Tandis que Fontanes représentait auprès du grand écrivain le classique pur, qui corrige les écarts du goût, Joubert ne cessait de l’exciter de l’aiguillon, de lui ouvrir la carrière, d’accommoder les avis à ses ressources et à son originalité même. […] « Il n’y a qu’un pécheur larmoyant qui ait pu appeler la mort un squelette, dit, dans l’Intrigue et l’amour de Schiller, l’héroïne de la pièce, Louise, se préparant au suicide et l’excusant d’avance ; c’est un doux et aimable enfant, au visage rose comme le dieu de l’amour, mais moins trompeur ; un génie silencieux et secourable, qui offre son bras à l’âme fatiguée du pèlerin, qui la fait monter sur les degrés du temps, lui ouvre le magique palais, lui fait un signe amical et disparaît. » Cette définition de la mort ressemble, trait pour trait, à celle qu’en fait le P.
Un peu après s’ouvrira le salon de madame de Tencin, puis ceux de madame Geoffrin, de madame du Deffand, enfin de madame Necker. […] Descartes avait ouvert un abîme qu’il ne put combler entre la matière et l’esprit. […] J’ai le plaisir que les princes du sang y consentent, et que ceux des pairs à qui j’ai pu m’en ouvrir sont entrés dans mes sentiments et ont bien voulu même m’en prier. […] Il sort avec sa lumière, et, du ton le plus empressé, cogne à ma porte, que je suis obligé d’ouvrir en chemise. — Hélas ! […] Réagir vers 1780 contre la poésie artificielle d’un siècle qui, Rousseau excepté, n’avait guères, a-t-on dit, ouvert ses fenêtres que du côté du jardin et non sur les vrais champs, ce n’était pas là un mérite banal.
» Aussitôt une victime noire est immolée ; la prêtresse en ouvre les entrailles palpitantes pour y chercher des présages. […] Romulus n’a-t-il pas ouvert aux Sabins les portes de notre ville ? […] Enrôlez-vous donc sous les enseignes de Dieu : ouvrez-vous un chemin à travers les bataillons des Infidèles et sur les monceaux de leurs corps. […] Réfléchissez longtemps sur l’adoption d’un ami ; une fois décidé, ouvrez toute votre âme pour le recevoir ; parlez devant lui aussi franchement qu’à vous-même. […] Que ton cœur s’ouvre à la pitié ; demeure ici, sur cette tour, si tu ne veux laisser ta femme veuve et ton fils orphelin.
Ce tombeau s’ouvrirait, ces ossements se rejoindraient et se ranimeraient pour me dire : « Pourquoi viens-tu mentir pour moi qui ne mentis jamais pour personne ? […] C'est dans ce sens que Virgile a dit : Panduntur portæ, parce qu’une porte s’étend quand elle s’ouvre. — Aperire, ouvrir, découvrir. Aperire litteras, ouvrir une lettre. […] — Recludere (claudere retrò), montrer le dedans, ôter la clôture, ouvrir. […] Hor. — Patefacere (patens facere), ouvrir, faire une ouverture, donner jour, faire voir.
Mais s’il veut porter la conviction dans les esprits, la persuasion dans les cœurs, la consolation dans les âmes, qu’il ouvre les saintes écritures, qu’il se nourrisse, qu’il enrichisse, qu’il fortifie son éloquence de leur lecture : il sera sûr alors de toucher, de persuader et de convaincre.
De tels sujets pouvaient ne pas ouvrir une carrière très vaste au génie du poète ou de l’orateur ; mais ils n’offraient pas du moins à leur imagination les écarts dangereux qui devaient bientôt outrager l’éloquence, la langue et la raison.
