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2. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bossuet, 1627-1704 » pp. 89-123

Ce qui est hasard, à l’égard de nos conseils1 incertains, est un dessein concerté dans un conseil plus haut, c’est-à-dire dans ce conseil éternel qui renferme toutes les causes et tous les effets dans un même ordre. […] Mon Dieu, lumière éternelle, c’est la figure de ce qui arrive à mon âme, quand vous l’éclairez. […] Ce qu’il y a d’assuré, c’est la peine de tes rapines, la vengeance éternelle de tes concussions et de ton ambition infinie. […] O éternel Roi des siècles ! […] Cette pensée est le fond des oraisons funèbres ; mais Bossuet renouvelle sans cesse ces sujets d’éternelle méditation.

3. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Massillon, 1663-1742 » pp. 205-215

Quelle folie donc de ne faire aucun usage d’un trésor si inestimable, de prodiguer en amusements frivoles un temps qui peut être le prix de notre salut éternel, et de laisser aller en fumée l’espérance de notre immortalité ? […] Une démarche où la circonspection la plus attentive devrait encore craindre de se méprendre est toujours l’ouvrage des amusements et des goûts puérils de l’enfance : à peine commence-t-on à bégayer, qu’on décide déjà de l’affaire la plus sérieuse de la vie ; et ces paroles irrévocables qui prononcent sur notre destinée sont les premières qu’on nous apprend à former, avant même qu’on nous ait appris à les entendre ; on accoutume de loin notre esprit naissant à ces images suggérées ; le choix d’un état n’est plus qu’une impression portée de l’enfance ; ainsi, avant que nos penchants soient développés, et que nous sachions ce que nous sommes, nous nous formons des engagements éternels, et arrêtons ce que nous devons être pour toujours. […] notre arrêt est prononcé : nos crimes rendent notre condamnation certaine ; on nous laisse encore un jour pour éviter ce malheur et changer la rigueur de notre sentence éternelle ; et ce jour unique, et ce jour rapide, nous le passons indolemment en des occupations vaines, oiseuses, puériles ; et ce jour précieux nous est à charge, nous ennuie : nous cherchons comment l’abréger ; à peine trouvons-nous assez d’amusements pour en remplir le vide : nous arrivons au soir sans avoir fait d’autre usage du jour qu’on nous laisse, que de nous être rendus encore plus dignes de la condamnation que nous avions déjà méritée. […] Qu’on ne prétende pas de là néanmoins que les choses soient égales ; car il y a cette extrême différence, que la violence n’a qu’un cours borné par l’ordre de Dieu, qui en conduit les effets à la gloire de la vérité qu’elle attaque ; au lieu que la vérité subsiste éternellement, et triomphe enfin de ses ennemis, parce qu’elle est éternelle et puissante comme Dieu même. » Nous lisons dans un sermon de Bossuet sur la brièveté de la vie « Quand je fais réflexion sur les diverses calamités qui affligent la vie humaine, entre toutes les autres la famine me semble être celle qui représente mieux l’état d’une âme criminelle, et la peine qu’elle mérite.

4. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Massillon 1643-1743 » pp. 133-138

Quelle folie donc de ne faire aucun usage d’un trésor si inestimable, de prodiguer en amusements frivoles un temps qui peut être le prix de notre salut éternel, et de laisser aller en fumée l’espérance de notre immortalité ! […] Les jours leur paraissent des moments, parce que tous les moments sont à leurs place : le temps ne leur pèse, pas, parce qu’il a toujours sa destination et son usage ; elles trouvent dans l’arrangement d’une vie uniforme et occupée cette paix et cette joie que les hommes cherchent en vain dans le dérangement et dans une agitation éternelle. » La Bruyère a dit : « L’ennui est entré dans le monde par la paresse ; elle a beaucoup de part à la recherche que font les hommes des plaisirs, du jeu, de la société. […] notre arrêt est prononcé : nos crimes rendent notre condamnation certaine ; on nous laisse encore un jour pour éviter se malheur et changer la rigueur de notre sentence éternelle ; et ce jour unique, et ce jour rapide, nous le passons indolemment en des occupations vaines, oiseuses, puériles ; et ce jour précieux nous est à charge, nous ennuis : nous cherchons comment l’abréger ; à peine trouvons-nous assez d’amusements pour en remplir le vide : nous arrivons au soir sans avoir fait d’autre usage du jour qu’on nous laisse, que de nous être rendus encore plus dignes de la condamnation que nous avions déjà méritée » Carême, iv.

5. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Chapitre I. Du Pathétique. » pp. 280-317

Un sépulcre funèbre, où vos noms, où vous-mêmes Dans l’éternelle nuit serez ensevelis. […]         Les feux célestes le couronnent,         Et les flammes qui l’environnent,         Sont ses vêtements éternels. […]         Du seuil des portes éternelles,         Des légions d’esprits fidèles         À sa voix s’élancent dans l’air. […] Il n’est plus temps : il voit la gloire qui l’opprime : Il tombe enseveli dans l’éternel abîme… Et loin des voluptés où fut livré son cœur, Ne trouve devant lui que la rage et l’horreur. […] Mais il n’a plus besoin de foi ni d’espérance : Un éternel amour en est la récompense.

6. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Sainte-Beuve. Né en 1804. » pp. 566-577

Un vrai classique, comme j’aimerais à l’entendre définir, c’est un auteur qui a enrichi l’esprit humain, qui en a réellement augmenté le trésor, qui lui a fait faire un pas de plus, qui a découvert quelque vérité morale non équivoque, ou ressaisi quelque passion éternelle dans ce cœur où tout semblait connu et exploré ; qui a rendu sa pensée, son observation ou son invention, sous une forme, n’importe laquelle, mais large et grande, fine et serrée, saine et belle en soi ; qui a parlé à tous dans un style à lui, et qui se trouve aussi celui de tout le monde, dans un style nouveau, sans néologisme, nouveau et antique, aisément contemporain de tous les âges. […] » vous qu’un sang généreux pousse aux nouvelles et incessantes conquêtes de l’art et du génie, et qu’impatiente, qu’ennuie à la fin cet éternel passé qu’on déclare inimitable, veuillez y songer un peu : les Anciens, si vantés qu’ils soient, ne doivent pas nous inspirer de jalousie : trop de choses nous séparent ; la société moderne obéit à des conditions trop différentes ; nous sommes trop loin les uns des autres pour nous considérer comme des rivaux et des concurrents. […] Or, à part un très-petit nombre de noms grandioses et fortunés qui, par l’à-propos de leur venue, l’étoile constante de leurs destins, et aussi l’immensité des choses humaines et divines qu’ils ont les premiers reproduites glorieusement, conservent ce privilége éternel de ne pas vieillir, ce sort un peu sombre, mais fatal, est commun à qui porte dans l’ordre des lettres le titre de talent et même celui de génie. […] Prémunis par là contre bien des agitations insensées, sachons nous tenir à un calme grave, à une habitude réfléchie et naturelle, qui nous fasse tout goûter selon la mesure, nous permette une justice clairvoyante, dégagée des préoccupations superbes, et, en sauvant nos productions sincères des changeantes saillies du jour et des jargons bigarrés qui passent, nous établisse dans la situation intime la meilleure pour y épancher le plus de ces vérités réelles, de ces beautés simples, de ces sentiments humains bien ménagés, dont, sous des formes plus ou moins neuves et durables, les âges futurs verront se confirmer à chaque épreuve l’éternelle jeunesse.

7. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Bossuet 1627-1704 » pp. 65-83

Que n’avez-vous pensé de bonne heure à vous faire de tels amis, qui maintenant vous tendraient les bras, afin de vous recevoir dans les tabernacles éternels ! […] O Dieu éternel ! […] Inquiétude de l’homme Les mondains, toujours dissipés, ne connaissent pas l’efficace1 de cette action paisible et intérieure qui occupe l’âme en elle-même ; ils ne croient pas s’exercer s’ils ne s’agitent, ni se mouvoir s’ils ne font du bruit ; de sorte qu’ils mettent la vie dans cette action empressée et tumultueuse ; ils s’abîment dans un commerce1 éternel d’intrigues et de visites, qui ne leur laisse pas un moment à eux2. […] Le coup est lâché ; l’enfer n’est pas loin de toi ; ses ardeurs éternelles nous touchent de près, puisque nous en avons en nous-mêmes et en nos propres péchés la source féconde. […] Bossuet revient souvent sur cette idée : « Si vous voulez voir, chrétiens, des peintures de ces gouffres éternels, n’allez pas rechercher bien loin ni ces fourneaux ardents, ni ces montagnes ensoufrées qui vomissent des tourbillons de flammes, et qu’un ancien appelle les cheminées de l’enfer.

8. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre II. De l’emploi des figures dans les écrivains sacrés. »

L’image de l’homme vertueux et l’heureuse influence des bons exemples qu’il donne à la terre, pouvait-elle nous être présentée sous des traits plus justes et plus capables de la faire sentir, que dans la comparaison suivante : Tel un arbre que la nature Plaça sur le courant des eaux, Ne redoute pour ses rameaux Ni l’aquilon ni la froidure : Dans son temps il donne des fruits, Sous une éternelle verdure Par la main de Dieu reproduits. […] 138 … Celui qui fait sa demeure Dans les royaumes éternels ; Qui suit en tous lieux, à toute heure, Les pas incertains des mortels : Celui qui leur envoie un maître, Ce dieu qu’ils osent méconnaître, Ou qu’ils feignent de mépriser, Entend les blasphèmes frivoles Dont ils amusent les idoles Sur eux prêtes à s’écraser. …………………………… 139Fils éternel comme ton père, Je t’engendrai pour les humains. […] Te voilà sans flatteurs, sans cortège, et perdu         Dans les ténèbres éternelles !

9. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — J. Racine. (1639-1699.) » pp. 226-241

Règne, ô Père éternel, Fils, sagesse incréée ;             Esprit saint, Dieu de paix, Qui fais changer des temps l’inconstante durée,             Et ne changes jamais. […] Règne, ô Père éternel, Fils, sagesse incréée,             Esprit saint, Dieu de paix, Qui fais changer des temps l’inconstante durée             Et ne changes jamais 1. […] Dois-je oublier son père à mes pieds renversé, Ensanglantant l’autel qu’il tenait embrassé 1 Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle, Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle ; Figure-toi Pyrrhus, les yeux étincelants, Entrant à la lueur de nos palais brûlants, Sur tous mes frères morts se faisant un passage, Et, de sang tout couvert, échauffant le carnage ; Songe aux cris des vainqueurs, songe aux cris des mourants, Dans la flamme étouffés, sous le fer expirants2 ; Peins-toi dans ces horreurs Andromaque éperdue : Voilà comme Pyrrhus vint s’offrir à ma vue ; Voilà par quels exploits il sut se couronner ; Enfin, voilà l’époux que tu me veux donner. […] Venez-vous m’enlever dans l’éternelle nuit ?

10. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Fénelon, 1651-1715 » pp. 178-204

Qu’ils sont beaux les pieds de ces hommes qu’on voit venir du haut des montagnes apporter la paix2, annoncer les biens éternels, prêcher le salut, et dire : O Sion, ton Dieu régnera sur toi ! […] On ne peut forcer. cette barrière éternelle de la vérité et de la justice. […] L’autre est commune à tous les hommes, supérieure à eux ; elle est parfaite, éternelle, immuable, toujours prête à se communiquer en tous lieux, et à redresser tous les esprits qui se trompent ; enfin incapable d’être jamais ni épuisée ni partagée, quoiqu’elle se donne à tous ceux qui la veulent. […] Il faut songer à rajeunir en Jésus-Christ pour la vie éternelle, et laisser vieillir cet homme extérieur, qui est, selon saint Paul, « le corps du péché ». […] Le peuple juif mérite l’éternelle reconnaissance du genre humain pour avoir conservé, comme dans une arche sainte, le dogme d’un Dieu unique, créateur et providence, au milieu des superstitions païennes qui déshonoraient la raison.

11. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre II. Du Sublime dans les Choses. »

Voilà pourquoi l’immensité de l’espace, l’infini des nombres et la durée éternelle, remplissent l’âme de si grandes idées. […] voyez l’Éternel Prendre au sein de la nuit un air plus solennel.

12. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre II. Les Oraisons ou discours prononcés. »

L’exemple suivant de Massillon le montrera clairement ; il reproche à ceux qui se pressent aux instructions données par les prédicateurs en renom, cette légèreté d’esprit qui les fait s’attacher à des mérites de forme, quand il s’agit pour eux des vérités éternelles : Cependant, parmi tous ceux qui nous écoutent, il en est peu aujourd’hui qui ne s’érigent en juges et en censeurs de la parole sainte. […] Il veut démontrer que si la dépravation de la raison nous fait sentir le besoin que nous avons d’un remède qui la guérisse, les inconstances et les variations éternelles de cette raison apprennent encore à l’homme qu’il ne peut se passer d’un frein et d’une règle qui la fixe. […] L’époux et l’épouse ne sont plus qu’une même cendre ; et tandis que leurs âmes, teintes du sang de Jésus-Christ, reposent dans le sein de la paix, j’ose le présumer ainsi de son infinie miséricorde, leurs ossements, humiliés dans la poussière du sépulcre, selon le langage de l’Écriture, se réjouissent dans l’espérance de leur entière réunion et de leur résurrection éternelle. […] L’orateur chrétien est l’organe de la religion, l’interprète de Dieu même ; il parle à la face des autels, dans le sanctuaire de la Divinité, pour ne traiter que des sujets qui regardent le bonheur ou le malheur éternel de l’homme. […] Le dogme de l’immortalité de l’âme et des récompenses ou des peines éternelles après la mort a fait de ces éloges une œuvre absolument nouvelle, dont l’antiquité païenne ne pouvait avoir aucune idée.

13. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Buffon, 1707-1788 » pp. 282-302

C’est que chaque ouvrage est un tout, et qu’elle travaille sur un plan éternel dont elle ne s’écarte jamais ; elle prépare en silence les germes de ses productions ; elle ébauche par un acte unique la forme primitive de tout être vivant ; elle la développe, elle la perfectionne par un mouvement continu et dans un temps prescrit. […] C’est le seul moyen de fixer quelques points dans l’immensité de l’espace, et de placer un certain nombre de pierres numéraires sur la route éternelle du temps. […] C’est dans les contrées les plus chaudes du nouveau monde que se trouvent toutes les espèces d’oiseaux-mouches ; elles sont assez nombreuses, et paraissent confinées entre les deux tropiques, car ceux qui s’avancent en été dans les zones tempérées n’y font qu’un court séjour ; ils semblent suivre le soleil, s’avancer, se retirer avec lui, et voler sur l’aile des zéphyrs à la suite d’un printemps éternel. […] Avoir parcouru l’un et l’autre hémisphère, traversé les continents et les mers, surmonté les sommets sourcilleux de ces montagnes embrasées où des glaces éternelles bravent également et les feux souterrains et les ardeurs du midi ; s’être livré à la pente précipitée de ces cataractes écumantes, dont les eaux suspendues semblent moins rouler sur la terre que descendre des nues ; avoir pénétré dans ces vastes déserts, dans ces solitudes immenses, où l’on trouve à peine quelques vestiges de l’homme, où la nature, accoutumée au plus profond silence, dut être étonnée de s’entendre interroger pour la première fois ; avoir plus fait, en un mot, par le seul motif de la gloire des lettres, que l’on ne fit jamais par la soif de l’or : voilà ce que connaît de vous l’Europe, et ce que dira la postérité. […] En dépit de quelques erreurs, les hommes lui devront longtemps les doux plaisirs que procurent à une âme jeune les premiers regards jetés sur la nature, et les consolations qu’éprouve une âme fatiguée des orages de la vie en reposant sa vue sur l’immensité des êtres paisiblement soumis à des lois éternelles et nécessaires. »

14. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre X. Petits poèmes. »

Les prés y sont toujours verts, l’ombre toujours fraîche, l’air toujours pur ; un éternel printemps y règne ; il faut donc que les acteurs et les actes aient un caractère de la plus riante douceur. […] C’est une admirable élégie que la consolation adressée par Malherbe à Du Perrier sur la mort de sa fille, où l’on trouve ces beaux vers : Ta douleur, Du Perrier, sera donc éternelle ? […] L’éternel cyprès t’environne ; Plus pâle que la pâle automne, Tu t’inclines vers le tombeau. […]         Les feux célestes le couronnent,         Et les flammes qui l’environnent         Sont ses vêtements éternels. […]         Du seuil des portes éternelles, etc.

15. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre III. Beautés de sentiment. »

La Mort, déployant ses ailes, Couvrait d’ombres éternelles La clarté dont je jouis ; Et dans cette nuit funeste, Je cherchais en vain le reste De mes jours évanouis. […] Ce que l’on admire principalement dans cette belle production, c’est la grande pensée de la religion, qui domine dans tout l’ouvrage, qui en rattache toutes les parties au but que l’auteur se propose, celui de montrer la main d’un Dieu même conduisant tous ces grands mouvements, et de nous ramener aux éternelles vérités de la foi et de la raison, à travers les ruines même entassées par le génie de l’irréligion et de l’erreur. […] Après ce court préambule, Florian commence sa narration : 168Lorsqu’autrefois un juge, au nom de l’Éternel, Gouvernait dans Maspha les tribus d’Israël, Du coupable Juda Dieu permit la ruine. […] C’est sans doute une fort belle figure ; qu’elle est faible, cependant, auprès de celle qui, en l’appelant l’aigle de l’Éternel, place sa chaire dans le ciel, et n’entend plus, dans son éloquence, que la foudre même de Dieu éclatant sur les mortels !

16. (1885) Morceaux choisis des classiques français, prose et vers, … pour la classe de rhétorique

qui peut exprimer tes grandeurs immortelles, Toi qui bien au-dessus des sphères éternelles, Si loin de mes regards, sièges au haut des cieux ? […] N’espérez point revoir vos rives fortunées, Car je vais vous conduire en un terrible lieu, Dans l’éternel enfer et de glace et de feu ! […] Mais ici, dans le domaine de Dieu, les jeux sont éternels. […] Ne vous figurez point que de cette contrée Par d’éternels remparts Rome soit séparée. […] Je n’ai que trop de pente à punir son audace ; Et, si je m’en croyais, ce triomphe indiscret Serait bientôt suivi d’un éternel regret.

17. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Beaumarchais 1732-1799 » pp. 199-202

Beaumarchais 1732-1799 [Notice] Horloger, musicien, chansonnier, dramaturge, acteur comique, homme de plaisir, homme de cour, homme d’affaires, financier, manufacturier, éditeur, armateur, fournisseur, agent secret, négociateur, publiciste, tribun par occasion, plaideur éternel, Pierre Caron de Beaumarchais eut une existence aussi compliquée que l’intrigue de son Figaro. […] Ce qui fera son éternel à-propos, c’est d’être une sorte de manifeste vivant contre les inégalités, justes ou injustes, de la société.

18. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Lamennais 1782-1854 » pp. 243-246

Il faut que les pluies et les glaces de l’hiver, les chaleurs de l’été et ses orages passent sur ce grain à peine germé ; et puis viendra le jour de la moisson, jour plein d’allégresse et de paix, jour des espérances satisfaites, des joies et du repos éternel. […] Et puis le repos, la joie, l’éternelle vision de tout bien.

19. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre IV. Beautés morales et philosophiques. »

Mais qui ne reconnaît à son langage, à ce mélange éternel de morgue et d’apathie, la sécheresse d’une âme absolument vide, et qui ne trouve rien en elle qui la puisse dédommager des vanités qu’elle regrette d’autant plus vivement, qu’elle affecte davantage de les mépriser ? […] c’est qu’il faut en effet quelque chose de plus à l’homme pour remplir l’abîme de son cœur : c’est que les biens fragiles et la gloire périssable du monde n’y portent que du trouble, et n’y laissent que l’ennui qui suit la satiété ; c’est qu’enfin cette amertume qui les accompagne entre dans les desseins éternels de la providence, et n’a d’autre motif que de nous forcer de recourir a ce quelque chose de plus réel et de plus solide. […] De tout temps il s’est élevé des hommes qui, mettant sans façon leur sagesse prétendue à la place de la sagesse éternelle, ont soumis sans pudeur ses œuvres à leur examen, et ses jugements à leurs jugements. L’Éternel lui-même s’est fait un jeu d’abandonner un moment son ouvrage à la puérilité de leurs discussions : Tradidit mundum disputationi eorum (Ecc.)

20. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VIII. de la disposition. — unité, enchainement des idées  » pp. 98-117

Sur la terre, la lutte entre le bien et le mal, entre Joad et Athalie : voilà la variété d’incidents ; au ciel, l’œil de la Providence, incessamment ouvert, et d’où partent, comme autant de rayons glorieux, ses éternels décrets : voilà l’unité de dessein. […] Dominant du point de vue d’un père de l’Eglise tout l’ensemble des faits humains, et les enchaînant l’un à l’autre avec une merveilleuse puissance de génie, il leur assigna pour loi unique et éternelle leur concours à l’accomplissement des desseins de Dieu sur son Eglise. […] De la conduite de l’esprit à l’égard de Jésus, type éternel et universel des vérités morales, dans chacun des actes de sa vie terrestre. […] Non, Sire, les grands se croient tout permis, et on ne pardonne rien aux grands ; ils vivent comme s’ils n’avaient point de spectateurs, et cependant ils sont tout seuls comme le spectacle éternel du reste de la terre.

21. (1883) Morceaux choisis des classiques français (prose et vers). Classe de troisième (nouvelle édition) p. 

Voici le sanctuaire          Où, dans sa grandeur solitaire,          Réside à jamais l’Eternel. […] L’Éternel a brisé son tonnerre inutile ; Et, d’ailes et de faux dépouillé désormais, Sur les mondes détruits le Temps dort immobile. […] Son pied colossal laisse une trace éternelle            Sur le front mouvant du désert. […] Bientôt des étoiles innombrables et d’un éclat éternel brillèrent au sein des ténèbres. […] Dieu même a parlé sur ces bords : les torrents desséchés, les rochers fendus, les tombeaux entrouverts attestent le prodige ; le désert paraît encore muet de terreur, et l’on dirait qu’il n’a osé rompre le silence depuis qu’il a entendu la voix de l’Éternel.

22. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Thiers Né en 1797 » pp. 265-270

Lorsqu’en présence des trônes chancelants, au sein d’assemblées ébranlées par l’accent de tribuns puissants, ou menacées par la multitude, il me restait un instant pour la réflexion, je voyais moins tel ou tel individu passager, que les éternelles figures de tous les temps et de tous les lieux, qui à Athènes, à Rome, à Florence, avaient agi autrefois comme ceux que je voyais se mouvoir sous mes yeux. J’étais à la fois moins irrité et moins troublé, parce que j’étais moins surpris, parce que j’assistais non à une scène d’un jour, mais à la scène éternelle que Dieu a dressée en mettant l’homme en société avec ses passions grandes ou petites, basses ou généreuses, l’homme toujours semblable à lui-même, toujours agité et toujours conduit par des lois profondes autant qu’immuables.

23. (1868) Morceaux choisis des écrivains contemporains à l’usage des classes supérieurs de l’enseignement classique et spécial. Prose et poésie

                      L’éternel mouvement et l’éternel repos15   sont ainsi rapprochés l’un de l’autre. […] Là tout commande le silence : le moindre bruit retentit si loin, qu’aucune parole ne semble digne d’être ainsi répétée dans une demeure presque éternelle ! […] Voilà la destinée très prochaine du grand Napoléon… Quel abîme entre ma misère profonde et le règne éternel du Christ prêché, aimé, adoré, vivant dans tout l’univers ! […] Veut-il se renfermer dans la prédication évangélique, cette science de la morale, cette expérience de l’homme, ces secrets des passions, étude éternelle des philosophes et des orateurs anciens, doivent être dans sa main. […] Ainsi rattaché à sa substance éternelle, l’ordre sort de son abstraction métaphysique et devient l’expression de la pensée divine : dès lors aussi la morale montre son côté religieux.

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