2° Les sujets qui impliquent la confusion des genres. Soit que le sujet admette par sa nature même deux genres opposés, comme le tragique et le comique, le roman et l’histoire, la prose et la poésie, la dissertation et la narration, soit qu’il y ait disparate entre le genre d’esprit de l’auteur et le genre du sujet, le résultat pour le style est un défaut d’unité, de naturel, de solidité.
Il s’arrange cependant de manière que ces aventures se suivent et s’enchaînent, puisque c’est là ce qui constitue le genre même dont nous parlons. […] Ce genre est moins estimé, parce qu’il ne nous apprend à peu près rien d’utile, et qu’il amuse seulement pendant quelques heures. […] C’est dans ce genre que s’est illustré Walter Scott. […] Ce genre fut exploité par beaucoup d’imitateurs, et enfin, se modifiant successivement, il arriva aux formes variées reconnues aujourd’hui.
Ces principes, soit généraux, soit particuliers, nous les avons justifiés par des exemples soigneusement choisis tant sous le rapport moral que sous le rapport littéraire, mais pour lequel nous avons souvent renvoyé au Recueil de Modèles, surtout pour les grands genres. […] Nous avons donc toujours recherché avec soin le but moral de la poésie en général et de chaque genre en particulier, persuadé que l’éducation, comme le dit si justement le savant Évêque d’Orléans, doit former l’esprit à l’intelligence du vrai, le cœur à l’amour du beau, et la vie entière à la pratique du bien. […] L’Écriture nous a fourni des modèles inimitables dans l’élégie, dans la pastorale, dans le genre didactique, et surtout dans l’ode.
Tartuse devait donc triompher ; mais, d’autre part, l’hypocrisie, dans tout le développement que lui donne Tartuse, est si odieuse, que la moralité universelle, la conscience du genre humain réclamait contre ce vice une peine exemplaire. […] Sans quitter Cicéron, nous trouverons dans ses discours de notables exemples de ces divers genres de péroraison. […] » Un beau modèle de péroraison tirée de la personne du juge, c’est celle du Mémoire de Pélisson en faveur de Fouquet, le seul morceau peut-être réellement éloquent qu’ait produit le genre judiciaire en France au xviie siècle. […] Quoi qu’il en soit, il est certain que nul genre d’éloquence ne prête plus que celle de la chaire au pathétique de la péroraison. […] Que l’élève s’habitue à résumer ainsi les ouvrages didactiques qu’il aura lus, il lui sera plus facile de suivre ensuite pour ses propres écrits, si lui-même s’attache au genre sérieux, les règles de récapitulation, de conclusion, tracées par la raison et les rhéteurs.
Le seul passage où il semble établir des distinctions de ce genre se trouve au commencement de son traité sur l’éloquence de Démosthène, traité qui nous est d’ailleurs parvenu acéphale, comme on sait. […] « Ces ornements supposent dans la voix une véhémence qu’on ne doit attendre ni exiger de lui ; il sera simple dans son débit comme dans son style… Son action ne sera ni tragique ni théâtrale ; avec des gestes modérés et l’air du visage, il produira une vive impression ; et sans grimace, il fera voir naturellement dans quel sens il faut l’entendre…, etc. » Il en est de même à propos des autres genres de style. […] Sans le style, il est impossible qu’il y ait un seul bon ouvrage en aucun genre d’eloquence ou de poésie. » Aussi Quintilien comparait-il l’invention et la disposition séparées de l’élocution à une épée qui ne sortirait jamais du fourreau. […] Quelques rhéteurs ont été jusqu’à admettre, pour certains genres d’ouvrages, le style sec ; comme si l’on pouvait jamais supposer pour qualité distinctive d’une classe d’écrits un caractère qui toujours et partout est un défaut. […] L’abbé de Cournand, qui publia en 1781 un poëme des Styles, poétique assez superficielle de certains genres, distingue quatre styles, le simple, le gracieux, le sublime, le sombre.
Les deux grands genres de composition, la narration et le discours, ont leurs préceptes spéciaux en fait de disposition. […] On peut citer comme modèles de genre l’exorde du plaidoyer de M. […] On peut admirer un modèle accompli du genre dans l’oraison funèbre de la Reine d’Angleterre, par Bossuet9. […] La narration oratoire aura en général toutes les qualités du genre narratif10. […] Ce genre de narration par ses mouvements d’éloquence, mérite plutôt d’être défini : une action en récit, que récit d’une action.
