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84. (1865) De la Versification française, préceptes et exercices à l’usage des élèves de rhétorique. Première partie. Préceptes. Conseils aux élèves.

Chez Boileau, en effet, la faculté qui domine toutes les autres, au point que parfois la sensibilité semble en être émoussée, l’imagination entravée, l’invention amoindrie, cette faculté, c’est la raison : la raison éprise du vrai, et trouvant que le vrai seul est aimable  ; la froide raison, jugement, bon sens, ou sens commun, peu importe le nom formulant ses arrêts dans un langage plus ou moins poétique15. Chez Racine, c’est la sensibilité surtout qui est mise en jeu, mais sans nuire en aucune manière à la solidité de sa raison et de son jugement, non plus qu’à la délicatesse de son bon goût. […] Malheureusement, parfois, comme dans les vers cités en tête du chapitre, les arrêts de Boileau, Ces fidèles échos d’un jugement si sûr, Sont, d’un ton un peu froid, un peu sec, un peu dur.

85. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Fénelon, 1651-1715 » pp. 178-204

Quand je me trompe, elle ne perd pas sa droiture ; quand je me détrompe, ce n’est pas elle qui revient au but ; c’est elle qui, sans s’en être jamais écartée, a l’autorité sur moi de m’y rappeler et de m’y faire revenir : c’est un maître intérieur, qui me fait taire, qui me fait parler, qui me fait croire, qui me fait douter, qui me fait avouer mes erreurs ou confirmer mes jugements ; en l’écoutant, je m’instruis ; en m’écoutant moi-même, je m’égare. […] C’est elle qui donne des pensées uniformes aux hommes les plus jaloux et les plus irréconciliables entre eux ; c’est elle par qui les hommes de tous les siècles et de tous les pays sont comme enchaînés autour d’un certain centre immobile, et qui les tient unis par certaines règles invariables, qu’on nomme les premiers principes, malgré les variations infinies d’opinions qui naissent en eux de eurs passions, de leurs distractions et de leurs caprices, pour tous leurs autres jugements moins clairs. […] Voyez aussi dans Rollin, Traité des Études, livre IV, chap I, art. 1, § 3, Jugement des anciens sur Démosthène, et § 4, De l’éloquence de Cicéron comparée avec celle de Démosthène.

86. (1879) L’art d’écrire enseigné par les grands maîtres

La finesse est la part du jugement, la géométrie est celle de l’esprit. […] Il ne faut point mettre un ridicule où il n’y en a point : c’est se gâter le goût, c’est corrompre son jugement et celui des autres. […] Il dit que c’est détruire la rhétorique, de la séparer de la philosophie ; que c’est faire des orateurs, des déclamateurs puérils sans jugement. […] Ensuite il loue le jugement de celui au discernement duquel les déesses mêmes s’étaient soumises. […] L’éloquence de Démosthène ne convient point à Thucydide ; une harangue directe qu’on met dans la bouche d’un héros, qui ne la prononça jamais, n’est guère qu’un beau défaut, au jugement de plusieurs esprits éclairés.

87. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre XXIII. » pp. 124-127

Le Jugement des armes.]

88. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Modèles

Il rougit de lui-même ; son jugement et sa raison ne servent qu’à le dégrader et à le décourager à ses propres yeux. […] Le jugement de l’humanité sur un de ses membres ; or l’humanité a toujours raison. […] Ce qui distingue la réputation de la gloire, c’est que la réputation est le jugement de quelques-uns, et que la gloire est le jugement du plus grand nombre, de la majorité dans l’espèce humaine. […] La gloire est le jugement de l’humanité, et un jugement en dernier ressort : on peut en appeler des coteries et des partis à  humanité ; mais de, humanité à qui en appeler en ce monde ? […] Chargée du poids du jugement inexorable, sa tête auguste fléchit ; elle retombe sur son cœur.

89. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Prosateurs

Tayme aussi Lucain, et le practique volontiers, non tant pour son style, que pour sa valeur propre et vérité de ses opinions et jugements. […] Au demourant, messieurs, prenez garde, quand vous viendrez au jugement, de n’y apporter poinct d’inimitié, ne de faveur, ne de prejudice, Je veois beaucoup de juges qui s’ingerent et veulent estre du jugement des causes de ceulx à qui ils sont amys ou ennemys. […] Pour moi, quoique je susse les incommodités qui suivent nécessairement les siéges qui se font en cette saison, j’arrêtai mon jugement. […] Je le considère avec un jugement que la passion ne fait pencher ni d’un côté ni d’autre, et je le vois des mêmes yeux dont la postérité le verra. […] Vous protestez de ne me point dire d’injures, et lorsqu’incontinent après vous m’accusez d’ignorance en mon métier, et de manque de jugement en la conduite de mon chef-d’œuvre, vous appelez cela des civilités d’auteur ?

90. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VII. Des différents exercices de composition. »

Il n’y a pas de règles à donner à ce sujet : le goût et le jugement sont les seuls guides à suivre : mais une fois qu’on a adopté un ton, il faut le soutenir fidèlement jusqu’à la fin. […] Rien n’est plus propre à exercer à la fois le jugement et le goût de la jeunesse que ce genre de composition : c’est une sévère gymnastique de pensée qui aiguise l’esprit et donne du nerf à l’imagination. […] L’existence de Dieu, démontrée par les phénomènes de la nature et par la voix du cœur ; la conscience, loi morale du devoir, qui incline doucement l’âme au joug de la vertu et lui fait fuir le vice ; les passions avec leurs bons et leurs mauvais côtés ; les goûts, les instincts avec leurs tendances diverses ; les secrets de la nature que l’on cherche à pénétrer ; les sciences et leurs merveilleux résultats,, les lettres avec leur influence et leur utilité ; la critique @ littéraire, si propre à donner de la finesse et du tact au jugement ; les arts avec les trésors de poésie qu’ils renferment ; tout cela peut être l’objet de dissertations animées et ingénieuses où l’esprit et le style trouvent à déployer sans cesse de nouvelles ressources. […] Obligés de réfléchir et de formuler leur jugement, ils s’habitueront à distinguer ce qui est bon de ce qui est mauvais ; ils perfectionneront en eux le goût du beau, et se formeront des principes d’esthétique qu’ils auront souvent occasion d’appliquer.

91. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre XV. » pp. 109-111

Il faut bien distinguer ces jugements sérieux des plaisanteries comiques dont la tradition s’est perpétuée depuis le vieux poëte Simonide d’Amorgos (poëme Sur les Femmes, dans les Lyrici varii de la collection de Boissonade, et dans les Lyrici græci de Bergk) et l’école d’Aristophane jusqu’à Molière, en passant par Érasme (Éloge de la Folie, chap. 

92. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Voltaire 1694-1778 » pp. 445-463

Ayons le cœur et l’esprit hospitaliers. » Je lis dans La Bruyère : « Appellerai-je homme d’esprit celui qui, borné et renfermé dans quelque art, ou même dans une certaine science qu’il exerce dans une grande perfection, ne montre hors de là ni jugement, ni mémoire, ni vivacité, ni mœurs, ni conduite ; qui ne m’entend pas, qui ne pense point, qui s’énonce mal ; un musicien, par exemple, qui, après m’avoir comme enchanté par ses accords, semble s’être remis avec son luth dans un même étui, on n’être plus, sans cet instrument, qu’une machine démontée, à qui il manque quelque chose, et dont il n’est plus permis de rien attendre ?  […] Ayons le cœur et l’esprit hospitaliers. » Je lis dans La Bruyère : « Appellerai-je homme d’esprit celui qui, borné et renfermé dans quelque art, ou même dans une certaine science qu’il exerce dans une grande perfection, ne montre hors de là ni jugement, ni mémoire, ni vivacité, ni mœurs, ni conduite ; qui ne m’entend pas, qui ne pense point, qui s’énonce mal ; un musicien, par exemple, qui, après m’avoir comme enchanté par ses accords, semble s’être remis avec son luth dans un même étui, on n’être plus, sans cet instrument, qu’une machine démontée, à qui il manque quelque chose, et dont il n’est plus permis de rien attendre ? 

93. (1811) Cours complet de rhétorique « Préface. »

Ce qu’il eût suffi d’indiquer dans d’autres temps, il le faut clairement énoncer aujourd’hui ; il faut attaquer sans crainte et combattre sans relâche toutes les erreurs du goût, parce qu’elles sont devenues des erreurs de morale ; toutes les hérésies littéraires, parce que l’esprit ne se trompe jamais qu’aux dépens du cœur, et que la corruption des mœurs est partout la conséquence inévitable de la dépravation du jugement.

94. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre IV. » pp. 78-81

) Eût-il toutefois adopté ce jugement de Saint-Évremond ?

95. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Seconde section. Des grands genres de poésie — Chapitre II. Du genre didactique. » pp. 161-205

Ce genre est donc pour le poète une carrière honorable, où peuvent briller à la fois son génie, son savoir et son jugement. […] La satire est un petit poème, un discours en vers dans lequel on attaque directement les vices, les ridicules et le mauvais goût, pour corriger les hommes, ou au moins pour empêcher les erreurs, les travers et les faux jugements de devenir funestes en se propageant. […] Ainsi le poète satirique doit éviter les personne· lités, la prévention dans ses jugements, et faire disparaître ce que la critique a toujours de désagréable sous l’urbanité du reproche.

96. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Guizot Né en 1787 » pp. 247-250

C’est la jeunesse, ce sont ses ignorances naturelles et ses préoccupations passionnées qui nous rendent exclusifs et âpres dans nos jugements sur autrui.

97. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Silvestre de Sacy Né en 1804 » pp. 271-274

Le goût est pour lui une sorte de conscience morale, et ses jugements nous font comprendre les relations nécessaires qui unissent le bien dire au bien penser.

98. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre III. Beautés de sentiment. »

Que les jeunes gens, qu’abuse si facilement tout ce qui a l’air de la grandeur ou de la vérité, apprennent et observent de bonne heure, que trois sortes de néologisme défigurent successivement les langues : celui d’abord qui introduit sans nécessité des mots nouveaux : celui qui donne aux mots anciens une acception qu’ils n’avaient pas ; et ici commence la dépravation du jugement et le désordre dans les idées : mais celui de tous qui est le plus dangereux, celui qu’il faut fuir avec le plus de soin, c’est celui, sans doute, qui familiarise insensiblement avec l’habitude de donner tout aux mots, et rien au sentiment ; de se faire un jargon aussi ridicule que barbare, où l’âme et le cœur ne sont et ne peuvent être pour rien, puisqu’il n’offre ni idées, ni sentiments, et que la langue seule en fait les frais. […] C’est dans cette pieuse et belle élégie que se trouvent, au jugement de La Harpe, vingt des plus beaux vers de la langue française.

99. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Saint-Simon 1625-1695 » pp. 144-147

Il faut se défier de ses portraits et de ses jugements ; car la passion l’aveugle, quand elle ne l’éclaire pas.

100. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome II (3e éd.)

Il serait difficile de trouver un auteur qui ait appliqué à l’étude de l’art oratoire plus de goût et de jugement que Quintilien. […] Aussi passe-t-il pour un écrivain plus agréable, et produit-il une impression plus vive, quoiqu’il lui soit inférieur pour le jugement et l’exactitude. […] C’est cependant un historien plein de candeur et de jugement ; mais il doit à ce manque d’unité d’être plus difficile à lire et d’exciter moins d’intérêt. […] Pope, c’est le jugement et l’esprit, auxquels il savait joindre une expression heureusement concise, et une versification très harmonieuse. […] Mais on doit, je pense, autant d’éloges au jugement du poète qu’à son génie.

101. (1863) Principes de rhétorique et de littérature appliqués à l’étude du français

2. — La critique est le sentiment du beau et du vrai appliqué au jugement des arts. […] Raisonner, c’est comparer deux propositions ou jugements, et, de cette comparaison, tirer une proposition nouvelle, que l’on appelle conclusion. […] (Car il est impossible que la peine et la récompense ne soient que pour les jugements humains, et qu’il n’y ait pas en Dieu une justice dont celle qui reluit en nous n’est qu’une étincelle.) […] « Où a-t-on pris que la peine et la récompense ne soient que pour les jugements humains, et qu’il n’y ait pas en Dieu une justice dont celle qui reluit en nous ne soit qu’une étincelle ? […] « Que restait-il à notre princesse, que restait-il à une âme qui, par un juste jugement de Dieu, était déchue de toutes les grâces, et ne tenait à Jésus-Christ par aucun lien ?

102. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Bourdaloue 1632-1704 » pp. 89-93

S’il n’y avait point de jugement dernier, voilà ce que l’on pourrait appeler le scandale de la Providence, la patience des pauvres outragés par la dureté et par l’insensibilité des riches3.

103. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre IV. Beautés morales et philosophiques. »

De tout temps il s’est élevé des hommes qui, mettant sans façon leur sagesse prétendue à la place de la sagesse éternelle, ont soumis sans pudeur ses œuvres à leur examen, et ses jugements à leurs jugements.

104. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre premier. Objet du genre judiciaire. »

Il s’attache donc essentiellement à tout ce qui peut devenir dans l’homme le mobile d’une action ; il parle aux passions ; il cherche à toucher le cœur, autant qu’à convaincre le jugement.

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