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2. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Chateaubriand 1768-1848 » pp. 222-233

Un petit nombre de fermes délabrées se montrent sur la nudité des champs ; les fenêtres et les portes en sont fermées ; il n’en sort ni fumée, ni bruit, ni habitants. Une espèce de sauvage, presque nu, pâle et miné par la fièvre, garde ces tristes chaumières : on dirait qu’aucune nation n’a osé succéder aux maîtres du monde dans leur terre natale, et que les champs sont tels que les a laissés le soc de Cincinnatus, ou la dernière charrue romaine. […] Des clairières5 se panachent d’élégantes et hautes fougères ; des champs de genêts et d’ajoncs6 resplendissent de fleurs qu’on prendrait pour des papillons d’or posés sur des arbustes verts et bleuâtres. […] Les futaies à fonds de bruyères et à cépées de houx3, habitées par des sabotiers, des charbonniers et des verriers tenant du gentilhomme, du commerçant et du sauvage, les landes nues, les plateaux pelés, les champs rougeâtres de sarrazin, qui séparent ces vallons entre eux, en font mieux sentir la fraîcheur et l’agrément. […] Les hôtes des champs ; c’est presque une énigme à deviner.

3. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Bernardin de Saint-Pierre. (1737-1814.) » pp. 153-158

Il y aperçoit une pauvre cabane, il y frappe ; il en sort un vieux hernouten à barbe blanche. « Mon père, lui dit l’officier, montrez-moi un champ où je puisse faire fourrager mes cavaliers. — Tout à l’heure », reprit l’hernouten. […] Après un quart d’heure de marche, ils trouvent un beau champ d’orge : « Voilà ce qu’il nous faut, dit le capitaine. — Attendez un moment, lui dit son conducteur, vous serez content. » Ils continuent à marcher, et ils arrivent, à un quart de lieue plus loin, à un autre champ d’orge. La troupe aussitôt met pied à terre, fauche le grain, le met en trousse, et remonte à cheval L’officier de cavalerie dit alors à son guide : « Mon père, vous nous avez fait aller trop loin sans nécessité ; le premier champ valait mieux que celui-ci. — Cela est vrai, monsieur, reprit le bon vieillard, mais il n’était pas à moi. » Études de la nature (notes de l’auteur).

4. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre III. Beautés de sentiment. »

Des murs de Bethléem chassés par la famine, Noémi, son époux, deux fils de leur amour, Dans les champs de Moab vont fixer leur séjour. […] Noémi cède, et toutes deux retournent aux champs paternels. […] Réduite à aller glaner pour vivre, Ruth se dévoue courageusement à ce genre nouveau de fatigue ; il s’agit de sa mère, tout est oublié :                        Le jour à peine luit, Qu’au champ du vieux Booz le hasard la conduit. […] Booz engage l’aimable Ruth à revenir glaner dans son champ, tant que durera la moisson. […] ……………………………………………… Par son âge, au travail à regret inhabile, Il presserait en vain le soc d’un bras débile ; Mais il ne peut languir dans un repos oisif : D’une épine noueuse aidant son pied tardif, Il va, des bords du champ, voir avancer l’ouvrage.

5. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Lamartine 1790-1869 » pp. 506-523

Ainsi, quand l’aigle du tonnerre Enlevait Ganymède aux cieux, L’enfant, s’attachant à la terre, Luttait contre l’oiseau des dieux ; Mais entre ses serres rapides L’aigle, pressant ses flancs timides, L’arrachait aux champs paternels ; Et, sourd à la voix qui l’implore, Il le jetait, tremblant encore, Jusques aux pieds des immortels. […] Mon œil cherchait quelqu’un qu’il pût interroger ; Mais dans les champs déserts, ni troupeau, ni berger. […] Les travaux sont suspendus, les champs déserts. […] Il lui est permis d’avoir une vigne, un jardin, un verger, quelquefois un petit champ, et de les cultiver de ses propres mains, d’y nourrir quelques animaux domestiques, de plaisir ou d’utilité ! […] Lui-même, sevré depuis si longtemps des jouissances des hommes, prenait un doux plaisir aux fêtes que lui faisaient les bêtes des champs.

6. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Première section. Des genres secondaires de poésie — Chapitre II. Du genre pastoral » pp. 96-112

Le but moral de ce genre est d’inspirer à l’homme l’amour de la paix et des douces joies que procure la vie des champs, afin de le détourner des agitations et de la corruption des villes. […] D’après notre définition, l’objet essentiel de la pastorale est de retracer à l’imagination le repos de la vie des champs avec tous ses agréments. […] Le ciel sous lequel il vit n’est pas toujours serein ; ses champs ne sont pas à l’abri des vents pernicieux, de la grêle, des orages ; un souffle mortel peut dessécher ses fruits, et des maladies contagieuses frapper ses troupeaux. […] L’églogue qui, comme l’idylle, est une représentation simple et naïve de la vie des champs dans ce qu’elle a de plus gracieux, diffère aujourd’hui de celle-ci en ce qu’elle semble demander plus d’action et de mouvement, et en ce qu’elle prend la forme dramatique ou la forme épique, c’est-à-dire qu’elle est en dialogue ou en récit ; tandis que l’idylle ne renferme ordinairement que des images, des sentiments et rarement des récits.

7. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — La Fontaine 1622-1695 » pp. 339-378

Remuez, votre champs dès qu’on aura fait l’août2 ; Creusez, fouillez, bêchez, ne laissez nulle place   Où la main ne passe et repasse. » Le père mort, les fils vous retournent le champs. […]   Puisqu’ils vous nuisent à vos pieds1,   Vous les aurez sur vos épaules2 »   Lors, la Beauce de s’aplanir3,   De s’égaler, de devenir   Un terroir uni comme glace ;   Et bossus de naître en la place,   Et monts de déloger des champs. […] Nous cultivions en paix d’heureux champs, et nos mains Etaient propres aux arts, ainsi qu’au labourage. […] « Nous, nous abandonnons nos champs paternels et nos douces campagnes. […] Homère nous montre le vieux Laerte cultivant ses champs pour adoucir ses regrets.

8. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Poètes

D’abord nous trouvions dans leurs poésies diverses un champ d’emprunts intéressants, plus resserré chez le second, plus étendu chez le premier. […] Du champ d’Attigny a madame d’Alençon51 (1521). […] Faire de ses fils des amis des champs fut son dernier but. […] On ne voit par les champs qu’enseignes et cornettes478 ; En la ville on ne voit que brebis et pourceaus, En la ville on n’oit plus que vaches et taureaus, On n’oit plus par les champs que tambours et trompettes. […] Delbenc, en nostre temps eussions nous pensé voir La ville dans les champs et les champs dans la ville480 !

9. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Victor Hugo Né à Besançon en 1802 » pp. 540-556

Après la bataille Mon père, ce héros au sourire si doux1, Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille, Parcourait à cheval, le soir d’une bataille, Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit. […] L’âme de deuil en deuil, l’homme de rive en rive   Roule à l’éternité4… Dès qu’il possède un bien, le sort le lui retire ; Rien ne lui fut donné dans ses rapides jours, Pour qu’il s’en puisse faire une demeure, et dire : C’est ici ma maison, mon champ et mes amours5 ! […] Dans les Poëmes des Champs, par M. de La Fayette, je lis ces vers : La vache ! […]   Que le jour s’achève ou renaisse, Courez et bourdonnez comme l’abeille aux champs !

10. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Racan. (1589-1670.) » pp. 165-168

Bien que du Dieu des armées Tout l’univers soit rempli, Ce n’est qu’aux champs Idumées2 Qu’il a son trône établi : De cette demeure sainte Il marche, et porte la crainte Au front des plus grands guerriers ; Et ses puissances suprêmes Arrachent des diadèmes Les palmes et les lauriers. […] Je crois que Lycidas serait bien votre fait : La fortune lui rit, tout lui vient à souhait ; De vingt paires de bœufs il sillonne la plaine, Tous les ans ses acquêts augmentent son domaine ; Dans les champs d’alentour on ne voit aujourd’hui Que chèvres et brebis qui sortent de chez lui ; Sa maison se fait voir par-dessus le village, Comme fait un grand chêne au-dessus d’un bocage ; Et sais5 que de tout temps son inclination Vous a donné ses vœux et son affection.

11. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Voltaire 1694-1778 » pp. 445-463

» Les champs désertés Plutus1 est dans Paris, et c’est là qu’il appelle Les voisins de l’Adour2, et du Rhône, et du Var ; Tous viennent à genoux environner son char ; Les uns montent dessus ; les autres dans la boue Baisent, en soupirant, les rayons de sa roue. […] En maudissant les champs que vos mains font fleurir ! […] Quelquefois un peu de verdure Rit sous les glaçons de nos champs ; Elle console la nature, Mais elle sèche en peu de temps. […] À chacun son tour a m. françois de neufchateau4 Si vous brillez à votre aurore, Quand je m’éteins à mon couchant ; Si dans votre fertile champ Tant de fleurs s’empressent d’éclore, Lorsque mon terrain languissant Est dégarni des dons de Flore ; Si votre voix jeune et sonore Prélude d’un ton si touchant, Quand je fredonne à peine encore Les restes d’un lugubre chant ; Si des Grâces qu’en vain j’implore, Vous devenez l’heureux amant ; Et si ma vieillesse déplore La perte de cet art charmant Dont le dieu des vers vous honore : Tout cela peut m’humilier, Mais je n’y vois point de remède.

12. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — L. Racine. (1692-1763.) » pp. 267-276

J’y reconnais un maître à qui rien n’a coûté, Et qui dans vos déserts a semé la lumière Ainsi que dans nos champs il sème la poussière. […] Dans un sage conseil, par les chefs assemblé, Du départ général le grand jour est réglé ; Il arrive, tout part : le plus jeune peut-être Demande, en regardant les lieux qui l’ont vu naître, Quand viendra ce printemps par qui tant d’exilés Dans les champs paternels se verront rappelés1 ? […] Sur les monts, dans les champs, l’aquilon nous les rend.

13. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Silvestre de Sacy Né en 1804 » pp. 271-274

Nous autres, bibliophiles raisonnables, notre champ est plus restreint. […] Quelles charmantes matinées que celles qu’on passerait, par un beau soleil, dans une allée bien sombre, au milieu de ce bruit des champs, immense, confus, et pourtant si harmonieux et si doux, à relire tantôt une tragédie de Racine, tantôt l’histoire des origines du monde, racontées par Bossuet avec une grâce si majestueuse !

14. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Chateaubriand, 1768-1848 » pp. 409-427

Un petit nombre de fermes délabrées se montrent sur la nudité des champs ; les fenêtres et les portes en sont fermées ; il n’en sort ni fumée, ni bruit, ni habitants. Une espèce de sauvage, presque nu, pâle et miné par la fièvre, garde ces tristes chaumières : on dirait qu’aucune nation n’a osé succéder aux maîtres du monde dans leur terre natale, et que les champs sont tels que les a laissés le soc de Cincinnatus, ou la dernière charrue romaine. […] En vain, dans nos champs cultivés, l’imagination cherche à s’étendre ; elle rencontre de toutes parts les habitations des hommes : mais, dans ces régions sauvages, l’âme se plaît à s’enfoncer dans un océan de forêts, à planer sur le gouffre des cataractes, à méditer au bord des lacs et des fleuves, et, pour ainsi dire, à se trouver seule devant Dieu2. […] Mais quand une brise vient à animer toutes ces solitudes, à balancer tous ces corps flottants, à confondre toutes ces masses de blanc, d’azur, de vert, de rose, à mêler toutes les couleurs, à réunir tous les murmures, il se passe de telles choses aux yeux, que j’essayerais en vain de les décrire à ceux qui n’ont point parcouru ces champs primitifs de la nature2.

15. (1883) Morceaux choisis des classiques français (prose et vers). Classe de troisième (nouvelle édition) p. 

Est-ce au champ de l’exil, dans l’avilissement, Que ta bouche s’est close à force de maudire ? […] « Mais Énée aux champs de Laurente. […] D’un vaste champ de fleurs je tire un peu de miel. […] Vous fuyez, et des champs le calme vous remplace. […] Presque au milieu du champ, déjà brille là-bas Plus d’un rouge corset entre les échalas.

16. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre V. De l’Éloquence politique chez les Français. »

Les orateurs n’avaient que le barreau ou la chaire ; et les formes judiciaires modernes n’offraient point à l’éloquence un champ aussi vaste, aussi libre que le barreau d’Athènes et de Rome. […] À peine le champ fut-il libre, que l’on y vit s’élancer à la fois une foule d’hommes, inconnus la plupart, ou à qui l’on était loin de supposer le genre et la mesure de talents qu’on les vit bientôt déployer ; d’autres s’avançaient escortés d’une réputation que les uns n’ont pas justifiée, que les autres ont surpassée de beaucoup.

17. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Voltaire. (1694-1778.) » pp. 277-290

    Près des bords de l’Iton et des rives de l’Eure2 Est un champ fortuné, l’amour de la nature : La guerre avait longtemps respecté les trésors Dont Flore et les Zéphyrs embellissaient ces bords1. […] Il veille autour de lui, tel qu’un puissant génie : Tel qu’on feignait jadis, aux champs de la Phrygie, De la terre et des cieux les moteurs éternels Mêlés dans les combats sous l’habit des mortels ; Ou tel que du vrai Dieu les ministres terribles, Ces puissances des cieux, ces êtres impassibles, Environnés des vents, des foudres, des éclairs, D’un front inaltérable ébranlent l’univers1. […] Beau portrait du calme qu’une âme forte conserve au milieu des dangers : Duplessis-Mornay, qui a laissé aussi des Mémoires curieux sur les événements et les guerres auxquels sa vie a été mêlée, se montra même sur les champs de bataille un sage, ami des hommes : ce qui ne l’empêchait nullement d’être un héros.

18. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

Ils oublient que si la vraie poésie consiste dans l’imitation d’une nature choisie, il ne faut pas trop restreindre le champ de cette belle nature. […]                                                 Mais un de ses parents, Mort aux champs de Fleurus, Nous doit dix mille francs. […] Il parle comme un ancien de la saison « où les tièdes zéphyrs ont l’herbe rajeunie », quand tout aime et quand tout pullule dans le monde, « monstres marins au fond de l’onde, tigres dans les forêts, alouettes aux champs ». […] … » Ramené par le malheur à de plus saintes idées et plein du souvenir de son ancien désert, Malc vit dans les champs en gardant les troupeaux comme il avait vécu dans la solitude de Béroé au milieu de ses frères ; il médite, il prie, il fuit les hommes et même la compagne de sa captivité. […] Sous prétexte qu’il ne faut pas sacrifier à la richesse de la rime toutes les autres beautés de la poésie, il néglige la rime au-delà même des libertés du théâtre ; par exemple, il fait rimer champs avec sens, sévère avec plaire, compassion avec prison, etc.

19. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Gilbert. (1751-1780.) » pp. 297-303

Aux traces d’exagération et d’inexpérience qui s’y découvrent se mêlent des beautés du premier ordre : des éteincelles de génie brillent dans son ode sur le jugement dernier1 ; et la vigueur originale, la véhémence et l’éclat qui distinguent son éloquente invective contre les vices de son siècle attestent à quel point Gilbert, digne successeur de Régnier et de Boileau, était capable de féconder encore et d’agrandir le champ de la satire2. […] Salut, champs que j’aimais, et vous, douce verdure,         Et vous riant exil des bois !

20. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Brizeux, 1803-1858 » pp. 557-563

— je vois les toits de ton village Baignés à l’horizon dans des mers de feuillage, Une grêle fumée au-dessus, dans un champ, Une femme de loin appelant son enfant1 ; Ou bien un jeune pâtre assis près de sa vache, Qui, tandis qu’indolente elle paît, à l’attache, Entonne un air breton si plaintif et si doux, Qu’en le chantant ma voix vous ferait pleurer tous.  […] Jeune et puissant Protéc aux formes toujours heuves, Il vogue, ardent navire, à tous les vents des mers ; S’allonge en ponts hardis sur le lit de nos fleuves, Fend, remorqueur tonnant, le vaste champ des airs ; Se roule autour du globe en splendide ceinture ; Rampe, en canaux de gaz, sous le sol tourmenté, Et porte aux nations, avec leur nourriture, La lumière, la paix, l’ordre, la liberté !

21. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Chapitre II. Des petits Poèmes. »

Le ciel, sous lequel ils vivaient, n’était pas toujours serein : leurs champs n’étaient pas à l’abri des vents pernicieux, de la grêle, des orages : il arrivait quelquefois qu’un souffle mortel desséchait leurs fruits ; que des maladies contagieuses frappaient leurs troupeaux. […] Par la même raison qu’ils avaient des rois, leurs champs étaient exposés aux malheurs que la guerre entraîne. […] Pourquoi la bénédiction du ciel serait-elle sur nos troupeaux et sur les productions de nos champs ? […] Telle qu’une Bergère, au plus beau jour de fête, De superbes rubis ne charge point sa tête, Et sans mêler à l’or l’éclat des diamants, Cueille en un champ voisin ses plus beaux ornements : Telle aimable en son air, mais humble dans son style, Doit éclater sans pompe une élégante idylle. […] Savez-vous pour la gloire oublier le repos, Et dormir en plein champ le harnois sur le dos ?

