/ 278
83. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Jean-Jacques Rousseau, 1712-1778 » pp. 185-195

Mécontent de lui-même et des autres, il aima mieux déclarer la guerre à l’ordre social que de réformer son caractère ou d’accuser ses torts. […] Le service n’aurait pas plus d’ordre que d’élégance ; la salle à manger serait partout, dans le jardin, dans un bateau, sous un arbre, quelquefois au loin, près d’une source vive, sur l’herbe verdoyante et fraîche, sous des touffes d’aunes et de coudriers1 : une longue procession de gais convives porterait en chantant2l’apprêt du festin  ; on aurait le gazon pour table et pour chaises ; les bords de la fontaine serviraient de buffet, et le dessert pendrait aux arbres3. Les mets seraient servis sans ordre, l’appétit dispenserait des façons4 ; chacun, se préférant ouvertement à tout autre, trouverait bon que tout autre se préférât de même à lui : de cette familiarité cordiale et modérée, naîtrait sans grossièreté, sans fausseté, sans contrainte, un conflit badin, plus charmant cent fois que la politesse, et plus fait pour lier les cœurs.

84. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Mirabeau, 1749-1791 » pp. 368-376

Ramenez l’ordre dans vos finances, la paix et la prospérité dans le royaume. […] Détachons du portrait de Mirabeau par Timon le passage suivant : « Dès qu’il aborde le débat, dès qu’il entre dans le cœur de la question, il est substantiel, nerveux, logicien autant que Démosthène ; il s’avance dans un ordre serré, impénétrable ; il fait la revue de ses preuves, dispose leur plan d’attaque et les rauge en bataille. […] Dans les ordres privilégiés, on n’y fait pas tant de façons.

85. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome I (3e éd.)

Étudions-la surtout parce qu’elle est originale, et qu’elle nous présente un autre ordre d’expressions pour un autre ordre d’idées. […] Voici l’ordre dans lequel je présenterai ce que j’ai à dire sur cette matière. […] Cependant si cet ordre n’est pas le plus conforme à la logique, c’est au moins le plus conforme à la nature. […] Leur prose admet peu de variété dans l’arrangement des mots ; l’ordre y est presque toujours le même, et l’on peut dire que cet ordre est celui que la raison a dicté. […] C’est sous ce second rapport qu’il produit des beautés d’un ordre bien supérieur.

86. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre Ier. Considérations générales. »

La Calprenède, en copiant, dans ses romans, toutes les formes usitées par les poètes épiques, n’osa pourtant pas croire qu’il pût trouver place dans un ordre aussi élevé. […] L’ordre.

87. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Bourdaloue 1632-1704 » pp. 89-93

Mais il prétend raisonner tout autrement à l’égard du monde entier, et il veut que, sans providence4, sans prudence, sans intelligence, par un pur effet du hasard, ce grand et vaste univers se maintienne dans l’ordre merveilleux où nous le voyons. […] Ce n’est pourtant pas sans douleur ni tristesse ; mon cœur en est blessé, mais je souffre ces maux comme étant dans l’ordre de la Providence. » 1.

88. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Louis XIV, 1638-1715 » pp. 146-149

Les bienfaits de la royauté À peine remarquons-nous l’ordre admirable du monde, et le cours si réglé et si utile du soleil, jusqu’à ce que quelque déréglement des saisons ou quelque désordre apparent dans la machine nous y fasse faire un peu plus de réflexion. […] De là partent les ordres qui font aller de concert les magistrats et les capitaines, les citoyens et les soldats, les provinces et les armées par mer et par terre.

89. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Deuxième partie. Préceptes des genres. — Chapitre second. De la narration. »

. — On détermine les rapports en détaillant les objets qu’embrasse le sujet défini ; le genre, en classant ce sujet dans l’ordre qui lui convient ; la différence, en montrant ses qualités propres qui le distinguent des sujets de même genre. […] Comme l’écrivain n’est point obligé de commencer une définition par une de ses qualités plutôt que par une autre, on ne le chicanera pas sur l’ordre de la disposition. […] A part ces cas de premier ordre, un peintre de caractères doit veiller à ce que les traits qu’il dessine soient applicables aux hommes en général, et non point à un homme en particulier. […] — Ce parallèle appartient à l’ordre moral, quoiqu’on y reconnaisse la réalité dans l’ordre physique ; car l’auteur n’a point voulu décrire une exécution, mais son but a été de mettre en opposition les procédés de deux êtres abstraits ; il l’a fait physiquement pour frapper nos yeux autant que notre esprit. […] C’est une ressource immense pour les écrivains du second ordre : car si une élocution digne du sujet est la marque certaine de l’art et du goût, une invention toute originale est la pierre de touche du génie.

90. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Première partie. De la poésie en général — Chapitre III. De la forme extérieure de la poésie » pp. 22-70

: Aux accords d’Amphion les pierres se mouvaient, Et sur les murs thébains en ordre s’élevaient. […] On appelles rimes mêlées, celles où l’on ne suit pas, comme dans les rimes croisées, un ordre uniforme et régulier. […] Elle est régulière quand elle suit un ordre déterminé et symétrique, comme dans les stances, strophes ou couplets ; elle est irrégulière, quand on n’y rencontre aucune symétrie, comme dans les pièces en vers libres. […] Les pièces en vers libres sont celles qui présentent le mélange de différentes mesures, ou même de toute espèce de mesures, depuis le vers héroïque jusqu’aux plus petits, et qui ne sont pas soumises au retour d’un rythme régulier, c’est-à-dire, où l’on ne trouve aucun ordre symétrique. […] L’inversion ou transposition consiste à ne pas exprimer les mots dans l’ordre direct ou grammatical.

91. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Pamphile ou le vaniteux Un Pamphile est plein de lui-même, ne se perd pas de vue, ne sort point de l’idée de sa grandeur, de ses alliances, de sa charge, de sa dignité : il ramasse, pour ainsi dire, toutes ses pièces, s’en enveloppe1 pour se faire valoir ; il dit : Mon ordre, mon cordon bleu 2 ; il l’étale ou il le cache par ostentation : un Pamphile, en un mot, veut être grand ; il croit l’être, il ne l’est pas, il est d’après un grand3. Si quelquefois il sourit à un homme du dernier ordre, à un homme d’esprit, il choisit son temps si juste qu’il n’est jamais pris sur le fait ; aussi la rougeur lui monterait-elle au visage s’il était malheureusement surpris dans la moindre familiarité avec quelqu’un qui n’est ni opulent, ni puissant, ni ami d’un ministre, ni son allié, ni son domestique4. […] On l’a regardé comme un homme incapable de céder à l’ennemi, de plier sous le nombre ou sous les obstacles ; comme une âme du premier ordre, pleine de ressources et de lumières5, et qui voyait encore où personne ne voyait plus ; comme celui qui, à la tête des légions, était pour elles un présage de la victoire, et qui valait seul plusieurs légions ; qui était grand dans la prospérité, plus grand quand la fortune lui a été contraire : la levée d’un siège, une retraite, l’ont plus ennobli que ses triomphes ; l’on ne met qu’après les batailles gagnées et les villes prises ; qui était rempli de gloire et de modestie ; on lui a entendu dire : « Je fuyais », avec la même grâce qu’il disait : « Nous les battîmes » ; un homme dévoué à l’État, à sa famille, au chef de sa famille ; sincère pour Dieu et pour les hommes, autant admirateur du mérite que s’il lui eût été moins propre et moins familier : un homme vrai, simple, magnanime, à qui il n’a manqué que les moindres vertus1. […] L’homme d’esprit, de mérite, ou de valeur, devient en un instant un génie de premier ordre, un héros, un demi-dieu. […] Cordon bleu, ruban bleu porté par les chevaliers de l’ordre du Saint-Esprit, et accordé seulement à la noblesse de vieille date.

92. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — La Bruyère 1646-1696 » pp. 100-117

L’homme d’esprit, de mérite, ou de valeur, devient en un instant un génie de premier ordre, un héros, un demi-dieu. […] Commence-t-il à chanceler dans le poste où on l’avait mis, tout le monde passe facilement à un autre avis ; en est-il entièrement déchu, les machines qui l’avaient guindé si haut, par l’applaudissement et les éloges, sont encore toutes dressées pour le faire tomber dans le dernier mépris ; je veux dire qu’il n’y en a point qui le dédaignent mieux, qui le blâment plus aigrement, et qui en disent plus de mal, que ceux qui s’étaient comme dévoués à la fureur1 d’en dire du bien2 Pamphile ou le vaniteux Un Pamphile est plein de lui-même, ne se perd pas de vue, ne sort point de l’idée de sa grandeur, de ses alliances, de sa charge, de sa dignité : il ramasse, pour ainsi dire, toutes ses pièces, s’en enveloppe3 pour se faire valoir ; il dit : Mon ordre, mon cordon bleu 4 ; il l’étale ou il le cache par ostentation : un Pamphile, en un mot, veut être grand ; il croit l’être, il ne l’est pas, il est d’après un grand1 Si quelquefois il sourit à un homme du dernier ordre, à un homme d’esprit, il choisit son temps si juste qu’il n’est jamais pris sur le fait ; aussi la rougeur lui monterait-elle au visage s’il était malheureusement surpris dans la moindre familiarité avec quelqu’un qui n’est ni opulent, ni puissant, ni ami d’un ministre, ni son allié, ni son domestique2 Il est sévère et inexorable à qui n’a point encore fait sa fortune : il vous aperçoit un jour dans une galerie, et il vous fuit ; et le lendemain, s’il vous trouve en un endroit moins public, ou, s’il est public, en la compagnie d’un grand, il vient à vous, et il vous dit : Vous ne faisiez pas hier semblant de nous voir. […] Cordon bleu, ruban bleu porté par les chevaliers de l’ordre du Saint-Esprit, et accordé seulement à la noblesse de vieille date.

93. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Napoléon Ier , 1769-1821 » pp. 428-446

Les ordres de mon gouvernement, et un danger imminent de la république Cisalpine, me rappelleront seuls au milieu de vous1. […] Campagne de Prusse Entrée en campagne Soldats, L’ordre de votre rentrée en France était parti ; vous vous en étiez déjà rapprochés de plusieurs marches. […] Le général Lamarque disait : « Nous sommes si accoutumés à nous voir mourir, que cela nous paraît dans l’ordre des convenances ; sans cela nous serions toujours dans les larmes, et le devoir en souffrirait. » 1. […]    Je ne crains que celles du Temps. » Ceci s’adresse à vous, esprits du dernier ordre, Qui, n’étant bons à rien, cherchez surtout à mordre.

94. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Deuxième partie. Rhétorique. — Chapitre III. — Disposition »

La disposition est une opération de l’esprit qui consiste à ranger et à enchaîner les idées pour que chacune ne s’écarte pas de l’idée principale, soit à la place qui lui appartient, et se succède dans un ordre tel que l’intérêt ; aille toujours croissant. […] Mais, lorsqu’il se sera fait un plan, lorsqu’une fois il aura rassemblé et mis en ordre toutes les pensées essentielles à son sujet, il s’apercevra aisément de l’instant auquel il doit prendre la plume ; il sentira le point de maturité de la production de l’esprit ; il sera pressé de la faire éclore ; il n’aura même que du plaisir à écrire : les idées se succéderont aisément et le style sera naturel et facile. » Section III. — De la Disposition oratoire Lorsque l’orateur a bien médité son sujet, il en dispose avec soin les différentes parties d’après certaines règles que nous allons indiquer : c’est ce qu’on appelle Disposition oratoire. […] Il y a longtemps, Catilina, qu’un ordre du consul aurait dû t’envoyer à la mort, et faire retomber sur toi les maux que tu nous prépares.

95. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre premier. Du Goût. »

Celui dont le goût est sur, ne s’en laisse jamais imposer par des beautés factices ; il a sans cesse devant les yeux la règle invariable du bon sens, qui doit le guider dans tout ce qu’il veut juger ; il apprécie exactement le mérite relatif des diverses beautés que lui offrent les ouvrages du génie ; il les classe avec ordre, assigne, autant qu’il est possible de le faire, les sources d’où elles tirent le pouvoir de nous charmer, et n’en est lui-même touché que précisément autant qu’il le doit être. […] Que l’on déclame donc, autant que l’on voudra, sur les caprices et l’incertitude du goût, l’expérience a prouvé depuis longtemps qu’il est un certain ordre de beautés qui, placées dans leur véritable jour, commandent une admiration universelle et durable.

96. (1866) Cours élémentaire de rhétorique et d’éloquence (5e éd.)

Non, vous ne renverserez pas de fond en comble toutes les règles de l’ordre judiciaire. […] L’ordre dans les idées et la justesse dans les mots sont pour lui deux qualités essentielles. […] Ordre dans les idées, netteté dans les détails, élégance dans le style, telles sont les qualités propres à ce genre. […] Que votre exposition soit nette, variée, attachante, et que, dans l’ordre ingénieux de vos faits, on voie déjà poindre et surgir l’ordre de vos moyens. […] Ramenez l’ordre dans vos finances, la paix et la prospérité dans le royaume.

97. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur les extraits des problèmes » pp. -144

Contraires à l’ordre naturel.] […] L’ordre nous est naturellement agréable.]

98. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Thiers Né en 1797 » pp. 265-270

Il aura l’esprit d’ordre et de détail ; car ce n’est pas tout que de faire battre les hommes, il s’agit de les nourrir, de les vêtir, de les armer, de les guérir. […] Les partis se suivent, se poussent à l’échafaud, jusqu’au terme que Dieu a marqué aux passions humaines ; et de ce chaos sanglant sort tout à coup un génie extraordinaire qui saisit cette société agitée, l’arrête, lui donne à la fois l’ordre, la gloire, réalise le plus vrai de ses besoins, l’égalité civile, ajourne la liberté qui l’eût gêné dans sa marche, et court porter à travers le monde les vérités puissantes de la révolution française.

99. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre VI. Massillon. »

Si elle lui fait un devoir quelquefois de sacrifices en apparence plus pénibles, ou réellement coûteux pour l’amour-propre, que l’on y réfléchisse un moment, et l’on verra bientôt que l’ordre social et l’intérêt du bonheur individuel commandent impérieusement ces sacrifices ; et l’on sera forcé de se prosterner devant ce chef-d’œuvre de la législation morale. […] Prenons pour exemple le beau discours sur la vérité d’un avenir, et suivons la marche de l’orateur dans l’ordre et le développement de ses preuves. […] Je me dirais : Tout ne finit pas pour nous avec la vie, tout rentre dans l’ordre à la mort ».

100. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Villemain. Né en 1790. » pp. 479-491

L’ordre et la majesté se montrèrent en même temps que la vigueur et la richesse ; et le souverain parut avoir créé toutes les grandeurs qu’il mettait à leur place4. […] Mais un ordre social, où tout semblait animé par un homme et fait pour sa gloire, pouvait-il assez inspirer l’éloquence, cette altière élève des révolutions et de la liberté ? […] L’esprit de critique est un esprit d’ordre : il connaît des délits contre le goût et les porte au tribunal du ridicule ; car le rire est souvent l’expression de sa colère, et ceux qui le blâment ne songent pas assez que l’homme de goût a reçu vingt blessures avant d’en faire une.

101. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Sainte-Beuve. Né en 1804. » pp. 566-577

Un tel classique a pu être un moment révolutionnaire, il a pu le paraître du moins, mais il ne l’est pas ; il n’a fait d’abord main basse autour de lui ; il n’a renversé ce qui le gênait que pour rétablir bien vite l’équilibre au profit de l’ordre et du beau. […] En ce sens, les classiques par excellence seraient les écrivains d’un ordre moyen, justes, sensés, élégants, toujours nets, d’une passion noble encore, et d’une force légèrement voilée. […] Or, à part un très-petit nombre de noms grandioses et fortunés qui, par l’à-propos de leur venue, l’étoile constante de leurs destins, et aussi l’immensité des choses humaines et divines qu’ils ont les premiers reproduites glorieusement, conservent ce privilége éternel de ne pas vieillir, ce sort un peu sombre, mais fatal, est commun à qui porte dans l’ordre des lettres le titre de talent et même celui de génie.

102. (1865) De la Versification française, préceptes et exercices à l’usage des élèves de rhétorique. Première partie. Préceptes. Conseils aux élèves.

Ma vie est votre bien ; vous voulez le reprendre : Vos ordres sans détours pouvaient se faire entendre. […] On dit, et sans horreur je ne puis le redire, Qu’aujourd’hui par votre ordre Iphigénie expire ; Que vous-même, étouffant tout sentiment humain, Vous l’allez à Calchas livrer de votre main. […] Seigneur, je ne rends point compte de mes desseins Ma fille ignore encor mes ordres souverains ; Et, quand il sera temps qu’elle en soit informée, Vous apprendrez son sort, j’en instruirai l’armée. […] Assez d’autres viendront, à mes ordres soumis, Se couvrir des lauriers qui vous furent promis, Et, par d’heureux exploits forçant la destinée, Trouveront d’Ilion la fatale journée. […] Le rejet est donc tout-à-fait opposé à la coupe naturelle du vers français ; et ce sera toujours un défaut capital, à moins que le poète n’y trouve, dans des cas très-rares, l’occasion de produire un effet extraordinairement heureux, et, par un trait de génie, ne transforme cette licence en une beauté de premier ordre.

103. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

Mais ce défaut (si c’en est un) est si heureusement compensé par des beautés du premier ordre, par ces développements profonds du cœur humain, par cette abondance de pensées fortes ou sublimes qui mettent le héros tout entier sous les yeux du lecteur, que l’on pardonne volontiers à l’historien de prendre la parole, et de se mettre à la place d’un personnage qui n’eût pas toujours été capable de parler aussi bien. […] Si donc les choses sont comme je le pense, si l’âme survit en effet au corps qu’elle abandonne, faites, par respect pour la mienne, ce que vous recommande aujourd’hui ma tendresse : si je suis dans l’erreur, si l’âme reste et périt avec le corps, craignez, du moins, craignez les dieux qui ne meurent point, qui voient tout, qui peuvent tout, qui entretiennent dans l’univers un ordre immuable dont la magnificence et la majesté sont au-dessus de l’expression ; craignez, dis-je, les immortels, et que cette crainte vous empêche de rien faire, de rien dire, de rien penser même qui puisse blesser la piété et la justice. […] Montrez au peuple romain la petite-fille d’Auguste, la veuve de Germanicus ; présentez-lui nos six enfants : le cri de la pitié publique s’élèvera avec la voix des accusateurs ; et ceux qui supposeront des ordres coupables ne trouveront ni croyance ni pardon ». […] N’est-ce pas parce qu’une âme exercée à voir plus et mieux, sent parfaitement qu’elle s’avance vers un meilleur ordre de choses, tandis que cette perspective consolante échappe à celle dont les sens ont émoussé les facultés » ?

104. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — D’Aguesseau. (1668-1751.) » pp. 124-129

Vous venez, mon cher fils, d’achever le cercle ordinaire de l’étude des humanités et de la philosophie ; vous l’avez rempli avec succès : je vous en félicite de tout mon cœur, je m’en félicite moi-même, ou plutôt nous devons l’un et l’autre en rendre grâces à Dieu, de qui viennent tous les biens dans l’ordre de la nature comme dans celui de la grâce… L’étude de la religion, mon fils, doit être le fondement, le motif et la règle de toutes les autres. […] Mais quoique cette conviction et cette espèce de foi humaine qu’on acquiert par l’étude des preuves de la religion chrétienne soient d’un ordre inférieur à la foi divine, qui est le principe de notre sanctification1/, et quoique la simplicité d’un paysan, qui croit fermement tous les mystères de la religion parce que Dieu les lui fait croire, soit infiniment préférable à toute doctrine d’un savant, qui n’est convaincu de la vérité de la religion que comme il l’est de la certitude d’une proposition de géométrie ou d’un fait dont il a des preuves incontestables, il est néanmoins très-utile d’envisager avec attention et de réunir avec soin toutes les marques visibles et éclatantes dont il a plu à Dieu de revêtir de ce caractériser, pour ainsi dire, la véritable religion.

105. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Voltaire. (1694-1778.) » pp. 140-145

Il en fit un bataillon carré long ; et, quoique chargé de cinq blessures, il se retira en bon ordre en cette forme, au milieu de la nuit, dans la petite ville de Gurau, à trois lieues du champ de bataille. […] Le roi donna tranquillement ses ordres pour éteindre le feu : trouvant un petit baril plein de liqueur, il prend le baril lui-même, et, aidé de deux Suédois, il le jette à l’endroit où le feu était le plus violent ; il se trouva que ce baril était rempli d’eau-de-vie ; mais la précipitation inséparable d’un tel embarras empêcha d’y penser.

106. (1853) Exercices de composition et de style ou sujets de descriptions, de narrations de dialogues et de discours

Il reçut ordre d’aller à leur tête combattre une armée française qui, sous les ordres du comte d’Enghien, prince du sang royal de France, venait d’entrer en Piémont. […] Ce malheureux événement remplit les séditieux de confusion et de douleur : ils rentrèrent dans l’ordre. […] Le lendemain, Keoven reçoit l’ordre ou de sacrifier aux idoles, ou de livrer le seul fils qui lui restait, enfant de douze ans. […] Le sévère consul repousse son fils, et veut le condamner à mort, comme ayant enfreint ses ordres. […] « Au mépris des ordres de ton général, au mépris de l’autorité de ton père, tu as combattu, malgré la défense.

107. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre IV. — Du Style. »

Il faut encore que toutes les parties soient arrangées avec ordre, et si bien enchaînées, qu’elles naissent facilement les unes des autres, qu’elles soient même prévues et devinées d’avance : voilà la clarté du style. […] Romulus, dans une assemblée où il survint tout à coup un grand orage, fut mis en pièces par les sénateurs, qui le trouvaient trop impérieux, et l’esprit d’indépendance commenta dès lors à paraître dans cet ordre. […] Tullus Hostilius établit, par de sévères règlements, la discipline militaire et les ordres de la guerre, que son successeur, Ancus Marcius ; accompagna de cérémonies sacrées, afin de rendre la milice sainte et religieuse. ! […] On conçoit à peine comment les plans en furent tracés, et dans quels termes les ordres furent expédiés aux ouvriers ; cela semble une pensée fugitive, une rêverie brillante, qui aurait pris tout à coup un corps durable, un songe réalisé. […] Le style est grave, quand il évite les saillies et les plaisanteries ; méthodique, lorsqu’il marche avec ordre, ne se permettant aucun écart ; précis, quand il rend les idées avec le moins de mots possible ; ferme et énergique quand la justesse des expressions répond à la solidité des pensées.

108. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XVIII. des qualites essentielles du style. — harmonie  » pp. 240-256

On peut en dire autant du rapprochement des extrêmes et des médiales dans l’ordre indiqué plus haut, il y est, il y a, Léon, etc., tandis que, au contraire, leur rapprochement en ordre inverse nous est antipathique, et ne s’admet guère que dans les onomatopées, huons, hua, haïr, etc. […] Etudiez ces modèles, cherchez à substituer aux termes employés par l’orateur des synonymes qui n’aient pas la même cadence, à déranger l’ordre des mots, à multiplier, à retrancher ou à déplacer les repos, et ce travail pour ainsi dire anatomique vous fera pénétrer le secret, et vous donnera le moyen de produire à votre tour des effets semblables.

/ 278