Le goût exquis craint le trop en tout, sans en excepter l’esprit même. […] Combien un homme est-il au-dessus de ce qu’on nomme esprit, quand il ne craint point d’en cacher une partie ! […] Un serpent qui se glisse entre les fleurs est plus à craindre qu’un animal sauvage qui s’enfuit vers sa tanière, dès qu’il vous aperçoit. […] Il faut que les bons vous aiment, que les méchants vous craignent, et que tous vous estiment. […] Je crains pour vous les discussions d’affaires, et tous les objets qui réveillent votre douleur.
On le vit, en ce dernier rang de la milice, ne refuser aucune fatigue et ne craindre aucun péril ; faire par honneur ce que les autres faisaient par nécessité, et ne se distinguer d’eux que par un plus grand attachement au travail et par une plus noble application à tous ses devoirs3. […] nous savions tout ce que nous pouvions espérer, et nous ne pensions pas à ce que nous devions craindre. […] Je viens vous faire admirer un homme qui ne se détourna jamais de ses devoirs, qui, pour maintenir la raison, se roidit contre la coutume, qui n’eut jamais d’autre intérêt que celui de la vérité et de la justice, et qui, ayant eu part à toutes les prospérités du siècle3, n’en a point eu à ses corruptions ; un homme d’une vertu antique et nouvelle, qui a su joindre la politesse du temps à la bonne foi de nos pères, en qui la fortune n’a fait que donner du crédit au mérite, qui a sanctifié l’honneur et la probité par les règles et les principes du christianisme, qui s’est élevé par une austère sagesse au-dessus des craintes et des complaisances humaines, et qui, toujours prêt à donner à la vertu les louanges qui lui sont dues, a fait craindre à l’iniquité le jugement et la censure ; vaillant dans la guerre, savant dans la paix ; respecté, parce qu’il était juste ; aimé, parce qu’il était bienfaisant ; et quelquefois craint, parce qu’il était sincère et irréprochable… Ne craignez point que l’amitié ou la reconnaissance me préviennent.
Craindrais-tu les reproches de la postérité ? […] Lui seul était à craindre, lui seul, et encore tant qu’il restait à Rome. […] Je crains que ceux qui n’ont pas vu les choses par eux-mêmes ne m’accusent d’en exagérer la beauté. […] Je vous comprends : cependant il n’est pas homme à craindre tous ceux qui habitent le bord de la mer. […] le danger qu’il avait à craindre de perdre la tête et la vie ?
Cependant Hermione, qui avait dû épouser Pyrrhus, outragée par la passion que ce prince a ressentie pour Andromaque, n’a pas craint de confier au fils d’Agamemnon, à Oreste qui l’aime, le soin de la venger. […] Il respecte en Pyrrhus l’honneur du diadème ; Il respecte en Pyrrhus Achille et Pyrrhus même : Il craint les Grecs, il craint l’univers en courroux ; Mais il se craint, dit-il, soi-même plus que tous. […] Non, non, il les verra triompher sans obstacle ; Il se gardera bien de troubler ce spectacle : Je sais de quels remords son courage est atteint ; Le lâche craint la mort, et c’est tout ce qu’il craint. […] Sorti de l’école de Port-Royal, Racine s’était déjà annoncé comme poëte distingué par ses deux premières pièces, la Thébaïde ou les Frères ennemis, et Alexandre, lorsqu’il fit son véritable avénement dans la tragédie par Andromaque (1667), qui a marqué, après le Cid, la seconde époque de la gloire du théâtre français. — Voltaire n’a pas craint d’appeler admirable cette pièce dont le sujet est tiré du IIIe livre de l’Eneïde de Virgile (v. 301-332), et où l’auteur a imité aussi en quelques passages l’Andromaque d’Euripide.
