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57. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Nous devons travailler à nous rendre très-dignes de quelque emploi : le reste ne nous regarde point ; c’est l’affaire des autres. […] Si vous le saluez quelquefois, c’est le jeter dans l’embarras de savoir s’il doit rendre le salut ou non ; et, pendant qu’il délibère, vous êtes déjà hors de portée. […] quelle force invincible et accablante des témoingnages rendus successivement et pendant trois siècles entiers par des millions de personnes les plus sages, les plus modérées qui fussent alors sur la terre, et que le sentiment d’une même vérité soutient dans l’exil, dans les fers, contre la vue de la mort et du dernier supplice ! […] Voilà, direz-vous, une étrange manière de les rendre heureux. Que pourrait-on faire de mieux pour les rendre malheureux ?

58. (1882) Morceaux choisis de prosateurs et de poètes des xviii e et xix e siècles à l’usage de la classe de rhétorique

Le rendraient-elles plus courageux, plus juste, plus libéral ? […] On ne peut rendre les mines ni les contenances des assistants. […] Des honneurs exceptionnels lui furent rendus. […] Il est impossible de rendre ses compositions ; il faut les voir. […] qu’un jour, une heure, un instant, pouvaient le rendre mortel ?

59. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXV. des figures. — figures par développement et par abréviation  » pp. 353-369

Sans doute, vous vous rappelez bien des périphrases pour rendre ces mots : il fait nuit ; comparez-les ensemble, et, si elles appartiennent à de vrais écrivains, vous remarquerez comment elles se modifient d’après l’analogie des idées, d’après la nature des sentiments, et enfin d’après le caractère des ouvrages ; car ce sont là les trois influences auxquelles doit obéir la périphrase. […] J’ajouterai avec presque tous mes prédécesseurs l’exemple de la Fontaine dans la fable du Charlatan : Ce charlatan se vantait d’être En éloquence un si grand maître, Qu’il rendrait disert un badaud, Un manant, un rustre, un lourdaud ; Oui, messieurs, un lourdaud, un animal, un âne. Que l’on m’amène un âne, un âne renforcé, Je le rendrai maitre passé… Vous remarquez dans ces deux derniers exemples une sorte de crescendo dans la synonymie. […] Voudriez-vous me rendre mon fer ? […] Je demandais à un ami ce que signifiaient, à son sens, deux vers où Delille décrit les travaux de certains prisonniers : Et d’un art inventif l’élégante merveille S’en va rendre plus pure ou la bouche ou l’oreille.

60. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre V. De la disposition. »

« Jetez les yeux de toutes parts : voilà tout ce qu’a pu la magnificence et la piété pour honorer un héros : des titres, des inscriptions, vaines marques de ce qui n’est plus ; des figures qui semblent pleurer autour d’un tombeau, et des fragiles images d’une douleur que le temps emporte avec tout le reste ; des colonnes qui semblent vouloir porter jusqu’au ciel le magnifique témoignage de notre néant ; et rien ne manque dans tous ces donneurs que celui à qui on les rend. […] « Pour moi, s’il m’est permis, après tous les autres, de venir rendre les derniers devoirs à ce tombeau, ô prince, le digne objet de nos louanges et de nos regrets, vous vivrez éternellement dans ma mémoire ; votre image y sera tracée, non point avec cette audace qui promettait la victoire ; non, je ne veux rien voir en vous de ce que la mort y efface ; vous aurez dans cette image des traits immortels ; je vous y verrai tel que vous étiez à ce dernier Jour, sous la main de Dieu, lorsque sa gloire sembla commencer à vous apparaître. […] Au lieu de déplorer la mort des autres, grand prince, dorénavant je veux apprendre de vous à rendre la mienne sainte : heureux si, averti par ces cheveux blancs da compte que je dois rendre de mon administration, je réserve au troupeau que je dois nourrir de la parole de vie, les restes d’une voix qui tombe et d’une ardeur qui s’éteint. » Bossuet. […] …… Venez, famille désolée, Venez, pauvres enfants qu’on veut rendre orphelins, Venez faire parler vos esprits enfantins3. […] Ce ne sont point, Messieurs, de ces faux amis du jour, esclaves de la fortune, et toujours prêts à nous abandonner dans l’adversité ; martyrs généreux de l’amitié, on les voit s’échapper de l’asile doré de l’opulence, où l’on veut les retenir captifs, et mi, où comme tant de parasites qui sont loin de les valoir, ils seraient traités magnifiquement, pour retourner dans l’humble galetas du pauvre auquel ils sont attachés par un lien que l’amitié rend indissoluble.

