L’âme, comme le corps, ne supporte ni une longue inertie, ni une longue tension de force ; l’une et l’autre en usent les ressorts ; qu’au repos succède le mouvement, ou encore à un mouvement énergique un mouvement plus doux, pourvu toutefois que tous deux appartiennent au même ordre d’idées et se développent sur le même terrain. […] Sans cesse en écrivant variez vos discours… Heureux qui, dans ses vers, sait d’une voix légère, Passer du grave au doux, du plaisant au sévère. […] L’école appelée romantique, qui pourtant ne pactisait guère avec Boileau et tenait ses préceptes en médiocre estime, s’avisa de prendre celui-ci à la lettre, et substituant la confusion à la variété, poussa jusqu’aux dernières limites de l’hyperbole le passage du grave au doux et du plaisant au sévère.
Ses manières y répondaient dans la même proportion, avec une aisance qui en donnait aux autres, et cet air et ce bon goût qu’on ne tient que de l’usage de la meilleure compagnie et du grand monde, qui se trouvait répandu de soi-même dans toutes ses conversations : avec cela une éloquence naturelle, douce, fleurie ; une politesse insinuante, mais noble et proportionnée ; une élocution facile, nette, agréable ; un air de clarté et de netteté pour se faire entendre dans les matières les plus embarrassées et les plus dures ; avec cela un homme qui ne voulait jamais avoir plus d’esprit que ceux à qui il parlait, qui se mettait à la portée de chacun sans le faire jamais sentir, qui les mettait à l’aise et qui semblait enchanté ; de façon qu’on ne pouvait le quitter, ni s’en défendre, ni ne pas chercher à le retrouver. […] L’esprit de Fénelon avait quelque chose de plus doux que la douceur même, de plus patient que la patience. Un ton de voix toujours égal, et une douce contenance toujours grave et polie ont l’air de la simplicité, mais n’en sont pas.
Je voudrais avoir un tombeau où ils pussent venir en troupe, dans un beau temps, dans un beau jour, pour parler ensemble de moi, avec quelque tristesse, s’ils voulaient, mais avec une tristesse douce, et qui n’exclût pas toute joie. […] Sans moi, vous ne connaîtriez pas, hors de votre famille, les délices de la contradiction ; sans moi, rien ne rappellerait jamais à votre souvenir l’ancienne et douce égalité. […] « Il n’y a qu’un pécheur larmoyant qui ait pu appeler la mort un squelette, dit, dans l’Intrigue et l’amour de Schiller, l’héroïne de la pièce, Louise, se préparant au suicide et l’excusant d’avance ; c’est un doux et aimable enfant, au visage rose comme le dieu de l’amour, mais moins trompeur ; un génie silencieux et secourable, qui offre son bras à l’âme fatiguée du pèlerin, qui la fait monter sur les degrés du temps, lui ouvre le magique palais, lui fait un signe amical et disparaît. » Cette définition de la mort ressemble, trait pour trait, à celle qu’en fait le P.
L’Orne3, comme autrefois, nous reverrait encore, Ravis de ces pensers que le vulgaire ignore, Egarer à l’écart nos pas et nos discours, Et couchés sur les fleurs, comme étoiles semées, Rendre en si doux ébat les heures consumées, Que les soleils nous seraient courts4. […] Tes desseins n’ont pas naissance Qu’on en voit déjà le bout ; Et la fortune, amoureuse De ta vertu généreuse, Treuve de si doux appas A te servir et te plaire, Que c’est la mettre en colère Que de ne l’employer pas.
La pensée délicate cherche à plaire ; elle cause une douce et agréable surprise, et renferme ordinairement un éloge, quoiqu’elle serve aussi à ménager la sensibilité dans les reproches. […] La pensée gracieuse est celle qui inspire je ne sais quoi de doux, de riant et d’agréable qui fait sourire de plaisir. […] Le fruit du travail est le plus doux des plaisirs. […] Voici deux exemples de pensées brillantes : Les premiers feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire. […] Le sentiment gracieux est celui qui présente au cœur des émotions douces et agréables, et qui plaît par un aspect riant ou touchant.