Ceux que Dieu a mieux partagés de ses grâces auront peut-être des desseins plus relevés ; mais je crains bien que celui-ci ne soit déjà que trop hardi pour plusieurs. […] Que si vous craignez les hivers du septentrion, dites-moi quelles ombres, quel éventail, quelles fontaines vous pourraient si bien préserver à Rome des incommodités de la chaleur5, comme un poêle et un grand feu vous exempteront ici d’avoir froid. […] Si c’est pour votre propre intérêt, il est certain que vous la pouvez mieux réparer que l’autre, en ce que l’acquisition d’un fidèle ami peut autant valoir que l’amitié d’un bon frère1 ; et si c’est pour l’intérêt de celui que vous regrettez, comme sans doute votre générosité ne vous permet pas d’être touché d’autre chose, vous savez qu’il n’y a aucune raison ni religion qui fasse craindre du mal après cette vie à ceux qui ont vécu en gens d’honneur, mais qu’au contraire l’une et l’autre leur promettent des joies et des récompenses. […] Il craint d’être déçu dans son espérance.
L’enfer s’émeut au bruit de Neptune en furie : Pluton sort de son trône, il pâlit, il s’écrie : Il a peur que ce Dieu, dans cet affreux séjour, D’un coup de son trident ne fasse entrer le jour ; Et, par le centre ouvert de la terre ébranlée, Ne fasse voir du Styx la rive désolée, Ne découvre aux mortels cet empire odieux, Abhorré des mortels, et craint même des dieux5. […] La terre au loin gémit, le jour fuit, le ciel gronde, Et l’Africain tremblant craint la chute du monde. […] Nous avons déjà cité le mot sublime de César au pilote que la tempête effrayait : Que crains-tu ? […] S’il faut qu’elle consente au vent qui nous menace, La tempête pour moi vaut mieux que la bonace : Et ce courroux des flots, ce péril que tu crains, Nuit à mes ennemis, et sert à mes desseins. […] Abhorré des mortels, et craint même des dieux.
Le peuple, paisible dans ses foyers au milieu des siens, et dans le sein d’une grande ville où il n’a rien à craindre ni pour ses biens ni pour sa vie, respire le feu et le sang, s’occupe de guerres, de ruines, d’embrasements et de massacres ; souffre impatiemment que des armées qui tiennent la campagne ne viennent point à se rencontrer ; ou, si elles sont une fois en présence, qu’elles ne combattent point ; ou, si elles se mêlent, que le combat ne soit pas sanglant, et qu’il y ait moins de dix mille hommes sur la place1. […] L’on craint la vieillesse, que l’on n’est pas sûr de pouvoir atteindre. L’on espère de vieillir, et l’on craint la vieillesse ; c’est-à-dire, l’on aime la vie et l’on fuit la mort. C’est plus tôt fait de céder à la nature et de craindre la mort, que de faire de continuels efforts, s’armer de raisons et de réflexions, et être continuellement aux prises avec soi-même pour ne la pas craindre.
Pour accomplir vos volontés et faire craindre vos jugements, votre puissance renverse ceux que votre puissance avait élevés. […] Que n’ont-elles pas à craindre de leur amour-propre ? […] Soumis avec respect à sa volonté sainte, Je crains Dieu, cher Abner, et n’ai point d’autre crainte. […] Mais qu’il n’ait point d’autre crainte ; qu’il ne craigne point la puissance et la fureur d’une Reine impie, ambitieuse et vindicative, c’est un courage dont les âmes les plus fortes et les plus élevées sont seules capables. […] C’est Zénobie qui parle à Rhadamisthe : Je connais la fureur de tes soupçons jaloux ; Mais j’ai trop de vertu pour craindre mon époux.
Ce qui est le plus à craindre, mademoiselle, c’est qu’après cette injustice on en entreprendra d’autres2. […] La France, que vous venez de mettre à couvert de tous les orages qu’elle craignait, s’étonne qu’à l’entrée de votre vie vous ayez fait une action dont César eût voulu couronner toutes les siennes, et qui redonne aux rois vos ancêtres autant de lustre que vous en avez reçu d’eux. […] C’était Pinchesne, maltraité par Boileau, qui, au contraire, admirait beaucoup Voiture ; car il n’a pas craint, dans un de ses vers, de le mettre à côté d’Horace.
