Un valet de comédie, un aventurier devint un tribun qui proclama les droits ou les prétentions du tiers état. […] On peut lui appliquer ce trait : « qui dit auteur, dit oseur. » Exorde de son quatrième mémoire 1 Si l’être bienfaisant qui veille à tout m’eût un jour honoré de sa présence et m’eût dit : « Je suis Celui par qui tout est ; sans moi tu n’existerais point ; je te douai d’un corps sain et robuste ; j’y plaçai l’âme la plus active ; tu sais avec quelle profusion je versai la sensibilité dans ton cœur et la gaieté sur ton caractère ; mais tu serais trop heureux si quelques chagrins ne balançaient pas cet état fortuné : aussi tu vas être accablé sous des calamités sans nombre ; déchiré par mille ennemis ; privé de ta liberté, de tes biens ; accusé de rapines, de faux, d’imposture, de corruption, de calomnie ; gémissant sous l’opprobre d’un procès criminel ; garrotté dans les liens d’un décret ; attaqué sur tous les points de ton existence par les plus absurdes on dit ; et ballotté longtemps au scrutin de l’opinion publique, pour décider si tu n’es que le plus vil des hommes ou seulement un honnête citoyen », je me serais prosterné, et j’aurais répondu : « Être des êtres, je te dois tout, le bonheur d’exister, de penser et de sentir ; je crois que tu nous as donné les biens et les maux en mesure égale ; je crois que ta justice a tout sagement compensé pour nous, et que la variété des peines et des plaisirs, des craintes et des espérances, est le vent frais qui met le navire en branle et le fait avancer gaiement dans sa route.
Habile à varier les formes de l’admiration, comme à insinuer le blâme, il expose et comprend plus qu’il ne conclut, et c’est à l’état d’épigrammes qu’il faut saisir parfois ses arrêts1. […] Loin donc de partager l’opinion que vous venez de soutenir, loin de croire, comme vous, que le théâtre est par état en opposition avec les mœurs, qu’il est le contre-pied de la société, et que, pour plaire au public, il ne doit pas du tout lui ressembler, je m’en tiens, je l’avoue, à l’ancienne opinion, et je chargerai vos comédies de réfuter en partie votre discours.
La Poétique d’Aristote, dans son état actuel, est pleine d’obscurités, qui ne seront peut-être jamais éclaircies, à moins qu’on ne retrouve de cet ouvrage quelque copie moins imparfaite que tous les manuscrits retrouvés jusqu’à ce jour.
Fixer, c’est mettre un corps volatil en état de supporter l’action du feu sans se volatiliser.
L’exposition est le point de départ du poème ; elle dit l’état où sont les choses quand l’action commence. […] Un homme d’un caractère vident acquiert des mœurs douces par la répétition d’actes de douceur, Ordinairement, le caractère et les mœurs tiennent ensemble132 ; il y a pourtant cette différence essentielle, que les mœurs dépendent plus de l’état social où l’on vit, et que le caractère est plus inhérent à l’individu. […] Les mœurs seront convenables, c’est-à-dire que les personnages parleront et agiront selon leur sexe, leur âge, leur état ; selon leur caractère, leur éducation, leurs passions ; selon leur siècle, leur pays, leur gouvernement ; et d’après l’histoire, ou la renommée, ou l’opinion.
Je ne te parlais point de l’état déplorable Où ta mort va laisser ta femme inconsolable ; Je croyais que l’amour t’en parlerait assez, Et je ne voulais pas de sentiments forcés ; Mais cette amour si ferme et si bien méritée Que tu m’avais promise, et que je t’ai portée1, Quand tu me veux quitter, quand tu me fais mourir, Te peut-elle arracher une larme, un soupir ? […] Le déplorable état où je vous abandonne Est bien digne des pleurs que mon amour vous donne ; Et si l’on peut au ciel sentir quelques douleurs,J’y pleurerai pour vous l’excès de vos malheurs ; Mais si, dans ce séjour de gloire et de lumière, Ce Dieu tout juste et bon peut souffrir ma prière, S’il y daigne écouter un conjugal amour, Sur votre aveuglement il répandra le jour. […] C’est pour vous que cette conduite m’afflige ; car vous devez savoir que je peux me passer de votre hommage, et vous n’êtes pas en état de connaître la mère que vous avez ; vous apprendrez dans la vie que c’est à mon nom ou plutôt à celui de mon père1 qu’est dû ce que vous avez d’agrément dans le monde.
Cinna, dans Corneille, pour déterminer Auguste à garder le pouvoir absolu, définit l’état populaire. […] Voici l’analyse qui suit immédiatement : « Il force une terre à nourrir les productions d’une autre, un arbre à porter les fruits d’un autre ; il mêle et confond les climats, les éléments, les saisons ; il mutile son chien, son cheval, son esclave ; il bouleverse tout, il défigure tout ; il aime la difformité, les monstres ; il ne veut rien tel que l’a fait la nature, pas même l’homme ; il le faut dresser pour lui comme un cheval de manége ; il le faut contourner à sa mode comme un arbre de son jardin. » Massillon, dans son discours sur le petit nombre des élus, veut prouver que bien peu de chrétiens méritent le salut par leur innocence ; il parcourt tous les états, toutes les conditions, toutes les occupations de l’homme.
Corneille, et il se disait, à raison de l’état de ses pères, sorti de la poudre du greffe. […] Vous seul, plus dégoûté, sans pouvoir et sans nom, Viendrez régler les droits et l’état d’Apollon.
C’est le tiers état instinctivement personnifié. […] En cet état.
