La gymnastique est pour les corps ce que la science des lois est pour l’âme : elle forme, elle perfectionne. La médecine est aussi pour le corps ce que la jurisprudence est pour l’âme : elle corrige, elle guérit. […] Dans les paroles et dans les actions du corps. […] A quoi sert l’action du corps ? […] Le mouvement du corps est donc une peinture des pensées de l’âme ?
C’est le corps qui parle au corps : tous les mouvements, tous les signes concourent et servent également.
J’aimerais autant qu’on l’accusât de se servir des mots anciens : comme si les mêmes pensées ne formaient pas un autre corps de discours par une disposition différente, aussi bien que les mêmes mots forment d’autres pensées par les différentes dispositions. » Mais si je n’aspire pas au renom d’inventeur, j’ai voulu, et d’une volonté ardente et profonde, rappeler des doctrines que je crois vraies et saines à tous ceux qui s’occupent des travaux de l’intelligence et surtout aux jeunes gens, et appuyer tous mes préceptes sur la nécessité de fortes et solides études. […] Ils entraient bravement en liee, leur premier assaut était hardi et vigoureux ; mais le cirque a applaudi trop fort et trop longtemps, et la tète leur a tourné ; ils ont voulu redoubler, et comme leur corps n’était pas assez endurci, ni leur pied assez affermi par l’exercice, nous les avons vus bientôt plier et défaillir.
Épitaphe 2 Ne verse point de pleurs sur cette sépulture Passant : ce lit funèbre est un lit précieux Où gît d’un corps tout pur la cendre toute pure ; Mais le zèle du cœur vit encore en ces lieux. […] Et toi, de mes exploits glorieux instrument, Mais d’un corps tout de glace inutile ornement, Fer jadis tant à craindre et qui, dans cette offense, M’as servi de parade, et non pas de défense, Va, quitte désormais le dernier des humains ; Passe, pour me venger, en de meilleurs mains. […] « On peut bien donner une tête et des bras à des corps figurés, comme, par exemple, à une armée ; mais non pas à des actions, comme des crimes, qui ne peuvent avoir ni tête ni bras. » Académie. […] Quelque effort qui s’oppose à l’ardeur qui m’enflamme, Les intérêts du corps cèdent à ceux de l’âme.
Telle est celle-ci de Salluste sur Catilina, tué dans une bataille que ce fier conspirateur contre Rome sa patrie, livra à l’armée de la république : son corps fut trouvé parmi ceux de ses ennemis ; et la fierté qui paraissait sur son visage pendant sa vie, y était encore empreinte . […] « Mais rien n’était si formidable que de voir toute l’Allemagne, ce grand et vaste corps, composé de tant de peuples et de nations différentes, déployer tous ses étendards, et marcher vers nos frontières, pour nous accabler par la force, après nous avoir effrayés par la multitude. » On voit que les chutes ou cadences de chaque incise et de chaque membre, sont bien marquées par les mots formidable, Allemagne, vaste corps, différentes, étendards, frontières, multitude. […] C’est de lui que nous vient cet art ingénieux De peindre la parole et de parler aux yeux, Et par des traits divers de figures tracées, Donner de la couleur et du corps aux pensées. […] Tels sont les mots faut-il vous rappeler, dans ces beaux vers de la Tragédie d’Athalie, par Racine : Faut-il, Abner, faut-il vous rappeler le cours Des prodiges fameux accomplis en nos jours ; Des tyrans d’Israëla les célèbres disgrâces, Et Dieu trouvé fidèle en toutes ses menaces ; L’impie Achabb détruit, et de son sang trempé Le champ que par le meurtre il avait usurpé ; Près de ce champ fatal, Jezabelc immolée, Sous les pieds des chevaux cette Reine foulée ; Dans son sang inhumain les chiens désaltérés, Et de son corps hideux les membres déchirés ; Des Prophètes menteurs la troupe confondue, Et la flamme du ciel sur l’autel descendue ; Elled aux éléments parlant en souverain ; Les cieux par lui fermés et devenus d’airain ; Et la terre trois ans sans pluie et sans rosée ; Les morts se ranimant à la voix d’Éliséee ?
