Prenez des sujets qui aillent à votre air : Psyché, par exemple. […] Le compagnon de Courier est bien Français par sa gaieté, sa cordialité, son air ouvert, sa pointe de vanité.
Je n’en veux pour preuve que l’air un peu fané du gros bouquet cueilli jadis par MM. […] Outre qu’il lui est impossible de ne pas respirer l’air qui nous entoure, ne donnons pas l’attrait du fruit défendu à des livres qu’un engouement irréfléchi lira sans critique, si on s’obstine à les proscrire des écoles, au lieu d’apprendre par une direction tout ensemble libérale et sévère à séparer le mort du vit, c’est-à-dire à discerner les qualités des défauts, et l’excellent du mauvais ou du médiocre.
Qu’appelle-t-on récitatif et air ou ariette ? […] Quelles sont les qualités nécessaires au récitatif et aux airs ? […] Dans les airs, la marche de la strophe demande l’élévation, la splendeur et la richesse de l’ode : l’harmonie doit même en être plus soignée. […] Le comique bourgeois peint les prétentions déplacées, les faux airs, la vanité et les autres ridicules de la bourgeoisie. […] Seulement ses couplets doivent être sur des airs connus, tandis que les airs de l’opéra à ariettes sont composés pour la circonstance.
Les amitiés littéraires Aimer Molière, c’est avoir une garantie en soi contre bien des défauts, bien des travers et des vices d’esprit ; c’est n’être disposé à goûter ni le faux bel-esprit, ni la science pédante ; c’est savoir reconnaître à première vue nos Trissotins et nos Vadius1 jusque sous leurs airs galants et rajeunis ; c’est ne pas se laisser prendre aujourd’hui plus qu’autrefois à l’éternelle Philaminte, cette précieuse de tous les temps, dont la forme seule change, et dont le plumage se renouvelle sans cesse ; c’est aimer la santé et le droit sens de l’esprit, chez les autres comme pour soi. Aimer et préférer ouvertement Corneille, c’est sans doute une belle chose, et sans aucun doute bien légitime ; c’est vouloir habiter et marquer son rang dans le monde des grandes âmes : et pourtant n’est-ce pas risquer, avec la grandeur et le sublime, d’aimer un peu la fausse gloire, jusqu’à ne pas détester l’enflure et l’emphase, un air d’héroïsme à tout propos ?
Ne sont-ce pas bien là ces outres d’Éole, qui, gonflées de vapeurs, occupent un espace immense, et se réduisent insensiblement à rien, lorsqu’une simple piqûre d’épingle a ouvert un libre passage à l’air qui les remplissait ? […] Quand il dit, par exemple, que les grands hommes pèsent sur l’univers et l’univers sur eux, cette idée, à force de vouloir être grande, peut n’être pas très claire, et, présentant plusieurs sens, ne vous arrête sur aucun ; choisissant de préférence le terme abstrait, il donne trop souvent à ses phrases une forme métaphysique qui peut fatiguer l’attention du lecteur, d’autant plus que les idées sont accumulées ; il place quelquefois des tournures et des expressions familières qui, entourées de phrases du ton le plus noble, ont un air étranger à sa diction, etc. ».
Tout ce qui m’entourait me racontait ma perte ; Quand la nuit dans les airs jeta son crêpe noir, Mon père à ses côtés ne me fit plus asseoir, Et j’attendis en vain à sa place déserte, Une tendre caresse et le baiser du soir. […] Le devoir fait, légers comme de jeunes daims, Nous fuyions à travers les immenses jardins, Éclatant à la fois en cent propos contraires, Moi, d’un pas inégal je suivais mes grands frères ; Et les astres sereins s’allumaient dans les cieux ; Et les mouches volaient dans l’air silencieux ; Et le doux rossignol, chantant dans l’ombre obscure, Enseignait la musique à toute la nature ; Tandis qu’enfant jaseur, aux gestes étourdis, Jetant partout mes yeux ingénus et hardis, D’où jaillissait la joie en vives étincelles, Je portais sous mon bras, noués par trois ficelles, Horace et les festins, Virgile et les forêts, Tout l’Olympe, Thésée, Hercule, et toi, Cérès, La cruelle Junon, Lerne, et l’hydre enflammée, Et le vaste lion de la roche Némée.
