Nulle autre force que l’éloquence, suivant la pensée de Cicéron 1, n’a pu dans l’origine des temps, engager les hommes dispersés et féroces, à se réunir et à se civiliser. […] Pour en venir à bout, il faut émouvoir puissamment leur âme, et y imprimer avec force les sentiments dont nous sommes nous-mêmes pénétrés. […] Assez ordinairement l’Orateur ne persuade, qu’en peignant avec force et avec vérité : bien souvent aussi le Poète, en présentant des tableaux énergiques et vrais, parvient jusqu’à émouvoir et à persuader. […] Cette objection n’affaiblirait en rien le pouvoir et la force de l’éloquence, qui, comme je l’ai déjà dit, n’a souvent que des effets momentanés, parce qu’elle ne peut pas enchaîner la volonté de l’homme, qui, de sa nature, est toujours libre et maître de ses actions.
Comme le sentiment de nos propres forces influe toujours sur nos opinions, le critique sans chaleur et sans imagination sentira faiblement des qualités qui lui sont trop étrangères. […] Le siècle de Louis XIV Au dix-septième siècle, le génie de la France était mûr pour enfanter de grandes choses ; et toutes les forces du courage, de l’intelligence et du talent, semblaient, par un mystérieux accord, éclater à la fois. […] L’académicien célèbre que vous remplacez aujourd’hui, et que vous avez si bien caractérisé, après avoir entrepris avec ardeur, et souvent avec force, la grande œuvre de la tragédie, a marqué surtout sa verve originale par des épigrammes qu’il appelait des fables. […] Au lieu de concentrer la force comique sur quelque sujet d’intrigue et de mœurs longtemps médité, vous avez éparpillé la comédie dans une foule de brillantes esquisses, et reproduit l’ingénieuse fécondité de ces poëtes espagnols, dont les ouvrages et les succès se comptaient par centaines.
Il a perdu tout ce qui faisait sa force, le jour où il a dû quitter Rome. […] Que n’a-t-il emmené avec lui toutes ses forces ! […] Mais pourquoi déclamer avec tant de force ? […] Écumant de rage et les yeux étincelants, il criait de toutes ses forces que je lui faisais violence. […] Cette accusation aurait eu de la force lorsque la république avait toute sa sévérité et sa dignité.
Nous nous intéressons plus vivement à l’entreprise que conduit la valeur ou la sagesse d’un seul homme, et le poète trouve une occasion de déployer tout son art en réunissant dans la peinture d’un seul caractère toute la grâce et toute la force de son pinceau. […] C’est ainsi que nous voyons Diomède briller par l’énergie, Ajax par sa force corporelle, Ulysse par la prudence et l’artifice. […] On peut par conséquent y mettre beaucoup de chaleur, de force et de dignité : elle est naturellement lyrique. […] La force et la majesté, l’élégance et l’harmonie, la chaleur et le coloris doivent le distinguer. […] Virgile a peut-être moins de force, de feu et de sublimité dans ses peintures, mais il a une majesté plus soutenue, et plus de sagesse et de goût.
Prise à la lettre, la litote semble affaiblir la pensée ; mais les idées accessoires en font sentir toute la force. […] Ter. — Abripere (rapere ab), enlever de force. […] Egere consiliis. — Indigere exprime la même idée, mais avec plus de force. […] Reparare vires, rétablir ses forces. — Reficere (rursùs facere), refaire, rebâtir. […] — Vires ne se dit guère que des forces du corps.
Ici toute la beauté est souvent dans la force, et la force est dans l’ensemble du discours.
Je vous regarde comme un autre cardinal Ximenès1, dont le génie supérieur, au lieu de s’affaiblir par les années, semblait en recevoir de nouvelles forces. — Point de flatterie, interrompit-il, mon ami. […] Si, par malheur pour toi, il me revenait qu’on dît dans la ville que mes discours n’ont plus leur force ordinaire, et que je devrais me reposer, je te le déclare tout net, tu perdrais avec mon amitié la fortune que je t’ai promise. […] Néanmoins, puisque vous m’avez récommandé d’être franc et sincère, je prendrai la liberté de vous dire que votre dernier discours ne me paraît pas tout à fait de la force des précédents.
