J’entends tout cela ; mais vous nous avez fait espérer l’explication de l’action du corps : je 11e vous en tiens pas quitte. […] Adieu, Monsieur ; je vous conjure de nous tenir parole. […] Un madrigal doit bien plutôt être élégant qu’une épigramme, parce que le madrigal tient quelque chose des stances, et que l’épigramme tient du comique ; l’un est fait pour exprimer un sentiment délicat, et l’autre un ridicule. […] Tout ce qui tiendra de près à la liberté d’un Anglais, à ses droits, à ses usages, fera plus d’impression sur lui que sur un Français. […] Toutes les places qui tiennent à la judicature, à la finance, au commerce, ferment la porte aux beaux-arts.
Enfin, tu sais l’affront, et tu tiens la vengeance : Je ne te dis plus rien. […] Il étale1 à son tour des revers équitables Par qui les grands sont confondus ; Et les glaives qu’il tient pendus2 Sur les plus fortunés coupables Sont d’autant plus inévitables Que leurs coups sont moins attendus. […] La mort impitoyable éteignant son flambeau, Tient Melpomène en pleurs au pied de ton tombeau. […] Dans le Cid de Diamante, Rodigue voit son père qui tient d’une main son épée, et de l’autre un mouchoir : il lui en demande raison. […] : Vos dieux n’ont point de bras à lancer le tonnerre, Gentils, ils ne sont tous que simulacres vains : C’est de l’or, de l’argent, du bois et de la pierre, Qui tient sa forme de vos mains.
Alors apparaîtront enfin des manuscrits, longue chaîne dont les anneaux se tiennent. […] Cependant, la papauté, dont les domaines s’étaient agrandis, devenait ou prétendait devenir l’arbitre de l’Europe ; ses milices, répandues partout, faisaient la loi au clergé séculier ; Boniface VIII allait bientôt proclamer qu’il tenait légitimement les deux glaives, et pouvait à son gré disposer des couronnes. […] On dirait qu’avant de se raviver aux sources antiques, l’esprit humain hésite, et se tient en suspens. […] Les jongleurs (de joculatores, faiseurs de tours) tenaient un rang inférieur.
Malheureux, qui voulaient être citoyens sans qu’il y eût de cité, et tenir leurs richesses de la main de leurs destructeurs ! […] La reine d’Espagne a appris à l’Europe un grand secret : c’est que les Indes, qu’on croyait attachées à l’Espagne par cent mille chaînes, ne tiennent qu’à un fil. […] Il a conservé l’accent gascon, qu’il tient de son pays, et trouve en quelque façon au-dessous de lui de s’en corriger. […] Je suis un peu partisan de la méthode, et je tiens que sans elle aucun grand ouvrage ne passe à la postérité. » Il se corrige ailleurs en ajoutant : « J’avoue que Montesquieu manque souvent d’ordre, malgré ses divisions en livres et en chapitres ; que quelquefois il donne une épigramme pour une définition, et une antithèse pour une pensée nouvelle ; qu’il n’est pas toujours exact dans ses citations ; mais ce sera à jamais un génie heureux et profond, qui pense et fait penser.
La première j’ai été bercée sur tes genoux, je t’ai donné mes caresses et j’ai reçu les tiennes. « — Eh bien, ma fille, me disais-tu, te verrons-nous bientôt au foyer d’un époux, heureuse, riche et florissante ? […] Devant de pareilles foules, un véritable orateur, à qui on eût laissé pleine carrière, eût été le maître des consciences ; il eût tenu dans ses mains la vie et la fortune de ses concitoyens ; il eût disposé de la justice. […] Ce n’est pas un philosophe ce Fabricius, qui montre aux Samnites ses oreilles, ses yeux, son nez, sa bouche, son gosier, son ventre, et qui leur dit : — « Tant que je tiendrai tout cela en bride, je n’aurai besoin de rien. […] Ceux que vous tenez en prison se sont déclarés les ennemis de la République, traitez-les en ennemis.