61. (1879) L’art d’écrire enseigné par les grands maîtres

Voilà les cinq règles qui forment tout ce qu’il y a de nécessaire pour rendre les preuves convaincantes, immuables, et pour tout dire géométriques ; et les huit règles ensemble les rendent encore plus parfaites. […] Ils n’ont, dit-il, rendu leurs citoyens que riches, puissants, belliqueux, et ils en ont été ensuite maltraités. […] C’est là ce qui rend l’action si puissante, et qui la faisait mettre par Démosthène au-dessus de tout. […] Et moi je comprends bien ce qui vous rend si incrédule : c’est que vous jugez de ceci par une expérience commune. […] Le style rend singulières les choses les plus communes, fortifie les plus faibles, donne de la grandeur aux plus simples.

62. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bourdaloue, 1632-1704 » pp. 133-137

Ce qui fit un héros du prince de Condé J’appelle le principe de ces grands exploits cette ardeur martiale qui ; sans témérité ni emportement, lui faisait tout oser et tout entreprendre ; ce feu qui, dans l’exécution, lui rendait tout possible et tout facile ; cette fermeté d’âme que jamais nul obstacle n’arrêta, que jamais nul péril n’épouvanta, que jamais nulle résistance ne lassa, ni ne rebuta ; cette vigilance que rien ne surprenait ; cette prévoyance à laquelle rien n’échappait ; cette étendue de pénétration avec laquelle, dans les plus hasardeuses occasions, il envisageait d’abord tout ce qui pouvoit ou troubler, ou favoriser l’événement des choses : semblable à un aigle dont la vue perçante fait en un moment la découverte de tout un vaste pays ; cette promptitude à prendre son parti, qu’on n’accusa jamais en lui de précipitation, et qui, sans avoir l’inconvénient de la lenteur des autres, en avait toute la maturité ; cette science qu’il pratiquait si bien, et qui le rendait si habile à profiter des conjonctures, à prévenir les desseins des ennemis presque avant qu’ils fussent conçus, et à ne pas perdre en vaines délibérations ces moments heureux qui décident du sort des armées ; cette activité que rien ne pouvait égaler, et qui, dans un jour de bataille, le partageant, pour ainsi dire, et le multipliant, faisait qu’il se trouvait partout, qu’il suppléait à tout, qu’il ralliait tout, qu’il maintenait tout : soldat et général tout à la fois, et, par sa présence, inspirant à tout le corps d’armée, jusqu’aux plus vils membres qui le composaient, son courage et sa valeur, ce sang-froid qu’il savait si bien conserver dans la chaleur du combat, cette tranquillité dont il n’était jamais plus sûr que quand on en venait aux mains, et dans l’horreur de la mêlée ; cette modération et cette douceur pour les siens, qui redoublaient à mesure que sa fierté pour l’ennemi était émue ; cet inflexible oubli de sa personne, qui n’écouta jamais la remontrance, et auquel constamment déterminé, il se fit toujours un devoir de prodiguer sa vie, et un jeu de braver la mort ; car tout cela est le vif portrait que chacun de vous se fait, au moment que je parle, du prince que nous avons perdu ; et voilà ce qui fait les héros1. […] Massillon a dit : « L’ambition, ce désir insatiable de s’élever au-dessus et sur les ruines même des autres ; ce ver qui pique le cœur et ne le laisse jamais tranquille ; cette passion qui est le grand ressort des intrigues et de toutes les agitations des cours, qui forme les révolutions des États, et qui donne tous les jours à l’univers de nouveaux spectacles ; cette passion qui ose tout, et à laquelle rien ne coûte, rend malheureux celui qui en est possédé. « L’ambitieux ne jouit de rien : ni de sa gloire, il la trouve obscure ; ni de ses places, il veut monter plus haut ; ni de sa prospérité, il sèche et dépérit au milieu de son abondance ; ni des hommages qu’on lui rend, ils sont empoisonnés par ceux qu’il est obligé de rendre lui-même ; ni de sa faveur, elle devient amère dès qu’il faut la partager avec ses concurrents ; ni de son repos, il est malheureux à mesure qu’il est obligé d’être plus tranquille. » 1.

63. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Buffon, 1707-1788 » pp. 282-302

Buffon se rendait le témoignage « de n’avoir pas mis dans ses discours un seul terme dont il ne pût rendre compte ». […] C’est en cela que consiste la sévérité du style ; c’est aussi ce qui en fera l’unité et ce qui en réglera la rapidité ; et cela seul aussi suffira pour le rendre précis et simple, égal et clair, vif et suivi. […] Grand Dieu, dont la seule présence soutient la nature et maintient l’harmonie des lois de l’univers ; vous qui du trône immobile de l’empyrée voyez rouler sous vos pieds toutes les sphères célestes sans choc et sans confusion ; qui du sein du repos reproduisez à chaque instant leurs mouvements immenses, et seul régissez dans une paix profonde ce nombre infini de cieux et de mondes ; rendez, rendez enfin le calme à la terre agitée ! […] Les Indiens, frappés de l’éclat et du feu que rendent les couleurs de ces brillants oiseaux, leur avaient donné les noms de rayons ou cheveux du soleil… Les petites espèces sont au-dessous de la grande mouche asile2 pour la grandeur, et du bourdon pour la grosseur. […] Ils inspirent de la confiance pour celui qui s’en sert à rendre ses pensées plus sensibles.

64. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Notes pour l’intelligence des exemples cités dans ce second volume. »

Les Athéniens lui décernèrent une couronne d’or, lui rendirent tous ses biens, et quelque temps après, le nommèrent généralissime de leurs troupes. […] Agamemnon la lui ayant refusée, l’armée des Grecs fut frappée de la peste, qui ne cessa qu’au moment où la jeune captive fut rendue à son père. […] Elle confirma sur ce point la loi Valéria, rendue vers l’an de Rome 245, environ 507 avant J.-C. ; la loi des douze tables, rendue vers l’an de Rome 304, environ 448 ans avant J. […] Cette chute rendit Vulcain boiteux, ce qui n’empêcha pas qu’il n’épousât Vénus, déesse de la beauté.

65. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

Un coup d’œil plus réfléchi sur les productions vraiment estimables de nos grands maîtres, leur apprendrait que c’est en se formant à l’école des anciens, qu’ils se sont rendus dignes de former à leur tour des élèves, et des rivaux de leur gloire et de leurs succès. […] Vous jouirez de tous les biens qui peuvent rendre les hommes heureux, et vous en jouirez sans trouble. […] Que tous ceux qui se rendront à votre invitation, reçoivent de vous les dons que l’on a coutume de distribuer aux funérailles de l’homme opulent. […] Un trépas généreux n’est-il pas préférable mille fois à l’opprobre d’une existence qui nous rend les jouets éternels de l’orgueil et du caprice des autres ? […] j’ai pu rendre Annibal favorable à mon fils, et je ne pourrai rien sur mon fils pour Annibal !

66. (1883) Morceaux choisis des classiques français (prose et vers). Classe de troisième (nouvelle édition) p. 

Reprenez-la, je suis heureux de vous la rendre. […] Il n’y a pas l’écrivain plus propre à rendre le pauvre superbe. […] On lui criait : « Rends-toi ! » Il répondit : « Rendez-moi mon Dieu, » et il expira ainsi. […] J’ai cru n’avoir au ciel que des grâces à rendre.

67. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre III. Des ornements du style » pp. 119-206

Dans la suite, le plaisir et l’agrément l’ont rendu commun. […] Dans ces sortes de figures, les mots sont employés de manière à rendre la pensée plus frappante en lui donnant plus de grâce, plus de noblesse ou plus de force. […] Exemples : Rendre l’homme au bonheur, c’est le rendre à la vie. […] 4° Le concours et l’enchaînement de mots pesants et rudes qui rendent le style embarrassé et rocailleux. […] La suppression d’un membre rend la phrase inintelligible.

68. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bossuet, 1627-1704 » pp. 89-123

S’il ignore la rhétorique, s’il méprise la philosophie, Jésus-Christ lui tient lieu de tout ; et son nom qu’il a toujours à la bouche, ses mystères qu’il traite si divinement, rendront sa simplicité toute-puissante. […] Mais voici un nouvel hommage qu’elle rend à son céleste illuminateur. […] Voilà le mot de l’énigme, voilà le dégagement de tout l’embarras : la foi nous a rendus à nous-mêmes, et nos faiblesses honteuses ne peuvent plus nous cacher notre dignité naturelle. […] Quoique nos ruines respirent encore quelque air de grandeur, nous n’en sommes pas moins accablés dessous ; notre ancienne immortalité ne sert qu’à nous rendre plus insupportable la tyrannie de la mort ; et quoique nos âmes lui échappent, si cependant le péché les rend misérables, elles n’ont pas de quoi se vanter d’une éternité si onéreuse. […] Quand on possède de pareils écrivains, n’est-ce pas une religion de leur rendre l’honneur qui leur est dû, celui d’une étude régulière et approfondie ? 

69. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Fénelon, 1651-1715 » pp. 178-204

Son empressement pour faire admirer son esprit me paraîtrait le rendre indigne de toute admiration. […] Le plaisir n’y doit être mêlé que pour faire le contre-poids des mauvaises passions, et pour rendre la vertu aimable. […] Jamais prince ne fut plus sage pour policer les peuples et pour les rendre tout ensemble bons et heureux. […] Les vertus rendent constamment heureux ceux qui les ont. Elles rendent meilleurs ou forcent au respect ceux mêmes qui les voient et ne les ont pas.

70. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre IV. Beautés morales et philosophiques. »

Sans cela, n’aurait-il pas rendu à l’homme le plus déplorable des services, en lui ôtant jusqu’aux illusions qui amusent son infortune réelle ? […] Il faut donc les rendre, autant que possible, d’une exécution assez facile, pour qu’ils ne rebutent point la faiblesse, et qu’ils laissent la mauvaise volonté sans excuse comme sans objection. […] Quel bien vaut le bonheur de rendre un homme heureux ! […] ) Il y a là un charme d’abandon et de sensibilité, bien heureusement rendu par M.  […] et que deviendrait la société, si cette étrange philosophie était celle de tous ceux qui peuvent se rendre utiles à leurs semblables ?

71. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Racine. (1639-1699.) » pp. 83-90

Ainsi, lorsque, dans les âges suivants, on parlera avec étonnement des victoires prodigieuses et de toutes les grandes choses qui rendront notre siècle l’admiration de tous les siècles à venir, Corneille, n’en doutons point, Corneille tiendra sa place parmi toutes ces merveilles. […] Jamais prince n’observa si religieusement sa parole ; il l’a toujours exactement tenue à ses ennemis mêmes : et dans la paix d’Aix-la-Chapelle1, il aima mieux, en rendant la Franche-Comté, renoncer à la plus glorieuse et à la plus utile de ses conquêtes que de manquer à la parole qu’il avait donnée de la rendre. […] Les Français, il y a quinze ans, passaient pour n’avoir aucune connaissance de la navigation ; ils pouvaient à peine mettre en mer six vaisseaux de guerre et quatre galères : maintenant la France compte dans ses ports vingt-six galères et cent vingt gros vaisseaux, et un nombre prodigieux d’autres bâtiments ; elle s’est rendue si savante dans la marine, qu’elle donne aujourd’hui aux étrangers et des pilotes et des matelots. […] Corneille avait rendu riches les libraires et les comédiens sans l’être devenu lui-même. […] Voltaire rend ce même témoignage à Louis XIV dans sa lettre à milord Hervey, que l’on trouvera dans les Morceaux choisis à l’usage de la classe de seconde.

72. (1866) Cours élémentaire de rhétorique et d’éloquence (5e éd.)