Les Chagrins dévorants et l’infâme Ruine, Enfants infortunés de ses raffinements, Troublent l’air d’alentour de longs gémissements. […] L’âge viril, plus mûr, inspire un air plus sage, Se pousse auprès des grands, s’intrigue, se ménage2, Contre les coups du sort songe à se maintenir, Et loin dans le présent regarde l’avenir. […] La vérité n’a point cet air impétueux.
Elle doit avoir un air de négligence et de liberté : c’est même ce qui la caractérise. […] Il y a néanmoins des occasions où les petits détails font bon effet, comme lorsque La Fontaine peint les tentatives des rats qui, après plusieurs alarmes, commencent à sortir : Mettent le nez à l’air, montrent un peu la tête, Puis rentrent dans leurs nids à rats ; Puis, ressortant, font quatre pas, Puis enfin se mettent en quête. […] Elle doit être claire et courte, c’est-à-dire exprimée en peu de mots et sans la moindre équivoque ; intéressante, par conséquent pas trop vague, et, s’il se peut, ayant un air de nouveauté et d’actualité : d’où il suit qu’une moralité ayant ces qualités n’admettra point de termes trop métaphoriques, point de périodes, point de vérités triviales, comme serait celle-ci : qu’il faut ménager sa santé. […] La simplicité consiste à rendre en peu de mots, et avec les termes ordinaires, la pensée que l’on veut exprimer : rien ne nuit tant à la fable que l’appareil et l’air composé. […] Nous vous voiturerons, par l’air, en Amérique.
On voit entrer une sorte de paysan, petit de taille, l’air ingénu, de gros souliers aux pieds, et un bâton à la main. […] On traverse des cours silencieuses, en rencontrant çà et là des jeunes gens portant une toque sur la tête et une toge sur leurs épaules ; point de foule, point de bruit : une gravité dans l’air comme dans les murs noircis par l’âge ; car il me semble qu’ici on ne répare rien, de peur de commettre un crime contre l’antiquité.
Au premier, violons ; en l’autre, luths et voix ; Des flûtes, au troisième ; au dernier, des hautbois, Qui tour à tour dans l’air poussaient des harmonies Dont on pouvait nommer les douceurs infinies. […] Je ne vous dirai point les différents apprêts, Le nom de chaque plat, le rang de chaque mets ; Vous saurez seulement qu’en ce lieu de délices On servit douze plats, et qu’on fit six services, Cependant que les eaux, les rochers et les airs Répondaient aux accents de nos quatre concerts. […] Dorante n’est qu’un fourbe ; et cet ingrat que j’aime, Après m’avoir fourbé, me fait fourber moi même ; Et d’un discours en l’air qu’il forge en imposteur, Il me fait le trompette et le second auteur ! […] des contes en l’air et sur l’heure inventés ?
Vous savez ce qu’il faut pour paraître marquis ; N’oubliez rien de l’air ni des habits ; Arborez un chapeau chargé de trente plumes Sur une perruque de prix ; Que le rabat soit des plus grands volumes Et le pourpoint des plus petits : Mais surtout je vous recommande Le manteau d’un ruban sur le dos retroussé : La galanterie en est grande ; Et parmi les marquis de la plus haute bande C’est pour être placé. […] Cette familiarité Donne à quiconque en use un air de qualité.
La destruction d’un homme sensible qui expire au milieu de ses amis désolés, et celle d’un papillon que l’air froid du matin fait périr dans le calice d’une fleur, sont deux époques semblables dans le cours de la nature. L’homme n’est rien qu’un fantôme, une ombre, une vapeur qui se dissipe dans les airs. » 2.
