Et à ceux-ci : Un lièvre en son gîte songeait Car, que faire en un gîte, à moins que l’on ne songe ? […] « Quand une fois, dit Quintilien, l’auditeur commence à partager nos sentiments, quand nous faisons entrer dans son cœur la haine ou l’amitié, l’indignation ou la crainte alors il est subjugué, il fait de notre affaire la sienne propre, il n’examine plus ; le torrent l’entraîne et il se laisse aller… » La première et indispensable condition pour exercer de l’influence sur les cœurs, c’est d’abord d’être soi-même bien touché, avant de songer à toucher les autres. […] songez-vous parfois que de faim dévoré, Peut-être un indigent, dans les carrefours sombres, S’arrête et voit danser vos lumineuses ombres Aux vitres du salon doré ? Songez-vous qu’il est là sous le givre et la neige.
Ceux même qui lui ont contesté avec le plus d’acharnement la divinité de sa mission, n’ont jamais songé à lui disputer le grand art de savoir conduire les hommes ; et cet art-là tient nécessairement du prodige, quand on songe à ce qu’était le peuple hébreu, lorsque Moïse conçut le projet de le réduire en corps de nation, et l’espérance de voir cette nation tenir un jour un rang distingué.
Nous empruntons celle-ci de La Fontaine, sans faire attention au petit défaut d’harmonie qu’elle renferme : Un lièvre en son gîte songeait ; Car que faire en un gîte à moins que l’on ne songe ? […] Et ce fidèle serviteur lui répondit aussitôt : J’y avais songé, madame.
La plupart d’entre eux n’ont songé qu’à réveiller l’intérêt d’imagination, ou plutôt l’intérêt de curiosité. […] L’intérêt de ces ouvrages est celui d’une énigme ; qui songe encore à une énigme dont il a le mot ?
Si j’osais vous donner un conseil, ce serait de songer à être simple, à ourdir votre ouvrage d’une manière bien naturelle, bien claire, qui ne coûte aucune attention à l’esprit du lecteur. […] Vous avez passé votre jeunesse1, vous deviendrez bientôt vieux et infirme ; voilà à quoi il faut que vous songiez. […] Songez qu’une bouteille qui a été fêtée quand elle était pleine d’eau des Barbades, est jetée dans un coin dès qu’elle est cassée, et qu’elle reste en morceaux dans la poussière ; que voilà ce qui arrive à tous ceux qui n’ont songé qu’à être admis à quelques soupers ; que la fin d’une vieillesse inutile, infirme, est une chose bien pitoyable. […] Cela posé, songez donc à vous, et puis à vos amis ; buvez du vin de Champagne avec des gens aimables, mais faites quelque chose qui vous mette en état de boire un jour du vin qui soit à vous.
Il est facile d’éviter le néologisme, c’est de n’y pas songer. […] Mais ni lui, ni Dumarsais, ni aucun rhéteur, que je sache, n’a songé à remonter à la véritable origine de la métaphore, qui pourtant me paraît assez facile à reconnaître. […] Il faut donc que la force de la pensée et du sentiment soit telle, qu’elle couvre la figure et ne permette pas d’y songer. » (Longin.) […] Il ne faut point songer d’abord à conserver à la un de la phrase le mot fuyait. […] Or, l’orateur et le poète doivent toujours songera l’effet total.
Agamemnon a eu un songe trompeur qui lui annonçait l’heureuse issue de la guerre et la chute prochaine de Troie. […] « — Peut-être, dit l’orateur en finissant, peut-être, venant d’une main ennemie, ces présents te paraissent odieux ; mais songe aux autres Grecs, songe au malheureux peuple foulé par la guerre. […] Songez que chez tous les peuples les vertus guerrières ont devancé les vertus civiles, que nous ne sommes encore que dans un camp, et que les grandes idées de dévouement à la patrie et d’obéissance aux lois sont aussi étrangères aux héros grecs qu’elles le furent plus tard aux barons du moyen âge. […] Tout ce qui peut frapper des âmes pieuses et des imaginations crédules, une vision divine, une voix entendue dans les airs, — moins que cela, un songe, un mot d’heureux augure échappé au hasard, — moins que cela encore, l’éternuement d’un soldat, le vol d’une chouette au moment d’un combat, tous ces incidents que la superstition commente et que la peur grossit, deviennent des instruments de ses desseins et des auxiliaires de sa politique. […] Quant à riposter ou à regarder l’adversaire en face, ils n’y songent pas.