. — Craignez, monsieur, ce défaut qui serait la source de tant d’autres. […] toi-même qui jouis maintenant d’une jeunesse si vive et si féconde en plaisirs, souviens-toi que ce bel âge n’est qu’une fleur qui sera presque aussitôt séchée qu’éclose : tu te verras changer insensiblement ; les grâces riantes, les doux plaisirs qui t’accompagnent, la force, la santé, la joie s’évanouiront comme un beau songe ; il ne t’en restera qu’un triste souvenir ; la vieillesse languissante et ennemie des plaisirs viendra rider ton visage, courber ton corps, affaiblir tes membres, faire tarir dans ton cœur la source de la joie, te dégoûter du présent, te faire craindre l’avenir, te rendre insensible à tout, excepté à la douleur. […] Vous vous imaginiez donc, Monsieur, être plus que moi ; quelques valets, sans doute, vous l’auront dit ; et moi, je ne crains pas de vous dire, puisque vous m’y forcez, que je suis plus que vous. […] Conseils à son neveu contre la mollesse Ce que vous avez le plus à craindre, monsieur, c’est la mollesse et l’amusement. […] Un serpent qui se glisse entre les fleurs est plus à craindre qu’un animal sauvage qui s’enfuit vers sa tanière, dès qu’il vous aperçoit.
Cependant, quoique ma vie ait été un enchaînement continuel de prospérités, j’ai toujours craint que l’avenir ne me réservât quelque revers funeste : et cette idée m’a sauvé des séductions de l’orgueil, et des excès d’une joie immodérée. […] Est-il quelqu’un qu’on craigne plus d’offenser, que celui dont le frère est puissant ? […] Si donc les choses sont comme je le pense, si l’âme survit en effet au corps qu’elle abandonne, faites, par respect pour la mienne, ce que vous recommande aujourd’hui ma tendresse : si je suis dans l’erreur, si l’âme reste et périt avec le corps, craignez, du moins, craignez les dieux qui ne meurent point, qui voient tout, qui peuvent tout, qui entretiennent dans l’univers un ordre immuable dont la magnificence et la majesté sont au-dessus de l’expression ; craignez, dis-je, les immortels, et que cette crainte vous empêche de rien faire, de rien dire, de rien penser même qui puisse blesser la piété et la justice. Après les dieux, craignez les hommes en général, et les races futures.
Comment se faire craindre, sans se mettre en danger d’être haï, et bien souvent abandonné ? […] nous savions tout ce que nous pouvions espérer, et nous ne pensions pas à ce que nous devions craindre. […] Pour accomplir vos volontés, et faire craindre vos jugements, votre puissance renverse ceux que votre puissance avait élevés.
Pendant qu’avec un air assuré il s’avance pour recevoir la parole de ces braves gens, ceux-ci, toujours en garde, craignent la surprise de quelque nouvelle attaque ; leur effroyable décharge met les nôtres en furie. […] Car ne vous imaginez pas que cet homme soit un dieu qui jouisse d’une félicité fixe et immuable, Il est craint, bat, envié, et par ceux-là mêmes qui paraissent les plus dévoués à ses intérêts. […] C’est ainsi que l’ombre d’Arcésius termine son discours à Télémaque ; il lui parle du châtiment des mauvais rois : Crains donc, mon fils, crains une condition si périlleuse : arme-loi de courage contre toi-même., contre les passions et contre les flatteurs.
Le temps, ce dépôt précieux que le Seigneur nous a confié, est donc devenu pour nous un fardeau qui nous pèse et nous fatigue : nous craignons, comme le dernier des malheurs, qu’on ne nous en prive pour toujours ; et nous craignons presque comme un malheur égal d’en porter l’ennui et la durée : c’est un trésor que nous voudrions pouvoir éternellement retenir, et que nous ne pouvons souffrir entre nos mains. Nous regarderions comme un insensé dans le monde un homme, lequel héritier d’un trésor immense, le laisserait dissiper faute de soins et d’attentions, et n’en ferait aucun usage, ou pour s’élever à des places et à des dignités qui le tireraient de l’obscurité, ou pour s’assurer une fortune solide, et qui le mît pour l’avenir dans une situation à ne plus craindre aucun revers. […] Une démarche où la circonspection la plus attentive devrait encore craindre de se méprendre est toujours l’ouvrage des amusements et des goûts puérils de l’enfance : à peine commence-t-on à bégayer, qu’on décide déjà de l’affaire la plus sérieuse de la vie ; et ces paroles irrévocables qui prononcent sur notre destinée sont les premières qu’on nous apprend à former, avant même qu’on nous ait appris à les entendre ; on accoutume de loin notre esprit naissant à ces images suggérées ; le choix d’un état n’est plus qu’une impression portée de l’enfance ; ainsi, avant que nos penchants soient développés, et que nous sachions ce que nous sommes, nous nous formons des engagements éternels, et arrêtons ce que nous devons être pour toujours.