Genre dramatique. […] Néanmoins, aucune passion n’est plus universelle ni plus féconde en émotions de tout genre ; aucune n’est d’un effet plus sûr au théâtre, quand elle est maniée habilement. […] C’est un genre mixte entre la tragédie et la comédie. […] Les trois genres de comique peuvent se trouver dans une même pièce, comme, par exemple, dans le Don Juan de Molière. […] Scribe a plusieurs pièces dans ce genre.
Genre… ïambique.] […] Et, dans ce genre, il est le seul.] […] Au genre satyrique.]
Qu’il s’agisse d’un individu, d’une espèce, d’un genre quelconque, la synecdoque suppose l’emploi du plus pour le moins, du moins pour le plus, d’une partie pour une autre, dans un objet unique. […] Souvent le genre est employé au lieu de l’espèce, et l’espèce au lieu du genre : dans la Fontaine, le quadrupède écume, l’arbre tient bon, pour le lion écume, le chêne tient bon ; au contraire, dans Boileau : Et vit-on, comme lui, les ours et les panthères S’effrayer follement de leurs propres chimères, pour les animaux en général. […] Tout cela n’est que le genre pour l’espèce, l’espèce pour le genre, une fraction pour une autre, dans la même unité abstraite.
Un bon moyen de donner à l’imagination l’impulsion dont elle manque, c’est de lire, avant de composer, quelques passages d’un bon auteur, analogues au sujet que l’on doit traiter ; les chrestomathies fournissent toujours des morceaux de ce genre. […] Après s’être exercés quelque temps à reproduire un modèle, ils s’habitueront à penser par eux-mêmes ; ils n’imiteront plus que de loin ; ils pourront transporter dans un autre genre les pensées de l’auteur ; enfin ils se sentiront assez forts pour traiter sans secours tous les sujets qu’on pourra leur proposer. […] Un genre d’exercice qui réunit à la fois l’utilité de la lecture et le charme de la conversation, c’est de lire, non pas seul, mais avec une personne qui soit en état de sentir les beautés ou les défauts du livre, et de vous communiquer ses impressions. […] Les images peuvent se rencontrer dans tous les genres de composition, mais elles sont surtout à leur place dans les genres élevés, dans l’éloquence et dans la poésie ; sans images, la poésie est froide, nue et décolorée, ou plutôt elle n’existe pas.
La critique Lorsque la critique est devenue nécessairement un genre de littérature ; souvent ceux qui l’exerçaient n’ont pas respecté dans les autres un titre qu’il portaient eux-mêmes. […] Mais si le règne de Louis XIV favorisait particulièrement ce genre d’éloquence, son goût juste et noble3, son amour naturel du grand et du beau, ne devaient pas exercer moins d’influence sur toutes les formes que prit alors le génie littéraire. […] Dans tout genre de littérature, toute célébrité durable est un grand titre académique ; et il n’est donné à personne d’amuser impunément le public pendant vingt ans de suite. […] Ce n’est pas lui, homme d’esprit autant que de talent, qui méconnaîtrait tout ce qu’il y a de création littéraire dans le genre de comédie dont vous renouvelez sans cesse les intentions ou la forme. […] Le secret de votre longue prospérité théâtrale, c’est, je crois, d’avoir heureusement saisi l’esprit de notre siècle, et fait le genre de comédie dont il s’accommode le mieux et qui lui ressemble le plus, une comédie vive, dégagée, pressée, non pas un grand tableau d’art, qu’on aurait peu le loisir d’étudier, mais une suite de portraits expressifs qui amusent, qui passent, et dont pourtant on se souvient.
Outre ces lois dictées par la raison, observez que la comparaison varie selon les temps et les genres divers. […] Barbier plusieurs passages de ce genre, sans même parler de ceux où il pousse jusqu’au cynisme le plus effronté. […] Mais le sublime, le nec plus ultra du genre, c’est un des critiques de notre siècle dont les excentricités métaphoriques rempliraient des volumes. […] l’un est d’un romancier moderne qui, dédiant son livre à un peintre, et voulant lui faire sentir que tous deux contribuent à propager les mêmes idées, chacun dans son genre, s’exprime ainsi : « Vous et moi, l’un avec son pinceau, l’autre avec sa plume, nous suivons deux lignes parallèles, qui aboutissent au même point. » Romancier, mon ami, accordez-vous avec M. […] Il va de soi qu’il ne s’agit pas ici des allégories de cette espèce, pas plus que de l’apologue ou de la fable ; ce sont là des genres de composition et non des ligures de style.