Ce fut une fête pour la curiosité publique ; et ce succès toujours croissant, qui étonna la modestie d’un auteur désintéressé, lui ouvrit les portes de l’Académie en 1693. […] Une naissance auguste, un air d’empire et d’autorité, un visage qui remplisse la curiosité des peuples empressés de voir le prince6, et qui conserve le respect dans le courtisan ; une parfaite égalité d’humeur ; un grand éloignement pour la raillerie piquante, ou assez de raison pour ne se la permettre point1 : ne faire jamais ni menaces ni repròches ; ne point céder à la colère, et être toujours obéi ; l’esprit facile, insinuant ; le cœur ouvert, sincère, et dont on croit voir le fond, et ainsi très-propre à se faire des amis, des créatures et des alliés ; être secret toutefois, profond et impénétrable dans ses motifs et dans ses projets ; du sérieux et de la gravité dans le public ; de la brièveté, jointe à beaucoup de justesse et de dignité, soit dans les réponses aux ambassadeurs des princes, soit dans les conseils ; une manière de faire des grâces2 qui est comme un second bienfait ; le choix des personnes que l’on gratifie ; le discernement des esprits, des talents et des complexions3, pour la distribution des postes et des emplois ; le choix des généraux et des ministres ; un jugement ferme, solide, décisif dans les affaires, qui fait que l’on connaît le meilleur parti et le plus juste ; un esprit de droiture et d’équité qui fait qu’on le suit jusqu’à prononcer quelquefois contre soi-même en faveur du peuple, des alliés, des ennemis ; une mémoire heureuse et très-présente qui rappelle les besoins des sujets, leurs visages, leurs noms, leurs requêtes ; une vaste capacité qui s’étende non-seulement aux affaires de dehors, au commerce, aux maximes d’État, aux vues de la politique, au reculement des frontières par la conquête de nouvelles provinces, et à leur sûreté par un grand nombre de forteresses inaccessibles ; mais qui sache aussi se renfermer au dedans, et comme dans les détails4 de tout un royaume ; qui en bannisse un culte faux, suspect et ennemi de la souveraineté, s’il s’y rencontre ; qui abolisse des usages cruels et impies5, s’ils y règnent ; qui réforme les lois et les coutumes6, si elles étaient remplies d’abus ; qui donne aux villes plus de sûreté et plus de commodités par le renouvellement d’une exacte police, plus d’éclat et plus de majesté par des édifices somptueux ; punir sévèrement les vices scandaleux ; donner, par son autorité et par son exemple, du crédit à la piété et à la vertu ; protéger l’Église, ses ministres, ses droits, ses libertés1 ; ménager ses peuples comme ses enfants2 ; être toujours occupé de la pensée de les soulager, de rendre les subsides légers, et tels qu’ils se lèvent sur les provinces sans les appauvrir ; de grands talents pour la guerre ; être vigilant, appliqué, laborieux ; avoir des armées nombreuses, les commander en personne ; être froid dans le péril3, ne ménager sa vie que pour le bien de son État, aimer le bien de son État et sa gloire plus que sa vie ; une puissance très-absolue, qui ne laisse point d’occasion aux brigues, à l’intrigue et à la cabale ; qui ôte cette distance infinie4 qui est quelquefois entre les grands et les petits, qui les rapproche, et sous laquelle tous plient également ; une étendue de connaissances qui fait que le prince voit tout par ses yeux, qu’il agit immédiatement par lui-même, que ses généraux ne sont, quoique éloignés de lui, que ses lieutenants, et les ministres que ses ministres ; une profonde sagesse qui sait déclarer la guerre, qui sait vaincre et user de la victoire, qui sait faire la paix, qui sait la rompre, qui sait quelquefois, et selon les divers intérêts, contraindre les ennemis à la recevoir ; qui donne des règles à une vaste ambition, et sait jusqu’où l’on doit conquérir ; au milieu d’ennemis couverts ou déclarés, se procurer le loisir des jeux, des fêtes, des spectacles ; cultiver les arts et les sciences, former et exécuter des projets d’édifices surprenants ; un génie enfin supérieur et puissant qui se fait aimer et révérer des siens, craindre des étrangers ; qui fait d’une cour, et même de tout un royaume, comme une seule famille unie parfaitement sous un même chef, dont l’union et la bonne intelligence est redoutable au reste du monde. […] Prenez l’histoire, ouvrez, remontez jusques au commencement du monde, jusques à la veille de sa naissance : y a-t-il eu rien de semblable dans tous les temps ?
Cicéron ouvrait son cœur tout entier à ses plus intimes amis, et principalement à Atticus. […] Considérés comme une inspiration divine, ils ouvrent une vaste carrière à des discussions d’une tout autre nature. […] Il suffit d’ouvrir l’Ancien Testament pour s’en convaincre. […] Il séduit et frappe l’imagination, et ouvre une vaste carrière aux descriptions magnifiques et sublimes. […] Quiconque ouvre Homère doit songer qu’il va lire le plus ancien livre du monde après la Bible.
