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57. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Buffon. (1707-1788.) » pp. 146-152

La fauvette à tête noire est de toutes les fauvettes celle qui a le chant le plus agréable et le plus continu : il tient un peu de celui du rossignol, et l’on en jouit plus longtemps ; car, plusieurs semaines après que ce chantre du printemps s’est tu, l’on entend les bois résonner partout du chant de ces fauvettes ; leur voix est facile, pure et légère, et leur chant s’exprime par une suite de modulations peu étendues, mais agréables, flexibles et nuancées : ce chant semble tenir de la fraîcheur des lieux où il se fait entendre ; il en peint la tranquillité, il en exprime même le bonheur : car les cœurs sensibles n’entendent pas sans une douce émotion les accents inspirés par la nature aux êtres qu’elle rend heureux. […] Ils n’ont d’autre voix qu’un petit cri fréquent et répété ; ils le font entendre dans les bois dès l’aurore, jusqu’à ce qu’aux premiers rayons du soleil tous prennent l’essor et se dispersent dans les campagnes.

58. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Le Sage, 1668-1747 » pp. 216-222

Je t’aime ; et pour te le prouver, je te fais mon confident. » Je n’eus pas sitôt entendu ces paroles, que je tombai aux pieds de Sa Grandeur, tout pénétré de reconnaissance. […] Je la trouve excellente, quoique un peu au-dessous de vos autres ouvrages. — Je vous entends, répliqua-t-il. […] J’ai été furieusement la dupe de votre intelligence bornée. » Quoique démonté, je voulus chercher quelque modification pour rajuster les choses ; mais le moyen d’apaiser un auteur irrité, et de plus un auteur accoutumé à s’entendre louer ! […] Il suffit que le poëte croie s’entendre. — Tu te moques de moi, interrompis-je, mon ami.

59. (1873) Principes de rhétorique française

A ce sentiment se rattache l’indulgence pour autrui : il faut toujours craindre de tomber dans le vice que signale Quintilien de condamner ce qu’on n’entend pas. […] et vous ne daignez pas l’entendre, et vous l’éloignez même rudement, et achevez de lui serrer le cœur de tristesse ! […] Chercher à plaire à ces êtres faibles pour les amener à entendre la vérité, ce n’est pas complaisance ou bassesse, c’est plutôt sage concession à la débilité de leur nature. […] Le poëte disparaît ; on ne voit plus que ce qu’il fait voir, on n’entend plus que ceux qu’il fait parler. […] Rien n’est plus propre à intéresser l’imagination et la sensibilité que la représentation d’un personnage dont le lecteur croit voir le visage et entendre les paroles.

60. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Molière 1622-1673. » pp. 27-43

Cela s’entend. […] Voilà la plus belle sentence que j’aie entendue de ma vie : Il faut vivre pour manger, et non pas manger pour vi… Non, ce n’est pas cela. […] Oui, entends-tu ? […] on ne saurait aller nulle part où l’on ne vous entende accommoder1 de toutes pièces. […] Molière laisse entendre que le naturel est préférable à tous les raffinements.

61. (1892) La composition française aux examens du baccalauréat de l’enseignement secondaire moderne, d’après les programmes de 1891, aux examens de l’enseignement secondaire des jeunes filles et aux concours d’admission aux écoles spéciales pp. -503

Écrire ainsi, c’est prouver seulement qu’on ne s’entend pas soi-même. […] Qu’entend-on par principes de 89 ?  […] Qu’entend-on par là ? […] Il est heureux, il chante, on est émerveillé de le voir et de l’entendre. […] qu’entends-je moi-même ?

62. (1872) Cours élémentaire de rhétorique

voyez et entendez (Il. […] L’oreille frémit, elle entend le craquement de leurs os. […] qu’entends-je ? […] … Je n’entends que les flots ! […] Il n’y entendit point cette éloquence frivole, l’étude et le charme des hommes futiles.

63. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — De Maistre 1753-1821 » pp. 210-213

On lui jette un empoisonneur, un parricide, un sacrilége : il le saisit, il l’étend, il le lie sur une croix horizontale, il lève le bras ; alors il se fait un silence horrible, et l’on n’entend plus que le cri des os qui éclatent sous la barre, et les hurlements de la victime. […] Je ne puis surtout entendre un clavecin1 sans me sentir attristé : je le dis lorsqu’il y a là quelqu’un pour m’entendre, ce qui n’arrive pas souvent, surtout dans les compagnies nombreuses.

64. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Première partie. De la poésie en général — Chapitre II. Des qualités essentielles du poète » pp. 16-21

Le nom de poète, dit Horace, ne doit être donné qu’à celui qui possède un génie divin, à celui dont l’esprit est sublime, et dont la bouche fait entendre de grandes choses. […] Dans cet état, le poète s’isole de tout ce qui l’environne ; il ne voit plus, il n’entend plus que les objets que lui présente son imagination. […] Aucun sujet ne l’eût plus heureusement enflammée ; aussi, même au milieu des superstitions les plus populaires, sa voix se fit toujours entendre pour célébrer le Tout-Puissant.

65. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre Ier. Des éléments du style. » pp. 22-78

Telles sont ces paroles d’un enfant qui venait d’entendre le récit de la mort de Pyrrhus : Ah ! […] Le sentiment, tel que nous l’entendons ici, est, suivant l’Académie, un trait qui exprime un mouvement du cœur. […] Que faut-il entendre par synonymes ? […] On entend par barbarisme de phrase une tournure empruntée à une langue étrangère. […] Qu’entend-on par force dans la phrase ?

66. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — De Maistre, 1753-1821 » pp. 377-387

N’entendez-vous pas la terre qui crie et demande du sang ? […] il pourra bien massacrer Nerva ou Henri IV ; mais le plus abominable tyran, le plus insolent boucher de chair humaine n’entendra jamais là : « Nous ne voulons plus vous servir. » Une révolte sur le champ de bataille, un accord pour s’embrasser en reniant un tyran, est un phénomène qui ne se présente pas à ma mémoire. […] Il fixe donc les bornes, au delà desquelles la voix, pour toute oreille anglaise, n’est plus que du bruit ; mais, dit-il encore : « Un orateur français se ferait entendre de plus loin, sa prononciation étant plus distincte et plus ferme. » Ce que Wren a dit de la parole orale me semble encore bien plus vrai de cette parole bien autrement pénétrante qui retentit dans les livres. Toujours celle des Français est entendue de plus loin ; car le style est un accent. […] On lui jette un empoisonneur, un parricide, un sacrilége : il le saisit, il l’étend, il le lie sur une croix horizontale, il lève le bras ; alors il se fait un silence horrible, et l’on n’entend plus que le cri des os qui éclatent sous la barre, et les hurlements de la victime.

67. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Lamartine 1790-1869 » pp. 506-523

En l’écoutant, chacun crut entendre les plaintes ou les soupirs de son propre cœur, et monta vers les régions sereines, porté par l’essor de sa strophe éthérée. […] Dans vos cités en deuil que de cris vont s’entendre, Avant qu’avec douleur la terre ait reproduit, Misérables mortels, ce qu’un jour a détruit ! […] Il me semblait déjà dans mon oreille entendre De sa touchante voix l’accent tremblant et tendre, Et sentir, à défaut de mots cherchés en vain, Tout son cœur me parler d’un serrement de main3 ; Car, lorsque l’amitié n’a plus d’autre langage, La main aide le cœur, et lui rend témoignage4. […] On n’entendait au loin que le cri du grillon, Au lieu du bruit vivant, des voix entremêlées Qui montent, tous les soirs, du fond de ces vallées. […] « Saint François d’Assises avait une sorte d’affection pour les petits animaux ; et la légende raconte qu’un jour, voyageant en compagnie d’un frère dans la marche d’Ancône, il rencontra un homme qui portait sur son épaule, suspendus à une corde, deux petits agneaux ; et, comme le bienheureux saint François entendit leurs bêlements, ses entrailles furent émues, et, s’approchant, il dit à l’homme : “Pourquoi tourmentes-tu mes frères les agneaux en les portant ainsi “liés et suspendus ?

68. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — A. Chénier. (1762-1794.) » pp. 304-312

Ses traits sont grands et fiers ; de sa ceinture agreste Pend une lyre informe, et les sons de sa voix Emeuvent l’air et l’onde et le ciel et les bois. »     Mais il entend leurs pas, prête l’oreille, espère, Se trouble, et tend déjà les mains à la prière1. […] j’étais assis près de la poupe : Aveugle vagabond, dit l’insolente troupe, Chante ; si ton esprit n’est point comme tes yeux, Amuse notre ennui, tu rendras grâce aux dieux… J’ai fait taire mon cœur qui voulait les confondre ; Ma bouche ne s’est point ouverte à leur répondre ; Ils n’ont pas entendu ma voix, et sous ma main J’ai retenu le dieu courroucé dans mon sein. […] Commençons par les dieux : Souverain Jupiter ; Soleil, qui vois, entends, connais tout ; et toi, mer, Fleuves, terre, et noirs dieux de vengeances trop lentes, Salut ! […] Il les entend, près de son jeune guide, L’un sur l’autre pressés, tendre une oreille avide ; Et Nymphes et Sylvains sortaient pour l’admirer, Et l’écoutaient en foule, et n’osaient respirer ; Car, en de longs détours de chansons vagabondes, Il enchaînait de tout les semences fécondes, Les principes du feu, les eaux, la terre et l’air, Les fleuves descendus du sein de Jupiter, Les oracles, les arts, les cités fraternelles, Et depuis le chaos les amours immortelles5.

69. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Prosper Mérimée. Né en 1803. » pp. 558-565

Tout ce qu’il entend, tout ce qu’il voit demande du sang, depuis sa sœur, cette Électre implacable dont le silence même lui impose son devoir, jusqu’à ce chien de garde qui court à travers les vignes pour le guider vers le lieu du meurtre impuni. […] Les dernières paroles de sa sœur retentissaient sans cesse à ses oreilles, et il lui semblait entendre un oracle fatal, inévitable, qui lui demandait du sang, et du sang innocent. […] Oreste, que sa sœur Électre croyait mort, reparait, entend ses plaintes et s’écrie : «  Oreste. […] Toutes les républiques de la Grèce se montrent à nous divisées en factions ennemies ; ces factions se combattent, en paroles s’entend, sur la place publique, et le parti vaincu se soumet paisiblement à la décision de la majorité.

70. (1863) Principes de rhétorique et de littérature appliqués à l’étude du français

Les contraires prouvent encore le sujet, en montrant ce qu’il n’est pas pour faire entendre ce qu’il est. […] Aussi, le mot de style fait-il entendre quelque chose d’original et de vivant qui n’est pas dans l’élocution. […] — Elle dit le contraire de ce qu’on veut faire entendre, pour rendre la pensée plus forte et plus amère, ou tout au moins plus piquante. […] — Elle exagère la vérité pour la faire mieux entendre. […] — C’est le contraire de l’hyperbole ; elle atténue la vérité, et dit moins pour faire entendre plus.

71. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section I. De l’Art d’écrire correctement. — Chapitre II. De l’arrangement des Mots. » pp. 87-179

Par exemple, entendre la raillerie, signifie savoir bien railler. Entendre raillerie, signifie souffrir les railleries sans se fâcher. […] il faut répondre : je l’ai entendue chanter ; c’est-à-dire, j’ai entendu elle chanter, ou, qui chantait : = avez-vous entendu chanter la nouvelle ariette ? il faut répondre : je l’ai entendu chanter, parce qu’on ne pourrait pas dire : j’ai entendu la nouvelle ariette chanter ; il faudrait dire : j’ai entendu chanter la nouvelle ariette. […] Ainsi l’on dira fort bien : ne jugez pas ce criminel, sans l’avoir entendu et examiné.

72. (1867) Rhétorique nouvelle « Troisième partie. la rhétorique » pp. 194-

Non, si l’on entend par art un ensemble de connaissances dérivant de principes absolus. […] Mais si nous entrons dans le détail, que de difficultés, et comment les entendre, s’ils ne s’entendent pas eux-mêmes ? […] Cet homme-là, selon vous, est né orateur. — Entendons-nous. […] J’entends par unité la concordance de toutes les parties d’une œuvre avec le but qu’on se propose en y travaillant. […] Je m’éveillai bientôt, et j’entendis le prédicateur qui s’agitait extraordinairement ; je crus que c’était le fort de sa morale. — Eh bien, qu’était-ce donc ? 

73. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bossuet, 1627-1704 » pp. 89-123

Rome même entendra sa voix ; et un jour cette ville maîtresse se tiendra bien plus honorée d’une lettre du style de Paul, adressée à ses concitoyens, que de tant de fameuses harangues qu’elle a entendues de son Cicéron. […] De cette sorte, tout concourt à la même fin ; et c’est faute d’entendre le tout, que nous trouvons du hasard ou de l’irrégularité dans les rencontres particulières2. […] Au premier bruit d’un mal si étrange, on accourt à Saint-Cloud de toutes parts ; on trouve tout consterné, excepté le cœur de cette princesse4 : partout on entend des cris ; partout on voit la douleur et le désespoir, et l’image de la mort. […] Un grand roi vous va prêter sa voix, afin que vous vous fassiez entendre aux oreilles, et que vous portiez dans les cœurs des vérités plus articulées3. […] D’être entendue par vous.

74. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VI. De l’élocution et du style. »

Il en est de même des ouvrages de littérature ; il suffit d’entendre une page d’Homère, de Tacite, de Pascal, de Molière ou de Chateaubriand, pour que le nom de l’auteur vienne aussitôt à l’esprit. […] Delille n’est pas moins expressif dans ce vers : J’entends crier la dent de la lime mordante. […] Et son ombre n’entend que le bruit monotone              D’une vague contre un écueil. […] Les rhéteurs entendent souvent par style sublime celui qui se distingue par quelques-unes des qualités élevées dont nous venons de parler, comme l’énergie, la véhémence, la richesse, la magnificence. […] La litote consiste à dire moins pour faire entendre plus.

75. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre II. Application des principes à la première Philippique de Démosthène, et à la seconde Catilinaire de Cicéron. »

Ne croit-on pas entendre Démosthène, et tout ce morceau n’a-t-il pas la rapidité et la chaleur de diction qui caractérisent l’orateur grec ? […] Cicéron lui demande son opinion : on va l’entendre. […] Nos ancêtres, pères conscrits, ne manquaient ni de prudence, ni de courage, et une présomption mal entendue ne les empêchait pas d’adopter les institutions étrangères, pour peu qu’elles leur parussent avantageuses. […] « Pères conscrits, l’aspect des dangers qui nous environnent, les discours que je viens d’entendre, m’inspirent des pensées bien différentes. […] J’entends, quelque grand que soit le danger, vous êtes tranquilles !

76. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

Je ne me croyais pas être ici pour l’entendre. […] Tel me voit, et m’entend, et me méprise encore, Qui gémirait sans moi dans les prisons du Maure. […] Ses pleurs mêlent aux siens une fierté sincère ; On n’entend que soupirs : « Ah, mon fils ! […] Avez-vous dans les airs entendu quelque bruit ? […] Quand il les fait converser, on croit les entendre.

77. (1813) Principes généraux des belles-lettres. Tome III (3e éd.) « Principes généraux des belles-lettres. » pp. 1-374

Phèdre n’entend qu’avec horreur ces discours, la charge d’imprécations, et la bannit à jamais de sa présence. […] Mais sur-tout songez que le temps presse, et que deux cœurs qui s’aiment, doivent s’entendre à demi-mot. […] Valère l’entend comme il doit l’entendre, et dit à Isabelle : Hé bien, madame, hé bien, c’est s’expliquer assez. […] Quand on se fait entendre, on parle toujours bien ? […] Je ne dis plus qu’un mot, c’est à vous de m’entendre.

78. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre quatrième. De la disposition oratoire, ou de l’Ordre mécanique du discours. — Chapitre premier. »

L’insinuation suppose, au contraire, la nécessité de détruire, dans l’esprit des auditeurs, des dispositions peu favorables à la cause que l’on entreprend de défendre  Il faut tout l’art possible pour dissiper sans effort, mais avec succès cependant, ces préventions fâcheuses, et amener insensiblement l’auditeur à nous entendre, non seulement avec attention, mais avec cette portion d’intérêt qui est d’avance un présage certain du gain de la cause. […] Il est alors si important d’être entendu, que la prononciation même doit être soignée de manière à ne rien faire perdre à l’oreille du juge. […] C’est ce qu’Aristote sans doute a voulu nous faire entendre, lorsqu’il nous a donné le conseil et le modèle à la fois de la plus courte et de la meilleure peut-être des conclusions, pour le plus grand nombre des plaidoyers : j’ai dit, vous m’avez entendu, vous connaissez l’affaire ; prononcez.

79. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Fontenelle. (1657-1757). » pp. 110-119

Environné et accablé dans ses audiences d’une foule de gens, du menu peuple pour la plus grande partie, peu instruits même de ce qui les amenait, vivement agités d’intérêts très-légers et souvent très-mal entendus, accoutumés à mettre à la place du discours un bruit insensé, il n’avait ni l’inattention ni le dédain qu’auraient pu s’attirer les personnes ou les matières ; il se donnait tout entier aux détails les plus vils, ennoblis à ses yeux par leur liaison nécessaire avec le bien public ; il se conformait aux façons de penser les plus basses et les plus grossières ; il parlait à chacun sa langue, quelque étrangère qu’elle lui fût ; il accommodait la raison à l’usage de ceux qui la connaissaient le moins ; il conciliait avec bonté des esprits farouches, et n’employait la décision d’autorité qu’au défaut de la conciliation. […] Il m’est bien doux d’être loué sur cet art par vous qui l’avez si bien entendu. […] Sans mentir, je m’étais bien douté que de certaines gens ne manqueraient point d’entendre finesse où je n’en avais point entendu.

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