Ce nid ressemblait à une conque de nacre, contenant quatre perles bleues1 : une rose pendait au-dessus, tout humide ; le bouvreuil se tenait immobile sur un arbuste voisin, comme une fleur de poupre et d’azur. […] Quelquefois elle tient des fleurs naissantes dans sa main, quelquefois une coupe pleine d’une liqueur enchanteresse. […] Cette vie, que nous ne possédons jamais que par diverses parcelles qui nous échappent sans cesse, se nourrit et s’entretient d’espérance ; l’avenir, nous ne le tenons que par espérance, et jusques au dernier soupir, c’est l’espérance qui nous fait vivre : et puisque nous espérons toujours, c’est un signe très-manifeste que nous ne sommes pas dans le lieu où nous puissions posséder les choses que nous souhaitons.
Sûr désormais de tenir la vérité, il force à dessein ses couleurs, il sent qu’il triomphe, que la conscience de l’homme s’émeut, que la vérité va sortir de sa bouche. […] Tenez, prenez mes cantiques sacrés, Sacrés ils sont, car personne n’y touche : Avec le temps un jour vous les vendrez. […] La prétérition. — Autre moyen de sou tenir l’attention.
18° La suspension, après avoir tenu les auditeurs dans l'incertitude, les surprend par une pensée qu'ils n'avaient pas prévue. […] On dit : les emplois de Mars, pour les travaux de la guerre ; on eût pu dire de Roland, quand il tenait son épée : la mort est dans ses mains. […] Es-tu Jéhovah, le Dieu fort, Qui tient de soi son existence, Et que n'atteindra point la mort ? […] Le vaudeville est une espèce de comédie en prose mêlée de couplets ; il tient de la comédie et de l'opéra. […] On appelle hors-d'œuvre des morceaux qui ne tiennent pas au sujet que l'on traite.
On leur a trouvé à tous deux des défauts, mais on n’a pas vu ou dit encore que ces défauts, en apparence si opposés, sont exactement les mêmes, et tiennent, dans l’un comme dans l’autre écrivain, à la manie de sortir du ton de son sujet. […] Écoutons Fontenelle : « Tous deux ont été des génies du premier ordre, nés pour dominer sur les autres esprits, et pour fonder des empires ; tous deux, géomètres excellents, ont vu la nécessité de transporter la géométrie dans la physique ; tous deux ont fondé leur physique sur une géométrie qu’ils ne tenaient presque que de leurs propres lumières.
Ils tenaient d’une main de l’encens, et de l’autre des couronnes de fleurs. […] Il portait l’habillement des Barbares, et tenait une massue à la main. […] permets ce nom à un vieillard qui t’a vu naître et qui t’a tenu enfant dans ses bras ; songe au fardeau que t’ont imposé les dieux ; songe aux devoirs de celui qui commande, aux droits de ceux qui obéissent.
L’archevêque, en racontant ceci, disait : « Si j’avais tenu ce maraud-là, je lui aurais rompu les bras et coupé les oreilles4. » Une noce À sa fille J’ai été à cette noce de Madame de Louvois. […] Il monta à cheval le samedi à deux heures, après avoir mangé ; et, comme il avait bien des gens avec lui, il les laissa tous à trente pas de la hauteur où il voulait aller, et dit au petit d’Elbeuf : « Mon neveu, demeurez là : vous ne faites que tourner autour de moi, vous me feriez reconnaître. » M. d’Hamilton, qui se trouva près de l’endroit où il allait, lui dit : « Monsieur, venez par ici ; on tire du côté où vous allez. — Monsieur, lui dit-il, vous avez raison ; je ne veux point du tout être tué aujourd’hui, cela sera le mieux du monde. » Il eut à peine tourné son cheval qu’il aperçut Saint-Hilaire, le chapeau à la main, qui lui dit : « Monsieur, jetez les yeux sur cette batterie que je viens de faire placer là2. » M. de Turenne revint, et dans l’instant, sans être arrêté, il eut le bras et le corps fracassés du même coup qui emporta le bras et la main qui tenaient le chapeau de Saint-Hilaire. […] Le voilà donc mort, ce grand ministre, cet homme si considérable qui tenait une si grande place, dont le moi, comme dit M.
