Un effort de douleur rompant enfin ce long et morne silence, d’une voix entrecoupée de sanglots que formaient dans leurs cœurs la tristesse, la pitié, la crainte, ils s’écrièrent : « Comment est mort cet homme puissant qui sauvait le peuple d’Israël ! […] Chacun trouve en soi la source de sa douleur, et rouvre lui-même sa plaie ; et le cœur, pour être touché, n’a pas besoin que l’imagination soit émue. […] La perte que vous avez faite, et la douleur que vous en avez, vous sont communes avec nous qui l’avons particulièrement aimé et respecté pendant sa vie, et avec tous ceux qui aiment l’Église, dont il a été le très-fidèle et très-zélé défenseur. […] Les peuples répondirent à la douleur de leur prince. […] Les consolations humaines ne viennent ici qu’en dernier lieu ; elles seraient puissantes et efficaces si ces douleurs se consolaient.
Ma douleur serait bien médiocre si je pouvais vous la dépeindre ; je ne l’entreprendrai pas1 aussi. […] J’écrivis à M. de Grignan, vous pouvez penser sur quel ton ; j’allai ensuite chez Madame de La Fayette, qui redoubla mes douleurs par la part qu’elle y prit. […] de Roye et beaucoup d’autres pensèrent mourir de douleur ; mais il fallut se faire violence, et songer aux grandes affaires qu’on avait sur les bras. […] Je pense que le pauvre chevalier de Grignan était bien abîmé de douleur. […] C’est le tableau très-éloquent de la douleur d’une mère apprenant la mort de son fils.
Elle allait et venait du cabinet dans la chambre, en attendant le moment d’aller au passage du roi ; et son maintien, toujours avec ses mêmes grâces, était un maintien de trouble et de compassion que celui de chacun semblait prendre pour douleur. […] Valets et femmes de chambre criaient déjà indiscrètement, et leur douleur prouva bien tout ce que cette espèce de gens allait perdre. […] Parmi ces diverses sortes d’affligés, point ou peu de propos, de conversation nulle, quelque exclamation parfois échappée à la douleur et parfois répondue par une douleur voisine, un mot en un quart d’heure, des yeux sombres ou hagards, des mouvements de mains moins rares qu’involontaires, immobilité du reste presque entière ; les simples curieux et peu soucieux presque nuls, hors les sots qui avaient en partage le caquet, les questions, le redoublement du désespoir et l’importunité pour les autres. […] On y voyait écrite une rage de douleur, non d’amitié, mais d’intérêt ; des intervalles secs, mais profonds et farouches, puis un torrent de larmes et de gestes involontaires, et cependant retenus, qui montraient une amertume d’âme extrême, fruit de la méditation profonde qui venait de précéder. […] Je ne sais pas trop si je réussis bien ; mais au moins est-il vrai que ni joie ni douleur n’émoussèrent ma curiosité, et qu’en prenant bien garde à conserver toute bienséance, je ne me crus pas engagé par rien au personnage douloureux.
Chacun trouve en soi la source de sa douleur, et rouvre lui-même sa plaie ; et le cœur, pour être touché, n’a pas besoin que l’imagination soit émue. […] Je me trouble, messieurs ; Turenne meurt : tout se confond, la fortune chancelle, la victoire se lasse, la paix s’éloigne, les bonnes intentions des alliés se ralentissent, le courage des troupes est abattu par la douleur et ranimé par la vengeance ; tout le camp demeure immobile. […] Sa douleur a vraiment trop de coquetterie académique. […] Les peuples répondirent à la douleur de leur prince. […] Les villes pour lesquelles ce triste spectacle était tout nouveau faisaient paraître une douleur encore plus véhémente que ceux qui l’accompagnaient ; et, comme si en voyant son cercueil on l’eût perdu une seconde fois, les cris et les larmes recommençaient. »
Nos grands orateurs sacrés, Bossuet et Fléchier, offrent un grand nombre d’exemples des effets admirables d’une harmonie majestueuse et sombre, heureusement placés dans des discours où tout respire la douleur. […] « Nobles rejetons de tant de rois, lumières de la France, mais aujourd’hui obscures et couvertes de votre douleur comme d’un nuage, venez voir le peu qui vous reste d’une si auguste naissance, de tant de grandeur, de tant de gloire. […] Des titres, des inscriptions, vaines marques de ce qui n’est plus ; des figures qui semblent pleurer autour d’un tombeau, et de fragiles images d’une douleur que le temps emporte comme tout le reste ; des colonnes qui semblent vouloir porter jusqu’au ciel le magnifique témoignage de votre néant ». […] « Turenne meurt ; tout se confond ; la fortune chancelle ; la victoire se lasse ; la paix s’éloigne : les bonnes intentions des alliés se ralentissent ; le courage des troupes est abattu par la douleur, et ranimé par la vengeance : tout le camp demeure immobile ; les blessés pensent à la perte qu’ils ont faite, et non aux blessures qu’ils ont reçues, etc. ». […] Un effort de douleur rompant enfin ce long et morne silence, d’une voix entrecoupée de sanglots, que formaient dans leurs cœurs la tristesse, la piété, la crainte, ils s’écrièrent : Comment est mort cet homme puissant, qui sauvait le peuple d’Israël !