Pour moi, satisfaisant mes appetits gloutons, J’ai dévoré force moutons. […] Son nez meurtri le force à changer de langage : Oh ! […] Sa pitié est orgueilleuse : c’est un protecteur égoïste ; il cherche prétexte à exalter sa grandeur, sa force, sa supériorité. […] Il a sa fierté de moucheron : il déclare la guerre ; mais il est fanfaron et étourdi : il juge la force sur la taille des gens. […] Les grands poëtes et les grands orateurs ne font pas autre chose que de donner, par la force de leur expression, un accent particulier au lieu commun ils font ce que fait l’émotion personnelle.
Ces obstacles s’appellent nœuds, et la manière dont on les force se nomme dénouement. […] Quoiqu’il soit vrai, en un sens, de dire que la Divinité se mêle de toutes les actions des hommes, cependant il semble que, pour conserver la dignité de cette cause, on ne doit l’employer que dans les entreprises importantes, et même dans les parties les plus importantes de ces entreprises, et lorsque, sans elle, les hommes, faute de lumière ou de force, pourraient se détourner du but où les dieux veulent qu’ils arrivent. […] Enfin, Voltaire invoque la Vérité : Descends du haut des cieux, auguste vérité, Répands sur mes écrits ta force et ta clarté ; Que l’oreille des rois s’accoutume à t’entendre. […] Après l’invocation, le poète commence d’un ton soutenu, comme : Valois régnait encore, et ses mains incertaines De l’État ébranlé laissaient flotter les rênes ; Les lois étaient sans force et les droits confondus, Ou plutôt, en effet, Valois ne régnait plus. […] Malgré ces défauts la fécondité, la force et la beauté d’imagination qui règnent dans tout cet ouvrage, font marcher l’auteur bien près d’Homère, de Virgile et de Tasse.
ma force usée en ce besoin me laisse ! […] Qu’on est digne d’envie Lorsqu’on perdant la force on perd aussi la vie ! […] J’en verse5, et plût à Dieu qu’à force d’en verser, Ce cœur trop endurci se pût enfin percer ! […] Variante : Quand avecque la force on perd aussi la vie, Sire, et que l’âge apporte aux hommes généreux Avec que sa faiblesse un destin malheureux. […] Avant l’épreuve qui va le tenter, il cherche sa force dans la prière, en Dieu, source des grâces.
La négligence vient de l’inobversation des règles relatives à la pureté, à la propriété, à la convenance des mots, ainsi que de l’oubli des préceptes touchant la correction, la clarté, la précision, l’unité, la force et l’harmonie des phrases. […] Tout ce qu’on peut exiger de l’élégance, c’est de ne pas énerver le sentiment ou la pensée ; mais on ne doit pas s’attendre qu’elle donne de la chaleur ou de la force à ce qui n’en a pas. […] Le style sublime est celui qui, par la grandeur et l’énergie des pensées, la force et la noblesse des sentiments, la vivacité et l’éclat des images, la hardiesse des figures, la beauté frappante des comparaisons, l’impétuosité des mouvements, l’harmonie des tours, la majesté des périodes, la magnificence et la pompe des expressions, étonne et émeut les esprits, agite l’âme avec force, l’élève au-dessus d’elle-même, la ravit, la transporte d’admiration. […] L’énergie du style consiste dans la vigueur des pensées, dans la force des sentiments rendus avec une concision frappante. […] Ainsi, tout ce qui est vaste et imposant, comme la voûte des cieux, l’Océan, une haute montagne ; tout ce qui indique un grand pouvoir et une grande force, comme le trouble des éléments, le bruit du tonnerre ou celui du canon, les inondations, le retentissement d’une abondante chute d’eau, les volcans, les tremblements de terre ; tout ce qui imprime l’effroi, comme les ténèbres, la solitude, le silence ; tout ce qui présente le caractère de la magnanimité, de l’héroïsme, de la haute vertu ; en un mot, tout ce qui nous plonge dans l’immensité, et éveille en nous l’idée de l’infini, doit être regardé comme le fondement et la source du sublime.
Quant à la force de ces devoirs, nous avons naturellement choisi le niveau le plus élevé, celui des colléges de Paris, en insérant, à dessein, quelques versions données au concours général.