Il s’élève une question sur la nature des richesses ; et, comme il n’est pas nécessaire de tenir les choses pour en raisonner, n’ayant pas un sou, j’écris sur la valeur de l’argent et sur son produit net ; sitôt, je vois du fond d’un fiacre se baisser pour moi le pont d’un château fort, à l’entrée duquel je laissai l’espérance et la liberté. Que je voudrais bien tenir un de ces puissants de quatre jours, si légers sur le mal qu’ils ordonnent, quand une bonne disgrâce a cuvé son orgueil ! […] On me dit que, pendant ma retraite économique, il s’est établi dans Madrid un système de liberté sur la vente des productions, qui s’étend même à celle de la presse ; et que pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs.
Boileau a dit : Qu’en un lieu, qu’en un jour, un seul fait accompli Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli. […] Il y en a un autre qui nous cause du dépit, parce qu’il tient à un défaut qui prend sur notre amour-propre : tel est le sot orgueil. […] Le ridicule est encore chargé quand on fait contraster les travers entre eux, ou avec la raison droite et la décence, lorsqu’on fait figurer un jeune homme prodigue à côté d’un père avare ; lorsque, sur la même scène, on voit un homme sensé et un joueur de trictrac qui vient lui tenir des propos impertinents ; une femme ménagère, à côté d’une savante ; un homme poli et humain à côté d’un misanthrope. […] Les comédies d’intrigue, dit Destouches, dans la préface de l’Envieux, consistent dans un enchaînement d’aventures qui tiennent le spectateur en haleine, et forment un embarras qui croît toujours jusqu’au dénouement. […] Ces ouvrages tiennent, si l’on veut, à la littérature par le fond, par la charpente générale ; pour le reste, le talent du poète y est si peu de chose, qu’ils ne peuvent, quoi qu’on en ait dit, concourir que d’une manière bien secondaire à la gloire littéraire d’une nation ; toutefois, il était bon de les nommer, ne fût-ce que pour montrera flexibilité de l’esprit humain et sa fécondité d’invention pour tout ce qui contribue aux plaisirs d’une société civilisée.
De la vie Peu de gens, dit-on avec Érasme2, voudraient renaître aux mêmes conditions qu’ils ont vécu ; mais tel tient sa marchandise fort haute, qui en rabattrait beaucoup, s’il avait quelque espoir de conclure le marché. […] Vous nous redressez trop bien sur nos deux pieds pour cesser de vous tenir sur les vôtres. […] L’or des genêts et la pourpre des bruyères4 frappaient mes yeux d’un luxe qui touchait mon cœur ; la majesté des arbres qui me couvraient de leur ombre, la délicatesse des arbustes qui m’environnaient, l’étonnante variété des herbes et des fleurs que je foulais sous mes pieds, tenaient mon esprit dans une alternative continuelle d’observation et d’admiration : le concours de tant d’objets intéressants qui se disputaient mon attention, m’attirant sans cesse de l’un à l’autre, favorisait mon humeur rêveuse et paresseuse, et me faisait souvent redire en moi-même : « Non, Salomon dans toute sa gloire ne fut jamais vêtu comme l’un d’eux5. » Mon imagination ne laissait pas longtemps déserte la terre ainsi parée. […] La vie active n’a rien qui me tente ; je consentirais cent fois plutôt à ne jamais rien faire qu’à faire quelque chose malgré moi ; et j’ai cent fois pensé que je n’aurais pas vécu trop malheureux à la Bastille, n’y étant tenu à rien du tout qu’à rester là. […] Voilà, monsieur, je vous le jure, la véritable cause de cette retraite, à laquelle nos gens de lettres ont été chercher des motifs d’ostentation, qui supposent une constance, ou plutôt une obstination à tenir à ce qui me coûte, directement contraire à mon caractère naturel.
Quelquefois elle tient des fleurs naissantes dans sa main, quelquefois une coupe pleine d’une liqueur enchanteresse. […] Quand on a choisi ces derniers, il faut savoir s’y tenir et ne pas voltiger de livre en livre. […] En général, l’exposition doit être simple et promettre moins qu’elle ne tiendra. […] Il faut savoir tenir le milieu entre une négligence choquante et une recherche qui paraîtrait ridicule. […] Il vaut mieux s’en tenir à cette unité rigoureuse.