Tout se change en douleur pour vous, et vos réflexions n’aboutissent qu’à tirer de toutes choses quelque sujet d’accablement. […] Non, les amis que nous avons perdus ne sont point honorés par ces douleurs excessives, qui n’honorent personne, parce qu’elles supposent plus la faiblesse et l’entêtement des âmes qui les éprouvent que la grandeur des pertes qu’on a faites. […] Ce qui honore ceux qui ne sont plus, c’est une douleur modérée, à qui sa modération même permet d’être aussi durable que la vie de celui qui l’éprouve, parce qu’elle ne fatigue ni son âme, ni son corps ; une douleur haute, qui permet aux occupations et même aux délassements de la vie, de passer, en quelque sorte, sous elle ; une douleur calme, qui ne nous met en guerre ni avec le sort, ni avec le monde, ni avec nous-mêmes, et qui pénètre une âme en paix, dans les moments de son loisir, sans interrompre son commerce avec les vivants et avec les morts. […] Vous en êtes digne, et vous en avez besoin ; vous en êtes même plus capable que vous ne pensez, car votre douleur, en ce moment, calomnie votre raison.
Mais c’est aux âmes sensibles à nous dire si la vraie douleur s’exprime avec cette recherche élégante ; si ce style brillant et semé d’antithèses est bien son langage, et si enfin les derniers accents, où s’exhale l’âme entière d’un mourant, sont bien ceux que le poète prête ici à Ézéchias. […] Mais où est le trait essentiel, le cri du sentiment, l’accent vrai de la douleur, presque abattue par le désespoir, et si bien exprimée dans ce peu de mots : du matin au soir, tu vas finir mon existence ; de manè usque ad vesperam finies me. […] unique objet de joie et de douleurs, » Jusqu’au dernier soupir, Sion chère à nos cœurs ! […] Et vos corps glorieux, rappelés à la vie, Renaîtront, possesseurs d’une heureuse patrie, Toujours inaccessible aux tempêtes du sort, Aux traits de la douleur, à la faulx de la mort. […] ……………………………………………… Les larmes cependant coulent de tous les yeux Vingt cris mal étouffés troublent les rits pieux ; L’effort de la douleur rompt toutes les barrières, Et les sanglots confus sont mêlés aux prières.
C’est la nature qui nous donne la voix, cet organe précieux qui sait pénétrer jusqu’au fond du cœur de nos semblables et y porter la joie, la douleur, en un mot toutes les émotions possibles. […] Il y a un ton, un accent pour la colère, et cet accent doit être vif, prompt et coupé ; il y en a un autre pour la douleur et la plainte : il est touchant, égal, mêlé de quelques interruptions, accompagné de gémissements ; un autre encore pour la crainte, humble, hésitant, bas et faible le ton de la violence est pressant, véhément, menaçant, impétueux ; l’accent du plaisir est doux, tendre, plein d’abandon ; le chagrin qui ne cherche point à inspirer la pitié, prend un ton grave, sombre, uniforme. » Telles sont les recommandations générales de Cicéron qui nous semblent fort utiles aux lecteurs ou aux orateurs qui ne veulent point affecter désagréablement leur auditoire par une prononciation froide ou monotone. […] « Ajoutez, dit Quintilien, que la nature leur a donné des larmes, qui s’ouvrent impétueusement un passage dans la douleur et coulent doucement dans la joie : ils ont un grand pouvoir quand ils sont immobiles, ils en ont bien davantage quand ils sont en mouvement.
