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31. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Madame de Staël, 1766-1817 » pp. 399-408

Madame de Staël 1766-1817 [Notice] Fille d’un homme d’État philosophe, d’un ministre populaire, mademoiselle Necker, depuis baronne de Staël, eut pour première école les graves entretiens d’un monde animé par le voisinage de la tribune, les écrits de Jean-Jacques qu’elle reconnut toujours pour son maître, et les espérances généreuses de rénovation sociale qui firent battre son cœur d’enfant. […] Elle a de l’éloquence et de l’enthousiasme ; elle excelle dans la peinture du monde et du cœur humain. […] Il y avait une telle foule à Fontainebleau qu’on ne pouvait parler qu’à deux ou trois personnes qui jouaient avec nous, et l’on ne retirait du plaisir d’être dans le monde que l’agrément d’être étouffé ; mais c’était surtout autour de la reine2 que les flots de la foule se précipitaient. […] Le goût des spectacles est universel ; car la plupart des hommes ont plus d’imagination qu’ils ne croient, et ce qu’ils considèrent comme l’attrait du plaisir, comme une sorte de faiblesse qui tient encore à l’enfance, est souvent ce qu’ils ont de meilleur en eux : ils sont, en présence des fictions, vrais, naturels, émus, tandis que, dans le monde, la dissimulation, le calcul et la vanité disposent de leurs paroles, de leurs sentiments et de leurs actions. […] Jamais, nous le croyons, jamais sa main paternelle ne nous abandonnera tout à fait dans ce monde, et son image attendrie se penchera vers nous pour nous soutenir avant de nous rappeler1.

32. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Chapitre I. Du Pathétique. » pp. 280-317

        Rarement à courir le monde         On devient plus homme de bien. […] Car quelle créature fut jamais plus propre à être l’idole du monde ? Mais ces idoles que le monde adore, à combien de tentations délicates ne sont-elles pas exposées ? […] L’idée de cette tranquillité comparée avec le fracas du monde entier qui se brise, est une image sublime, et la tranquillité du juste un sentiment sublime. […] Ainsi les âges se renouvellent ; ainsi la figure du monde change sans cesse ; ainsi les morts et les vivants se succèdent et se remplacent continuellement : rien ne demeure ; tout s’use, tout s’éteint.

33. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre IV. — Du Style. »

Il fut donc tendu à monsieur de Bayard un beau pavillon pour se reposer ; et puis, ayant demeuré en cet estat deux ou trois heures, il mourut ; et les Espagnols enlevèrent son corps avec tous les honneurs du monde en l’église, et par l’espace de deux jours luy fut fait service très solennel ; et puis les Espagnols le rendirent à ses serviteurs qui l’emmenèrent en Dauphiné, à Grenoble ; et là, reçu par la pour de Parlement et une infinité de monde, qui l’allèrent recueillir et luy firent de beaux et grands services en la grande église de Nostre-Dame, et puis fui porté en terre à deux lieues de là, chez les Minimes. […] Le morceau que nous citons ici est écrit d’un style noble et harmonieux : il exprime avec force et grandeur la vanité des choses de ce monde, l’instabilité de la fortune et les consolations puissantes de la religion : nous le devons à M.  […] Je ne suis jamais entré dans une vieille église, avec sa vierge, ses saints, ses vitraux qui reflètent en mille couleurs l’enfance de Jésus, sa fuite en Égypte, ou son sublime sacrifice, sans que mon imagination ne m’ait reproduit l’immense mouvement qu’imprima au monde la prédication chrétienne. […] Je te tiens pour l’autel le plus sacré du monde. […] Un tas de nains difformes, Se taillent des pourpoints dans ton manteau de roi ; Et l’aigle impérial qui, jadis, sous ta loi, Couvrait le monde entier de tonnerre et de flamme, Cuit, pauvre oiseau plumé, dans leur marmite infâme.

34. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre V. Analyse de l’éloge de Marc-Aurèle, par Thomas. »

Il ne fut donc pas élevé comme ceux que l’on flatte déjà lorsqu’ils sont encore ignorants et faibles ; un lâche respect ne craignit pas de le fatiguer par des efforts ; une discipline sévère assujétit son enfance au travail ; et parent du maître du monde, il fut forcé à s’éclairer comme le dernier citoyen ». […] La philosophie sur le trône a fait vingt ans le bonheur du monde : c’est en essuyant les larmes des nations, qu’elle a réfuté les calomnies des tyrans. […] Que ne s’arrêtait-il à cette belle phrase : « La philosophie sur le trône a fait vingt ans le bonheur du monde ; c’est en essuyant les larmes des nations qu’elle a réfuté les calomnies des tyrans ». […] Marc-Aurèle, quand Dieu te met à la tête du genre humain, il t’associe pour une partie au gouvernement du monde. […] Maître du monde, tu peux m’ordonner de mourir, mais non de t’estimer.

35. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Louis XIV, 1638-1715 » pp. 146-149

Les bienfaits de la royauté À peine remarquons-nous l’ordre admirable du monde, et le cours si réglé et si utile du soleil, jusqu’à ce que quelque déréglement des saisons ou quelque désordre apparent dans la machine nous y fasse faire un peu plus de réflexion. […] Ce sont les accidents extraordinaires qui lui font considérer ce qu’il en retire ordinairement d’utile, et que1, sans le commandement, il serait lui-même la proie du plus fort, il ne trouverait dans le monde ni justice, ni raison, ni assurance pour ce qu’il possède, ni ressource pour ce qu’il avait perdu ; et c’est par là qu’il vient à aimer l’obéissance, autant qu’il aime sa propre vie et sa propre tranquillité1. […] « La puissance de Dieu se fait en un instant de l’extrémité du monde à l’autre : la puissance royale agit en même temps dans tout le royaume. […] « Que Dieu retire sa main, le monde retombera dans le néant ; que l’autorité cesse dans le royaume, tout sera en confusion. […] Le monde a été ébloui de l’éclat qui l’environnait ; ses ennemis ont envié sa puissance ; les étrangers sont venus des îles les plus éloignées baisser les yeux devant la gloire de sa majesté ; ses sujets lui ont presque dressé des autels ; et le prestige qui se formait autour de lui n’a pu le séduire lui-même. » Glissons ici ce fragment d’une Lettre que Louis XIV écrivait à Philippe V, son petit-fils, roi d’Espagne : « Il y a deux ans que vous régnez, vous n’avez pas encore parlé en maître par trop de défiance de vous-même ; vous n’avez pu vous défaire de votre timidité ; à peine cependant vous arrivez à Madrid, qu’on réussit à vous persuader que vous êtes capable de gouverner seul une monarchie, dont vous n’avez senti jusqu’à présent que le poids excessif.

36. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre VI. — Différents genres d’exercices »

Elle est intitulée : le Tour du monde impromptu. […] Le Tour du Monde impromptu. […] Bougainville fait lever l’ancre, et de Boncourt est forcé de faire le tour du monde. […] J’ai un peu de torts ; mais qui est-ce qui n’en a point dans ce monde ? […] De vous dire qu’il fait ici le plus beau temps du monde ?

37. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Prosateurs

Aye suspectz les abus du monde. […] Veoir le monde ? […] , estre le plus sot et inepte animant du monde. […] Il fait icy le plus beau temps du monde. […] Que ne mesprisons-nous ce monde, lequel en tout est si frêle et imbecile ?

38. (1882) Morceaux choisis de prosateurs et de poètes des xviii e et xix e siècles à l’usage de la classe de rhétorique

Il avait foi dans la vérité, car il a demandé pour elle le droit de régner en ce monde. […] Estrées revint à soi le premier, se secoua, s’ébroua, regarda la compagnie comme un homme qui revient de l’autre monde. […] De cette retraite, habilement choisie pour garantir son indépendance, Voltaire continue à agiter le monde. […] Les gens de lettres font grand bruit de toutes ces petites querelles ; le reste du monde ou les ignore ou en rit. […] Jupiter appelle cela gouverner le monde, et il a tort.

39. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Molière 1622-1673. » pp. 27-43

C’est la chose la plus aisée du monde, et il n’y a si pauvre esprit qui n’en fit autant ; mais pour agir en habile homme, il faut parler de faire bonne chère avec peu d’argent1. […] Je trouve que toute imposture est indigne d’un honnête homme, et qu’il y a de la lâcheté à déguiser ce que le ciel nous a fait naître, à se parer, aux yeux du monde, d’un titre dérobé, à se vouloir donner pour ce qu’on n’est pas. […] il y a plus de quarante ans que je dis de la prose sans que j’en susse rien5 ; et je vous suis le plus obligé du monde de m’avoir appris cela. […] On eut toutes les peines du monde à lui apprendre à lire6 ; et il avait neuf ans qu’il ne connaissait pas encore ses lettres. […] et qu’avez-vous fait dans le monde pour être gentilhomme ?

40. (1867) Morceaux choisis des classiques français, à l’usage des classes supérieures : chefs d’œuvre des prosateurs et des poètes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouvelle édition). Classe de rhétorique

Tout ce monde visible n’est qu’un trait imperceptible dans l’ample sein de la nature. […] Or, à quoi pense le monde ? […] Difficulté de la conversion pour les âmes entrainées par l’amour du monde et des plaisirs. […] Pour la plonger entièrement dans l’amour du monde, il fallait ce dernier malheur : quoi ? […] Mais considérez où vous êtes, et en quelle basse région du monde vous avez été relégué.

41. (1883) Morceaux choisis des classiques français (prose et vers). Classe de troisième (nouvelle édition) p. 

Par toi du moins avec le Roi du ciel je partagerai l’empire : peut-être même régnerai-je sur plus d’une moitié de l’univers, comme l’homme et ce monde nouveau l’apprendront en peu de temps. […] Ils aimaient la guerre avec passion, comme le moyen de devenir riches dans ce monde, et, dans l’autre, convives des dieux. […] Dégoûté du monde et des hommes, il se retira parmi les cénobites les plus austères. […] Il distinguait plus judicieusement qu’homme du monde entre le mal et le pis, entre le bien et le mieux, ce qui est une très grande qualité pour un ministre. […] Il avait assez de religion pour ce monde.

42. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Voltaire, 1694-1778 » pp. 158-174

Nous voyons peu de monde, nous étudions le jour, nous soupons gaiement, nous prenons notre café au lait le lendemain d’un bon souper. […] Les gens de lettres font grand bruit de toutes ces petites querelles ; le reste du monde ou les ignore, ou en rit. […] Nous sommes de l’âge d’or dans notre petit coin du monde où tous les Délices5 vous embrassent. […] Alors je suis mon dieu à moi-même, je sacrifie le monde entier à mes fantaisies, si j’en trouve l’occasion ; je suis sans loi, je ne regarde que moi. […] Voltaire, comme au plupart des vieillards, croyait, volontiers à la fin du monde c’est-à-dire se lamentait souvent sur la décadence du goût, de l’esprit et des arts.

43. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Saint-Marc Girardin. Né en 1801. » pp. 534-541

Les stoïciens de l’Empire conspirent peu ; ils ne cherchent pas à délivrer le monde de ses tyrans : ils se contentent de pourvoir à leur honneur par leur silence au sénat, et par un suicide paisible, quand l’empereur demande leur mort. […] Vous mourez, satisfait de sortir d’une vie où la vertu n’a rien à faire qu’à s’envelopper de sa majesté et à se garder de toute souillure ; vous mourez sans ostentation comme sans espoir, ne croyant pas que le monde vaille la peine que vous lui donniez un exemple ou que vous fassiez un vœu pour lui. […] — Rien moins, Thraséas, que d’aider par sa mort à régénérer le monde, et de verser son sang pour Dieu. […] Sa mort est une de ces morts bénies qui changeront le monde ; la vôtre est un beau et inutile spectacle. […] Tantôt les événements sont bizarres et impossibles ; tantôt les caractères sont exagérés et faux ; ce sont des aventures qu’on ne rencontre jamais, des vertus qui ne sont pas de ce monde, et des vices aussi extraordinaires que les vertus.

44. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Victor Hugo Né à Besançon en 1802 » pp. 540-556

Chez lui, tout est forme et couleur ; le monde moral et le monde physique se confondent ; les sentiments sont des sensations, les idées ont des contours, l’abstrait prend un corps, et l’invisible même veut qu’on le voie. […] Tout commence en ce monde, et tout finit ailleurs2. […] Mais moi, sous chaque jour courbant plus bas ma tête, Je passe, et, refroidi sous ce soleil joyeux, Je m’en irai bientôt, au milieu de la fête, Sans que rien manque au monde immense et radieux1 ! […] Victor Hugo : « Entreprenant, multiple, divers, infatigable, son talent s’approprie le monde entier. […] Tous les temps, tous les aspects du monde physique et moral, l’histoire et la spéculation, la méditation intime et le fracas des événements, les délices du foyer et les préoccupations de la politique, le gigantesque, l’imperceptible, le rationnel et le fantastique, le beau et le difforme se donnent rendez-vous dans ses vers.

45. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Balzac. (1594-1655.) » pp. 2-6

Jésus-Christ a ainsi traité les sages du monde : de cette sorte il a pacifié leurs querelles et leurs guerres. […] Ou le monde est éternel, ou il a eu un commencement ; ou l’âme de l’homme meurt avec le corps, ou il y a une seconde vie pour elle après celle-ci : voilà toute la satisfaction que vous donneront les savants de la Grèce et les habiles de Rome. […] Depuis la publication de cette doctrine, nous disons hautement et affirmativement que le monde ne s’est pas bâti lui-même, mais qu’il y a je ne sais quoi de plus vieux et de plus ancien qui a travaillé à une si admirable architecture. […] Il devait périr, cet homme fatal1, il devait périr, dès le premier jour de sa conduite, par une telle ou telle entreprise ; mais Dieu se voulait servir de lui pour punir le genre humain et tourmenter2 le monde : la justice de Dieu se voulait venger et avait choisi cet homme pour être le ministre de sa vengeance. […] Cette main invisible, ce bras qui ne paraît pas, donne les coups que le monde sent ; il y a bien je ne sais quelle hardiesse qui menace de la part de l’homme ; mais la force qui accable est toute de Dieu1.

46. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Racine 1639-1699 » pp. 415-440

Avant la naissance du monde… Dandin, bâillant. […] Avant donc La naissance du monde et sa création, Le monde, l’univers, tout, la nature entière Était ensevelie au fond de la matière. […] Ma foi, je n’y conçois plus rien ; De monde, de chaos, j’ai la tête troublée. […] Le poëte entend par là que la lumière du jour prend possession pleine et entière du monde qui se réveille. […] Ici le premier vers, Que Dieu veut être aimé, est pour tout le monde ; le second et le quatrième sont pour Athalie, et l’application ne lui échappe pas ; car elle répond par ce premier mot très-remarquable : J’entends.

47. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Chateaubriand, 1768-1848 » pp. 409-427

Qui dira le sentiment qu’on éprouve en entrant dans ces forêts aussi vieilles que le monde, et qui seules donnent une idée de la création telle qu’elle sortit de la main de Dieu ? […] Une espèce de sauvage, presque nu, pâle et miné par la fièvre, garde ces tristes chaumières : on dirait qu’aucune nation n’a osé succéder aux maîtres du monde dans leur terre natale, et que les champs sont tels que les a laissés le soc de Cincinnatus, ou la dernière charrue romaine. […] Une âme telle que la vôtre, dont les amitiés doivent être durables, se persuadera malaisément que tout se réduit à quelques jours d’attachement dans ce monde dont les figures passent si vite, et où tout consiste à acheter si chèrement un tombeau. […] Le monde, ennemi de sa longue domination, avait premièrement brisé et fracassé toutes les pièces de ce corps admirable, et parce qu’encore tout mort, renversé et défiguré, il lui faisait horreur, il en avait enseveli la ruine même. Que ces petites montres de sa ruine qui paraissent encore au-dessus de la bière, c’était la Fortune qui les avait conservées pour le témoignage de cette grandeur infinie que tant de siècles, tant de feux, la conjuration du monde réitérée à tant de fois à sa ruine, n’avaient pu universellement éteindre.

48. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — De Maistre 1753-1821 » pp. 210-213

Le monde politique est aussi réglé que le monde physique ; mais comme la liberté de l’homme y joue un certain rôle, nous finissons par croire qu’elle y fait tout3 L’idée de détruire ou de morceler un grand empire est souvent aussi absurde que celle d’ôter une planète du système planétaire. […] Chaque jour, en rentrant chez moi, je trouve ma maison aussi désolée que si vous m’aviez quitté hier ; dans le monde, la même idée me suit et ne m’abandonne presque pas. […] Tu peux bien te fier sur ma tendresse, et je puis aussi t’assurer que l’idée de partir de ce monde sans te connaître est une des plus épouvantables qui puissent se présenter à mon imagination.

49. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXV. des figures. — figures par développement et par abréviation  » pp. 353-369

Mais quand Bossuet veut faire sentir aux grands du monde tout le néant des grandeurs humaines, les faire pâlir et frissonner à l’idée des formidables coups de surprise de la mort, ah ! […] Il y a des endroits où il faut appeler Paris, Paris, et d’autres où il faut l’appeler capitale du royaume. » — Il fait nuit et Didon veille. — On comprend que le sentiment demande une périphrase pour la première idée, et que cette périphrase exprimera nécessairement le contraste entre le repos silencieux de la nature entière et l’orageuse insomnie de l’infortunée : C’était l’heure où tout dort dans une paix profonde ; Un calme universel assoupissait le monde ; Ni les flots de la mer, ni les feuilles des bois N’exhalaient un murmure, une plainte, une voix ; Les étoiles glissaient dans le ciel taciturne, Les troupeaux réunis sous le bercail nocturne, Les oiseaux colorés, les voyageurs errants Qui peuplent les forêts ou les lacs transparents, Mollement engourdis dans leurs muets domaines, Savouraient le repos et l’oubli de leurs peines, Mais la fille de Tyr veille avec ses ennuis110. […] Dans Massillon : « Ce monde ennemi de Jésus-Christ, ce monde qui ne connaît pas Dieu, ce monde qui appelle le bien un mal et le mal un bien, ce monde, tout monde qu’il est, respecte encore la vertu, envie quelquefois le bonheur de la vertu, cherche souvent un asile et une consolation auprès des sectateurs de la vertu, rend même des honneurs publics à la vertu. » Inutile de s’arrêter à la répétition, ni d’en énumérer toutes les variétés indiquées par les rhéteurs.

50. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Madame de Sévigné, 1626-1696 » pp. 76-88

Je fus hier au Buron2, j’en revins le soir ; je pensai pleurer en voyant la dégradation de cette terre : il y avait les plus vieux bois du monde ; mon fils, dans son dernier voyage, y a fait donner les derniers coups de cognée. […] Avec la douleur dans l’âme, je vous fais faire des compliments, je plains votre malheur, j’en parle même dans le monde, et je dis assez librement mon avis sur le procédé de madame de la Baume, pour en être brouillée avec elle. […] Justement : elle me fit tous les biens du monde, et je vous en remercie. […] Si l’on pouvoit écrire tous les jours, je m’en accommoderois fort bien ; je trouve même quelquefois le moyen de le faire, quoique mes lettres ne partent pas ; mais le plaisir d’écrire est uniquement pour vous ; car à tout le reste du monde on voudroit avoir écrit, et c’est parce qu’on le doit. […] Corbinelli (1615-1716) descendait d’une illustre famille de Florence, venue en France à la suite de Catherine de Médicis ; il cultiva les lettres avec succès, (Bayle l’appelle un des beaux et bons esprits d’aujourd’hui), et était fort répandu dans un monde d’élite.

51. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Pascal, 1623-1662 » pp. 56-71

Sainte-Beuve a dit de lui : « On s’élève, on se purifie, dans les heures qu’on passe en tête à tête avec cet athlète, ce héros, ce martyr du monde moral et invisible. […] Tout ce monde visible n’est qu’un trait imperceptible dans l’ample sein de la nature3 ; nulle idée n’en approche. […] C’est la plus belle place du monde : rien ne peut le détourner de ce désir, et c’est la qualité la plus ineffaçable du cœur de l’homme. […] Or, à quoi pense le monde ? […] Tous les rois et tous les savants en étoient autant d’ébauches qui ne remplissoient qu’à demi leur attente ; et à peine nos ancêtres ont pu voir en toute la durée du monde un roi médiocrement savant ; ce chef-d’œuvre étoit réservé pour votre siècle.

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