En voici un exemple : Ce qui nous rend heureux est aimable : Or la vertu nous rend heureux, Donc la vertu est aimable. […] Non, vous ne vous rendrez pas complices des entreprises qu’on ose former contre la vérité. […] Ne serait-il pas absurde de rendre l’entrée d’un tombeau aussi riante que celle d’un jardin ? […] Ce fut par sa douceur : 1º douceur patiente qui lui rendit tout supportable ; 2º douceur entreprenante et agissante qui lui rendit tout possible. […] Qu’un jour, une heure, un instant pouvaient le rendre mortel ?

73. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome II (3e éd.)

Il faut alors n’avoir égard qu’au sens, parce qu’il y aurait plus d’inconvénient à le rendre obscur ou inintelligible qu’à rendre le vers un peu moins harmonieux. […] Toutes deux concourent à rendre un historien intéressant et instructif. […] Les Indiens, les Persans et les Arabes se rendirent célèbres par leurs contes. […] Quelques exemples vont rendre ces règles générales plus sensibles. […] Sa simplicité, rendue littéralement, deviendrait platitude dans nos langues modernes.

74. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Silvestre de Sacy. Né en 1801. » pp. 522-533

N’aura-t-elle pas plus de services à rendre ? […] J’étais stoïcien avec Sénèque ; j’aurais voulu être le parfait citoyen avec Cicéron, l’homme juste, généreux, aimable, n’usant de son éloquence que pour défendre les faibles ou pour soutenir l’État contre les factieux : une douce chaleur se répandait dans mon âme et me rendait meilleur en me faisant croire à la vertu, au désintéressement, à l’héroïsme. […] le christianisme aurait rendu un bien triste service au monde en le désabusant de tout ce qu’il aimait, s’il ne lui avait pas proposé quelque chose de plus grand et de plus solide à aimer ! Rendez-moi le soleil de la Grèce, les jeux, les combats des héros, ces temples où l’homme vouait un culte à son image divinisée par le ciseau d’un Phidias ; rendez-moi les sages se complaisant dans leur sagesse, et s’étudiant à se mettre par la force de leur âme au-dessus des accidents de la fortune et de la colère du ciel ; un Platon pénétrant jusque dans le sanctuaire des idées éternelles ; un Aristote embrassant dans sa vaste science la morale, la politique, tous les secrets de l’art et de la nature ; un Caton disposant de sa vie pour échapper à l’oppression ; un Socrate buvant la ciguë d’une âme calme et sereine, bien sûr que s’il y a des dieux, ce sont des dieux bons ; rendez-moi toutes les illusions, toutes les chimères du monde antique, si vous n’avez rien à mettre à la place qu’une sèche et désespérante anatomie des petitesses du cœur ! […] quel plaisir de ne se sentir pas tiraillé, au milieu de ces enivrantes études, par l’affaire qui vous rappelle à la maison, de ne pas porter au fond de l’âme l’idée importune de l’ennui qui vous a donné rendez-vous pour ce soir ou pour demain, et qui ne sera, hélas !

75. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre IX. Parallèle des Oraisons funèbres de Condé, par Bossuet et de Turenne, par Fléchier et Mascaron. »

quelle fatale influence te porta à répandre tant de sang, et à perdre tant de vaillants hommes, qui eussent pu te rendre maîtresse de l’Europe ! […] Ce ne sont pas seulement des hommes à combattre : ce sont des montagnes inaccessibles, ce sont des ravines et des précipices, d’un côté ; c’est, de l’autre, un bois impénétrable, dont le fond est un marais, et derrière, des ruisseaux, de prodigieux retranchements : ce sont partout des forts élevés et des forêts abattues qui traversent des chemins affreux ; et au-dedans, c’est Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de succès et de la prise de Fribourg : Merci, qu’on ne vit jamais reculer dans les combats ; Merci, que le prince de Condé et le vigilant Turenne n’ont jamais surpris dans un mouvement irrégulier, et à qui ils ont rendu ce grand témoignage, que jamais il n’avait perdu un seul moment favorable, ni manqué de prévenir leurs desseins, comme s’il eût assisté à leurs conseils. […] On s’attribue une supériorité de puissance et de force ; on se couronne de ses propres mains ; et lors même qu’on rend à Dieu de solennelles actions de grâces, et qu’on tend aux voûtes sacrées de ses temples les drapeaux déchirés et sanglants qu’on a pris sur les ennemis, qu’il est dangereux que la vanité n’étouffe une partie de la reconnaissance, et qu’on ne retienne au moins quelques grains de cet encens qu’on va brûler sur les autels » ! […] Rendait-il compte d’une bataille : il n’oubliait rien, sinon que c’était lui qui l’avait gagnée. Racontait-il quelques-unes de ces actions qui l’avaient rendu si célèbre : on eût dit qu’il n’en avait été que le simple spectateur, et l’on doutait si c’était lui qui se trompait ou la renommée