A quel genre appartient la lettre ? […] — De quel genre est cette lettre ? […] 7º De quel genre est ce portrait ? […] À quel genre peut-on rapporter ce dialogue ? […] A quel genre appartient cette narration ?
C’est par là, en effet, qu’elle montre les fautes suivies de leurs inévitables châtiments, les desseins longuement préparés et sagement accomplis, couronnés de succès infaillibles ; c’est par là qu’elle élève l’âme au récit des choses mémorables, qu’elle fait servir les grands hommes à en former d’autres, qu’elle communique aux générations vivantes l’expérience acquise aux dépens des générations éteintes, qu’elle expose dans ce qui arrive la part de la fortune et celle de l’homme, c’est-à-dire l’action des lois générales et les limites des volontés particulières ; en un mot, monsieur, c’est par là que, devenue, comme vous le désirez, une science avec une méhode exacte et un but moral, elle peut avoir la haute ambition d’expliquer la conduite des peuples et d’éclairer la marche du genre humain1. […] Ils y verront comment le fils d’un pauvre artisan, ayant lui-même travaillé longtemps de ses mains pour vivre, est parvenu à la richesse à force de labeur, de prudence et d’économie ; comment il a formé tout seul son esprit aux connaissances les plus avancées de son temps, et plié son âme à la vertu par des soins et avec un art qu’il a voulu enseigner aux autres ; comment il a fait servir sa science inventive et son honnêteté respectée aux progrès du genre humain et au bonheur de sa patrie. […] C’est par eux que le genre humain marche de plus en plus à la science et au bonheur. […] En effet, au bout de quelques générations, ce qui était le génie d’un homme devient le bon sens du genre humain, et une nouveauté hardie se change en usage universel.
C’est alors que Fénelon fit voir que les cœurs sensibles, à qui l’on reproche d’étendre leurs affections sur le genre humain, n’en aiment pas moins leur patrie. […] On ne saurait citer un meilleur exemple dans ce genre que la fable des Deux Pigeons. […] Heureusement les auteurs qui ont le courage de cultiver ce genre de littérature sont-ils rares, et peut-être eussions-nous mieux accompli notre devoir, si nous eussions gardé le silence sur leur compte. Mais nous avons la satisfaction de penser que les écrivains eux-mêmes qui se sont égayés dans ce genre, n’ont pas douté qu’il ne fût contraire au bon sens et au bon goût. Nous avons donc peu d’efforts à faire pour dissuader nos jeunes élèves d’un genre de style que leurs auteurs eux-mêmes ont réprouvé d’avance.
Bacon, distinguant les divers sens du mot poésie, choisit justement pour sa division des sciences i celui que j’indique ici ; à ce point qu’il rejette du genre des poèmes les satires, les élégies, les épigrammes et les odes, pour les renvoyer à la philologie et à l’art de l’orateur ; et, au contraire, il regarde comme appartenant à la poésie toutes les histoires fictives, et, par conséquent, les romans, les contes, les fables, les emblèmes des anciens sages et les paraboles des livres saints. […] Ce sera dans l’exposition et l’examen de ces règles particulières, c’est-à-dire à propos des divers genres d’ouvrages, que les premières se trouveront développées successivement, comme nous le verrons. Nous dirons plus tard comment se divisent les poèmes ; quant aux ouvrages en prose, par lesquels nous commençons, nous parlerons : 1º des discours oratoires, ou de l’éloquence parlée ; 2º des lettres, ou de ce qu’on nomme le genre épistolaire ; 5º des ouvrages didactiques ; 4º des ouvrages historiques ; 5º des contes et romans 2.
On pourrait être étonné des nombreuses contradictions, des inconséquences multipliées qui échappent à ces précepteurs fameux du genre humain, si ce défaut même de liaison dans leurs idées et de consistance dans leur doctrine, ne prouvait la nécessité d’un maître plus habile et d’un philosophe plus éclairé. Or, si tout ce qui manque en ce genre à la doctrine philosophique des temps anciens, les philosophes sacrés le réunissent au plus haut degré, il faut bien que celui qui les a inspirés soit ce maître plus habile, ce philosophe plus éclairé, dont nous venons de parler. […] Ce que l’antiquité nous a laissé de plus estimable en ce genre, ce sont, sans contredit, les Pensées d’Épictète et les Réflexions de Marc-Aurèle. […] Aussi est-il, sous plus d’un rapport, l’homme le plus étonnant peut-être de toute l’antiquité ; et nous a-t-il laissé, dans ses seuls ouvrages, des modèles achevés de plus d’un genre de poésie, des préceptes infaillibles en matière de goût, et un cours de morale d’autant plus utile, d’autant plus susceptible de le devenir, que toute l’amertume des leçons y est heureusement déguisée par la douceur du style et les grâces de l’enjouement. […] Pénétré de la lecture des livres saints, enthousiasmé de tous les genres de beautés qui y brillent, le poète anglais y a puisé cette force de pensées qui nous semblent quelquefois gigantesques, parce que nous les mesurons sur la portée ordinaire de nos idées : cette hardiesse de figures qui nous étonne, et cette chaleur vraiment sentimentale, qui nous subjugue et nous entraîne malgré nous.