Craignez, Romains, craignez que le ciel quelque jour Ne transporte chez vous les pleurs et la misère, En mettant en nos mains, par un juste retour, Les armes dont se sert sa vengeance sévère, Il ne vous fasse en sa colère Nos esclaves à votre tour. […] Craint de tout l’univers, il vous faudra tout craindre, Toujours punir, toujours trembler dans vos projets, Et pour vos ennemis compter tous vos sujets.
Quelque brillantes que soient les couleurs qu’il emploie, quelques beautés qu’il sème dans les détails, comme l’ensemble choquera, ou ne se fera pas assez sentir, l’ouvrage ne sera point construit… C’est par cette raison que ceux qui écrivent comme ils parlent, quoiqu’ils parlent bien, écrivent mal ; que ceux qui s’abandonnent au premier feu de leur imagination prennent un ton qu’ils ne peuvent soutenir ; que ceux qui craignent de perdre des pensées isolées, fugitives, et qui écrivent en différents temps des morceaux détachés, ne les réunissent jamais sans transitions forcées ; qu’en un mot il y a tant d’ouvrages faits de pièces de rapport, et si peu qui soient fondus d’un seul jet. » Les interruptions, les repos, les sections peuvent être utiles au lecteur, elles le délassent et lui indiquent les temps d’arrêt, mais il ne doit pas y en avoir dans l’esprit de l’auteur. […] Nous saisissons mal la liaison entre cette idée : « Ils ne craignent pas un public qui les craint et qui les respecte, et, à la honte du siècle, ils se flattent avec raison qu’on a pour leurs passions les mêmes égards que pour leurs personnes, » et celle-ci : « Ainsi,… ceux qui leur sont soumis se vengent de la servitude par la liberté des discours ; les grands se croient tout permis, et l’on ne pardonne rien aux grands. » Encore une fois, Massillon a parfaitement raison, il énonce une vérité, et une vérité bonne à dire ; mais assurément ses prémisses, au lieu d’amener cette conséquence, semblaient en promettre une toute contraire. […] Ils ne craignent pas un publie qui les craint et qui les respecte ; et, à la honte du siècle, ils se flattent avec raison qu’on a pour leurs passions les mêmes égards que pour leur personne.
Quand je pourrois me faire craindre, j’aimerois encores mieulx me faire aimer : il y a tant de sortes de defaults en la vieillesse, tant d’impuissance, elle est si propre au mespris6, que le meilleur acquest7 qu’elle puisse faire, c’est l’affection et amour des siens. […] A sa suite est un cabinet assez poly12, capable à recevoir du feu pour l’hyver, tresplaisamment percé1 : et si ie ne craignois non plus le soing que la despense, le soing qui me chasse de toute besongne2, i’y pourrois facilement couldre à chaque costé une gallerie de cent pas de long et douze de large, à plain pied, ayant trouvé touts les murs montez, pour aultre usage, à la haulteur qu’il me fault. […] Et ne crains pour elle, qu’elle mesme. Et crains pour elle, autant certes, que pour autre piece11 de cet estat.
Fuyez comme la mort, et pour vous et pour elles, tout ce qui n’est que pour orner, élever et contenter l’esprit ; craignez la science qui enfle le cœur ; ne cherchez que la charité qui édifie. […] Ne craignez point que des filles instruites avec cette simplicité soient incapables de vivre dans le monde ; et quand en effet Dieu les y appellerait, il ne faut2 pas moins leur inspirer la haine du monde, puisque Jésus-Christ l’a maudit à cause de ses scandales : la charité vaut mieux que toute la politesse du siècle. […] Ne craignez ni de m’offenser ni de m’importuner.