76. (1867) Rhétorique nouvelle « Tableau des arguments » pp. 306-

Prenons cet exemple banal qui traîne dans tous les traités : Il faut aimer ce qui nous rend heureux, Or la Vertu nous rend heureux, Donc il faut aimer la Vertu. […] Au lieu de dire dogmatiquement : Il faut aimer ce qui nous rend heureux, Or la Vertu, etc. Il dit : La Vertu nous rend heureux, Il faut aimer la Vertu. […] Si la majeure ou la mineure lui paraît devoir laisser des doutes dans l’esprit, il la rend évidente par une démonstration.

77. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre II. Des différentes espèces de Discours Oratoires. »

Mais la troisième est une loi de consolation et de douceur, qui nous rend ses préceptes les plus rigoureux en apparence, aisés à pratiquer, parce qu’elle nous conduit, non par la crainte, mais par l’amour, etc. […] Qui le rendait si intrépide et si fier dans les combats ? […] Chez les Grecs, on faisait publiquement l’éloge des grands hommes, qui avaient rendu quelque service important à la patrie. […] Les sentiments vertueux et vraiment patriotiques dont ses discours portent l’empreinte en rendent surtout l’auteur bien estimable. […] L’abbé d’Olivet a bien mieux rendu ses Philippiques.

78. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Préface. »

Je commence par déclarer que le but de cet ouvrage est de rendre la composition facile aux élèves ; mais que je n’ai point l’intention de m’astreindre au mécanisme auquel on soumet ordinairement les traités de Rhétorique. […] Sans art, leurs compositions ressembleraient à des ébauches informes ; leur talent est comme un fer contourné et battu par le premier travail du forgeron, mais qu’il faut limer pour le rendre luisant et poli, ou comme un diamant brut qu’il faut tailler à cent facettes, pour le rendre éclatant de mille feux. […] Si, dans un plaidoyer, outre la discussion du fait et du droit, vous avez loué ou blâmé, conseillé ou dissuadé, mais d’une manière telle que vous ayez captivé notre attention et commandé nos éloges, nous vous rendrons grâces.

79. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Notes pour l’intelligence des exemples cités dans ce premier volume. » pp. 365-408

Elle ajoute que sa mère le plongea dans les eaux du Styx, fleuve des enfers, pour le rendre invulnérable, et qu’il le fut eu effet, excepté au talon, par lequel elle le tenait. […] Nommé gouverneur de l’Italie dès que César s’en fut rendu le maître, il commanda l’aile gauche de son armée à la bataille de Pharsale. […] Ce prince s’étant rendu à Fontainebleau pour voir la duchesse, sa petite-fille, qui avait la petite vérole, y mourut, en 1686, âgé de 65 ans. […] Ce qui le rend non moins célèbre dans l’histoire, c’est sa frugalité, sa générosité, sa franchise, sa droiture, son désintéressement. […] Elle est située entre l’Adda et le Tessin, d’où l’on a tiré deux canaux ; ce qui la rend très commerçante.

80. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Deuxième partie. Préceptes des genres. — Chapitre second. De la narration. »

— Tous les détails de cette définition concourent à rendre sensible aux yeux une idée abstraite par elle-même : ils contribuent donc à la clarté. […] Qu’un interlocuteur ne cède à l’ autre que par la nécessité de convenir de ses torts ; c’est ce qui rendra le dialogue animé et intéressant. […] il se rend familier. […] Cette heureuse infraction aux lois du dialogue permet au poète de rendre plus vives et plus frappantes les apostrophes de l’interlocuteur qui parle seul. […] On ne peut trop admirer tous ces mots qui font image et rendent sensibles aux yeux les magnificences du désert.

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