Cette même tête qui nous a enfanté Pallas armée nous la rendra avec son olive paisible, douce, savante, et suivie de tous les arts qui marchent d’ordinaire avec elle. […] Alors les bourgeois de Paris seront ses gardes, et il connaîtra combien il est plus doux d’entendre ses louanges dans la bouche du peuple que dans celle des poëtes.
L’Hippolyte de Pradon ose dire à Aricie : Depuis que je vous vois, j’abandonne la chasse, Elle fit autrefois mes plaisirs les plus doux, Et quand j’y vais, ce n’est que pour penser à vous. […] Rappelez-vous les reproches si doux de Didon à Enéc : Si bene quid de le merui, fuit aut tibi quidquam Dulce meum… ; le mot d’Iphigénie, quand Agamemnon veut l’obliger à renoncer à Achille : Dieux plus doux, vous n’aviez demandé que ma vie !
; Les cinq rimes coups, courroux, doux, nous, vous 278 id. […] Fille d’Agamemnon, c’est moi qui, la première, Seigneur, vous appelai de ce doux nom de père ; C’est moi qui, si longtemps le plaisir de vos yeux, Vous ai fait de ce nom remercier les dieux, Et pour qui, tant de fois prodiguant vos caresses, Vous n’avez point du sang dédaigné les faiblesses. […] Dans le temple des Juifs un instinct m’a poussée, Et d’apaiser leur Dieu j’ai conçu la pensée ; J’ai cru que des présents calmeraient son courroux, Que ce Dieu, quel qu’il soit, en deviendrait plus doux. […] Dans le temple aussitôt le prélat plein de gloire Va goûter les doux fruits de sa sainte victoire ; Et de leur vain projet les chanoines punis S’en retournent chez eux, éperdus et bénis. […] Enfin, ce vers si charmant, si doux, si harmonieux, qu’un Racine seul pouvait composer avec de pareils éléments : Hippolyte à Thésée.
Dès que le jeune voyageur a percé les ténèbres, a débrouillé le chaos qui lui cachait ce monde nouveau qu’il vient habiter, tout le charme, tout l’étonne, tout le ravit ; une foule innombrable de vives sensations, de doux plaisirs, pénètrent dans son âme par les cinq parties que le ciel a placées artistement autour d’elle pour les y conduire. […] Enfin, enivré de tant de sensations nouvelles, déjà fatigué de son bonheur, sa vie a besoin de trêve, et la nature lui fait éprouver une autre félicité dans une cessation apparente d’existence, dans le doux repos du sommeil. […] Harmonie des mots L’Harmonie des mots consiste à ne choisir que les mots les plus coulants, les plus doux, les plus sonores et les réunir suivant ce précepte de Boileau : Il est un heureux choix de mots harmonieux ; Fuyez des mauvais sons le concours odieux ; Le vers le mieux rempli, la plus noble pensée Ne peut plaire à l’esprit, quand l’oreille est blessée, Boileau, Art poétique, ch. […] Exemple d’une période ronde : Si la sagesse… (1er membre), Ou s’il n’eût pas eu devant les yeux… (2e membre) Ou si les doux conseils de la philosophie d’Aristote avaient pu calmer l’effervescence de ce jeune courage, (3e membre) (division principale), Jamais il n’eût porté (4e membre).
Sa morale est douce et humaine. […] Ces époux, partageant les doux soins du ménage, Cultivaient leur jardin, recueillaient leurs moissons ; Et le soir, dans l’été, soupant sous le feuillage, Dans l’hiver, devant leurs tisons, Ils prêchaient à leurs fils la vertu, la sagesse6, Leur parlaient du bonheur qu’elles donnent toujours : Le père par un conte égayait ses discours, La mère par une caresse7.
Mais il faut faire un choix de ce que l’on admettra, et se souvenir que tout ce qui se passe à la campagne n’est pas digne d’entrer dans l’églogue ; on ne doit en prendre que ce qui est de nature à plaire ou à intéresser ; par conséquent, il faut en exclure les grossièretés, les choses dures ou triviales, les menus détails, en un mot tout ce qui n’a rien de piquant ni de doux. […] Il doit être doux. […] Il a su d’ailleurs réunir toutes les qualités, le piquant et le doux, la naïveté, les images choisies, des sentiments doux et tendres, des vers aisés, coulants, harmonieux, les expressions simples, quelquefois riches, toujours vraies. […] Il avait un génie aisé et fécond, un caractère doux et simple ; il sentait l’harmonie poétique et trouvait facilement cette douceur dans les mots et le style qui conviennent aux images champêtres. […] Cette sorte de poésie est donc consacrée aux mouvements du cœur ; mais elle se borne aux sentiments doux, soit de tristesse, soit de joie.