Craignez-vous de confier une épée à Eumène ? […] Lorsque vous régnerez, mettez toute votre gloire à renouveler l’âge d’or ; écoutez tout le monde, croyez peu de gens ; gardezvous bien de vous croire trop vous-même : craignez de vous tromper, mais ne craignez jamais de laisser voir aux autres que vous avez été trompé. […] « Craignez-vous d’affronter les périls de la guerre ? […] Craignez-vous que de nouvelles troupes de barbares ne s’opposent à notre marche ? […] Chez eux commande la loi qui est leur maîtresse souveraine ; ils la craignent bien plus que vos sujets ne vous redoutent vous, leur maître !
Saint Paul et ses compagnons furent à peine arrachés des mains du peuple par les magistrats, qui craignirent qu’il n’arrivât de plus grands désordres dans ce tumulte. […] Point d’ami intime qui ne craigne Dieu, et que les pures maximes de la religion ne gouvernent en tout ; autrement il vous perdra, quelque bonté de cœur qu’il ait. […] Cela me fait trembler : je crains furieusement que l’on ne croie que les bêtes aient parlé, comme elles font dans mes apologues. […] Je rougis de me taire et je crains de parler ! […] Jusqu’à quand voulez-vous que l’empereur vous craigne ?
Mais un homme possédera-t-il sans trouble la gloire d’être plus craint que les dieux (on parlait ainsi en ce temps-là) ? […] Cette conduite est bientôt découverte ; elle se fait toujours craindre et ne mène jamais aux grandes choses. […] Sous l’horreur des tourments je crains de succomber. […] Dieu même a craint la mort. […] On ne peut craindre trop pour le salut des rois.
Voltaire, qui écrivait dans un temps et chez un peuple observateur bien plus scrupuleux des bienséances, n’a pas craint de comparer, dans sa Henriade, les troupes françaises à une meute de chiens : sûr de la justesse de la comparaison et du rapport vrai des idées, il ne restait plus qu’à ennoblir les détails par la richesse et l’harmonie de la diction ; et c’est l’art des grands poètes. […] 142Mortels qui jugez vos semblables, Rois qu’à la terre j’ai donnés, Rois devenus si formidables Par vos projets désordonnés ; Instruisez-vous dans ma justice, Si vous voulez que j’affermisse Vos droits par la révolte enfreints ; Pour mériter que l’on vous aime, Aimez, servez, craignez vous-même Le Dieu par qui vous êtes craints. […] Le pauvre, sous ce défenseur, Ne craindra plus que l’oppresseur Lui ravisse son héritage : Et le champ qu’il aura semé Ne deviendra plus le partage De l’usurpateur affamé.
Ce royaume n’avait que deux sortes d’ennemis qu’il dût craindre, les huguenots et les Espagnols. […] Il faut que les bons vous aiment, que les méchants vous craignent, et que tous vous estiment. […] Combien un homme est-il au-dessus de ce qu’on nomme esprit, quand il ne craint pas d’en cacher une partie ! […] Les pères de famille espèrent la longueur de ma vie comme celle de leurs enfants : les enfants craignent de me perdre, comme ils craignent de perdre leur père. […] Il se contentait de ne les pas craindre, et d’engager tout le monde à s’y précipiter pour lui avec ardeur.
Mais s’il est à propos de réduire à sa juste valeur le néant de l’homme et de tout ce qui l’environne, il est à craindre cependant que le découragement ne résulte bientôt de cette première idée, et que la conviction profonde de cette vérité que nous ne sommes rien ici-bas, ne nous fasse perdre de vue ce que nous devons être un jour dans une autre patrie. […] « Il faut donc penser qu’outre le rapport que nous avons, du côté du corps, avec la nature changeante et mortelle, nous avons d’un autre côté un rapport intime avec Dieu, parce que Dieu même a mis quelque chose en nous qui peut confesser la vérité de son être, en adorer la perfection, en admirer la plénitude ; quelque chose qui peut se soumettre à sa toute-puissance, s’abandonner à sa haute et incompréhensible sagesse, se confier en sa bonté, craindre sa justice, espérer en son éternité. — Il faut, par la suite du même raisonnement, que ce qui porte en nous sa marque divine, ce qui est capable de s’unir à Dieu y soit aussi rappelé. […] Fidèle en ses paroles, incapable de déguisement, sûre à ses amis, par la lumière et la droiture de son esprit, elle les mettait à couvert des vains ombrages, et ne leur laissait à craindre que leurs propres fautes.