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33. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XII. du corps de l’ouvrage. — portrait, dialogue, amplification  » pp. 161-174

N’allez pas exagérer le vice ou la vertu, la beauté ou la laideur, au point que le lecteur se récrie et déclare votre création impossible ; et d’une autre part cependant, que la figure soit assez originale et les traits assez bien accusés pour que l’imagination les accepte à l’instant, et que la mémoire les retienne fidèlement. […] Leur dessin est si naturel, leur coloris si vrai, que vous croyez avoir déjà vu quelque part ce qui n’existe que dans leur pensée, que vous reconnaissez leur modèle, sans l’avoir jamais connu, et qu’une fois admis dans votre imagination, il n’en sort plus. […] Pour les juger mettez-vous à leur place, sinon votre froide et rigoureuse analyse glacera toute imagination, étouffera tout sentiment. […] à propos d’une ridicule motion du Palais-Royal, d’une risible insurrection, qui n’eut jamais d’importance que dans les imaginations faibles, ou dans les desseins pervers de quelques hommes de mauvaise foi, vous avez entendu naguère ces mots forcenés : Catilina est aux portes, et on délibère ! […] Dans Cicéron, dans Bossuet, dans Massillon, dans Rousseau, dans Bernardin de Saint-Pierre, dans Chateaubriand, elle s’adresse plutôt au sentiment ou à l’imagination.

34. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre IV. »

Il se présente naturellement trois manières de développer un sujet : 1° décrire, raconter des faits, ce qui s’adresse à l’imagination ; 2° émouvoir, en cherchant à exciter les passions ; 3° prouver, en s’adressant à l’esprit par le raisonnement. […] Pour réussir à manier les passions en écrivant, il faut avoir l’imagination vive : l’âme qui est fortement frappée, comme un timbre sonore, fait vibrer fortement son émotion dans ses paroles. […] N’oublions pas toutefois que la sensibilité, comme l’imagination, doit être guidée par le jugement et la raison. […] Qu’ils se laissent aller dans leurs compositions à ces élans de l’âme ; qu’ils ne prennent des passions humaines que ce qu’elles ont de pur et d’élevé ; ils perfectionneront ainsi leur sensibilité et leur imagination ; ils s’affermiront dans la voie du bien.

35. (1897) Extraits des classiques français, seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours moyens. Première partie : prose. [Seizième siècle] « Introduction » pp. -

Il charmera les imaginations avides de merveilleux par des fables tragiques ou touchantes, qui attestent déjà des instincts élégants et les vagues réminiscences de l’antiquité. […] Parmi les surprises, les enlèvements, les prodiges et les coups de théâtre brille un rayon d’idéal qui éclaire ces fables attrayantes, dont la profusion atteste le besoin universel des plaisirs choisis que permet l’imagination. […] Politique peu loyal, il éblouira les imaginations par les dehors qui séduisent ; et ce luxe qui alimente les arts épuisera son peuple. […] S’il les pacifie trop volontiers par le doute, et ne remplace pas tout ce qu’il détruit, ses confessions sincères vivront autant que la langue française par l’originalité pittoresque d’une imagination incomparable. […] Son tort fut de croire que l’imitation est l’imagination, et qu’une langue s’improvise du jour au lendemain.

36. (1881) Rhétorique et genres littéraires

2° Figures d’imagination. […] 2° Figures d’imagination. […] Son but est de produire sur l’imagination du lecteur ou de l’auditeur une impression si vive qu’il lui semble voir l’objet. […] Elle est l’attribut spécial du génie, qui ne peut créer sans imagination. […] Boileau a du talent, de l’esprit, beaucoup de goût, peu d’imagination.

37. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre III. Des ornements du style » pp. 119-206

D’autres figures sont employées par les passions ou par l’imagination, pour ajouter de la force au discours. […] Dans le cas même où le sujet prête naturellement aux figures, et où l’imagination les fournit d’elle-même, il faut prendre garde de les prodiguer. […] Faites connaître les principales figures d’imagination. […] Quoique naturellement il n’y ait pas d’affinité entre le son et le mouvement, il y en a une bien réelle dans notre imagination, comme le prouve clairement la liaison entre la musique et la danse. Le poète a donc en son pouvoir de rappeler vivement l’idée de l’espèce de mouvement qu’il veut décrire, en employant des sons qui, dans notre imagination, correspondent à ce mouvement.

38. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXI. des figures  » pp. 289-300

« Dans toutes les langues, dit Voltaire, le cœur brûle, le courage s’allume, les yeux étincellent ; l’esprit est accablé, il se partage, il s’épuise ; le sang se glace, la tête se renverse ; on est enflé d’orgueil, enivré de vengeance, etc. » A ce penchant à l’imitation et à l’association, première source du style figuré, ajoutez la puissante influence qu’une imagination encore vierge et des passions libres et naïves exerçaient sur l’homme primitif. […] En même temps, la raison mieux exercée par l’expérience et l’analyse dissipa les illusions de l’imagination. […] Elles sont fondées, nous l’avons dit aussi, sur des qualités ou des besoins de notre nature, penchant à l’imitation, association d’idées, imagination, passion, etc. ; leurs avantages, sous ce rapport, sont incontestables. […] Sans les figures, le langage, sec et incolore, peut parler encore à la raison, mais il laisse l’imagination froide et inanimée.

39. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Diderot, 1713-1784 » pp. 303-312

Il était la proie de ses idées : de là, les saillies aventureuses d’un style qui participe à l’ardeur de son sang et à la fougue d’une imagination mobile. […] Ses nuits sont aussi touchantes que ses jours sont beaux ; ses ports sont aussi beaux que ses morceaux d’imagination sont piquants. […] Diderot dit ailleurs de Vernet : « Ce qu’il y a d’étonnant, c’est que l’artiste se rappelle ces effets à deux cents lieues de la nature, et qu’il n’a de modèle présent que dans son imagination ; c’est qu’il peint avec une vitesse incroyable ; c’est qu’il dit : Que la lumière se fasse, et la lumière est faite ; que la nuit succède au jour, et le jour aux ténèbres, et il fait nuit, et il fait jour ; c’est que son imagination, aussi juste que féconde, lui fournit toutes ces vérités ; c’est qu’elles sont telles, que celui qui en fut spectateur froid et tranquille au bord de la mer en est émerveillé sur la toile ; c’est qu’en effet ces compositions prêchent plus fortement la grandeur, la puissance, la majesté de la nature, que la nature même.

40. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VII. Des différents exercices de composition. »

C’est toujours la même imagination vive, le même abandon, le même mouvement dans le style ; mais comme l’effet en est différent ? […] Dans quelles rêveries ils nous plongent, soit que l’imagination s’enfonce sur les mers du Nord, au milieu des frimas et des tempêtes, soit qu’elle aborde sur les mers du midi, à des îles de repos et de bonheur ! […] Rien n’est plus propre à exercer à la fois le jugement et le goût de la jeunesse que ce genre de composition : c’est une sévère gymnastique de pensée qui aiguise l’esprit et donne du nerf à l’imagination. […] Il faut que la philosophie, quand elle veut nous plaire dans un ouvrage de goût, emprunte la voix de l’harmonie, la vivacité et le coloris de l’imagination. » (Guénard, Discours couronné par l’Académie française, en 1755.) […] Je cherche en vain dans l’âme de la captive une croyance, une aspiration vers le ciel ; j’y vois une gracieuse imagination, avec l’empreinte du caractère antique : mais la composition est païenne par le fond, comme elle l’est par la forme.

41. (1854) Éléments de rhétorique française

Tous les faits nouveaux que la science a découverts ou que l’imagination a créés ont été distingués parties tenues particuliers. […] Dans les premiers temps, les passions et l’imagination étaient toutes-puissantes sur l’homme. […] L’ordre du latin est plus animé : il retrace plus vivement la pensée, telle qu’elle s’est présentée à l’imagination. […] La première décrit les faits : elle s’adresse à l’imagination. […] Comment prévoir toutes les manières dont la raison, la passion et l’imagination peuvent combiner les idées ?

42. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Fénelon, 1651-1715 » pp. 178-204

Est-ce un pamphlet ou le jeu d’une imagination tendre et subtile qu’inspire la passion du beau et du bien ? […] Toutefois, son imagination subtile lui tendit quelques piéges. […] C’est ce qu’un déclamateur livré à son imagination et sans science ne peut discerner. […] Les traits principaux de cette peinture du véritable orateur se trouvent déjà dans les Dialogues ; mais nulle part ils n’y sont réunis avec autant d’imagination et de force. […] Non, il n’y a que les sens et l’imagination qui aient perdu leur objet.

43. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Jean-Jacques Rousseau, 1712-1778 » pp. 313-335

Tourmenté par une imagination ombrageuse, il finit par tomber dans une noire misanthropie qui devint son supplice ; peut-être abrégea-t-il par le suicide une existence solitaire et farouche que consumaient des craintes sans cause, et un orgueil sans bornes. […] Formé tout seul, sans maîtres, à l’école de la souffrance, son talent se compose d’imagination et de sensibilité, de logique et de véhémence ; il a de l’orateur le mouvement, la force, la dialectique pressante, l’abondance et la flamme. […] Je trouve mieux mon compte avec les êtres chimériques que je rassemble autour de moi, qu’avec ceux que je vois ; et la société dont mon imagination fait les frais dans ma retraite achève de me dégoûter de toutes celles que j’ai quittées. […] L’extrême agitation que je viens d’éprouver vous a pu faire porter un jugement contraire ; mais il est facile de voir que cette agitation a son principe dans une imagination déréglée, prête à s’effaroucher sur tout, et à porter tout à l’extrême. […] « C’est une chose bien singulière que mon imagination ne se monte jamais plus agréablement que quand mon état est le moins agréable, et qu’au contraire elle est moins riante lorsque tout rit autour de moi.

44. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre XVII. » p. 114

« « L’heureux don d’être affecté fortement par les objets, et de pouvoir reproduire leur image absente ou évanouie, est le fond même de l’imagination. La puissance de modifier ces images pour en former de nouvelles, est encore indispensable  sans quoi l’imagination serait captive dans le cercle de la mémoire  elle ne serait qu’une mémoire imaginative, comme on l’a dit, tandis qu’elle doit disposer à son gré du passé, du réel et du possible.

45. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Buffon, 1707-1788 » pp. 282-302

Un de ses plus remarquables chapitres est celui qui contient les Époques de la nature, chef-d’œuvre de science conjecturale, où il évoque dans un magnifique langage et avec une puissante imagination les spectacles grandioses dont l’homme ne fut pas le temoin. […] C’est par cette raison que ceux qui écrivent comme ils parlent, quoiqu’ils parlent très-bien, écrivent mal1 ; que ceux qui s’abandonnent au premier feu de leur imagination prennent un ton qu’ils ne peuvent soutenir ; que ceux qui craignent de perdre des pensées isolées, fugitives, et qui écrivent en différents temps des morceaux détachés, ne les réunissent jamais sans transitions forcées ; qu’en un mot il y a tant d’ouvrages faits de pièces de rapport, et si peu qui soient fondus d’un seul jet. […] Buffon a l’imagination du poëte : il peint des tableaux qu’il n’a pas vus. […] Il se proposait de vulgariser l’histoire naturelle, et voulait frapper les imaginations. […] Pour me distraire d’une imagination importune, il n’est que de recourir aux livres ; ils me destournent facilement à eux et me la dérobent, ne se mutinent point, pour voir que je ne les recherche qu’au deffaut de ces autre ; commodités plus réelles, vives et naturelles ; ils me reçoivent tousjours de mesme visage.

46. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VII. des passions  » pp. 89-97

Sans doute la nature individuelle a d’admirables révélations, des inspirations sublimes ; mais pour être sûr de saisir et de conserver cette sublimité, il faut, en quelque sorte, l’arrêter au passage par la réflexion, la généraliser par l’abstraction, s’élancer au-delà des bornes étroites de l’individu, contempler un modèle plus grand et plus haut placé, pressentir enfin d’imagination et de génie la nature universelle, et la rendre par la combinaison de l’enthousiasme idéal et du sang-froid personnel. […] Tout se réduit à ce précepte : si vous n’avez point la passion, donnez-vous-la, à l’aide de cette faculté que les Grees appellent fantaisie, et nous imagination. […] Essayez d’agir ainsi, même avec les sujets qui, au premier abord, vous paraissent les plus indifférents, peu à peu cette animation fictive, sous certains rapports, échauffe réellement ; on s’enthousiasme pour son idée, la fiction devient une vérité ; et cela sans contradiction avec ce qui précède, car cette passion volontaire ne prend plus au cœur et aux entrailles, elle réside toute dans l’imagination.

47. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Balzac, 1596-1655 » pp. 2-8

Esprit brillant, belle imagination, il fut le Malherbe de la prose : il a l’ampleur de la période, l’éclat du discours ; il sait choisir et ordonner les mots ; il orne de grandes pensées par des expressions magnifiques dont l’harmonie soutenue enchante l’oreille. […] Allons par les routes qu’elle nous marque, et ne prenons point les sentiers obliques que notre imagination nous fait concevoir souvent plus sûrs que le grand chemin. […] O mon imagination, que de délices et de douceurs !

48. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Bernardon de Saint-Pierre 1737-1814 » pp. 203-209

Bernardon de Saint-Pierre 1737-1814 [Notice] D’abord ingénieur et officier, Bernardin de Saint-Pierre eut une jeunesse fort aventureuse ; il promena longtemps à travers le monde, en Pologne, en Russie, à l’Ile de France, sa mélancolie inquiète et son imagination éprise de rêveries philanthropiques. […] Il a l’imagination tendre ; quelquefois il en abuse, il amollit la nature. […] Il a l’imagination tendre ; quelquefois il en abuse, il amollit la nature.

49. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre II. Des différentes espèces de Discours Oratoires. »

Ses sermons réunissent la solidité du raisonnement, la vivacité de l’imagination, l’élégance du style, et la chaleur du sentiment. […] Le pathétique continu, qui règne dans tous ses sermons, décèle une imagination vive, une âme sensible et pleine de chaleur. […] Si l’on exige que l’imagination de l’Orateur soit vive, brillante et fleurie, on exige aussi qu’elle soit sage, bien réglée, et toujours dirigée par le goût. […] Aucun Orateur n’a possédé au même degré que lui cette éloquence noble, nerveuse et rapide, qui étonne l’imagination, arrache l’âme à elle-même. […] Tout ce qui passe par son imagination vive et féconde, y prend le plus beau coloris, le tour le plus piquant et le plus varié.

50. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre II. Des qualités du style » pp. 79-118

Tous les sujets qu’on traite appartiennent ou à la mémoire, ou à la raison, ou au sentiment, ou à l’imagination. […] Dans les sujets qui appartiennent à l’imagination, l’écrivain cherche à plaire : il faut que son style soit fin, gracieux, élégant, varié. […] On entend par froideur dans les ouvrages d’esprit, l’absence de vie, de chaleur, d’énergie, en un mot, de tout ce qui pourrait émouvoir le cœur ou flatter l’imagination. […] Il joint aux grâces du sentiment le coloris de l’imagination ; et en s’attachant à plaire par les charmes de l’élocution, il contribue merveilleusement à la persuasion. […] Cette qualité vient principalement de la fécondité de l’imagination, et admet fréquemment les épithètes. — On doit éviter la sécheresse et l’excès d’ornements.

51. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Voltaire. (1694-1778.) » pp. 277-290

Excellent aussi dans le poëme didactique, l’un de ses principaux mérites fut de revêtir des couleurs d’une imagination inspirée les plus hautes idées de la science, et, pendant que Fontenelle en propageait l’intelligence par la clarté de sa prose facile, de la populariser également par le prestige des beaux vers. […] On peut voir enfin, à son sujet, Delille, au chant V de son poëme de l’Imagination, et Châteaubriand, Génie du Christianisme, IIe part., liv.  […] Il y a de plus, dans ce tableau d’une nature paisible et heureuse, opposé aux scènes de douleur et de guerre qui suivent, un contraste d’un effet puissant sur l’imagination. […] Belle imitation de l’Othello de Shakspeare, elle appartient au genre de ces pièces dites romanesques, où le poëte puise dans son imagination, non dans l’histoire, les principaux événements qu’il offre aux yeux des spectateurs.

52. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Madame de Sévigné, 1626-1696 » pp. 76-88

Parmi les françaises illustres dont la postérité se souvient, nulle ne lui est supérieure par l’imagination, la sensibilité, la verve d’une gaieté qui coule de source, la franchise d’un naturel ennemi de toute affectation, de toute grimace, enfin par les qualités brillantes qui sont l’ornement d’une raison solide. […] j’ai l’imagination si vive que tout ce qui est incertain me fait mourir3 Les regrets de l’absence À Madame de Grignan Livry, mardi saint, 24 mars 1671. […] L’on veut qu’une religion subsistante par un miracle continuel, et dans son établissement, et dans sa durée, ne soit qu’une imagination des hommes ! […] L’imagination, la sensibilité et l’esprit y sont dans une mesure exquise.

53. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre V. Du Roman. »

Il faut que rien ne languisse dans le récit de ces événements ; que l’action marche avec rapidité ; que le style vif et plein de chaleur échauffe toujours de plus en plus l’imagination et l’âme du lecteur ; que les situations des personnages n’aient rien de forcé ; que leurs caractères particuliers soient bien marqués, parfaitement soutenus jusqu’à la fin ; et que le dénouement amené naturellement et par degrés, soit tiré du seul fond des événements. […] Ceux qu’on met au nombre des meilleurs, sont Zaïde et la princesse de Clèves par madame de La Fayette ; faits avec goût, écrits avec décence, et bien propres à entretenir dans les cœurs l’amour de la vertu : Les Mémoires d’un homme de qualité, le Doyen de Killerine, et autres de l’abbé Prévost ; pleins des situations les plus attendrissantes ou les plus terribles, et qui décèlent l’imagination la plus féconde ; mais où quelquefois les événements ne s’accordent pas assez avec la vraisemblance : Gil Blas 130, le Diable boiteux et autres de Lesage 131 ; ils offrent un tableau de tous les états de la vie, le portrait ou la satire du monde : Le Paysan parvenu de Marivaux, très plaisant.

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