Ici on n’a pas la force de songer aux figures ; la pensée a tout couvert. […] Il ne songeait pas à ce qui est arrivé. […] Monsieur, songez-vous bien à ce que vous dites ? […] Songez, Monsieur, qu’il ne m’a donné que deux heures. […] Laissez-là cette galère, et songez que le temps presse, et que vous courez risque de perdre votre fils.
Et quand ils sont dans la disgrâce, et qu’on les envoie à leurs maisons des champs5, où ils ne manquent ni de biens, ni de domestiques pour les assister dans leurs besoins, ils ne laissent pas6 d’être misérables et abandonnés, parce que personne ne les empêche de songer à eux. […] Mais comme il ne pouvait oublier sa condition naturelle, il songeait, en même temps qu’il recevait ces respects, qu’il n’était pas le roi que ce peuple cherchait, et que le royaume ne lui appartenait pas.
Vous croyez qu’il est temps que je songe à la retraite. — Je n’aurais pas été assez hardi, lui dis-je, pour vous parler si librement, si Votre Grandeur ne me l’eût ordonné. […] Au lieu de chercher à ranimer ses souvenirs, il ne faudrait songer qu’à fortifier ses espérances.
C’était l’heure du repas, mais mon songe m’annonçait qu’elle ne sonnerait pas. — j’entendis qu’on fermait la porte au bas de l’horrible tour. […] Le peuple songera à la vengeance de la fille de ses rois ; il retirera à la reine ses respects et sou amour. Non, Elisabeth ne souillera point sa vie ; elle songera que l’histoire mettra au rang des crimes la mort de Marie-Stuart. […] Il va revoir ses amis, songe à ses plaisirs, retrouve sa famille dans le deuil et les larmes, et ne fait rien pour l’en tirer. […] Ô céleste vérité, je te verrai sans ombre, dans nos jours de sommeil tu te caches de nous ; cette vie est un songe, et le monde un réveil.
On ne songe guère, où vous êtes, si nous nous massacrons ici. […] La colonne Trajane elle-même l’avait échappé belle : on avait songé à l’enlever et à la transporter à Paris.
Dis-moi, quel songe d’or nos chants vont-ils bercer ? […] Les laboureurs lassés, remontant à la ferme, Ramènent les grands bœufs au pesant attirail ; Chacun songe au repos, chacun rentre et s’enferme : Les faneurs dans le pré sont encore au travail. […] Songez-y ; je vous laisse, et je viendrai vous prendre Pour vous mener au temple où ce fils doit m’attendre ; Et là vous me verrez, soumis ou furieux, Vous couronner, madame, ou le perdre à vos yeux. […] Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle ; Figure-toi Pyrrhus, les yeux étincelants, Entrant à la lueur de nos palais brûlants, Sur tous mes frères morts se faisant un passage, Et, de sang tout couvert, échauffant le carnage. Songe aux cris des vainqueurs, songe aux cris des mourants, Dans la flamme étouffés, sous le fer expirants ; Peins-toi dans ces horreurs Andromaque éperdue : Voilà comme Pyrrhus vint s’offrir à ma vue ; Voilà par quels exploits il sut se couronner ; Enfin voilà l’époux que tu me veux donner.
» Souvent, par l’allusion, le personnage mis en scène rappelle à son insu aux lecteurs un fait qu’ils connaissent, mais auquel ils ne songeaient pas, parce que, au moment où se passe l’action, ce fait est encore dans l’avenir. […] … songe du moins à lui rester fidèle ! […] Lemaire songeait aux nymphes d’Ovide quand il préparait les cent cinquante volumes de sa Collection des classiques latins, uniformes par le caractère et le format, variés par les commentaires confiés à diverses mains.
chacun voudrait s’en faire un semblable ; la paix régnerait sur la terre ; les hommes ne songeraient plus à se nuire, et il n’y aurait plus de méchants quand nul n’aurait intérêt à l’être. […] » sans pouvoir dire ni penser rien de plus2. » Ainsi s’écoulaient dans un délire continuel les journées les plus charmantes que jamais créature humaine ait passées ; et quand le coucher du soleil me faisait songer à la retraite, étonné de la rapidité du temps, je croyais n’avoir pas assez mis à profit ma journée, je pensais en pouvoir jouir davantage encore, et, pour réparer le temps perdu, je me disais : « Je reviendrai demain. » Je revenais à petits pas, la tête un peu fatiguée, mais le cœur content ; je me reposais agréablement au retour, en me livrant à l’impression des objets, mais sans penser, sans imaginer, sans rien faire autre chose que sentir le calme et le bonheur de ma situation. […] Ne songez pas non plus, de grâce, à retirer celles qui sont entre les mains de Duchesne. […] Ils ont eu un songe confus, uniforme, et sans aucune suite ; ils sentent néanmoins, comme ceux qui s’éveillent, qu’ils ont dormi longtemps.