Le poète rassemble les plus beaux traits de la même espèce, qu’il voit épars dans la nature, et qui peuvent former un tout parfait en son genre. […] Mais il observa attentivement différents avares ; il saisit les plus grands traits d’avarice qu’ils avaient faits ; il y ajouta, d’après la connaissance profonde qu’il avait du cœur humain, d’autres traits qu’il imagina qu’un avare est capable de faire : il réunit tous ces traits, les attribua à son personnage, et, par là, vint à bout d’en composer un caractère parfait dans son genre. […] Nous avons cependant de très beaux vers en ce genre, tels que ceux-ci de Racine : Hé bien, filles d’enfer, vos mains sont-elles prêtes ? […] Ces quatre genres, quoique séparés l’un de l’autre, peuvent se trouver, et se trouvent assez souvent réunis dans un même poème. […] Il ne serait guère possible d’indiquer un poète, qui, dans toutes ses parties, se rapportât exactement à un seul de ces quatre genres.
Il n’y a pas de règle absolue à établir sur la manière de construire un plan ; il dépend toujours de la matière elle-même, du genre de composition et du but que l’on veut atteindre. […] Chaque genre de littérature a ses règles, et nécessite un plan particulier : une ode ne se compose pas comme un drame1. […] Quoique le genre épistolaire doive presque tout son agrément au naturel et à l’abandon, il ne faut pas croire qu’une lettre puisse être écrite sans ordre ni plan. […] Comme notre but est d’appliquer la rhétorique à tous les genres d’écrire, nous ne ferons qu’indiquer sommairement la disposition oratoire : il est rare, du reste, qu’on ait à l’employer dans toute son étendue. […] Nous indiquons, dans la seconde partie de l’ouvrage, le plan qui confient spécialement à chaque genre d’ouvrage.
Il est, je crois, difficile de mettre plus de grâce et de bonté dans la politesse : elle a même un genre d’affabilité qui ne permet pas d’oublier qu’elle est reine, et persuade toujours cependant qu’elle l’oublie. […] De l’arlequinade à ce genre il y a un peu loin. […] Beauzée, à cause de ma grand’maire. » — L’orthographe est un peu blessée ; mais ce genre de jeux de mots est tellement à la mode aujourd’hui que je n’ai pu me refuser à en citer un exemple2. […] Ne faut-il pas, pour admirer l’Apollon, sentir en soi-même un genre de fierté qui foule aux pieds tous les serpents de la terre ?
Tels sont : la définition, le genre, l’espèce, l’énumération des parties d’une chose, etc. […] La division, à sou tour, a amené des définitions de genres, et celles-ci des définitions d’espèces ; de là est venue l’énumération des parties, qui a fourni encore de nouvelles définitions et divisions de genres et d’espèces. […] Considérée relativement à ces deux grands genres, l’invention n’a pas les mêmes principes et ne se sert pas des mêmes moyens. […] L’invention impose à l’orateur des obligations aussi rigoureuses qu’au narrateur, mais elles sont d’un autre genre.
La ballade allemande à une autre forme et un autre caractère : c’est un petit poème d’un genre capricieux et fantastique, qui, sous une forme presque lyrique, contient ordinairement un récit merveilleux, une légende tragique, un rêve, une tradition populaire. […] Hugo s’est aussi essayé avec succès dans ce genre de ballade. […] Les petits genres de poésie dont nous venons de parler sont pour la plupart passés de mode ; ils ont été trop souvent le langage du bel esprit prétentieux, de la galanterie raffinée ; c’était la poésie des ruelles ; l’hôtel de Rambouillet se pâmait à la lecture d’une ballade, d’un rondeau, d’un madrigal : la cour et la ville se partageaient en deux camps, à propos des fades sonnets de Job et d’Uranie, par Benserade et par Voiture.