Près du chevet du lit, selon le sacré rite, Un rameau de buis sec trempait dans l’eau bénite ; Ma main avec respect le secoua trois fois, En traçant sur le corps le signe de la croix ; Puis je baisai les pieds et les mains. […] mon pauvre Fido, quand, tes yeux sur les miens, Le silence comprend nos muets entretiens ; Quand, au bord de mon lit épiant si je veille, Un seul souffle inégal de mon sein te réveille ; Que, lisant ma tristesse en mes yeux obscurcis, Dans les plis de mon front tu cherches mes soucis, Et que, pour la distraire attirant ma pensée, Tu mords plus tendrement ma main vers toi baissée ; Que, comme un clair miroir, ma joie ou mon chagrin Rend ton œil fraternel inquiet ou serein, Révèle en toi le cœur avec tant d’évidence, Et que l’amour dépasse encor l’intelligence ; Non, tu n’es pas du cœur la vaine illusion, Du sentiment humain une dérision, Un corps organisé qu’anime une caresse, Automate trompeur de vie et de tendresse2 ! […] La cloche des funérailles Moi, quand des laboureurs porteront dans ma bière Le peu qui doit rester ici de ma poussière, Après tant de soupirs que mon sein lance ailleurs ; Quand des pleureurs gagés, froide et banale escorte, Déposeront mon corps endormi sous la porte Qui mène à des soleils meilleurs ; Si quelque main pieuse en mon honneur te sonne, Des sanglots de l’airain, oh !
Fléchier, par exemple, dans l’oraison funèbre de Turenne : « N’attendez pas de moi, Messieurs, que j’ouvre à vos yeux une scène tragique ; que je vous montre ce grand homme étendu sur ses propres trophées ; que je vous découvre ce corps pâle et sanglant, auprès duquel fume encor la foudre qui l’a frappé ; que je fasse crier son sang comme celui d’Abel ; que je rassemble à vos yeux les tristes images de la Religion et de la Patrie éplorées. […] Je vous représenterois ce fidèle sujet marchant sur les traces de son maître, qui étaient des pas de géant, et le surpassant par la nouvelle ardeur que lui inspirait l’exemple de ce monarque ; vous le verriez dans un corps usé de travaux, rallumant tout le feu de ses premières années, combattre à la tête de nos troupes, défaire les trois formidables armées de l’Empereur, de l’Espagne et de la Hollande ; partout s’immolant et se sacrifiant ; mais partout triomphant, et remplissant la mesure de cette glorieuse réputation qu’il faisait à la France Mais un objet plus intéressant m’oblige de me taire sur ses triomphes profanes, pour ne parler que de ses victoires sacrées ».
« Ne crains point, disent-ils, malheureux étranger (Si plutôt, sous un corps terrestre et passager, Tu n’es point quelque Dieu protecteur de la Grèce, Tant une grâce auguste ennoblit ta vieillesse !) […] J’ai vu Corinthe, Argos, et Crète et les cent villes, Et du fleuve Egyptus les rivages fertiles ; Mais la terre et la mer, et l’âge et les malheurs, Ont épuisé ce corps fatigué de douleurs ; La voix me reste.
Au VIe livre de l’Énéide, on place le corps inanimé de Misène sur un lit funèbre, etc. […] On peut adresser ses regrets au corps inanimé d’un ami que l’on vient de perdre ; mais les adresser à ses habits, ou aux différentes parties du corps, comme si ces objets avaient une vie séparée, n’offrirait qu’une idée étroite et mesquine. […] L’harmonie imitative peut représenter trois classes d’objets principalement : 1° les sons et les bruits de la nature ; 2° les différents mouvements des corps ; 3° les mouvements de l’âme, c’est-à-dire ses pensées, ses sentiments, ses émotions, ses passions. […] La seconde classe d’objets, que le son des mots imite souvent, se compose des divers mouvements des corps. […] Sans elles la composition est décousue et formée de morceaux qui se rapprochent et ne s’unissent pas, qui se succèdent et ne se suivent pas, qui ne font jamais un tout, et qui ressemblent, dit Quintilien, à ces corps de figure ronde qui ne peuvent jamais s’emboîter parfaitement et cadrer juste les uns avec les autres.
La disposition comprend trois parties : le commencement, appelé, selon les genres, exposition, début, exorde ; le milieu ou corps du sujet, nommé nœud, intrigue ou confirmation ; la fin ou conclusion, qui prend le nom de dénoûment ou de péroraison. […] Le nœud ou corps du récit est la partie de la narration où sont mis en rapport les différents personnages qui y jouent un rôle, et les diverses circonstances ou faits partiels dont elle se compose. […] M. de Turenne revint, et dans l’instant, sans être arrêté, il eut le bras et le corps fracassés du même coup qui emporta le bras et la main qui tenaient le chapeau de Saint-Hilaire. […] Le dénoûment ou la fin est le point où l’on voit s’accomplir la solution du nœud, c’est-à-dire la cessation des difficultés et des complications qui, dans le corps du récit, ont vivement provoqué le désir de connaître l’issue de l’action. […] Il faut rejeter tout ce qui ne fait pas corps avec le sujet, tout ce qui est commun, usé, et tout ce qui n’est pas de nature à faire une heureuse impression.