Sa fille alors, interrompant sa plainte, Tout en filant, lui chante à demi-voix Ces airs proscrits qui, les frappant de crainte, Ont en sursaut réveillé tous les rois2. […] Quand il eut bien fait voir l’héritier de ses trônes Aux vieilles nations comme aux vieilles couronnes, Eperdu, l’œil fixé sur quiconque était roi, Comme un aigle arrivé sur une haute cime, Il cria tout joyeux avec un air sublime : — L’avenir !
« Et ces paroles, juges, il ne les prononce pas en versant des larmes, comme je fais, mais avec cet air calme que vous lui voyez. […] Je l’ai vu ; son même air, son même habit de lin, Sa démarche, ses yeux, et tous ses traits enfin ; C’est lui-même. […] L’horreur d’être vaincu rend son air plus farouche. […] de quel front cet ennemi de Dieu Vient-il infecter l’air qu’on respire en ce lieu ? […] L’un paraît agir a par des réflexions profondes, et l’autre par de soudaines illuminations ; celui-ci par conséquent plus vif, mais sans que son feu eût rien de précipité ; celui-là d’un air plus froid, sans jamais avoir rien de lent, plus hardi à faire qu’à parler, résolu et déterminé au dedans, lors même qu’il paraissait embarrassé au dehors.
Jusque-là, les sons qui frappaient les airs n’étaient point recueillis d’une manière exacte et sure ; la tradition ne pouvait les transmettre sans les altérer. […] C’est dans ce phénomène de la réfraction que les poëtes ont vu la déesse du matin : elle ouvre les portes du jour avec ses doigts de rose, et la fille de l’air et du soleil a son trône dans l’atmosphère. […] Buffon peint l’écureuil par le son même des mots, qu’il choisit avec un art infini : « Il est propre, leste, vif, très-alerte, très-éveillé ; il a les yeux pleins de feu, la physionomie fine, le corps nerveux. » M. de Chateaubriand veut exprimer l’effet que produisent certains airs nationaux sur les Suisses éloignés de leur pays : « On craint de vous faire entendre ces airs de la patrie, qui vous rappellent vos pères, vos mères, vos frères, vos sœurs et le mugissement des troupeaux sur vos montagnes. […] Chez d’autres apprentis, l’on passe pour galant, Lorsqu’on écrit en l’air, et qu’on peint en parlant. […] Attendons : Pendant qu’avec un air assuré le prince s’avance pour recevoir la parole de ces braves gens, ceux-ci, toujours en garde, craignent la surprise de quelque nouvelle attaque ; leur effroyable décharge met les nôtres en furie.
Sainte-Beuve, j’aperçois dans l’air une multitude de papillons : on eut enfin une abeille ! […] Si d’ailleurs quelque endroit plein chez eux d’excellence Peut entrer dans mes vers sans nulle violence, Je l’y transporte, et veux qu’il n’ait rien d’affecté, Tâchant de rendre mien cet air d’antiquité.
L’objet de cette pensée est la fierté, l’audace, l’air menaçant que nous voyons sur le visage de Catilina, tout mort qu’il est ; et assurément cet objet ne peut que nous frapper, nous étonner, et remuer fortement notre âme. […] Quelle finesse, quelle délicatesse dans cet air d’humeur qu’affecte le poète ; dans ce refus simulé de faire l’éloge du roi, lors même qu’il le loue si bien ! […] Bouhours 1, dans je ne sais quel air simple et ingénu, mais spirituel et raisonnable, tel qu’est celui d’un villageois de bon sens, ou d’un enfant qui a de l’esprit. […] Le choc fut rude : il resta sur le coup, Presqu’assommé, l’œil hagard et l’air morne. […] Il faut nécessairement les revêtir des ornements de l’expression, pour leur donner un certain air de nouveauté, de grandeur, de noblesse, ou un autre agrément quelconque.
