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88. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Guizot. Né en 1787. » pp. 469-478

Pourtant Washington n’avait point ces qualités brillantes, extraordinaires, qui frappent, au premier aspect, l’imagination humaine. […] Sans doute, il portait sur les droits et les intérêts de l’Angleterre un jugement bien moins pur, bien moins juste que Falkland et Hampden1 ; cependant il ne faut pas croire que tout fût erreur dans sa pensée politique : bien des choses, et de très-importantes, le frappaient, qui échappaient à ses rivaux ; il connaissait des besoins publics, des conditions de liberté publique dont Hollis et Pym2 avaient tort de ne point tenir compte ; il prévoyait, au train de la révolution, mille conséquences dont ils ne voulaient pas plus que lui, mais qu’ils ne savaient point démêler.

89. (1912) Morceaux choisis des auteurs français XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles

On lui a fait un service militaire dans le camp, où les larmes et les cris faisaient le véritable deuil725 : tous les officiers pourtant avaient des écharpes de crêpe, tous les tambours en étaient couverts, qui726 ne frappaient qu’un coup ; les piques traînantes et les mousquets renversés ; mais ces cris de toute une armée ne se peuvent pas représenter sans que l’on n’en727 soit ému. […] Brissac1024, fatigué d’y voir des femmes qui n’avaient pas le bruit1025de se soucier beaucoup d’entendre le salut, donna le mot un jour aux officiers qui postaient1026 ; et pendant la prière il arrive dans la travée du Roi, frappe dessus de son bâton, et se met à crier d’un ton d’autorité : « Gardes du Roi, retirez-vous, le roi ne vient point au salut ». […] On dépouille nu le patient, on le couche sur le ventre, et deux bourreaux le frappent sur le dos avec des baguettes jusqu’à ce que le juge dise : C’est assez. […] On donne au cheval de l’éducation, on le soigne, on l’instruit, on l’exerce, tandis que l’âne, abandonné à la grossièreté du dernier des valets ou à la malice des enfants, bien loin d’acquérir, ne peut que perdre par son éducation ; et s’il n’avait pas un grand fonds de bonnes qualités, il les perdrait en effet par la manière dont on le traite : il est le jouet, le plastron, le bardeau1150 des rustres qui le conduisent le bâton à la main, qui le frappent, le surchargent, l’excèdent sans précaution, sans ménagement.

90. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre IV. Continuation du même sujet. Historiens latins. »

Entrez dans leurs palais ; frappez, mettez en cendre Tout ce qui prétendra l’honneur de se défendre. […] Leur génie s’enflamme avec le leur, leurs pensées s’élèvent ; et de ce concours admirable, de ce choc sublime de deux grandes âmes, résultent ces traits qui frappent, qui entraînent, qui n’excitent et ne laissent après eux qu’un sentiment, celui de l’admiration la plus profonde. […] charge de fers ces mêmes mains, qui, armées il n’y a qu’un moment, ont acquis à Rome le droit de commander : voile la tête du libérateur de ces remparts ; attache le vainqueur à l’arbre fatal ; frappe, au-dedans des murs, au milieu des dépouilles des ennemis qu’il a vaincus, ou hors des murs, parmi les tombeaux des Curiaces.

91. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre IV. Genre dramatique. »

Le théâtre est une école dangereuse ; il ne faut pas s’étonner que l’Église ait laissé peser sur lui l’anathème et que les moralistes l’aient frappé de proscription. […] L’esprit ne se sent point plus vivement frappé Que, lorsqu’en un sujet, d’intrigue enveloppé, D’un secret tout à coup la vérité connue Change tout, donne à tout une face imprévue. […] Il frappait le spectateur d’une terreur et d’une pitié profondes ; il lui laissait une vive impression de la puissance des dieux.

92. (1883) Morceaux choisis des classiques français (prose et vers). Classe de troisième (nouvelle édition) p. 

