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96. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VI. De l’élocution et du style. »

Le langage peint l’homme : il vient de l’abondance du cœur. […] La naïveté est un sentiment qui a l’air d’échapper au cœur, de se trahir ingénument et sans réflexion. […] La délicatesse dans le style est comme la finesse de la sensibilité ; car si la finesse tient à l’esprit, la délicatesse tient au cœur. […] Mais outre cette justesse absolue, mathématique, qui convient surtout aux sciences, il y a encore une justesse relative qui suffit au cœur. […] Pourtant, il faut avouer que le langage du cœur et de l’imagination a des charmes non moins persuasifs que celui de la raison.

97. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Chapitre II. Des petits Poèmes. »

Assurément il veut faire entendre que deux cœurs unis par le sentiment, cessent bientôt de l’être, après qu’ils se sont liés par le mariage. […] Les jeunes gens surtout doivent pour se former le cœur et le goût, les lire, et les relire sans cesse. […] Il faut que le cœur seul parle dans l’élégie. […] Le cœur fournit les sentiments ; l’imagination les met en œuvre, et leur prête son coloris et ses grâces. […] Emporté par la fougue de son imagination brûlante, et par les mouvements de son cœur vivement ému, il prend un essor rapide, et chante tout à coup sur un ton élevé.

98. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Origine et principe des beaux-arts »

Il faut qu’ils soient parfaits en eux-mêmes, pour qu’ils plaisent à notre esprit ; voilà le beau ; qu’ils aient un rapport intime avec nous, pour qu’ils intéressent notre cœur ; voilà le bon. […] Voilà le bon, qui a un rapport intime avec nous, qui intéresse notre cœur. […] S’il ajoute que les actions de ce monarque ont produit le bonheur de ses sujets, il nous présentera le bon qui intéressera notre cœur. […] Il est vrai que l’âme de ce scélérat, ainsi décrite, inspire à notre cœur le plus vil mépris, l’aversion la plus forte.

99. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — D’Aguesseau. (1668-1751.) » pp. 124-129

[Notice] Né à Limoges en 1668, d’une ancienne et honorable famille, François d’Aguesseau eut le bonheur de trouver dans son père un excellent maître qui forma également son cœur et son esprit. […] Vous venez, mon cher fils, d’achever le cercle ordinaire de l’étude des humanités et de la philosophie ; vous l’avez rempli avec succès : je vous en félicite de tout mon cœur, je m’en félicite moi-même, ou plutôt nous devons l’un et l’autre en rendre grâces à Dieu, de qui viennent tous les biens dans l’ordre de la nature comme dans celui de la grâce… L’étude de la religion, mon fils, doit être le fondement, le motif et la règle de toutes les autres. […] Vous ne sauriez mieux réussir à l’éviter qu’en vous attachant aux deux vues générales que je viens de vous marquer : l’une, de vous convaincre toujours de plus en plus du bonheur que vous avez d’être né dans la seule véritable religion, en vous appliquant à considérer les caractères éclatants qui en démontrent la vérité ; l’autre, de vous remplir le cœur et l’esprit des préceptes qu’elle renferme, et qui sont la route assurée pour parvenir au souverain bien, que les anciens philosophes ont tant cherché et que la religion seule peut nous faire trouver. […] Il sera donc fort important pour vous d’avoir fait de bonne heure un grand fonds de religion, et de vous être mis hors d’état de pouvoir être ébranlé ou même embarrassé par des objections qui ne paraissent spécieuses à ceux qui les proposent que parce qu’elles flattent l’orgueil de l’esprit ou la dépravation du cœur, qui voudraient pouvoir se mettre au large, en secouant le joug de la religion.

100. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre V. — Qualités particulières du Style »

Tel est ce mot de madame de Sévigné à, sa fille : J’ai mal à votre poitrine ; expression de génie, si l’on peut appeler ainsi ce que le cœur a inventé. […] Un froid mortel glace ses sens, roidit ses nerfs, et, pénétrant jusqu’à son cœur, en arrête le mouvement ; il n’est plus qu’un cadavre étendu sur la neige et blanchissant au souille du nord. […] Mémoire précieuse du cœur, céleste reconnaissance, c’est par toi que les amitiés se perpétuent, que la pauvreté cesse d’être envieuse, et qu’un noble dévouement vient habiter le sein du mortel dont un bras secourable a relevé la misère ! […] Napoléon a les Hautes-Alpes à franchir ; et le grand Saint-Bernard, qui, de tous les points de la vaste chaîne, lui livrerait de plus près le cœur de l’Italie, est aussi celui où la nature a semblé réunir le plus de difficultés insurmontables pour défendre ses forteresses contre les conquérants. […] Celui qui était près de périr me semblait de bénédictions, et je consolais le cœur de la veuve.

101. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Il ne voit rien dans de si faibles avantages qui soit assez bon et assez solide pour remplir son cœur, et pour mériter ses soins et ses désirs ; il a même besoin d’efforts pour ne les pas trop dédaigner. […] Ces vérités amères nous font voir une blessure vive dans le cœur de La Bruyère ; il prend sa revanche contre les sots importants. […] « Loin de nous les héros sans humanité, s’écrie Bossuet ; ils pourront bien forcer les respects et ravir l’admiration comme font tous les objets extraordinaires, mais ils n’auront pas les cœurs. » (Oraison funèbre du prince de Condé.) […] On lit, dans les Mémoires historiques de Louis XIV : « La moindre marque de mépris qu’un prince donne d’un particulier fait au cœur de cet homme une plaie incurable. » Bossuet exprime la même idée : « Que votre puissance ne vous emporte pas à des moqueries insolentes. […] On lit dans Racine : Il faut désormais que mon cœur, S’il n’aime avec transport, haïsse avec fureur.

102. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Voltaire. (1694-1778.) » pp. 277-290

    Mayenne en ce moment, inquiet, abattu, Dans son cœur étonné cherche en vain sa vertu3 : Soit que, de son parti connaissant l’injustice, Il ne crùt point le ciel à ses armes propice ; Soit que l’âme, en effet, ait des pressentiments, Avant-coureurs certains des grands événements. […] ) Ce généreux Français, qui vous est inconnu, Par la gloire amené des rives de la France, Venait de dix chrétiens payer la délivrance : Le soudan, comme lui gouverné par l’honneur, Croit, en vous délivrant, égaler son grand cœur. […] Que d’un bonheur si grand mon cœur se sent toucher ! […] Je te vois dans mes bras et pleurer et frémir ; Sur ton front pâlissant Dieu met le repentir : Je vois la vérité dans ton cœur descendue ; Je retrouve ma fille après l’avoir perdue, Et je reprends ma gloire et ma félicité En dérobant mon sang à l’infidélité1. […] Vers imité de Boileau, Lutrin, V, 230 : Dans son cœur éperdu cherche en vain du courage.

103. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Boileau 1636-1711 » pp. 401-414