Iphigénie cherchant à consoler son père qui l’envoie à la mort arrache des larmes plus douces que si elle disputait sa vie au nom de sa jeunesse et de son innocence. […] O doux nom de liberté ! […] L’agrément du récit est une séduction qu’il ne faut pas négliger ; ce qui plaît paraît moins long : un chemin riant et d’une pente douce fatigue moins qu’un chemin plus court, mais rude et escarpé. […] Lorsque un cri tout à coup suivi de mille cris Vient d’un calme si doux retirer ses esprits. […] au noir souffle du nord Je plie et relève ma tète, S’il est des jours amers, il en est de si doux.
Ma muse en l’attaquant, charitable et discrète, Sait de l’homme d’honneur distinguer le poëte1 Qu’on vante en lui la foi, l’honneur, la probité ; Qu’on prise sa candeur et sa civilité ; Qu’il soit doux, complaisant, officieux, sincère : On le veut, j’y souscris, et suis prêt à me taire2 Mais que pour un modèle on montre ses écrits, Qu’il soit le mieux renté de tous les beaux esprits, Comme roi des auteurs qu’on l’élève à l’empire, Ma bile alors s’échauffe, et je brûle d’écrire ; Et, s’il ne m’est permis de le dire au papier, J’irai creuser la terre, et, comme ce barbier, Faire dire aux roseaux, par un nouvel organe : « Midas, le roi Midas, a des oreilles d’âne3 ». […] Quittez ces vains plaisirs dont l’appât vous abuse : A de plus doux emplois occupez votre Muse, Et laissez à Feuillet1réformer l’univers. […] Ce doux siècle n’est plus.
Ce mélange de gloire et d’amour, d’idées douces et guerrières, est le sublime du genre, et plus d’un grognard, qui se croyait un cœur de bronze, à dû sentir avec étonnement sa paupière se soulever, et essuyer furtivement une larme sur le revers de sa manche. […] Son rhythme est doux et agréable à l’oreille. […] Le rhythme de ce vers est doux et majestueux à la fois ; il convient à l’ode et à la poésie légère. […] Il est facile de remarquer combien ce rhythme, ainsi que le précédent, est disgracieux, employé seul, il fait au contraire très bon effet quand on le mêle à un autre, comme dans cette strophe de Chateaubriand : Combien j’ai douce souvenance Du joli lieu de ma naissance ! […] Qu’il est doux, quand du soir l’étoile solitaire, Précédant de la nuit le char silencieux, S’élève lentement dans la voûte des cieux, Et que l’ombre et le jour se disputent la terre, Qu’il est doux de porter ses pas religieux Dans le fond du vallon, vers ce temple rustique, Dont la mousse a couvert le modeste portique, Mais où le ciel encor parle à des cœurs pieux.
Il est doux de jouir dans un autre soi-même, Et des lieux qu’on préfère, et des livres qu’on aime. […] Ouvrez-vous, lieux témoins de mes plus doux loisirs, Reconnaissez la voix d’un compagnon fidèle ; C’est moi !
Ses caractères, saillants et naturels, sont tracés avec un pinceau hardi ; ses récits sont faits pour inspirer l’humanité et les affections les plus douces. […] C’est à produire cette douce illusion que le poète doit essentiellement s’attacher. […] Le principal mérite de son style, considéré poétiquement, est d’être doux, agréable et tendre. […] C’est un homme doux et presque impassible. […] La scène change souvent de place ; du théâtre des armes, du tumulte des camps il nous transporte au milieu d’une nature douce et pleine de charmes.