Il faut toute la force de l’habitude prise pour nous rendre insensible à ce ridicule ; mais tous les étrangers qui visitent nos écoles et nos lycées en sont frappés et ne peuvent se défendre de déplorer cet usage ou d’en rire. […] Les chevaux se cabrent, creusent l’arène, secouent leur crinière, frappent de leur bouche écumante leur poitrine enflammée, ou lèvent vers le ciel leurs naseaux brûlants pour respirer les sons belliqueux. […] Ils commençaient le combat en lançant de loin cette hache, soit au visage, soit contre le bouclier de l’ennemi, et rarement ils manquaient d’atteindre l’endroit précis où ils voulaient frapper. […]Frappé par un pouvoir impie, J’ai fait du bien à l’homme, et ce bien, je l’expie ! […] de quel souvenir viens-tu frapper mon âme !

93. (1853) Éléments de la grammaire française « Éléments de lagrammaire française. — Chapitre VIII. Huitième espèce de mots.  » p. 43

Certains adjectifs sont quelquefois employés comme adverbes ; on dit : chanter juste, parler bas, voir clair, rester court, frapper fort, sentir bon, etc.

94. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XV. de l’élocution  » pp. 203-216

La rangerez-vous sous le titre style sublime à côté des premiers vers d’Iphigénie : Oui, c’est Agamemnon, c’est ton roi qui t’éveille, Viens, reconnais la voix qui frappe ton oreille… Il est cependant manifeste que ces deux styles, également sublimes, si vous voulez, ne se ressemblent d’ailleurs en aucune façon. […] « Presque toujours, dit Voltaire, les choses qu’on dit frappent moins que la manière dont on les dit ; car les hommes ont tous à peu près les mêmes idées de ce qui est à la portée de tout le monde.

95. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) «  Chapitre XXIV. des figures. — figures par rapprochement d’idées opposées  » pp. 339-352

Connaissez-vous rien de plus grand que l’antithèse de Socrate s’adressant à ses juges : « Maintenant retirons-nous, moi pour mourir, et vous pour vivre ; » rien de plus touchant que celle d’Hérodote : « Préférez toujours la paix à la guerre ; car pendant la paix, les enfants ensevelissent leurs pères, et pendant la guerre, ce sont les pères qui ensevelissent leurs enfants ; » rien de plus gracieux que celle de Quinault : Vous juriez autrefois que cette onde rebelle Se ferait vers sa source une roule nouvelle, Plus tôt qu’on ne verrait votre cœur dégagé : Voyez couler ces flots dans cette vaste plaine, C’est le même penchant qui toujours les entraîne ; Leur cours ne change point, et vous avez changé… L’antithèse est la vraie expression du sentiment, toutes les fois que l’esprit est tellement frappé d’un contraste qu’il ne peut le rendre d’une autre manière. […] Autres exemples : Agamemnon, déplorant le coup fatal qui frappe Iphigénie, est interrogé tour à tour par Arcas et par Clytemnestre.

96. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Première partie - Préceptes généraux ou De la composition littéraire. — Chapitre second. De la disposition. »

C’est quelquefois la marche que suit l’orateur, lorsqu’il reconnaît la nécessité de frapper de grands coups dès l’abord, afin que ses auditeurs ou ses lecteurs, surpris à l’improviste, soient comme étonnés de la force de ses moyens, et qu’il n’ait plus ensuite qu’à achever son triomphe par le développement des idées accessoires qu’il a réservées pour les dernières. […] Quintilien les compare à la grêle qui ne renverse pas comme la foudre, mais qui frappe vivement et à coups redoublés.

97. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Chateaubriand 1768-1848 » pp. 222-233

D’abord il frappe l’écho des brillants éclats du plaisir : le désordre est dans ses chants : il saute du grave à l’aigu, du doux au fort : il fait des pauses ; il est lent, il est vif : c’est un cœur que la joie enivre, un cœur qui palpite sous le poids de l’amour. […] Ces deux voix sorties du tombeau, cette mort qui servait d’interprète à la mort m’ont frappé ; je suis devenu chrétien.

98. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome I (3e éd.)

Plusieurs objets nous frappent intérieurement et font sur nous une profonde impression, sans que nous soyons capables d’en assigner la cause. […] Les chansons et les contes ravissent les paysans les plus grossiers ; les beaux aspects que présentent le ciel et la terre les frappent vivement. […] Cæsarem vehis  ; nous sommes frappés de la courageuse audace du héros plein de confiance en sa cause et en sa fortune. […] Les phrases sont longues ou brèves, et c’est la première différence qui nous frappe lorsque nous les examinons. […] L’oreille, sans cesse frappée de la même mélodie, s’en fatiguerait bientôt.