Il est un autre genre de pensées, qui se tiennent moins dans la généralité, et qui, appliquées aux sujets avec grâce, font toujours un excellent effet dans le style. […] Excepté des cas rares, comme la fatigue et le découragement, il ne faut pas les tenir sur la même ligne. […] Il faut s’en tenir aux choses que l’on a à se dire, lorsqu’elles ont été clairement exprimées. […] En décomposant les tableaux et descriptions, on ne tiendra aucun compte du fond ; toute l’attention se portera sur les ornements. […] La narration mixte est ainsi nommée parce qu’elle tient à la fois de l’histoire et de la fiction.
Qu’il y a cependant loin encore du pinceau d’Homère au burin énergique de Moïse, et quelle différence de l’homme poétiquement parfait, à la conception divine du créateur ; différence qui tient surtout à l’infériorité du trait primitif ! […] beautés qui n appartiennent point exclusivement, comme l’Iliade ou l’Énéide, à telle ou telle contrée, mais qui sont le patrimoine universel du genre humain, parce qu’Abraham, Jacob, Joseph, sont des hommes : au lieu qu’Achille, Hector, Priam, Ulysse, Agamemnon, sont des Grecs : beautés qui ne tiennent point absolument à l’idiome primitif, puisqu’elles sont belles et attachantes dans tous les idiomes ; au lieu qu’une grande partie du charme des poètes anciens dépend de l’harmonie du vers et du choix heureux de l’expression, mérite qui disparaît presque entièrement dans une traduction, quelque bien faite qu’elle soit d’ailleurs.
A suivre ce grand chef l’un et l’autre s’apprête ; Leur cœur semble allumé d’un zèle tout nouveau : Brontin tient un maillet, et Boirude un marteau. […] Ils atteignaient déjà le superbe portique Où Ribou le libraire, au fond de sa boutique, Sous vingt fidèles clefs3 garde et tient en dépôt L’amas toujours entier des écrits de Hainaut : 4 : Quand Boirude, qui voit que le péril approche, Les arrête, et tirant un fusil1 de sa poche, Des veines d’un caillou, qu’il frappe au même instant, Il fait jaillir un feu qui pétille en sortant ; Et bientôt, au brasier d’une mèche enflammée, Montre, à l’aide du soufre, une cire allumée2, Cet astre tremblotant3 dont le jour les conduit Est pour eux un soleil au milieu de la nuit. […] Mais le barbier, qui tient les moments précieux : « Ce spectacle n’est pas pour amuser nos yeux5, Dit-il, le temps est cher, portons-le6 dans le temple ; C’est là qu’il faut demain qu’un prélat7 le contemple. » Et d’un bras, à ces mots, qui peut tout ébranler, Lui-même, se courbant, s’apprête à le rouler.
beuuons6 ; ho, laissons toute melancholie ; apporte du meilleur, rince les verres, boute7 la nappe, chasse ces chiens, souffle ce feu, allume la chandelle, ferme cette porte, taille ces souppes8, enuoye9 ces pauures, bai’le10 leur ce qu’ilz demandent, tiens ma robbe, que ie me mette en pourpeinct11 pour mieux festoyer12 les commeres. […] Et si iamais ie te peuz tenir en notre chapitre9 à Myrebeau, tu auras du Miserere iusques à Vitulos10. […] « Je vous suis bien tenu de ce soin obligeant. » (Molière.)
Elle parle plus volontiers de ses plaisirs que de ses dégoûts ; elle tient plus à nous faire aimer les beautés des livres qu’à nous rendre trop délicats sur les défauts des écrivains. […] Quiconque a tenu une plume sait ce qu’il en coûte pour être goûté, ou seulement pour n’être pas rebuté. […] Que de fois la force d’esprit qui doit tenir toutes ces pièces rangées ne fléchit-elle point !