Faites état de moi, monsieur, comme du plus chaud de vos amis. […] Apprenez enfin qu’un gentilhomme qui vit mal est un monstre dans la nature ; que la vertu est le premier titre de noblesse ; que je regarde bien moins au nom qu’on signe qu’aux actions qu’on fait ; et que je ferais plus d’état du fils d’un crocheteur qui serait honnête homme, que du fils d’un monarque qui vivrait comme vous1.
C’est dans une histoire de la Grammaire qu’il convient de relever et de discuter en détail tant d’assertions, souvent obscures, et qui témoignent de l’état d’enfance où était encore, au temps d’Aristote, la théorie du langage.
Ceux qu’on met au nombre des meilleurs, sont Zaïde et la princesse de Clèves par madame de La Fayette ; faits avec goût, écrits avec décence, et bien propres à entretenir dans les cœurs l’amour de la vertu : Les Mémoires d’un homme de qualité, le Doyen de Killerine, et autres de l’abbé Prévost ; pleins des situations les plus attendrissantes ou les plus terribles, et qui décèlent l’imagination la plus féconde ; mais où quelquefois les événements ne s’accordent pas assez avec la vraisemblance : Gil Blas 130, le Diable boiteux et autres de Lesage 131 ; ils offrent un tableau de tous les états de la vie, le portrait ou la satire du monde : Le Paysan parvenu de Marivaux, très plaisant.
C’est seulement après cette préparation générale qu’on sera en état d’aborder l’analyse de la matière même sur laquelle on veut écrire. . […] De cet abîme sortit un prince affable, doux, humain, modéré, patient, modeste, et quoique fois au-delà de ce que son état pouvait comporter : humble, austère pour soi. […] Or l’erreur n’est pas l’état naturel et normal de l’esprit humain ; elle lui. est si contraire que les opinions même les plus absurdes. […] Rousseau a fondé toutes ses utopies sociales sur un cercle vicieux : il prouve ; que l’homme n’est pas né pour l’état de société ; parce que l’homme a vécu, à l’état sauvage, et il prouve que l’homme a dû vivre à l’état sauvage, parce qu’il n’est pas né pour l’état social14. […] C’est ce rapport qui fait l’unité de l’œuvre et qui laisse le lecteur ou l’auditeur dans un état de pleine satisfaction d’esprit.
En un mot, dans tous les lieux, dans tous les âges, dans tous les états de la vie, cette étude si variée, si attrayante, nous procure les plaisirs les plus délicats, les plus purs et les plus durables que puisse goûter l’homme qui pense.
Comme il n’y a point de figure qui caractérise mieux que la prosopopée cet état d’exaltation de l’âme, où tout ce qui lui échappe est nécessairement sublime, il n’en est point qui soit plus familière aux poètes inspirés, qui se place plus naturellement sous leur plume, et dont ils tirent un parti plus brillant. […] Lui, qui d’or et de sang épuisait les états ; Et, potentat vainqueur des plus fiers potentats, En désert transformait la terre ?
Il faut donc, pour être bon orateur, avoir dans le cœur les vertus de son état, sous peine de l’avilir, et d’en faire, au lieu d’un art par excellence, un triste métier d’argent. […] Je crois qu’il est plus facile de faire passer quelqu’un de la haine à l’amour, ou de l’amour à la haine, que de vaincre l’indifférence, cet état passif de l’âme, qu’aucun aiguillon ne peut faire sortir de sa torpeur habituelle.
« Le peu de rimes de notre langue fait que, pour rimer à hommes, on fait venir comme on peut le siècle où nous sommes, l’état où nous sommes, tous tant que nous sommes 6. […] En quel état croyez-vous la surprendre ? […] Si pourtant ce respect, si cette obéissance Paraît digne à vos yeux d’une autre récompense ; Si d’une mère en pleurs vous plaignez les ennuis, J’ose vous dire ici qu’en l’état où je suis, Peut-être assez d’honneurs environnaient ma vie Pour ne pas souhaiter qu’elle me fût ravie, Ni qu’en me l’arrachant, un sévère destin, Si près de ma naissance, en eût marqué la fin.
Il semble même que le grand nombre des spectateurs étant dans cet état mitoyen, la proximité du malheureux qui touche à ceux qui le voient souffrir serait un motif de plus pour s’attendrir155. […] La tragédie demeura longtemps dans cet état. […] Ce fut lui, en un mot, qui donna le ton au public et qui mit le public en état de le donner aux auteurs163.
Devenu aussi simple, l’art décrire fut bientôt porté à son plus haut degré de perfection ; et c’est dans cet état que nous le voyons aujourd’hui chez tous les peuples de l’Europe. […] Racine, voulant faire comprendre toute la grandeur du génie de Corneille, commence par rappeler l’état du théâtre français avant l’apparition de ce grand poëte : Vous savez en quel état se trouvait la scène française, lorsqu’il commença à travailler. […] Dans l’état où je les suppose, ce serait les tromper. […] Les habitants consternés, et n’ayant point chez eux de pompes en bon état, se livraient au désespoir, au lieu de porter remède au mal. […] « Les habitants d’Ancône, n’ayant point, chez eux de pompes en bon état, se hâtaient de porter avec leurs bras quelques secours.
Ce n’est pas que ce bel art de convaincre les hommes des vérités les plus consolantes et les plus essentielles à l’harmonie sociale, et au bonheur de chacun en particulier, n’ait eu, comme tous les autres, son état d’enfance, ses moments de faiblesse, et ses époques de décadence.