Corpus suum fatigare, fatiguer son corps. […] Lucilius, homme d’un grand esprit, avait un corps effilé et de petite taille. […] Il ne faut pas seulement pourvoir aux besoins du corps, mais plus encore à ceux de l’esprit et du cœur. […] Je trouve quatre raisons pour lesquelles la vieillesse semble être malheureuse : la première, c’est qu’elle éloigne des affaires ; la seconde, c’est qu’elle rend le corps infirme ; la troisième, etc. […] Démocrite, qui est un homme savant, pense que le soleil est un grand corps.
Ceux qui ont donné son histoire ont peut-être exagéré la difformité de son corps pour donner plus de relief à son esprit. […] Réaumur, dont la main si savante et si sûre A percé tant de fois la nuit de la nature, M’apprendra-t-il jamais par quels subtils ressorts L’éternel artisan fait végéter les corps ? […] Pourquoi ce ver changeant se bâtit un tombeau, S’enterre, et ressuscite avec un corps nouveau, Et, le front couronné, tout brillant d’étincelles, S’élance dans les airs en déployant ses ailes ? […] Je veux savoir de lui par quels secrets mystères Ce pain, cet aliment dans mon corps digéré, Se transforme en un lait doucement préparé ? Comment, toujours filtré dans ses routes certaines, En longs ruisseaux de pourpre il court enfler mes veines, À mon corps languissant rend un pouvoir nouveau, Fait palpiter mon cœur et penser mon cerveau ?
Phédon ou le pauvre Phédon2 a les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre : il dort peu, et d’un sommeil fort léger ; il est abstrait, rêveur, et il a, avec de l’esprit, l’air d’un stupide ; il oublie de dire ce qu’il sait ou de parler d’événements qui lui sont connus, et, s’il le fait quelquefois, il s’en tire mal ; il croit peser à ceux à qui il parle ; il conte brièvement, mais froidement ; il ne se fait pas écouter, il ne fait point rire ; il applaudit, il sourit à ce que les autres lui disent, il est de leur avis, il court, il vole pour leur rendre de petits services ; il est complaisant, flatteur, empressé ; il est mystérieux sur ses affaires, quelquefois menteur ; il est superstitieux, scrupuleux, timide ; il marche doucement et légèrement, il semble craindre de fouler la terre3 ; il marche les yeux baissés, et il n’ose les lever sur ceux qui passent. […] Vous me trouverez sur les livres de Platon qui traitent de la spiritualité de l’âme et de sa distinction avec les corps, ou la plume à la main pour calculer les distances de Saturne et de Jupiter ; j’admire Dieu dans ses ouvrages, et je cherche, par la connaissance de la vérité, à régler mon esprit et à devenir meilleur. […] « Phédon, de son côté, a toujours “les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre…” Il est toujours “libre sur les affaires publiques, chagrin contre le siècle, médiocrement prévenu des ministres et du ministère”.
Je ne vous rappellerai pas les admirables paroles que le vieil Homère met dans la bouche de Priam demandant à Achille le corps de son fils. […] C’est un malheureux plébéien qui soulève le peuple contre les riches, en lui montrant sur son corps les traces sanglantes de la cruauté de ses créanciers ; c’est Fabius qui, devant le Sénat de Carthage, secoue la guerre des plis de son manteau ; c’est le malheureux Varron portant toute sa vie le deuil de ses légions de Cannes ; c’est Popilius enfermant dans un cercle le roi Antiochus ; ce sont les enfants de Persée traînés en triomphe avec leur père et tendant au peuple leurs mains suppliantes ; c’est César égorgé en plein jour, dans le Sénat, et tombant au pied de la statue de Pompée ; c’est Antoine étalant devant les rostres le cadavre du dictateur et comptant ses blessures ; enfin c’est Agrippine en deuil, débarquant à Brindes, accompagnée de ses fils orphelins et pressant sur son sein l’urne de Germanicus. […] Mais, appelé à être un jour le patron des peuples alliés et à avoir des provinces entières dans sa clientèle, il faut qu’il se prépare à ce grand rôle en apprenant la langue des vaincus, leur histoire, leur philosophie, leurs mœurs, leurs arts, leurs droits, leur situation politique dans le grand corps dont ils sont devenus les membres par la conquête.
De là l’argumentation, qui est la partie technique du raisonnement, ou, si l’on veut, le corps de la preuve ; et le pathétique, qui en est l’âme, et qui achève victorieusement sur les cœurs, ce que l’argumentation a commencé sur les esprits. […] Lorsque dans un grand nombre d’arguments, il s’en trouve un ou deux qui sont plus faibles que les autres, Cicéron conseille de les placer au milieu de ce corps de preuves, parce que leur faiblesse y sera bien moins sensible qu’au commencement où à la fin de la confirmation.
