pu voler sur un champ couvert d’herbes hautes ou d’épis, sans les faire plier sous ses pas, ou se frayer une route au milieu de la mer, et courir sur les flots, sans mouiller ses pieds légers. » Malherbe, dans son Ode à Louis XIII, dit aussi par hyperbole, pour peindre les temps heureux qu’il lui promet : La terre en tous endroits produira toutes choses ; Tous métaux seront or, toutes fleurs seront roses ; Tous arbres oliviers.
Elle ne s’emploie pas seulement dans l’éloquence et la philosophie ; que d’amplifications poétiques dans Homère, dans Virgile, dans Racine, dans lord Byron, dans Lamartine, dans l’auteur de la Divine Epopée et de Jeanne d’Arc !
Chimène ne peut mieux faire comprendre son amour à Rodrigue qu’en lui disant toute en larmes : Va, je ne te hais point… des dénégations répétées de la Fontaine : Ce n’était pas un sol, non, non, et croyez-m’en, Que le chien de Jean de Nivelle, je conclus la haute sagacité du prudent animal qui ne venait pas quand on l’appelait ; « Nec sum adeo informis… je ne suis pas si laid, » dit le berger de Virgile qui se croyait sans doute un fort beau berger.
Racine et Fénelon respiraient l’élégante pureté, la douce mélodie des plus beaux temps d’Athènes ; ils choisissaient même parmi les Grecs ; ils avaient le goût et l’âme de Virgile.
Ecoutez Virgile, il mettra le fait devant vos yeux. […] Ce n’est plus Virgile que vous écoutez ; vous êtes trop attentif aux dernières paroles de la malheureuse Didon pour penser à lui. […] L’appréciation est digne de l’œuvre et du critique, de Virgile et de Fénelon.
Injustus fascis (Virgile, Géorg.
Imité de Virgile (Protée), I.
Virgile l’a allongée dans plusieurs endroits ; par exemple : Nuda genu, nodoque sinus collecta fluentes, etc.
s’écrie Boileau en parodiant Virgile ; et la Fontaine à propos des deux coqs : Deux coqs vivaient en paix ; une poule survint, Et voilà la guerre allumée.
Dans quelque langue que ce soit, Homère, Virgile, Horace, le Tasse, Milton, etc., ne seraient pas supportables, littéralement traduits.
Au premier rang des allégories classiques, je trouve les Prières et la Ceinture de Vénus dans Homère, la Renommée de Virgile, la Mollesse du Lutrin ; ailleurs le Fanatisme, le Temps, le Sommeil, etc.
Les poètes de son temps l’appelaient le Virgile au rabot ; et Mainard assurait que les Muses ne doivent être assises que sur des tabourets, faits de la main de ce poète-menuisier .
Tableau achevé, qu’envierait Virgile.
Elle a chanté chez les anciens avec Hésiode et Lucrèce les phénomènes de la nature ; avec Virgile, le travail et la vie des champs. […] Œuvre d’une époque savante et d’une civilisation raffinée, elle s’enorgueillit de Théocrite, de Virgile et d’André Chénier. […] Buffon, peintre fidèle des animaux, leur prête, comme Virgile, les mœurs et les passions humaines, Fénelon et Bossuet, parmi les spéculations de la vérité pure et les abstractions métaphysiques, expriment par les mouvements de la passion et par les effusions de l’âme les vives émotions que fait naître en eux l’étude de Dieu et de l’homme. […] Virgile, Géorgiques.
Voilà ce qui se trouve partout, ce qu’Horace, Virgile et beaucoup d’autres ont dit en vers magnifiques.
Dante avait pris Virgile pour maître et pour guide en son pèlerinage de la Divine Comédie.
Écolier extraordinaire, il allait d’instinct vers les intelligences royales, vers les plus divins des poëtes : Homère et Virgile furent ses maîtres, avant le jour où, dans la Bible, il reconnut le livre par excellence, la source même de son propre génie.
Il est notre Virgile français.