Il y a je ne sçay quoy de servile en la rigueur et en la contraincte ; et tiens2 que ce qui se peult faire par la raison, et par prudence et addresse, ne se faict jamais par la force. […] Ils ont la jeunesse4 et les forces en la main, et par consequent le vent et la faveur du monde ; et receoivent avec mocquerie ces mines fieres et tyranniques d’un homme qui n’a plus de sang ny au cœur ny aux veines ; vrais espovantails de cheneviere5. […] …………… C’est elle qui revêt d’une indomptable force Vos fils, durs à la neige, insensibles au feu ; Par elle vous gardez, sous une rude écorce, Les tendresses du cœur et la croyance en Dieu. […] Au delà des forces et de la condition d’un vieillard (Virg., Æn., VI, 114).
Ses arrêts ont force de loi1. […] Coutume : elle avait force de loi avant 89. […] « Les secours donnés à l’esprit pour le rendre plus attentif et plus étendu sont une force prétendue, une industrie acquise, qui le trompent également sur sa nature et sur ses forces naturelles : erreur grave et funeste.
Aussi est-il un maître dans toute la force du mot : par l’accent et l’autorité de ses doctrines, nul n’est plus propre à diriger, à féconder les esprits ; nul ne forme plus sûrement le goût par la ferveur de ses convictions persuasives. […] Que de fois la force d’esprit qui doit tenir toutes ces pièces rangées ne fléchit-elle point ! […] Les fables ne sont pas le livre des jeunes gens ; ils préfèrent les illustres séducteurs, qui les trompent sur eux-mêmes et leur persuadent qu’ils peuvent tout ce qu’ils veulent, que leur force est sans bornes et leur vie inépuisable1. […] Ce temps d’ivresse passé2, quand chacun a trouvé enfin la mesure de sa taille en s’approchant d’un plus grand ; de ses forces, en luttant avec un plus fort ; de son intelligence, en voyant le prix remporté par un plus habile ; quand la maladie, la fatigue lui ont appris qu’il n’y a qu’une mesure de vie ; quand il en est arrivé à se défier même de ses espérances, alors revient le fabuliste qui savait tout cela, qui le lui dit et qui le console, non par d’autres illusions, mais en lui montrant son mal au vrai, et tout ce qu’on en peut ôter de pointes par la comparaison avec le mal d’autrui.
L’éloquence, en effet, est une force irrésistible qui saisit les âmes, et qui les gouverne en les charmant. […] Nous avons choisi les formes qui donnent à la pensée une force ou une grâce particulière. […] Les écrivains médiocres n’ont pas la force d’être précis. […] Les voyelles donnent de la douceur aux mots ; les consonnes leur impriment de la force. […] L’expression métaphorique a plus de grace et de force que l’expression simple.
Malgré la pureté de langage qui caractérise ses plaidoyers et ses lettres, on a cessé depuis longtemps de les lire, parce qu’on y chercherait en vain cette chaleur de style et cette force de raison qui donnent seules la vie aux écrits, de quelque nature qu’ils soient. […] Partout le naturel, la force, l’érudition, la solidité s’adaptent et se fondent heureusement dans les sujets qu’il traite.
Que les avis soient en opposition tranchée ; que les raisonnements soient, de part et d’autre, exposés dans toute leur force. […] Contraste frappant, brièveté énergique d’expression dans les deux hémistiches ; harmonie différente appropriée, l’une à la force, l’autre à ta faiblesse. […] Le chêne parle avec orgueil, et sa commisération affectée pour la faiblesse du roseau lui sert à faire ressortir sa propre force. […] Ce serait une tâche au-dessus de mes forces ; d’ailleurs les bornes d’une rhétorique ne me permettraient point les développements nécessaires. […] Les auteurs dramatiques sentent la force de la vérité, et savent que le public aime à voir agir, à entendre parler les grands acteurs des siècles passés.