Ce fut là ton seul mal, et le secret fardeau Sous lequel ton beau corps plia comme un roseau. […] Maintenant que vos corps sont réduits en poussière, J’irai m’agenouiller pour vous sur vos tombeaux.
Adroit à manier l’antithèse, la métaphore, l’hyperbole, il donne l’idée d’un beau corps auquel l’âme fait défaut. […] Les biens de l’esprit ne nous ont pas été donnés pour la simple volupté du corps.
N’attendez-pas, messieurs, que j’ouvre ici une scène tragique, que je représente ce grand homme étendu sur ses propres trophées, que je découvre ce corps pâle et sanglant auprès duquel fume encore la foudre qui l’a frappé, que je fasse crier son sang comme celui d’Abel3, et que j’expose à vos yeux les tristes images de la religion et de la patrie éplorées. […] On vit dans les villes par où son corps a passé les mêmes sentiments que l’on avait vus autrefois dans l’empire romain, lorsque les cendres de Germanicus furent portées de la Syrie au tombeau des Césars.
Nous étions là, le corps incliné, les jambes écartées pour élargir notre base, pour résister avec plus d’avantage, et les deux mains cramponnées à nos chapeaux pour les assurer sur nos têtes. Le tumulte immense de la mer, la course bruyante des vagues, celle, non moins rapide, mais silencieuse, des nuages, les oiseaux de marine qui flottaient dans le ciel et balançaient leurs corps grêles entre deux ailes arquées et d’une envergure démesurée, tout cet ensemble d’harmonies sauvages et retentissantes qui venaient toutes converger à l’âme de deux êtres de cinq pieds de hauteur, plantés sur la crête d’une falaise, secoués comme des feuilles par l’énergie du vent, et qui n’étaient guère plus apparents dans cette immensité que deux oiseaux perchés sur une motte de terre : oh !
Ils ont tous, en corps, résolu d’en parer une galerie, et de laisser cette marque de leur reconnaissance et de leur magnificence à l’éternité. […] La mort ne nous laisse pas assez de corps pour occuper quelque place, et on ne voit là que les tombeaux qui fassent quelque figure. […] Il eut peine à trouver quelqu’un pour aller chercher des capucins pour venir prier Dieu auprès du corps. […] Qui dit une société, dit un corps qui subsiste par l’union de divers membres et confond l’intérêt particulier dans l’intérêt général : c’est là le fondement de toute la morale. […] La loi des esprits n’est pas différente de celle des corps, qui ne peuvent se maintenir que par une continuelle nourriture.
Quant au reste du corps, il est de telle sorte Qu’il semble que ses reins et son épaule torte Fassent guerre à sa tête, et par rébellion, Qu’ils eussent entassé Ossa sur Pélion : Tellement qu’il n’a rien en tout son attelage Qui ne suive au galop la trace du visage. […] Ce même roi me vit dedans l’Andalousie Dégager sa personne en prodiguant ma vie, Quand, tout percé de coups, sur un monceau de morts, Je lui fis si longtemps bouclier de mon corps, Qu’enfin autour de lui ses troupes ralliées, Celles qui l’enfermaient furent sacrifiées ; Et le même escadron qui vint le secourir Le ramena vainqueur, et moi prêt à mourir. […] Le corps se porte mieux lorsque l’esprit se trouve Dans un parfait repos. […] Votre corps est à Dieu : ses mains l’ont façonné ; Le droit d’en disposer ne vous est pas donné. […] Heureux l’homme à qui la grâce Départ ce don efficace Puisé dans ces saints trésors, Et qui, rallumant sa flamme, Trouve la santé de l’âme Dans les souffrances du corps !
Non, le gain les excite, et l’argent les enfièvre, L’argent leur clôt les yeux et leur noircit la lèvre ; L’argent, l’argent fatal, dernier dieu des humains, Les prend par les cheveux, les secoue à deux mains, Les pousse dans le mal, et pour un vil salaire, Leur mettrait les deux pieds sur le corps de leur père. […] Outre que la moralité doit naître naturellement et sans effort du corps de la fable, puisque c’est pour elle que la fable est faite, il faut encore qu’elle soit claire, courte, intéressante, et surtout vraie et par conséquent utile. […] Tantôt le corps : — Demoiselle belette au corps long et fluet… Tantôt les lieux : Le lapin à l’aurore allait faire sa cour Parmi le thym et la rosée.
Les ennemis rendirent son corps, après l’avoir embaumé.