C’est la raison énergique et brûlante comme la passion ; c’est la passion calme et pure comme la raison : nos devoirs les plus saints deviennent nos voluptés les plus douces, et tout l’homme est d’accord. […] comme il voue ce monstre à l’exécration des Romains, lorsqu’il s’écrie : « O doux nom de la liberté ! […] N’accompagnez de vos religieux murmures que le chant des oiseaux, ou les doux entretiens des amis qui veulent se reposer sous vos ombrages ! […] Un particulier peut, sans déshonneur, mener une vie douce et obscure ; un roi ne peut, sans se déshonorer, préférer une vie douce et oisive aux fondions pénibles du gouvernement. […] Il est doux de voir la lumière du jour.
La douce, la consolante religion peut seule en relever le courage et ranimer les forces. […] Brumoi a ainsi paraphrasé : Ovide pour vos destinées Ferait les souhaits les plus doux. […] « Je n’ai eu jusqu’à ce moment que la douce habitude de vous aimer : mais je vous avouerai que je mêle à cet amour un vrai respect, quand je me représente votre destinée honorable.
Sa morale sage, douce et sensible, n’en devient que plus onctueuse et plus attrayante par les grâces du style, dont elle a su la revêtir. […] Jamais la vertu n’a parlé un si doux langage : jamais la sagesse la plus profonde ne s’est exprimée avec autant d’énergie et de vérité : « La majesté des Ecritures m’étonne, dit J. […] Le fruit de cette lecture sera une piété douce et tendre, une tranquillité d’âme inaltérable, un courage à toute épreuve dans les peines et les afflictions qui sont inséparables de la nature humaine, au faîte même des grandeurs, et dans le sein de la plus brillante prospérité.
toi-même qui jouis maintenant d’une jeunesse si vive et si féconde en plaisirs, souviens-toi que ce bel âge n’est qu’une fleur qui sera presque aussitôt séchée qu’éclose : tu te verras changer insensiblement ; les grâces riantes, les doux plaisirs qui t’accompagnent, la force, la santé, la joie s’évanouiront comme un beau songe ; il ne t’en restera qu’un triste souvenir ; la vieillesse languissante et ennemie des plaisirs viendra rider ton visage, courber ton corps, affaiblir tes membres, faire tarir dans ton cœur la source de la joie, te dégoûter du présent, te faire craindre l’avenir, te rendre insensible à tout, excepté à la douleur. […] La brûlante canicule1 desséchait la terre : toutes les plantes altérées languissaient ; les fleurs ternies penchaient leurs têtes, et leurs tiges malades ne pouvaient plus les soutenir ; les zéphyrs mêmes retenaient leurs douces haleines, l’air que les animaux respiraient était semblable à de l’eau tiède2. La nuit, qui répand avec ses ombres une douce fraîcheur, ne pouvait tempérer la chaleur dévorante que le jour avait causée ; elle ne pouvait verser sur les hommes abattus et défaillants, ni la rosée qu’elle fait distiller quand Vesper3brille à la queue des autres étoiles, ni cette moisson de pavots qui font sentir les charmes du sommeil à toute la nature fatiguée.
À la mémoire d’un ami …………… L’Orne, comme autrefois, nous reverrait encore, Ravis de ces pensers1 que le vulgaire ignore, Égarer à l’écart nos pas et nos discours ; Et couchés sur les fleurs, comme étoiles semées, Rendre en si doux ébats les heures consumées, Que les soleils nous seraient courts. […] Ta lyre, qui ravit par de si doux accords, Te soumet les esprits dont je n’a y que le co Elle t’en rend le maistre, et te sçait introduire Où le plus fier tyran n’a jamais eu d’empire.
L’objet de l’éloge est d’élever nos esprits par la sublimité des pensées et des images, d’agrandir, d’ennoblir nos âmes par l’émotion quelles reçoivent des grands exemples, et par cet attendrissement si doux qu’excite en nous la magnanimité. […] Exemples : la terre est ronde ; le sucre est doux. […] N’ayant plus de besoins, jouissant d’un calme profond et d’une douce liberté dont la sagesse de mes livres m’apprend à faire un bon usage, qu’irai-je encore chercher parmi les hommes jaloux, trompeurs et inconstans ? […] Je comparais ce roi invisible avec Sésostris, si doux, si accessible, si affable, si curieux de voir les étrangers, si attentif à écouter tout le monde et à tirer du cœur des hommes la vérité qu’on cache aux rois. […] On dira en style poétique : Qu’un ami véritable est une douce chose !