Souvent aussi la tragédie exprime avec simplicité ses douleurs : ainsi, Télèphe et Pélée, pauvres et bannis tous les deux, rejettent bien loin l’emphase et la pompe des grands mots, s’ils tiennent à éveiller la sympathie des spectateurs. […] A peine il sait bégayer quelques mots, et se tenir sur ses jambes, l’enfant brûle de jouer avec les enfants ; un rien le fâche, un rien l’apaise ; son humeur varie à chaque instant. […] Tenez-vous à ne faire parler ni un jeune homme en vieillard, ni un enfant en homme mûr : attachez-vous scrupuleusement à peindre les traits et la physionomie de chaque âge. […] Mais tenez, le voilà ; l’ours déchaîné a rompu les barreaux de sa loge. […] Mais, pour ceux qui tiendraient absolument à la leçon vulgaire, nous rétablissons dans la même note le texte de l’édition de Quicherat.
Ceux même qui lui ont contesté avec le plus d’acharnement la divinité de sa mission, n’ont jamais songé à lui disputer le grand art de savoir conduire les hommes ; et cet art-là tient nécessairement du prodige, quand on songe à ce qu’était le peuple hébreu, lorsque Moïse conçut le projet de le réduire en corps de nation, et l’espérance de voir cette nation tenir un jour un rang distingué.
Vous m’avez voulu faire passer pour simple traducteur, sous ombre de soixante et douze vers que vous marquez sur un ouvrage de deux mille, et que ceux qui s’y connoissent n’appelleront jamais de simples traductions ; vous avez déclamé contre moi, pour avoir tu1 le nom de l’auteur espagnol, bien que vous ne l’ayez appris que de moi, et que vous sachiez fort bien que je ne l’ai célé à personne, et que même j’en ai porté l’original en sa langue à Monseigneur le Cardinal votre maître et le mien ; enfin, vous m’avez voulu arracher en un jour ce que près de trente ans d’étude m’ont acquis ; il n’a pas tenu à vous que, du premier lieu où beaucoup d’honnêtes gens me placent, je ne sois descendu au-dessous de Claveret2 ; et pour réparer des offenses si sensibles, vous croyez faire assez de m’exhorter à vous répondre sans outrage, de peur, dites-vous, de nous repentir après, tous deux, de nos folies. […] Après tout, pour vous parler sérieusement, et vous montrer que je ne suis pas si piqué que vous pourriez vous l’imaginer, il ne tiendra pas à moi que nous ne reprenions la bonne intelligence du passé.
Tu disais en ton cœur avare : je tiens la mer sous mes lois, et les nations sont ma proie. […] mon père y tient l’urne fatale. […] La Suspension est une figure, par laquelle, pour piquer la curiosité du Lecteur, on tient quelque temps son esprit en suspens, et dans l’incertitude de ce qu’on va dire. […] Virgile s’en est tenu au signe de tête ; Ovide à l’agitation des cheveux ; et Horace au mouvement des sourcils.
Un excès de franchise nous rend souvent les victimes de la trahison et de la perfidie : la connoissance des hommes nous fait tenir, quand il le faut, dans les bornes de la circonspection. […] L’esprit, qu’on lui reproche de montrer, n’est pas un esprit recherché, il tient essentiellement aux choses ; c’est la pensée elle-même fortement colorée, revêtue de la seule image qui lui convenoit. […] Aussi, voit-on le guerrier, dont la conscience est tranquille, affronter avec bien plus d’audace et d’intrépidité, les périls et la mort : Nous avons parlé souvent ensemble du prince Eugène, qui, dans toutes ses expéditions militaires, portoit sur lui l’Imitation de Jésus-Christ ; de l’immortel et vertueux Turenne, qui étoit de l’exactitude la plus scrupuleuse à remplir tous ses devoirs de religion ; de ce grand Condé, qui, vainqueur dans les plaines de Rocroi, se prosterna au milieu du champ de bataille, pour rendre ses hommages et ses actions de grâces au Dieu des armées, qui seul tient en ses mains la balance des combats et la destinée des empires ; de ce grand Condé, qui, dans ses derniers momens, pour détruire les injustes soupçons que la calomnie avoit voulu jeter sur sa foi, crut devoir déclarer qu’il n’avoit jamais douté des mystères de la religion, quoi qu’on eût dit, et dont la mort fut tout à la fois, et celle du héros, et celle du parfait chrétien.