La pensée simple est celle dont l’objet n’a rien de relevé ni de bas, et où le travail est tellement caché sous un air de facilité, qu’elle semble devoir tout à la nature et rien à l’art. […] La pensée est naïve quand elle cache, sous un air simple et ingénu, une certaine finesse et un certain sel que l’esprit ne paraît point avoir cherchés. […] Cette pensée a été imitée par Chateaubriand, dans les Martyrs : Les Sicambres, tous frappés par-devant et couchés sur le dos, conservaient, dans la mort, un air si farouche que le plus intrépide osait à peine les regarder. […] Mais, comme ces innovations donnent facilement au style un air d’affectation et de recherche, elles ne peuvent être risquées, d’après Horace et Quintilien, qu’autant qu’elles sont autorisées par l’usage, c’est-à-dire par la pratique des bons écrivains. […] En certaines occasions, les parenthèses donnent à la pensée un air de vivacité qui la fait briller au passage ; mais, le plus souvent, elles embarrassent et obscurcissent la phrase et brisent l’unité.
L’âme ne me parut qu’une faible étincelle Que l’instant du trépas dissipe dans les airs. […] Il osait caresser le dieu D’un air familier, mais aimable. […] On y sait fuir également Le précieux, le pédantisme, L’air empesé du syllogisme, Et l’air fou de l’emportement. […] Il est à remarquer que si l’élégance a toujours l’air facile, tout ce qui est facile et naturel n’est cependant pas élégant. […] C’est elle dont l’instinct enseigne à prendre d’abord un air, un ton modeste avec ceux dont on a besoin.
Ses traits sont grands et fiers ; de sa ceinture agreste Pend une lyre informe, et les sons de sa voix Emeuvent l’air et l’onde et le ciel et les bois. » Mais il entend leurs pas, prête l’oreille, espère, Se trouble, et tend déjà les mains à la prière1. […] Il les entend, près de son jeune guide, L’un sur l’autre pressés, tendre une oreille avide ; Et Nymphes et Sylvains sortaient pour l’admirer, Et l’écoutaient en foule, et n’osaient respirer ; Car, en de longs détours de chansons vagabondes, Il enchaînait de tout les semences fécondes, Les principes du feu, les eaux, la terre et l’air, Les fleuves descendus du sein de Jupiter, Les oracles, les arts, les cités fraternelles, Et depuis le chaos les amours immortelles5.
De quel air calme vous faites de votre sang des libations à Jupiter Libérateur ! […] Un jour je lui en parlai : — Ma maison est prête, me dit-il, et me menant sur la place, il me montre d’un air joyeux ses pierres taillées, ses poutres équarries, ses planches sciées et rabotées ; vous voyez, me disait-il, ma maison est prête, il ne reste plus qu’à la bâtir.
Il n’y a rien de si bien pensé ni de si bien dit que ce qui a un air naturel et aisé. […] La prosopographie (πρόσωπον) décrit la figure, l’air, le maintien, la pose, les manières d’un homme ou d’un animal. […] On distingue dans la cantate le récit et l’air. Le récit précède et expose le sujet, l’air exprime le sentiment où la réflexion que ce sujet a fait naître. […] Casimir Delavigne a remplacé les airs par des chœurs, et Lamartine a fait une cantate sans aucune allégorie pour les enfants d’une maison de charité.
Voici des métaphores qui pèchent par la bassesse des expressions : Par toi le mol Zéphyr, aux ailes diaprées, Refrise d’un air doux la perruque des prées. […] Ce discours a un air de liberté ; mais, en réalité, il a pour but de plaire à César et de faire l’éloge de sa clémence, afin de sauver Ligarius. […] Voyez-vous des épis effleurant la surface, Camille dans un champ, qui court, vole et fend l’air ? […] Soudain le mont liquide élevé dans les airs Retombe ; un noir limon bouillonne au fond des mers. […] — Comme ces formules sont banales et ont un air négligé, on ne doit les employer, en dehors de l’enseignement familier, qu’avec une grande réserve.