Lisons, par exemple, ces paroles prononcées par Assuérus pour rassurer la tremblante Esther : Je ne trouve qu’en vous je ne sais quelle grâce Qui me charme toujours et jamais ne me lasse : De l’aimable vertu doux et puissants attraits ! […] Dans la Phèdre de Pradon, Hyppolyte dit à Aricie : Depuis que je vous vois, j’abandonne la chasse ; Elle fit autrefois mes plaisirs les plus doux ; Et quand j’y vais, ce n’est que pour penser à vous. […] L’harmonie des mots consiste dans le choix et l’arrangement des mots considérés comme sons ; les uns sont doux, et sonores, les autres sont durs et sourds : il faut éviter la rencontre des consonnes désagréables, sans pourtant pousser ce soin jusqu’à l’affectation et la contrainte. […] Voici un passage de Châteaubriand dont la riche harmonie est sensible : « Si tout est silence et repos dans les savanes de l’autre côté du fleuve, tout ici, au contraire, est mouvement et murmure : des coups de bec contre le tronc des chênes ; des froissements d’animaux qui marchent, broutent ou broient les noyaux des fruits ; des bruissements d’ondes, de faibles gémissements, de sourds meuglements, de doux roucoulements, remplissent ces déserts d’une tendre et sauvage harmonie. […] Le premier se moquant, l’autre reprit : Tout doux ; On le fit pour cuire vos choux.
Celui qui est assez heureux pour en sentir tout le prix a toujours à sa disposition, dans ses moments de loisir, une récréation innocente et douce, qui le garantit des pernicieuses atteintes des passions. […] Si quelqu’un voulait soutenir que le sucre est amer, et que le tabac est doux, aucun raisonnement ne pourrait prouver le contraire. […] L’émotion qu’elle produit est bien différente de celle que le sublime fait naître ; cette émotion est plus paisible, plus agréable, plus suave ; elle n’élève pas autant l’esprit, mais elle le place dans une situation très douce. […] Les mouvements modérés et doux appartiennent seuls à la beauté ; la rapidité ou la violence, comme la chute d’un torrent, sont le partage du sublime. […] Les idées les plus douces ne s’expriment point en effet par les sons les plus rudes.
Le triste hiver, saison de mort, est le temps du sommeil, ou plutôt de la torpeur de la nature : les insectes sans vie, les reptiles sans mouvement, les végétaux sans verdure et sans accroissement, tous les habitants de l’air détruits ou relégués, ceux des eaux renfermés dans des prisons de glace, et la plupart des animaux terrestres confinés dans les cavernes, les antres et les terriers, tout nous présente les images de la langueur et de la dépopulation ; mais le retour des oiseaux au printemps est le premier signal et la douce annonce du réveil de la nature vivante, et les feuillages renaissants, et les bocages revêtus de leur nouvelle parure, sembleraient moins frais et moins touchants sans les nouveaux hôtes qui viennent les animer. […] La fauvette à tête noire est de toutes les fauvettes celle qui a le chant le plus agréable et le plus continu : il tient un peu de celui du rossignol, et l’on en jouit plus longtemps ; car, plusieurs semaines après que ce chantre du printemps s’est tu, l’on entend les bois résonner partout du chant de ces fauvettes ; leur voix est facile, pure et légère, et leur chant s’exprime par une suite de modulations peu étendues, mais agréables, flexibles et nuancées : ce chant semble tenir de la fraîcheur des lieux où il se fait entendre ; il en peint la tranquillité, il en exprime même le bonheur : car les cœurs sensibles n’entendent pas sans une douce émotion les accents inspirés par la nature aux êtres qu’elle rend heureux.
Quelle noble et douce figure que celle de cette femme aux yeux baissés, assise au milieu de ses esclaves, et leur donnant l’exemple du travail et des vertus austères ! […] Après tant de terribles inventions, tant de furieux coups d’épée, tant de drames tumultueux empruntés aux sombres chroniques du moyen âge, l’auditoire rentrait dans la douce lumière, dans la belle harmonie des œuvres antiques. […] Elle n’agit pas seulement sur les manières, mais sur l’esprit et le cœur ; elle rend modérés et doux tous les sentiments, toutes les opinions et toutes les paroles.