Les riches de la terre, qui, durant cette vie, jouissent de la tromperie d’un songe agréable, et s’imaginent avoir de grands biens, s’éveillant tout à coup dans ce grand jour4 de l’éternité, seront tout étonnés de se trouver les mains vides. […] 2 le présent ne nous touche plus guère ; mais la jeunesse qui ne songe pas que rien lui soit encore échappé, qui sent sa vigueur entière et présente, ne songe aussi qu’au présent, et y attache toutes ses pensées.
Cette correspondance établie par des sons religieux entre les deux plus grands monuments de Rome païenne et de Rome chrétienne me causa une vive émotion : je songeai que l’édifice moderne tomberait comme l’édifice antique ; je songeai que les monuments se succèdent comme les hommes qui les ont élevés ; je rappelai dans ma mémoire que ces mêmes Juifs, qui, dans leur première captivité, travaillaient aux pyramides de l’Égypte et aux murailles de Babylone, avaient, dans leur dernière dispersion, bâti cet énorme amphithéâtre. […] C’est ainsi, mon très-cher ami, que nous sommes avertis à chaque pas de notre néant ; l’homme cherche au dehors des raisons pour s’en convaincre, il va sur les ruines des empires, il oublie qu’il est lui-même une ruine encore plus chancelante, et qu’il sera tombé avant ces débris1 Ce qui achève de rendre notre vie le songe d’une ombre 2, c’est que nous ne pouvons pas même espérer de vivre longtemps dans le souvenir de nos amis, puisque leur cœur, où s’est gravée notre image, est comme l’objet dont il retient les traits, une argile sujette à se dissoudre.
Non, après ce que nous venons de voir, la santé n’est qu’un nom, la vie n’est qu’un songe, la gloire n’est qu’une apparence, les grâces et les plaisirs ne sont qu’un dangereux amusement : tout est vain en nous, excepté le sincère aveu que nous faisons devant Dieu de nos vanités, et le jugement arrêté qui nous fait mépriser tout ce que nous sommes ». […] Commencez aujourd’hui à mépriser les faveurs du monde ; et toutes les fois que vous serez dans ces lieux augustes, dans ces superbes palais à qui Madame donnait un éclat que vos yeux cherchent encore ; toute les fois que regardant cette grande place qu’elle remplissait si bien, vous sentirez qu’elle y manque, songez que cette gloire que vous admirez, faisait son péril en cette vie, et que dans l’autre elle est devenue le sujet d’un examen rigoureux, où rien n’a été capable de la rassurer, que cette sincère résignation qu’elle a eue aux ordres de Dieu, et les saintes humiliations de la pénitence ».
Leclerc, exercé par ces méthodes artificielles, saura en profiter dans l’occasion, même à son insu, et les mettre en pratique sans y songer. » Outre les trois topiques dont j’ai parlé dans le chapitre précédent, Cicéron et Quintilien en comptent treize autres que l’on peut réduire aux suivants : Le genre et l’espèce ; Les antécédents et les conséquents ; La cause et l’effet ; Les circonstances ou accessoires ; Les semblables et les contraires. […] Mais, dit-on, ni l’un ni l’autre n’ont songé, en composant leurs vers, aux classifications de la rhétorique.
La vraie et la fausse éloquence Il y a une faiseuse de bouquets et une tourneuse de périodes, je ne l’ose nommer éloquence, qui est toute peinte et toute dorée1 ; qui semble toujours sortir d’une boîte2 ; qui n’a soin que de s’ajuster, et ne songe qu’à faire la belle : qui, par conséquent, est plus propre pour les fêtes que pour les combats, et plaît davantage qu’elle ne sert, quoique néanmoins il y ait des fêtes dont elle déshonorerait la solennité, et des personnes à qui elle ne donnerait point de plaisir. […] Elle ne laisse pas toutefois de se parer, quand il est besoin, quoiqu’elle soit moins curieuse de ses ornements que de ses armes, et qu’elle songe davantage à gagner l’âme pour toujours par une victoire entière, qu’à la débaucher pour quelques heures par une légère satisfaction… L’antiquité appelait cela puiser ses discours dans l’estomac1 et avoir l’âme éloquente : elle a donné cette qualité à Ulysse, après lui avoir donné la doctrine et l’expérience, comme si la vertu de discourir devait être l’effet et la créature2 de celle de connaître et de savoir.