Comme, dans les genres élevés, les acteurs qui parlent ont des idées et des connaissances supérieures à celles du vulgaire, l’élévation, la force, la grandeur, la finesse, la richesse des pensées doivent y régner : tout y doit être or et pourpre. […] Il préfère surtout les expressions pittoresques qui font image, et s’attache à tout ce qui est extraordinaire par la richesse, la hardiesse, la force ou la nouveauté. […] Ainsi monde ne rimerait pas avec demande, office avec espace, source avec force, quoique la dernière syllabe de ces mots soit la même ; mais source irait bien avec course, exerce avec diverse. […] On se sert de ces rimes dans des pièces légères, pour rendre la narration plus rapide, et pour exprimer avec plus de force les sentiments impétueux. […] L’inversion est une des beautés de la poésie ; elle fournit un moyen puissant de varier les tours et de donner à la période plus de rapidité, de force, d’harmonie, et se prête mieux à la nécessité du nombre, de la rime et de la mesure.
L’excès, en quoi que ce soit, est un signe d’impuissance ou d’ignorance du bon emploi de la force, ce qui revient à peu près au même. Croyez-vous que l’emphase, le faux brillant, la délicatesse outrée, la prétention, ce que les Grecs nommaient cacozelia, accusent une force réelle ? […] Quand on commence à apprendre l’escrime, la danse, l’équitation, on emploie presque toujours trop de force, on fait de trop grands mouvements, et l’on réussit moins en se donnant plus de peine.
Par la force du génie, on se représentera toutes les idées générales et particulières sous leur véritable point de vue ; par une grande finesse de discernement, on distinguera les pensées stériles des idées fécondes ; par la sagacité que donnera l’habitude d’écrire, on sentira d’avance quel sera le produit de toutes ces opérations de l’esprit. […] Ou ne peut donc trop s’en occuper ; c’est même le seul moyen d’affermir, d’étendre et d’élever ses pensées ; plus on leur donnera de substance et de force par la méditation, plus il sera facile ensuite de les réaliser par l’expression. […] Un tel cynisme révolta les hommes de goût, et le scandale fut tel que les journaux qui en général ne se piquent pas de bonne littérature, et qui étaient d’ailleurs presque tous aussi coupables eux-mêmes, s’écrièrent qu’il fallait faire cesser par la force cette dégoûtante manière de penser et d’écrire ; que, sans cette précaution, la littérature française serait marquée aux yeux du monde entier d’un éternel déshonneur. […] Toutes les autres vertus que peut montrer un orateur, se rapporteront à ces quatre qualités principales : la piété, la pitié à la bienveillance ; la fermeté, le courage à la prudence ; l’indignation, l’horreur du crime à la probité ; la défiance de ses forces, l’humilité sans bassesse à la modestie.
14° Pensées fortes, frappantes et énergiques La pensée est forte, frappante et énergique, lorsqu’elle laisse une profonde impression dans l’âme : elle unit la vivacité à la force, et s’exprime par peu de mots, dont chacun renferme un sens précis, tranché, étonnant. […] Henri IV répondit à ceux qui l’exhortaient à traiter avec rigueur quelques places de la Ligue qu’il avait réduites par la force : « La satisfaction qu’on tire de la vengeance ne dure qu’un moment ; mais celle qu’on tire de la clémence est éternelle. […] Boileau dit que les transitions sont ce qu’il y a de plus difficile dans l’art d’écrire : aussi rien ne donne plus d’agrément et de force même au discours que la liaison parfaite des idées dont il se compose. […] 3° Gradation Le troisième rapport à établir entre plusieurs idées réunies, c’est un rapport de gradation, un certain arrangement des pensées tel que les pensées soient disposées selon leur degré de force ou de faiblesse.
Rapin 112, le plus achevé de son histoire, il se trouve, dit-il, peu de choses de cette force dans l’antiquité. […] C’est une entreprise bien difficile que celle d’une histoire universelle, qu’on veut écrire dans tous les détails nécessaires : elle est au-dessus des forces d’un seul homme. […] Mais ils nous font sentir en même temps notre impuissance de nous élever jusqu’à l’imitation de ces actions d’éclat, qui ont fixé la destinée des empires et le sort des peuples : au lieu que nous ne jugeons pas au-dessus de nos forces morales, les actions particulières d’un homme, quelque illustres qu’aient été son rang et sa naissance. […] Plutarque, né à Chéronée dans la Béotie, vers l’an 50 de l’ère chrétienne, écrit avec force et avec clarté dans ses Vies des hommes illustres. […] Le style en est inégal ; mais il y a bien des endroits où l’auteur se montre, par la force des expressions et la profondeur du génie, le digne rival de Salluste.