La douleur s'exprime lentement ; elle demande de la douceur, de l'harmonie, et, quelquefois, de ces suspensions qui peignent avec tant de vérité les mouvements de l'âme oppressée. […] Excusez ma douleur ! […] Ma maison ; j'y verrais une mère fondre en larmes et mourir de douleur. […] Les lettres de condoléance demandent un style grave, mais négligé ; un ton qui marque une douleur vraie. […] de ce dévoûment sublime Le riche est loin ; fier, corrompu, Son cœur a médité le crime, De ma douleur il s'est repu.
Être dans les mains de tout le monde ; se trouver imprimée ; être le livre de divertissement de toutes les provinces, où ces choses-là font un tort irréparable, se rencontrer dans les bibliothèques, et recevoir cette douleur, par qui ? […] Avec la douleur dans l’âme, je vous fais faire des compliments, je plains votre malheur, j’en parle même dans le monde, et je dis assez librement mon avis sur le procédé de madame de la Baume, pour en être brouillée avec elle. […] Ce fut là où M. de Lorges, M. de Roye et beaucoup d’autres pensèrent mourir de douleur ; mais il fallut se faire violence, et songer aux grandes affaires qu’on avoit sur les bras. […] Je pense que le pauvre chevalier de Grignan étoit bien abîmé de douleur. […] Je l’assurai fort de votre douleur.
En contemplant le regard de Niobé4, de cette douleur calme et terrible qui semble accuser les dieux d’avoir été jaloux du bonheur d’une mère, quel sentiment s’élève dans notre sein ! […] J’ai quelquefois une lassitude de souffrir, que je prends pour du soulagement ; cela va deux ou trois jours, et puis la douleur revient plus vive, parce que j’ai repris des forces pour la sentir. […] Bal, l’expression de sa douleur est toute mondaine et féminine. […] Parmi mes amis, il en est qui se sont associés à mon sort avec une admirable générosité ; mais j’ai vu les sentiments les plus intimes se briser contre la nécessité de vivre avec moi dans la solitude, et j’ai passé ma vie depuis huit ans entre la crainte de ne pas obtenir des sacrifices et la douleur d’en être l’objet. »
Tout ce que la grandeur a de vains équipages, D’habillements de pourpre et de suite de pages, Quand le terme est échu, n’allonge point nos jours : Il faut aller tout nus où le destin commande ; Et, de toutes douleurs, la douleur la plus grande, C’est qu’il faut laisser nos amours2. Depuis que tu n’es plus, la campagne déserte A dessous3 deux hivers perdu sa robe verte, Et deux fois le printemps l’a repeinte de fleurs, Sans que d’aucun discours ma douleur se console, Et que ni la raison, ni le temps qui s’envole.
mon pauvre Bayard : c’est avec douleur que je te vois en cet état. […] C’est avec douleur que je vous vois aussi. […] c’est la douleur qui me trouble l’esprit. […] Accablé sous le poids de la douleur, sa langue éloquente ne trouva plus de sons pour l’exprimer. […] la douleur ne me laisse ni la force ni le courage nécessaire pour une fuite lointaine.
. — L’Interjection est un mot dont on se sert pour exprimer un sentiment de l’âme, comme la joie, la douleur, etc. […] La douleur : Aye !
as-tu pensé qu’Andromaque infidèle Pût trahir un époux qui croit revivre en elle, Et que, de tant de morts réveillant la douleur, Le soin de mon repos me fît troubler le leur ? […] Sans pitié, sans douleur au moins étudiée ! […] Que de cris de douleur le temple retentisse : De leur hymen fatal troublons l’événement ; Et qu’ils ne soient unis, s’il se peut, qu’un moment. […] Oui, je te loue, ô ciel, de ta persévérance : Appliqué sans relâche au soin de me punir, Au comble des douleurs tu m’as fait parvenir : Ta haine a pris plaisir à former ma misère ; J’étais né pour servir d’exemple à ta colère, Pour être du malheur un modèle accompli : Hé bien ! […] Cette ironie ressemble au rire effrayant et convulsif qui saisit quelquefois un malheureux dans l’aliénation de la douleur. » 1.