99. (1863) Précis de rhétorique : suivi des règles auxquelles sont assujettis les différents ouvrages de littérature pp. 1-100

Les pensées sublimes sont des modèles parfaits du beau ; elles élèvent l'âme ou la frappent comme un éclair. […] Je l'ai vu de mes yeux, Je l'ai vu qui frappait ce monstre audacieux : « Meurs, tyran, disait-il ; dieux, prenez vos victimes !  […] 7° La disjonction retranche les particules qui nuisent à la rapidité de la pensée : Français, Anglais, Lorrains, que la fureur assemble, Avançaient, combattaient, frappaient, mouraient ensemble. […] 8° L'apposition emploie des substantifs comme épithètes : C'est dans un faible objet, imperceptible ouvrage, Que l'art de l'ouvrier me frappe davantage. […] Mais mon âme immortelle, aux siècles échappée, Ne sera point frappée, Et des mondes brisés foulera le tombeau.

100. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Seconde partie. Moyens de former le style. — Chapitre II. De l’exercice du style ou de la composition » pp. 225-318

L’homme de génie, au contraire, vivement impressionné par la vue de l’objet, en pénètre les véritables beautés, et le présente à nos regards sous un aspect qui frappe à l’instant l’imagination et l’échauffe. […] Si la description, qui est l’exposé des choses, demande une imagination puissante et vivement frappée par l’objet à décrire, la narration, qui est l’exposé des faits, exige beaucoup de naturel dans l’esprit et de fidélité dans l’imagination. […] L’auteur, après avoir décrit scrupuleusement le lieu de la scène, ainsi que la situation des personnages secondaires relativement à son héros, rappelle les paroles échappées à Turenne, et nous le montre prenant des précautions inaccoutumées, comme pour nous donner le change sur le sort qui l’attend, et frapper un coup plus terrible, lorsque la catastrophe arrivera. […] Les soldats frappent leurs boucliers en signe de triomphe, et se hâtent d’apporter les enseignes. […] Les contrastes plaisent beaucoup, parce qu’ils frappent vivement l’esprit.

101. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Chapitre I. Du Pathétique. » pp. 280-317

Vous immolez à votre souveraine grandeur de grandes victimes, et vous frappez, quand il vous plaît, ces têtes illustres que vous avez tant de fois couronnées. » À l’homme en général : c’est ce qu’on voit dans ces vers de Mme Deshoulières : De ce sublime esprit dont ton orgueil se pique,             Homme, quel usage fais-tu ? […] Quand il a été attiré par degrés, ému, saisi, c’est alors qu’il doit être frappé, enlevé avec violence. […] Mais la fureur ayant étouffé tout sentiment de respect et d’humanité, chacun le frappe comme à l’envi, et veut avoir part au crime, espérant avoir part à la récompense. » Les Poètes dramatiques font un fréquent usage de cette figure.

102. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section II. De l’Art d’écrire agréablement. — Chapitre I. Du style. » pp. 181-236

L’objet de cette pensée est la fierté, l’audace, l’air menaçant que nous voyons sur le visage de Catilina, tout mort qu’il est ; et assurément cet objet ne peut que nous frapper, nous étonner, et remuer fortement notre âme. […] La lumière du soleil frappe nos yeux, sans que nous y fassions attention : telle doit être, suivant la pensée de Quintilien 2, la lumière qui brille dans un ouvrage d’esprit. […] Nous ne saurions être trop en garde contre ce défaut du style, puisque nos meilleurs poètes mêmes, ceux dont l’esprit était frappé sur le grand, y sont quelquefois tombés. […] Quel vaste, quel pompeux spectacle Frappe mes yeux épouvantés Un nouveau monde vient d’éclore : L’univers se reforme encore Dans les abîmes du chaos ; Et pour réparer ses ruines, Je vois des demeures divines Descendre un peuple de héros.

103. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre VII. Satire. »

La vraie satire attaque les vices généraux de la-société, frappe le ridicule sans avilir les personnes, flétrit le mal, le préjugé, l’erreur, sans sortir des bornes des convenances, sans blesser le goût ni la pudeur.

104. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Deuxième partie. Préceptes des genres. — Chapitre troisième. Du discours. »

Les plus justes et les plus sensibles reçoivent la première impression ; ils la communiquent aux plus faibles, et l’étendent en la redoublant de proche en proche ; la conscience agit dans tous, dans les uns, le courage dit tout haut : oui, dans les autres, la honte craint de dire : non ; et s’il reste un petit nombre de rebelles opiniâtres, ils sont renversés, attérés, étouffés par cette irrésistible impulsion, par ce rapide contre-coup qu’ébranle toute la masse d’une assemblée, et comme la première lame des mers du nouveau-monde pousse le dernier flot qui vient frapper les plages du nôtre, de même la vérité partant de l’extrémité d’un vaste espace, accrue et fortifiée dans sa route, vient frapper à l’extrémité opposée son plus violent adversaire, qui, lorsqu’elle arrive avec toute cette force, n’en a plus assez pour lui résister. […] Dans toute cause, l’éloquence de l’ orateur est employée à l’attaque et à la défense ; en même temps qu’il frappe il doit savoir parer, et, pour cela, se tenir en garde contre les surprises et les ruses de l’adversaire. […] Il faut, dit-il, choisir un genre d’écrire qui soit agréable et qui plaise à l’auditeur, de sorte néanmoins que cet agrément, ce plaisir ne viennent point enfin à lui causer du dégoût ; car c’est l’effet que produisent ordinairement les choses qui frappent d’abord les sens par un vif sentiment de plaisir, sans qu’on puisse trop en rendre raison. […] Un discours qui est partout ajusté et peigné, sans mélange et sans variété, où tout frappe, tout brille, un tel discours cause plutôt une espèce d’éblouissement qu’une véritable admiration : il lasse et il fatigue par trop de beautés, et il déplaît à la longue à force de plaire.

105. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre V. Analyse de l’éloge de Marc-Aurèle, par Thomas. »

Il faudrait que son oreille pût être frappée à la fois de tous les gémissements, de toutes les plaintes, de tous les cris de ses sujets. […] Apollonius fut frappé des malheurs qui menaçaient Rome.

106. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XII. du corps de l’ouvrage. — portrait, dialogue, amplification  » pp. 161-174

Frappés du coloris de ces tableaux de mœurs, du piquant de ces détails qui présentaient la vie des hommes au naturel, ils voulurent les reproduire, mais au lieu de rattacher, comme l’avait fait Bourdaloue, leurs portraits à des principes, ils firent de l’accessoire le principal, et d’une petite partie, le tout. […] Voyez, dans Bossuet, comme elle fait retentir jusqu’au fond du cœur les coups multipliés qui frappèrent Henriette de France, et le tonnerre imprévu qui tua Henriette d’Angleterre.

107. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Règles pour les ouvrages de littérature »

Elles lui font découvrir, non seulement mille beautés qui lui seraient échappées, mais encore la source et le principe de celles qui le frappent ; et l’on conçoit aisément que cette découverte doit ajouter beaucoup au sentiment agréable, que lui cause la lecture d’un bel ouvrage.

108. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre IV. — Du Style. »

Buffon lui-même l’a ainsi défini : « Le style c’est l’homme. » En effet, tous les hommes ont à peu près les mêmes idées : presque toutes les choses qu’ils disent frappent moins que la manière dont on les dit ; mais c’est l’expression, c’est le style qui en fait toute la différence : il relève les choses les plus communes, fait ressortir les plus singulières, donne de la force, de la grâce aux pensées ; il charme par son élégance, sa finesse, sa délicatesse ; il se fait admirer par sa gravité, sa noblesse et son harmonie ; le style est le portrait fidèle de l’écrivain lui-même, qui s’en sert pour nous communiquer ses pensées et ses sentiments, pour nous faire apprécier les qualités de son goût et nous entraîner par les élans sublimes de son génie. […] Aussitost qu’il se sentit frappé, il s’écria : « Ah ! […] Dans le passage suivant, nous voyons le monarque frappé par la main de Dieu, se résignant à son sort avec le courage du chrétien, et s’avouant heureux d’être appelé au ciel le vendredi saint. […] Quel vaste, quel pompeux spectacle Frappe mes yeux épouvantés !

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