22. (1811) Cours complet de rhétorique « Notes. »

Des vastes champs qu’il venait de parcourir avec Virgile et Milton, M.  […] Nous ne nous arrêterons pas sur les poèmes de l’Homme des champs et de la Pitié, productions estimables qui ne pouvaient manquer leur effet, quand elles parurent, mais que l’on distingue à peine aujourd’hui à côté des grands ouvrages dont nous venons de parler. […] Ainsi que la rosée en nos champs répandue, Du sein de l’Éternel la grâce descendue, Au couple infortuné, touché de ses erreurs, Avait rendu l’espoir, le remords et les pleurs. Soumis, agenouillés, ils priaient ; leur prière Franchissant d’un plein vol les champs de la lumière, Malgré les vents jaloux, sur des ailes de feu, Part, vole, monte, arrive aux portes du saint lieu ; Là, du temple divin le pontife suprême, Heureux médiateur, fils de Dieu, Dieu lui-même, Sur l’autel d’or où fume un encens éternel, La bénit et la porte aux pieds de l’Éternel.

23. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre II. De l’emploi des figures dans les écrivains sacrés. »

Son règne à ses peuples chéris Sera ce qu’aux champs défleuris Est l’eau que le ciel leur envoie ; Et tant que luira le soleil, L’homme plein d’une sainte joie Le bénira dès son réveil. […] Le pauvre, sous ce défenseur, Ne craindra plus que l’oppresseur Lui ravisse son héritage : Et le champ qu’il aura semé Ne deviendra plus le partage De l’usurpateur affamé. […] -C., morceau vraiment magnifique, qui a fourni à Virgile son Pollion, à Pope sa belle églogue du Messie, et dont Racine le fils a réuni les traits principaux dans les vers suivants : Aux champs, déshonorés par de si longs combats, La main du laboureur rend leurs premiers appas : Le marchand, loin du port, autrefois son asile, Fait voler ses vaisseaux sur une mer tranquille.

24. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Bernardon de Saint-Pierre 1737-1814 » pp. 203-209

Ce bruissement des prairies, ces gazouillements des bois, ont des charmes que je préfère aux plus brillants accords : mon âme s’y abandonne ; elle se berce avec les feuillages ondoyants des arbres : elle s’élève avec leur cime vers les cieux ; elle se transporte dans les champs qui les ont vus naître et dans ceux qui les verront mourir ; ils étendent dans l’infini mon existence circonscrite et fugitive. […] Le soleil allait se coucher lorsque nous mîmes pied à terre au milieu des champs.

25. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre IV. »

Il donne aux fleurs leur aimable peinture ;               Il fait naître et mûrir les fruits :               Il leur dispense avec mesure Et la chaleur des jours et la fraîcheur des nuits ; Le champ qui les reçut les rend avec usure. […] Rousseau, fait un rapprochement habile et plein d’effet entre ce poète et Orphée : Quand le premier chantre du monde Expira sur les bords glacés Où l’Hèbre, effrayé, dans son onde Reçut ses membres dispersés, Le Thrace, errant sur les montagnes, Remplit les bois et les campagnes Du cri perçant de ses douleurs ; Les champs de l’air en retentirent, Et dans les antres qui gémirent Le lion répandit des pleurs.

26. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre IV. Beautés morales et philosophiques. »

Delille, dans les vers suivants : Ô champs ! […] (L’Homme des Champs, ch. 4)184. […] Une comparaison d’autant plus sublime, qu’elle rend plus sensible et plus vraie l’application des vers précéder, termine ce beau morceau : Semblables aux torrents dont la fange et les ondes Ravageaient avec bruit les campagnes fécondes, Et qui, formés soudain, mais plus vite écoulés, Se perdent dans les champs qu’ils avaient désolés.

27. (1867) Rhétorique nouvelle « Deuxième partie. L’éloquence du barreau » pp. 146-

« — Il a recours, disent-ils, à des maléfices pour nous ruiner et faire passer la fécondité de nos champs dans les siens. » Au jour de l’audience, le fermier se présente au forum avec tout son attirail de labour, charrue, herses, bèches, hoyaux, bien entretenus, bien reluisants ; un chariot traîné par deux forts bœufs, et sur l’attelage, portée comme en triomphe, la famille du laboureur, de beaux et solides garçons, la fermière et ses filles, mains calleuses, teint brûlé, forte lignée de paysans. — « Regardez, citoyens, dit l’homme au peuple, voilà ma magie, voilà mes sorti-léges. » Je demande s’il y a des discours qui vaillent cette éloquence des faits. […] Alors on vivait plus aux champs et aux camps qu’à la ville ; on bornait sa science à l’étude des douze tables, sa philosophie à l’observation des coutumes des ancêtres, sa morale aux devoirs du soldat et du citoyen. […] Nos pères préféraient le soleil du champ de Mars à l’ombre des écoles, et faisaient plus de cas d’un bon fermier que d’un habile discoureur.

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