Rien n’est beau que le vrai Un cœur noble est content de ce qu’il trouve en lui, Et ne s’applaudit point des qualités d’autrui1. […] Ce n’est pas que leurs sons, agréables, nombreux, Soient toujours à l’oreille également heureux ; Qu’en plus d’un lieu le sens n’y gêne la mesure, Et qu’un mot quelquefois n’y brave la césure4 : Mais c’est qu’en eux le vrai, du mensonge vainqueur, Partout se montre aux yeux et va saisir le cœur ; Que le bien et le mal y sont prisés au juste ; Que jamais un faquin n’y tint un rang auguste, Et que mon cœur, toujours conduisant mon esprit, Ne dit rien aux lecteurs qu’à soi-même il n’ait dit. […] Plein du feu qu’en son cœur souffla l’Esprit divin, Il terrassa Pélage, il foudroya Calvin ; De tous les faux docteurs confondit la morale : Mais, pour fruit de son zèle, on l’a vu rebuté, En cent lieux opprimé par leur noire cabale, Errant, pauvre, banni, proscrit, persécuté ; Et même par sa mort leur fureur mal éteinte N’aurait jamais laissé ses cendres en repos, Si Dieu lui-même ici de son ouaille sainte A ces loups dévorants n’avait caché les os1. […] Regnier, satire v, avait dit : Croissant l’âge en avant, sans soin de gouverneur, Relevé, courageux, et cupide d’honneur, Il se plaist aux chevaux, aux chiens, à la campaigne, Facile au vice, il hait les vieux et les dédaigne : Rude à qui le reprend, paresseux à son bien, Prodigue, dépensier, il ne conserve rien, Hautain, audacieux, conseiller de soi-même, Et d’un cœur obstiné se heurte à ce qu’il aime. […] Racine a consacré au docteur Arnauld les vers suivants : Sublime en ses écrits, doux et simple de cœur, Puisant la vérité jusqu’en son origine, De tous ses longs combats Arnauld sortit vainqueur, Et soutint de la foi l’antiquité divine ; De la grâce il perça les mystères obscurs, Aux humbles pénitens traça des chemins sûrs, Rappela le pécheur au joug de l’Évangile.

104. (1843) Nouvelle rhétorique, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes (7e éd.)

Que l’orateur paraisse avoir à cœur nos intérêts, il n’est pas possible alors que nous ne soyons de son avis. […] Il vous dira que toute la force de la parole ne doit tendre qu’à mouvoir les ressorts cachés que la nature a mis dans le cœur des hommes. […] On voit un homme qui porte la patrie dans le cœur ; il ne cherche pas à plaire, mais à être utile : c’est le bons sens qui parle sans autre ornement que sa force. […] S’il te reste au fond du cœur le moindre sentiment de vertu, viens, que je t’apprenne à aimer la vie. […] Catilina, né d’une famille patricienne, eut en partage la force du corps et de l’âme, mais un esprit méchant, un cœur pervers.

105. (1867) Rhétorique nouvelle « Première partie. L’éloquence politique » pp. 34-145

ses faveurs, toutes funestes qu’elles sont, sont réputées si chères à tous les cœurs haut placés, qu’il trouve toujours de nouveaux chefs, aussi prêts à lui offrir leurs services que lui à les oublier. […] Parce qu’avant même qu’un honnête homme ait ouvert la bouche, son caractère a déjà parlé pour lui et ouvert les cœurs à la persuasion. […] La sympathie vraie a un accent inimitable qui va droit au cœur parce qu’il sort du cœur. […] Mais la solennité imposante de ce début était tempérée par une modestie qui lui conciliait tous les cœurs. […] Il faut enflammer les cœurs après avoir éclairé les esprits ; il faut achever par la passion l’œuvre du raisonnement.

106. (1863) Principes de rhétorique et de littérature appliqués à l’étude du français

Celle-ci se trouve partout, jusque dans le reste et dans le regard, à plus forte raison dans un mot ou dans un cri du cœur. […] Pauline combat l’ardeur du martyre qui l’a chassée du cœur de Polyeucte. […] Tout cela doit se faire d’une manière simple et naturelle, sans étude et sans affectation ; l’air, l’extérieur, le geste, le ton, le style, tout doit respirer je ne sais quoi de doux et de tendre, qui parte du cœur et qui aille droit au cœur. […] sous un beau semblant de ferveur si touchante Cacher un cœur si double, une âme si méchante ? […] Chacun sait par cœur celle de Camille.

107. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre V. Du Roman. »

La fin que l’écrivain doit s’y proposer, est d’instruire sous le voile de la fiction, de polir l’esprit et de former le cœur, en présentant un tableau de la vie humaine. […] Il s’agit d’abord d’inventer des événements qui soient peu ordinaires, mais vraisemblables ; qui intéressent, attachent le lecteur ; et qui amènent des peintures vraies du cœur humain, des divers mouvements qui l’agitent, et des différentes passions qui le tyrannisent dans les différentes circonstances de la vie. […] Ceux qu’on met au nombre des meilleurs, sont Zaïde et la princesse de Clèves par madame de La Fayette ; faits avec goût, écrits avec décence, et bien propres à entretenir dans les cœurs l’amour de la vertu : Les Mémoires d’un homme de qualité, le Doyen de Killerine, et autres de l’abbé Prévost ; pleins des situations les plus attendrissantes ou les plus terribles, et qui décèlent l’imagination la plus féconde ; mais où quelquefois les événements ne s’accordent pas assez avec la vraisemblance : Gil Blas 130, le Diable boiteux et autres de Lesage 131 ; ils offrent un tableau de tous les états de la vie, le portrait ou la satire du monde : Le Paysan parvenu de Marivaux, très plaisant.

108. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre V. Beautés oratoires. »

… Je vous afflige, je le vois, en vous tenant ce langage, parce que vous connaissez mon cœur ; vous savez qu’il est pur du sang qui a été versé, et que les pusillanimes considérations du danger ne m’ont jamais empêché de vous dire la vérité. […] à qui nous avons cru plus utile encore de donner des leçons de morale, que de citer des modèles d’éloquence, apprenez de bonne heure et n’oubliez jamais, que l’esprit est essentiellement faux, le goût essentiellement dépravé, quand le cœur est corrompu ; et le cœur est corrompu, quand rien de bon ou d’utile n’y a germé dans l’enfance, ou que ces germes précieux ont été tristement étouffés, dans la suite, par la séduction des mauvais exemples et l’empire des mauvaises habitudes. Nous avons tâché de vous prouver, dans le cours de cet ouvrage, que les progrès du goût et de l’éloquence étaient nécessairement attachés à ceux de la morale, et que la ruine de l’une entraînait la décadence inévitable de l’autre : nous vous avons montré que les plus beaux morceaux, que l’on pût offrir à votre admiration, étaient ceux où respire le sentiment de la vertu, la haine du vice ou l’amour éclairé de la patrie ; que tout ce qui ne porte pas ces grands caractères du vrai beau, ne peut qu’être froid, languissant, inanimé ; et qu’enfin, en tout genre comme en tout sens, dans la conduite, comme dans les ouvrages, L’esprit se sent toujours des bassesses du cœur.

109. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Lebrun Né en 1785 » pp. 498-505

surtout si, dans la solitude, L’amitié quelquefois vient se joindre à l’étude ; Si de leur double ivresse on goûte les douceurs, Et si le même mot fait tressaillir deux cœurs. […] Heureux, qui dès le temps de son adolescence, A connu cette ivresse, en abreuva son cœur ! […] Le cœur se reconnaît, Et l’homme tout entier quelques instants renaît, Soudain jeune, en voyant quelque pierre oubliée Où d’un ancien bonheur la mémoire est liée, Quelque nom, que sa main sur le hêtre a gravé, Et que mieux que son cœur l’écorce a conservé.

110. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Cours complet de littérature à l’usage des séminaires et des colléges rédigé d’après les meilleurs critiques anciens et modernes par M. l’abbé A. Piron. Chanoine, Vicaire général, Membre de l’Académie des Arcades, ancien Professeur de littérature. » pp. 1-8

Cette nouvelle Poétique peut donc être mise très avantageusement entre les mains des jeunes humanistes, car non seulement elle ne leur offre aucun danger au double point de vue des croyances et des mœurs, mais elle est très propre à éclairer leur esprit, à épurer leur goût et à orner leur cœur. […] Par un art aussi simple qu’ingénieux, vous nous montrez comment toute la Bible, déployant le pathétique du sensible, et faisant briller à nos yeux la splendeur du vrai, est un élan poétique du cœur tout ensemble et de la raison ; bien mieux, vous nous montrez comment tous les genres de poésie trouvent leurs modèles dans les Livres saints : l’Ode, dans les chants de Moïse et de Débora ; l’Épithalame, dans le Cantique des cantiques et dans le Psaume Eructavit cor meum verbum bonum ; l’Élégie, dans les plaintes sublimes de Job et dans les Lamentations de Jérémie ; le Poème didactique, dans les Proverbes et dans l’Ecclésiaste ; la Pastorale, dans Ruth et dans Tobie, etc. […] Oui, Monsieur le Vicaire général, votre ouvrage par l’exactitude et la netteté des définitions, par la justesse des divisions, par l’esprit si profondément chrétien qui l’inspire, me parait fait, entre tous les autres, pour développer sûrement le goût littéraire, élever les esprits et orner les cœurs. […] Je prie Dieu de tout cœur pour qu’il bénisse vos laborieux efforts, et leur accorde le succès qu’ils méritent si bien.

111. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre premier. Division générale. »

Ainsi, quand tu fonds sur mon âme, Enthousiasme, aigle vainqueur, Au bruit de tes ailes de flamme Je frémis d’une sainte horreur ; Je me débats sous ta puissance, Je fuis, je crains que ta présence N’anéantisse un cœur mortel ; Comme un feu que la foudre allume, Qui ne s’éteint plus, et consume Le bûcher, le temple et l’autel. […] Tous les arts ont une poésie qui leur est propre, et qui parle au cœur et à l’imagination par le moyen des sens. […] Par l’heureuse disposition des syllabes, par la coupe habile du vers, par la répétition des mêmes sons, la pensée se dessine plus frappante et plus vive ; elle saisit à la fois l’oreille et l’imagination, elle pénètre plus profondément dans le cœur et dans la mémoire. […] Vers le beau convergent toutes les facultés nobles et généreuses de l’homme : c’est le pôle du cœur humain. […] En présence de Dieu et de la nature, son cœur s’épanouit d’admiration, d’enthousiasme ou de reconnaissance.

112. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Regnard. (1655-1709.) » pp. 242-253

Une vie romanesque et aventureuse, en lui faisant voir bien des pays1, éprouver bien des conditions diverses, l’avait initié à cette science du cœur humain sans laquelle on ne saurait offrir un tableau véritable de la société. […] Votre bourse est, monsieur, puisqu’il faut vois le dire, Un thermomètre sûr, tantôt bas, tantôt haut, Marquant de votre cœur ou le froid ou le chaud. […] De serpents mon cœur est dévoré : Tout semble en un moment contre moi conjuré. […] Mon cœur, dans les transports de sa fureur extrême, N’est point si malheureux, puisqu’enfin il vous aime. […] Dans mon cœur il s’élève Des mouvements de rage.

113. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Mirabeau, 1749-1791 » pp. 368-376

Pardon, mon oncle, je me répète : tout sentiment surabondant fait ainsi ; mon cœur crie sans cesse qu’il vous respecte, qu’il vous aime, qu’il espère en vous : éclairez-le, guidez-le ; ce cœur toujours ardent est devenu docile ; il obéira à la moindre inflexion de votre main ou de celle de mon père. […] Les institutions de la vieille monarchie avaient blessé des esprits justes et indigné des cœurs droits ; mais il n’était pas possible qu’elles n’eussent froissé quelque âme ardente et irrité de grandes passions. […] Détachons du portrait de Mirabeau par Timon le passage suivant : « Dès qu’il aborde le débat, dès qu’il entre dans le cœur de la question, il est substantiel, nerveux, logicien autant que Démosthène ; il s’avance dans un ordre serré, impénétrable ; il fait la revue de ses preuves, dispose leur plan d’attaque et les rauge en bataille. […] Rien de plus touchant que cette prière d’un cœur sincère et désespéré.

114. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Notions préliminaires. »

Voyons comment vos cœurs sublimes Du sort soutiendront le retour. […] Un cœur noble ne peut soupçonner dans autrui               La bassesse et la malice               Qu’il ne sent point en lui. […] De ce monstre si farouche Craignez la feinte douceur : La vengeance est dans son cœur, Et la pitié dans sa bouche. […] Mais il observa attentivement différents avares ; il saisit les plus grands traits d’avarice qu’ils avaient faits ; il y ajouta, d’après la connaissance profonde qu’il avait du cœur humain, d’autres traits qu’il imagina qu’un avare est capable de faire : il réunit tous ces traits, les attribua à son personnage, et, par là, vint à bout d’en composer un caractère parfait dans son genre. […] Pour en mériter le beau titre, il faut qu’il rende l’objet qu’il a trouvé, aussi sensible à l’esprit et au cœur, que l’est aux yeux du corps un objet présente sur la toile.

115. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — La Bruyère 1646-1696 » pp. 100-117

Un si grand fonds ne se peut bien faire que lorsque tout s’imprime dans l’âme naturellement et profondément, que la mémoire est neuve, prompte et fidèle, que l’esprit et le cœur sont encore vides de passions, de soins et de désirs, et que l’on est déterminé à de longs travaux par ceux de qui l’on dépend. […] Vauvenargues dit : « Qui peut soutenir son esprit et son cœur au-dessus de sa condition ? […] La Bruyère a eu le cœur tendre pour les humbles. […] (Peu s’en faut que le cœur ne me fende.) […] On lit dans Racine : Il faut désormais que mon cœur S’il n’aime avec transport, haïsse avec fureur.

116. (1892) La composition française aux examens du baccalauréat de l’enseignement secondaire moderne, d’après les programmes de 1891, aux examens de l’enseignement secondaire des jeunes filles et aux concours d’admission aux écoles spéciales pp. -503

Montrer comment ces trois affections s’enchaînent et se concilient dans le cœur de l’homme. […] Célimène la coquette spirituelle et sans cœur, Arsinoé la prude, sont aussi des caractères humains. […] Les défauts de l’esprit ou du cœur, et les manies ne sont pas moins durables. […] Les deux héroïnes ont dû contraindre leur cœur pour obéir à leur père. […] L’imagination et le cœur de ce grand homme ne vont pas à un but moins haut que celui-là.

117. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Seconde partie. Moyens de former le style. — Chapitre II. De l’exercice du style ou de la composition » pp. 225-318

Une tentation horrible s’empare du cœur d’Eudore. […] le cœur est déchargé d’un poids qui l’accablait. […] La douceur, au contraire, et un ton affectueux sont de nature à lui gagner les cœurs. […] Elles doivent être dictées par le cœur. […] Il est toujours pénible pour l’homme de cœur de refuser un service.

118. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Chapitre I. Du Pathétique. » pp. 280-317

Tu disais en ton cœur avare : je tiens la mer sous mes lois, et les nations sont ma proie. […] Tes principes ne sont-ils pas gravés dans tous les cœurs ; et ne suffit-il pas, pour apprendre tes lois, de rentrer en soi-même, et d’écouter la voix de sa conscience dans le silence des passions ?  […] Chez les Rois mes voisins, mon cœur humble et confus Ira-t-il s’exposer au hasard d’un refus ; Eux dont j’ai tant de fois avec tant d’insolence Méprisé la recherche et bravé la puissance ? […] N’allait-elle pas gagner tous les cœurs, c’est-à-dire la seule chose qu’ont à gagner ceux, à qui la naissance et la fortune semblent tout donner ? […] Il n’est plus temps : il voit la gloire qui l’opprime : Il tombe enseveli dans l’éternel abîme… Et loin des voluptés où fut livré son cœur, Ne trouve devant lui que la rage et l’horreur.

119. (1854) Éléments de rhétorique française

La seconde soulève les passions : c’est au cœur qu’elle s’adresse. […] Songez qu’il était mort, et qu’il avait une partie du cœur emportée. […] Heureux l’orateur ou l’écrivain qui s’empare de ces mouvements du cœur fondés sur la raison ! […] Qui ne sait par cœur cette phrase sur le cheval ? […] La finesse ne s’adresse qu’à l’esprit ; la délicatesse s’adresse en même temps à l’esprit et au cœur.

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