Aujourd’hui surtout que l’on nous donne en mille romans la monnaie du vieux poëme épique, comme en mille lithographies et en mille statuettes, celle de la peinture et de la sculpture, le plus mince fabricant de nouvelles croirait déroger en débutant tout bonnement comme les contes de fées : « Il était une fois un roi… ou un bûcheron. » Ouvrez le premier roman venu, vous êtes sûr d’y trouver, après un titre plus ou moins prétentieux, quelque chose comme ceci : « Vers la fin du mois d’octobre dernier, un jeune homme entra dans le Palais-Royal… » ou, pour varier : « Vers la fin du mois de septembre 1800, un étranger arriva devant le palais des Tuileries… » ou bien : « Assez, Caroline, voici la nuit ; remettons à demain vos réflexions sur cette lecture… » ou encore : « Voyez ce brick ! […] Il en est de son discours comme des deux pièces de Corneille, Attila et Othon, qui s’ouvrent par des expositions magnifiques auxquelles la suite ne répond pas.
Trésor inépuisable d’observation et d’expérience, son livre, ouvert à n’importe quelle page, nous offre partout et toujours des pensées profondes, exprimées d’une façon durable, et se détachant avec ce relief qui les grave dans la mémoire. […] Questeur après la mort de Caligula, exilé sous Claude, rappelé par Agrippine, précepteur et ministre de Néron, il finit par être impliqué dans la conjuration de Pison, et dut s’ouvrir les veines en 16 après J.
Ouvrons au hasard le livre de ses fables. […] Ménalque descend son escalier, ouvre la porte pour sortir ; il la referme ; il s’aperçoit qu’il est en bonnet de nuit ; et venant à mieux s’examiner il se trouve rasé à moitié ; il voit que son épée est mise du côté droit, que ses bas sont rabattus sur ses talons, et que sa chemise est par-dessus ses chausses.
*** Que les cachots vidés s’ouvrent partout d’eux-même, Que de Dieu dans le temple on rétablit l’emblème. […] Mon cœur pour la sauver vous ouvrait une voie ; Mais vous ne demandez, vous ne cherchez que Troie, Je vous fermais le champ où vous voulez courir : Vous le voulez, partez ; sa mort va vous l’ouvrir.
Des régions immenses qui s’ouvrent tout à coup ; un nouveau monde inconnu à l’ancien et plus grand que lui5. […] Où est-elle cette pure et douce lumière qui non-seulement éclaire les yeux ouverts, mais qui ouvre les yeux fermés, qui guérit les yeux malades, qui donne des yeux à ceux qui n’en ont pas pour la voir, enfin qui inspire le désir d’être éclairé par elle, et qui se fait aimer par ceux mêmes qui craignaient de la voir ? […] Pour moi, qui étais privé de le voir depuis tant d’années, je lui parle, je lui ouvre mon cœur, je crois le trouver devant Dieu ; et quoique je l’aie pleuré amèrement, je ne puis croire que je l’aie perdu.
Ouvrez Milton : …………………………… Eh !
L’éloquence est un asile qui ne doit s’ouvrir que pour la vertu : c’est un port salutaire, mais qui doit être constamment fermé aux pirates (Quint.
Dans sa correspondance à la fois militaire, politique, diplomatique et intime, nous voyons tour à tour le chef de parti, le roi reconnu par une moitié de la France, combattu par l’autre, le vainqueur, le souverain populaire, mais surtout l’homme lui-même nous offrant toujours le parfait modèle d’un caractère habile et chevaleresque, d’un naturel ouvert et généreux, d’une imagination preste et originale.
Tout à coup la porte de la salle s’ouvre, et l’on voit entrer l’évêque, vieillard de soixante et dix ans. […] Il ouvre : l’étranger entre. […] L’offrande est reçue avec plaisir ; mais les portes de l’Éden ne s’ouvrent pas. […] L’Éden s’ouvre pour lui. […] Paris ouvrit ses portes à Henri IV le 22 mars 1594.