Non seulement vos amis, mais les personnes étrangères partagent vos douleurs — ….. […] mon pauvre Bayard, c’est avec douleur que je te vois en cet état. […] Pendant trois jours je me traînai, aveuglé sur leurs cadavres, et la douleur n’ayant pu me tuer, la faim me fit mourir. […] Et la mort ne termine pas mes douleurs. […] Mais sa douleur n’est rien auprès de l’honneur de sa patrie prête à se couvrir de honte.
cherchant de tous côtés dans cette île sauvage et horrible, je n’y trouvai que la douleur. […] Depuis dix ans je souffrais la honte, la douleur, la faim ; je nourrissais une plaie qui me dévorait ; l’espérance même était éteinte dans mon cœur. […] Partout on entend des cris ; partout on voit la douleur et le désespoir, et l’image de la mort. […] Cependant, aucun gémissement n’échappa de sa bouche, et parmi tant de douleurs, à travers le bruit des coups répétés, on entendait seulement ces mots : Je suis citoyen romain. […] On comptait sur la douleur pour tirer de lui la vérité.
garde pour toi seul ton scrupule frivole : Sois captif dans le cercle obscur et limité Qui fut tracé des mains de l’uniformité ; Aux lois de ton compas asservis Melpomène, Et la douleur de Phèdre et l’amour de Chimène, Ravale à ton niveau l’essor audacieux De l’oiseau du tonnerre égaré dans les cieux ; Meurs d’ennui, j’y consens : sois barbare à ton aise ; Mais ne m’accable pas sous un joug qui me pèse ; N’exige pas du moins, insensible lecteur, Que jamais je me plie à ton goût destructeur. […] ô douleurs ! […] Sur ces bords que la Somme arrose J’irai chercher l’asile où ta cendre repose ; J’irai d’une modeste fleur Orner ta tombe respectée, Et, sur la pierre encorde larmes humectée, Redire ce chant de douleur.
C’est purement de mes nouvelles que vous aurez ; et voyez ma confiance, je suis persuadée que vous aimez mieux celles-là que les autres… Ma fille, aimez-moi toujours : c’est ma vie, c’est mon âme que votre amitié : je vous le disais l’autre jour ; elle fait toute ma joie et toutes mes douleurs. […] Le péril extrême où se trouve mon fils ; la guerre qui s’échauffe tous les jours ; les courriers qui n’apportent plus que la mort de quelqu’un de nos amis ou de nos connaissances, et qui peuvent apporter pis ; la crainte que l’on a des mauvaises nouvelles, et la curiosité qu’on a de les apprendre ; la désolation de ceux qui sont outrés de douleur, et avec qui je passe une partie de ma vie ; l’inconcevable état de ma tante, et l’envie que j’ai de vous voir : tout cela me déchire, me tue, et me fait mener une vie si contraire à mon humeur et à mon tempérament, qu’en vérité il faut que j’aie une bonne santé pour y résister. […] » Et là-dessus elle tombe sur son lit ; et tout ce que la plus vive douleur peut faire, et par des convulsions, et par des évanouissements, et par un silence mortel, et par des cris étouffés, et par des larmes amères, et par des élans vers le ciel, et par des plaintes tendres et pitoyables, elle a tout éprouvé.
Fléchier, après avoir célébré dans sa jeunesse la gloire de Louis XIV1 2, eut la douleur de mourir au moment où tous les fléaux réunis semblaient conspirer la ruine d’une monarchie qu’il avait vue si brillante. […] Turenne meurt ; tout se confond, la fortune chancelle, la victoire se lasse, la paix s’éloigne, les bonnes intentions des alliés se ralentissent, le courage des troupes est abattu par la douleur et ranimé par la vengeance ; tout le camp demeure immobile2. […] Mascaron a bien décrit aussi, dans son oraison funèbre, cet hommage spontané de la douleur publique : « On vit, dit-il, dans les villes par où son corps a passé les mêmes sentiments que l’on avait vus autrefois dans l’empire romain, lorsque les cendres de Germanicus furent portées de la Syrie au tombeau des Césars… » (Tacite, Annales, III, 4.)
Tout ce que la grandeur a de vains équipages, D’habillements de pourpre, et de suite de pages, Quand le terme est échu, n’allonge point nos jours : Il faut aller tout nus où le destin commande ; Et, de toutes douleurs, la douleur la plus grande, C’est qu’il faut laisser nos amours6. Depuis que tu n’es plus, la campagne déserte1 A dessous deux hivers perdu sa robe verte, Et deux fois le printemps l’a repeinte de fleurs, Sans que d’aucun discours ma douleur se console, Et que ni la raison, ni le temps qui s’envole, Puisse faire tarir mes pleurs.
Douleur et reproches de Robert ; adieux d’Ézilda. […] Sylla s’éloigne en frémissant de douleur et de honte. […] De là on retournera auprès du lit de douleur. […] À cette nouvelle, Narsès, frappé comme d’un coup de foudre, mourut de regret et de douleur. […] Auguste aussi faillit mourir de douleur.