D’Aguesseau veut prouver que la science étend et enrichit l’esprit : il rapproche, par un dénombrement vif et animé, les différentes sources d’agrandissement qu’elle lui ouvre : Par elle, l’homme ose franchir les bornes étroites dans lesquelles il semble que la nature l’ait renfermé. […] Ainsi, un général vient de mourir : le temple s’ouvre, ses voûtes retentissent d’accents lugubres ; tout à coup ils sont interrompus, un ministre paraît dans la chaire de vérité ; on l’entend s’écrier : Ils meurent donc comme le reste des hommes, ces héros couverts de gloire, ces foudres de guerre qui ont fait trembler les peuples, ces arbitres de la paix qui ont fait cesser leurs terreurs17, etc. […] Les Romains, suivant Polybe, ouvrirent cette carrière à l’éloquence la même année qu’ils abolirent la royauté pour établir le gouvernement républicain, c’est-à-dire 509 ans avant J. […] Ils ont des avis à ouvrir, des sentiments à proposer, à faire prévaloir, des représentations à faire, des dépêches à expédier, des conférences à soutenir, des mesures et des résolutions à prendre, des obstacles à lever, enfin des mémoires, des conventions, des traités à dresser29.
« Ajoutez, dit Quintilien, que la nature leur a donné des larmes, qui s’ouvrent impétueusement un passage dans la douleur et coulent doucement dans la joie : ils ont un grand pouvoir quand ils sont immobiles, ils en ont bien davantage quand ils sont en mouvement.
Tandis que sonnait le tocsin de la Saint-Barthélemy, une troupe armée vint le menacer dans son asile ; ses serviteurs voulant la repousser, il s’y opposa : « Si la petite porte ne suffit pas, s’écria-t-il, qu’on ouvre la grande. » Il ne devait pas survivre au crime qu’il avait prévu.
Mais peut-être y faut-il moins chercher un parti pris que le résumé d’une expérience amère, et les souvenirs d’un temps où l’esprit de faction ouvrit carrière à des intérêts égoïstes, et coalisés par la mauvaise foi.
Joubert disait : « Il faut toujours avoir dans la tête un coin ouvert et libre, pour y donner une place aux opinions de ses amis, et les y loger en passant. […] Joubert disait : « Il faut toujours avoir dans la tête un coin ouvert et libre, pour y donner une place aux opinions de ses amis, et les y loger en passant.
Irais-je, par d’indignes brigues, M’ouvrir des palais fastueux, Languir dans de folles fatigues, Ramper à replis tortueux Dans de puériles intrigues, Sans oser être vertueux ? […] La première est dans le genre noble et sublime ; c’est l’ode proprement dite, qui, suivant Boileau 267, Élevant jusqu’au ciel son vol ambitieux, Entretient dans ses vers commerce avec les Dieux : Aux athlètes dans Pise268 elle ouvre la barrière, Chante un vainqueur poudreux au bout de la carrière. […] Il nous a ouvert les trésors de la poésie : il faut qu’il en étale à nos yeux toute la richesse et toute la magnificence ; qu’il nous élève, nous transporte, nous enchante par le sublime des sentiments, la hardiesse des pensées, l’énergie et la pompe des expressions, et par tous les charmes d’une harmonie soutenue et toujours ravissante. […] Environné de lumière, Cet astre ouvre sa carrière, Comme un époux glorieux, Qui, dès l’aube matinale, De sa couche nuptiale Sort brillant et radieux. […] Ainsi de cris et d’alarmes, Mon mal semblait se nourrir ; Et mes yeux noyés de larmes Étaient lassés de s’ouvrir.
Je me pare des fleurs qui tombent de sa main ; Il ne fait que l’ouvrir, et m’en remplit le sein. […] — A peine le soleil fait ouvrir les boutiques ! […] Il est évident que les mots les plus agréables à l’oreille sont ceux qui sont formés de sons doux et coulants, où les voyelles et les consonnes sont heureusement mélangées, où deux consonnes rudes ne se heurtent point, où l’on ne trouve pas trop de voyelles consécutives qui forment un hiatus et forcent d’ouvrir la bouche d’une manière pénible. […] Des cieux, sur leurs gonds d’or, s’ouvrent les vastes portes, Et rendent en s’ouvrant des sons harmonieux ; Les célestes concerts sont moins mélodieux. […] Rois, soyez attentifs ; peuples, ouvrez l’oreille : Que l’univers se taise et m’écoute parler !
L’on peut voir dans les admirables Institutions de Quintilien, que s’il s’occupe de former avec soin et d’orner l’esprit de son jeune élève, il met bien plus d’attention encore et de sollicitude à ouvrir son âme à toutes les vertus, persuadé avec raison qu’il en fera aisément un orateur habile, quand il en aura fait un citoyen vertueux.